Conférence de solidarité
anti-impérialiste de La Havane
pour la démocratie et contre le néolibéralisme
Cuba n'est pas seule
- Miranda Jolie -
La Conférence de solidarité anti-impérialiste
pour la démocratie et contre le néolibéralisme
s'est déroulée à La Havane (Cuba) du 1er
au 3 novembre, avec la participation
de 1 400 délégués venus de 95 pays,
selon Fernando Gonzalez, président de l'Institut
cubain de l'amitié avec les peuples (ICAP).
Pendant trois jours, des militants de différents
mouvements sociaux, partis politiques et
organisations sociales du monde entier se sont
réunis à Cuba pour exprimer leur solidarité avec
le peuple cubain et leur rejet du blocus imposé à
Cuba par les États-Unis en 1961 et pour dire
leur opposition à l'escalade des hostilités de
l'administration Trump envers l'île.
La réunion a été appelée et organisée par l'ICAP
et l'Organisation centrale des syndicats cubains
(CTC), ainsi que par le Chapitre cubain des
mouvements sociaux et la Conférence continentale
pour la démocratie et contre le néolibéralisme
sous le slogan « Ne touchez pas à
Cuba ! ».
Selon un communiqué de l'ICAP, l'objectif de la
rencontre était « d'apporter une véritable
contribution à l'opposition à l'offensive
contre-révolutionnaire actuelle de l'impérialisme
américain, à la recherche de la plus grande unité
possible des forces progressistes de la région et
au renforcement de la solidarité militante avec
les justes causes défendues par les peuples. Dans
la situation politique actuelle, marquée par
l'agressivité de l'administration Trump, de
nouvelles voies seront recherchées pour renforcer
la solidarité avec ces causes dans le monde,
principalement dans notre région. »
Discours d'ouverture : Fernando Gonzalez et
Bruno Rodriguez Parrilla
Dans son
discours d'ouverture, Fernando Gonzalez, héros de
la République de Cuba, a dédié cet événement à la
mémoire de Fidel Castro, leader historique de la
révolution cubaine « dont les concepts, les idées
et l'exemple personnel constituent notre guide sur
la voie de la victoire ».
Il a rappelé que Cuba a traversé 150 ans de
lutte et vécu 60 ans de révolution et que «
nous sommes en train de construire le projet
socialiste auquel nous avons osé rêver, dont le
peuple est le protagoniste ».
« Les États-Unis menacent et calomnient Cuba pour
qu'ils ne soient pas obligés de reconnaître leur
échec à renverser notre révolution et déforment la
réalité de coopération médicale altruiste que Cuba
offre dans plus de 80 pays. Il n'y a pas de
meilleure tribune que cet espace-ci pour réitérer
que Cuba ne renoncera jamais à ses principes, elle
ne trahira jamais ses principes ni la solidarité
avec les autres peuples du monde », a
souligné Gonzalez.
Pour sa part, le ministre cubain des Relations
extérieures, Bruno Rodriguez Parilla, qui a
également participé à l'inauguration de la
rencontre, a assuré que le gouvernement de Donald
Trump constituait la principale menace pour la
paix internationale en raison de son ingérence
croissante dans les affaires intérieures des
peuples du monde. Il a souligné qu'« il n'y aura
pas de développement durable sans le droit des
pays du sud au développement et sans justice
sociale ».
Rodriguez Parrilla a remercié les militants pour
la solidarité témoignée envers Cuba et a souligné
que des « temps difficiles » étaient à venir.
Il a évoqué les dernières mesures prises par les
États-Unis contre Cuba, telles que la limitation
des déplacements vers l'île, l'augmentation du
nombre de violations des droits humains et les
campagnes de diffamation.
« Les États-Unis doivent blâmer Cuba pour leur
échec total au Venezuela et justifier le
renforcement du blocus. Nous ne participons
d'aucune manière aux manifestations qui se
déroulent en Amérique latine sinon que par
l'exemple de la Révolution cubaine », a dit
le ministre des Relations extérieures.
Il a également dénoncé l'emprisonnement injuste
de l'ancien président brésilien Luis Inacio «
Lula » da Silva, les actions de
l'Organisation des États américains (OÉA) et
l'activation du Traité interaméricain d'assistance
réciproque (Traité de Rio) contre le Venezuela «
sous des prétextes absurdes ».
Étaient également présents José Ramon
Machado Ventura, deuxième secrétaire du Parti
communiste de Cuba, Esteban Lazo Hernandez,
président de l'Assemblée nationale du pouvoir
populaire et président du Conseil d'État, Salvador
Sanchez Ceren, ancien président du
Salvador, Ralph
Gonsalves, premier ministre de
Saint-Vincent-et-les Grenadines et d'autres
personnalités exceptionnelles. Un spectacle
culturel présenté par les enfants de la troupe
de théâtre Colmenita a également été accueilli
avec chaleur par les participants.
La première journée de la rencontre a débuté par
une table ronde au cours de laquelle des
intellectuels et activistes bien connus ont exposé
leurs points de vue sur les développements actuels
des affaires politiques en Amérique latine et dans
le monde, sur le rôle que jouent les mouvements
sociaux et ouvriers ainsi que sur les défis
auxquels la gauche est confrontée. Des
interventions de représentants de toutes les
régions d'Amérique latine, des Caraïbes, des
États-Unis, du Québec et du monde ont suivi.
À la mi-journée, des discussions animées
caractérisées par des expressions de solidarité
profonde ont eu lieu à l'extérieur du Palais des
congrès, où des délégués du monde entier ont
également parlé aux médias.
Dans la soirée, les comités de défense de la
révolution (CDR) du district de Barbosa, à la
périphérie de La Havane, ont invité les délégués à
se joindre à eux dans une tribune
anti-impérialiste. Quand les autobus transportant
les délégués sont arrivés à Barbosa, des drapeaux
et des slogans cubains étaient suspendus aux
bâtiments, aux fenêtres et aux balcons ainsi que
dans les rues, créant une belle atmosphère de
fête. Des centaines de résidents locaux
attendaient dans les rues pour saluer les
délégations et emmener des contingents dans les
différents CDR. Il y a un CDR par bloc et, à
chaque passage, les voisins expliquent aux
visiteurs ce que font les CDR, comment ils
fonctionnent et sont organisés. Ils ont également
expliqué comment le peuple cubain s'organise en
général pour la vie quotidienne et pour la défense
de la révolution. Des enfants de la communauté ont
récité des poèmes et ont présenté des cadeaux et
des dessins aux visiteurs de leur CDR. Les voisins
ont offert la nourriture qu'ils préparent
traditionnellement lors de célébrations du CDR et
ont échangé leurs expériences avec les délégués
qui ont exprimé leur gratitude pour cet accueil si
chaleureux.
Fernando Gonzalez, président de l'ICAP, s'est
ensuite adressé à toutes les personnes rassemblées
dans une zone centrale. Des vidéos étaient
projetées sur grand écran au son de la musique du
groupe Pupy y Los que Son Son et les gens ont
dansé et chanté jusqu'à tard dans la soirée.
La tradition de tenir des tribunes
anti-impérialistes a débuté sur l'île à la fin
de 1999 et au début de l'année 2000,
lorsque le peuple cubain s'est battu pour le
retour d'Elian Gonzalez - l'enfant cubain que la
mère avait emmené illégalement États-Unis, qui
s'est retrouvé seul en mer après un accident et a
été emmené aux États-Unis. Son père a entamé une
bataille judiciaire pour le ramener à Cuba. Cette
bataille a été initiée par Fidel Castro, avec le
soutien de l'ensemble du peuple cubain et un grand
appui aux États-Unis, au Canada et dans le monde.
C'est au cours de ce combat que Fidel Castro a
lancé la « bataille des idées ». Les tribunes
anti-impérialistes sont devenues son lieu de
réunion. Elles avaient lieu tous les samedis dans
différents quartiers pour réclamer le retour
d'Elian, qui est finalement revenu à Cuba en
juin 2000, ce qui fut considéré comme une
grande victoire de la révolution cubaine. Avec le
temps, la tribune anti-impérialiste a été
construite dans le Vedado, en face du bâtiment de
la Section des intérêts des États-Unis. De
nombreuses manifestations historiques y ont
convergé. Le site de cette tribune est en cours de
rénovation, mais la tradition se poursuit.
La célébration de l'unité et de l'amitié avec la
révolution cubaine à Barbosa a certainement montré
l'enthousiasme des habitants et des invités
étrangers pour la révolution et le fait que Cuba
n'est pas seule.
Deuxième jour de la rencontre anti-impérialiste
À la deuxième journée de débat, une grande table
ronde a eu lieu dans la matinée avec la
participation d'Ismael Drullet, du Chapitre cubain
des mouvements sociaux, qui a souligné
l'importance de l'unité et de la solidarité pour
faire face à l'impérialisme et au
capitalisme ; de Ralph Gonsalves, premier
ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines, qui a
exprimé le soutien de toutes les personnes
présentes au peuple vénézuélien et expliqué le
rôle des pays des Caraïbes dans la solidarité
anti-impérialiste ; Manuel Bertoldi
d'Argentine, qui a souligné l'importance des
soulèvements en Amérique latine ; Félix César
Navarro Miranda, ministre des Mines de de la
Métallurgie de la Bolivie ; et un représentant de
la République populaire de Chine, qui a souligné
l'importance des relations entre la Chine et Cuba
et a déclaré que son pays « continuera de
soutenir, comme toujours, la juste cause de cette
île des Caraïbes, sa souveraineté et son
socialisme suivant ses conditions
nationales. »
Ralph Gonsalves, premier ministre de
Saint-Vincent-et-les Grenadines (à gauche), et
Gail Walker, directrice exécutive d'IFCO-Pastors
for Peace, ont notamment pris la parole au cours
de la deuxième journée.
Dans l'après-midi, les délibérations se sont
poursuivies en commission :
Commission 1 : Solidarité avec Cuba
et d'autres causes justes
Commission 2 : Les peuples face au
libre-échange et aux transnationales
Commission 3 : Décolonisation et
guerre culturelle - communications stratégiques
et lutte sociale
Commission 4 : Jeunesse :
stratégies et continuité dans les luttes
Commission 5 : Démocratie,
souveraineté et anti-impérialisme
Commission 6 : Intégration, identités
et luttes communes
Les rapports des commissions ont ensuite été
présentés à la session plénière.
Rangée du haut: la commission 1 se réunit à
l'École de médecine d'Amérique latine. Rangée du
bas: réunion de la commission jeunesse au cours
de laquelle des jeunes autochtones de la
Colombie-Britannique et du Manitoba ainsi que
d'autres personnes interviennent.
Les discussions au sein des commissions ont été
instructives et ont permis de relever les nombreux
défis auxquels sont confrontés les peuples. Par
exemple, les participants de Porto Rico ont parlé
de la situation de leur pays, le plus ancien pays
encore sous domination coloniale. Maria Lourdes
Santiago, vice-présidente du Parti de
l'indépendance portoricaine, de la commission de
la décolonisation, a expliqué en détail les
nombreux problèmes auxquels Porto Rico est
confronté au quotidien sur les plans économique et
culturel, mais elle a également insisté sur le
fait qu' « après 121 ans de domination, nous
parlons encore espagnol », et après l'ouragan
Maria qui a fait des ravages partout au pays et de
nombreuses victimes, le drapeau portoricain, son
propre drapeau, a été brandi dans les endroits
mêmes les plus reculés.
« Porto Rico est la grande dette de l'Amérique
latine envers le colonialisme », a-t-elle
déclaré.
La solidarité avec la cause du peuple
vénézuélien, la revendication du retour à
l'Argentine des Malouines occupées par la
Grande-Bretagne et l'indépendance de la Guadeloupe
occupée par la France ainsi que la solidarité avec
les luttes des peuples chilien, bolivien,
hondurien, salvadorien, nicaraguayen, sahraoui,
palestinien ont été exprimées à de nombreuses
reprises au cours de l'événement.
L'un des faits saillants du Forum
anti-impérialiste a été l'annonce que plus de deux
millions de signatures avaient été recueillies à
Cuba en seulement 14 jours pour exiger la
liberté de l'ancien président brésilien Luis
Inacio Lula da Silva, emprisonné arbitrairement et
injustement par le président néolibéral actuel à
cause de la manipulation et de la corruption des
procédures judiciaires.
Des signatures ont également été rassemblées dans
l'agora à l'extérieur du Palais des Congrès.
La lettre soulignait que la solidarité avec Cuba,
« à chaque étape de la révolution, est un devoir
de toute personne attachée à la démocratie et à la
souveraineté des peuples, dans la lutte contre le
néolibéralisme et le blocus pervers imposé par le
gouvernement américain à l'île depuis plus d'un
demi-siècle. »
Le cri « Lula libre ! » a retenti tout
au long de de l'événement.
Un grand enthousiasme a également été exprimé
pour les actions de solidarité cubaine avec le
monde qui se manifeste par l'envoi de médecins
dans tous les coins du monde, où ils sont
nécessaires pour ceux qui n'ont aucun autre accès
aux soins médicaux. Ces médecins, certains d'entre
eux présents à la conférence, soit invités
spécialement, soit en tant que délégués de leur
pays, ont eu droit à une ovation prolongée.
C'était particulièrement significatif à la lumière
des campagnes de diffamation que les États-Unis
mènent contre eux et leurs missions.
Troisième jour de la rencontre
La journée a débuté avec la présentation des
rapports des commissions, la présentation du texte
de la déclaration finale, les interventions de
nombreux délégués et l'adoption de la déclaration.
Dans l'après-midi, la séance de clôture de la
rencontre anti-impérialiste pour la démocratie et
contre le néolibéralisme a débuté par des
applaudissements retentissants et des ovations qui
ont salué l'arrivée du général d'armée Raul Castro
Ruz, premier secrétaire du Parti communiste de
Cuba, du président Miguel Diaz-Canel Bermudez, du
président Nicolas Maduro de la République
bolivarienne du Venezuela, de José Ramon Machado
Ventura, deuxième secrétaire du Parti communiste
cubain, et d'Esteban Lazo, président de
l'Assemblée nationale du pouvoir populaire et du
Conseil d'État.
.
Une déclaration de solidarité avec Cuba a été lue
par Gail Walker, directrice exécutive de la
Interreligious Foundation for Community
Organization (IFC) basée aux États-Unis, et fille
du pasteur Lucius Walker, qui a lancé en 1992
les caravanes de Pasteurs pour la paix à Cuba.
« Nous soutenons la construction d'une Cuba
prospère, partant du principe de José Marti
quiconque se lève aujourd'hui avec Cuba, se lève
pour tous les temps », lit-on dans la déclaration
qui demande également la fin du blocus contre Cuba
et répudie la mise en oeuvre de la Loi
Helms-Burton.
Gail Walker avait déjà indiqué qu'en tant que
membres du peuple américain, les communautés se
sentent davantage engagées avec Cuba.
Le président vénézuélien Nicolas Maduro et le
président cubain Miguel Diaz-Canel Bermudez
s'adressent à la séance de clôture.
Le président Maduro a ensuite pris la parole. Son
discours exprimant le défi du peuple vénézuélien
face aux actes hostiles des États-Unis a été
accueilli par des applaudissements prolongés et
une ovation debout.
Le président de la République de Cuba, Miguel
Diaz-Canel Bermudez, a ensuite prononcé le
discours de clôture de la manifestation. Il a
commencé ses remarques en déclarant : « Un
salut spécial à tous ceux qui résistent et qui
sont venus dans la capitale cubaine, qui a
toujours été et sera un point de rencontre pour
ceux qui défendent la paix et la solidarité entre
les peuples. »
« La nouvelle génération de dirigeants cubains,
formés et éduqués par la génération historique de
Fidel et de Raul, sont des révolutionnaires, des
socialistes fidèles à Fidel et à Martí, a-t-il
déclaré sous des applaudissements prolongés. Nous
ne céderons pas un millimètre dans nos positions
en faveur de l'indépendance, de la souveraineté et
de la justice sociale. Et en tant que lien avec
les peuples qui luttent et qui résistent, nous
défendrons toujours la solidarité en tant que
principe fondamental, auquel nous devons
beaucoup. »
C'était sans doute une fin qui ouvrait la voie à
un nouveau départ. Vivifiant et optimiste, il y
avait une certitude que Cuba n'est pas seule et
qu'il existe en Amérique latine et dans les
Caraïbes la conscience que les peuples préservent
la paix et la solidarité pour créer une région
plus prospère, une région qui met fin à toutes les
formes de colonialisme qui existent encore, une
région de démocratie populaire et de lutte contre
le néolibéralisme. L'unité anti-impérialiste est
sans aucun doute la clé de la victoire.
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