Un assaut du gouvernement albertain contre le corps politique

Le discours du trône déclare l'Alberta «ouverte aux affaires»

La session de printemps de l'Assemblée législative de l'Alberta a débuté le 22 mai par le discours du trône prononcé par la lieutenante-gouverneure Lois Mitchell. Partant de l'affirmation habituelle que le peuple a parlé et que le gouvernement a maintenant le mandat de payer les riches et d'imposer son programme antisocial, le discours du trône déclare que l'élection « est l'expression d'un mouvement pour le renouveau démocratique et économique ».

Il est vrai que les Albertains veulent un renouveau démocratique et économique. C'est leur plus grand besoin et désir. Mais ce que fait Jason Kenney ne satisfera pas ce besoin. En fait, cela ne résoudra aucun des problèmes auxquels sont confrontés l'économie et la politique de l'Alberta et ne fera qu'aggraver les choses. À l'heure actuelle le corps politique ne décide pas des politiques que suivent les partis cartellisés et leurs candidats qui luttent pour le pouvoir en Alberta ou ailleurs au Canada. Pour les travailleurs et le peuple, le renouveau démocratique et économique vient de leur lutte pour s'investir du pouvoir de décider et du pouvoir de changer la direction de l'économie. Le changement du parti cartellisé au pouvoir en Alberta maintient la domination, le privilège de classe et le régime de l'oligarchie financière et cela n'a rien à voir avec le renouveau de quoi que ce soit.

La prise du pouvoir de Kenney dans le Parti progressiste-conservateur de l'Alberta et la formation du Parti conservateur uni était un coup d'État des harpéristes de Calgary pour reprendre le contrôle de la province des mains des conservateurs du Wildrose dans les zones rurales et des mains du NDP à Edmonton. Le changement de régime consolide et maintient le pouvoir de l'oligarchie financière de payer les riches et la campagne du gouvernement précédent pour permettre aux intérêts privés mondiaux d'exploiter sans restriction les ressources naturelles , tout en intensifiant la lutte acharnée qui se mène parmi les couches rivales des cercles dirigeants. L'offensive antisociale et le désinvestissement dans les programmes sociaux se poursuivent, notamment par un assaut ouvert contre les systèmes publics d'éducation et de santé et des mesures pour rendre la vie plus difficile à la classe ouvrière et à ses organisations.

Le discours du trône brosse le portrait d'une Alberta « assaillie par de graves contraintes politiques et économiques extérieures et, par conséquent, aux prises avec de graves problèmes financiers internes nécessitant une action urgente ». Il parle de « graves contraintes », mais n'analyse pas les conditions matérielles de l'Alberta, du Canada et du monde. Les « graves problèmes budgétaires internes » qui étaient jusqu'à tout récemment attribués au gouvernement néodémocrate précédent sont maintenant attribués à « des contraintes politiques et économiques extérieures ». Autrement dit, l'Alberta serait maintenant la victime de forces économiques indépendantes de sa volonté et d'un complot visant à « enclaver son pétrole ». Cette perspective intéressée, qui était dans une grande mesure partagée par le gouvernement néodémocrate Notley lorsqu'il était au pouvoir, place l'Alberta dans une situation de devoir prendre parti dans le conflit intermonopoliste qui prend la fausse apparence d'une opposition entre l'environnement naturel et l'économie et qui divise les Canadiens avec des arguments irrationnels.

On ne saurait dire que la résurrection du slogan « Ouvert aux affaires » est un renouveau. Il est tout simplement ressorti du déshonneur de l'offensive antisociale de Mike Harris en Ontario dans les années 1990 et copié aujourd'hui par le gouvernement Ford en Ontario, le gouvernement Legault au Québec et maintenant Kenney en Alberta.

Le discours du trône promet de « créer des emplois, la croissance et la diversification économique » et de « montrer au monde que nous sommes ouverts aux entreprises pour rétablir la confiance des investisseurs, tout en rétablissant l'équilibre des finances de notre province ». Kenney est-il sérieux ? Que peut-il faire quand une oligarchie financière mondiale possède et contrôle les principaux secteurs de l'économie albertaine et que son gouvernement n'a aucune intention de changer ces arrangements ? Les crises économiques récurrentes reflètent cette domination mondiale et le peu de pouvoir, s'il en est, qu'ont l'assemblée législative et les partis cartellisés de l'Alberta sur la situation au sein du système impérialiste d'États dominé par les États-Unis.

Le programme législatif antisocial du gouvernement Kenney réduit le salaire minimum pour les jeunes de 15 dollars à 13 dollars l'heure. Il cible le système public d'éducation et de santé et les programmes sociaux avec un programme pour poursuivre la privatisation et la destruction. Il éliminera davantage les réglementations qui restreignent ceux qu'il appelle « les créateurs d'emplois ». C'est ce que Kenney appelle la création d'emplois et le renouveau économique. Les riches oligarques se voient débarrasser du lourd fardeau de 2 dollars de l'heure, des programmes sociaux, de la réglementation et de la bureaucratie administrative et ils lèvent un verre à « l'ouverture de l'Alberta aux affaires ».

La soumission de l'État aux intérêts privés pour offrir à l'oligarchie financière tout ce dont elle a besoin pour poursuivre son pillage des ressources naturelles et l'expropriation de la valeur que produisent les travailleurs ne contribue en rien à la solution des problèmes de l'économie ou de la démocratie. Le renouveau économique de Kenney et de ses semblables revient à nier toute considération des conséquences de l'activité économique à l'exception de la seule qui compte : le taux de profit de la richesse privée investie. Rien ne doit interférer avec le motif de production de l'impérialisme, qui est le plus grand profit le plus rapidement possible.


Rassemblement à Edmonton le 30 avril 2017 pour exiger que cesse la pratique des entreprises « à deux volets » dans l'industrie de la construction..

À quel renouveau démocratique les travailleurs peuvent-ils s'attendre des dieux de la peste lorsque même les lois du travail les empêchent de constituer des organisations de défense sur le lieu de travail ? Dans le secteur de la construction, la loi autorise les travaux « à deux volets » dans lesquels les entreprises peuvent transférer une partie des travaux aux non-syndiqués et favorise la reconnaissance de l'Association chrétienne des travailleurs du Canada qui agit aux ordres des entreprises de même qu'à d'autres ruses pour priver les travailleurs de leur droit de s'organiser. Le gouvernement précédent dit avoir modifié les lois du travail en faveur de la classe ouvrière, mais aucun lieu de travail n'a été en mesure de négocier un accord sur les services essentiels sans lequel les grèves sont illégales.

Pour le gouvernement Kenney, le renouveau démocratique pour les travailleurs est d'être traités comme des consommateurs ayant un « choix », celui d'appartenir à un syndicat ou non, de verser des cotisations syndicales ou non, et la possibilité de choisir entre l'un ou l'autre des partis cartellisés. Et tout le monde sait ce que cela signifie dans un pays où la propagande antisyndicale est monnaie courante et où les travailleurs sont blâmés pour tous les maux de l'économie quand leur « choix » gêne la réalisation du profit sans égard aux conséquences pour l'environnement naturel et social.

Les partis cartellisés et les gouvernements sont portés au pouvoir et renvoyés à la demande de l'oligarchie financière. Toute discussion sur le renouveau démocratique doit donc commencer ailleurs que dans leurs coulisses et à partir d'autre chose que leurs communiqués de presse. Les travailleurs eux-mêmes doivent acquérir le pouvoir par leurs propres efforts et leur organisation, en parlant en leur propre nom. Ce n'est qu'alors qu'ils pourront faire l'expérience d'un véritable renouveau démocratique et s'engager sur la voie du renouveau économique avec un nouveau motif de production, celui de garantir le bien-être et les droits du peuple en priorité et d'humaniser l'environnement social et naturel.


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 21 - 1er juin 2019

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Un assaut du gouvernement albertain contre le corps politique: Le discours du trône déclare l'Alberta «ouverte aux affaires» - Peggy Morton


    

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