L'épreuve de la famille de Gemma Concepcion
Le 27 janvier, l'Agence des services frontaliers du
Canada (ASFC) a déporté Gemma Concepcion, une
travailleuse migrante de 49 ans des Philippines, son conjoint
philippin Enrico, lui aussi un travailleur migrant, et leurs deux
enfants nés au Canada, Ricca Mae, 12 ans, et Mark
Eli, 8 ans. Le combat mené
depuis 14 ans par Gemma pour se bâtir une vie productive
pour elle et sa famille au Canada a pris fin de façon dramatique
à la suite d'une décision de l'État canadien qui
ne
peut être qualifiée que d'inhumaine. Son combat, qui n'est
pas unique, est lié au contrôle impérialiste dans
le monde, y compris dans les Philippines natales de Gemma. Les
travailleurs dans ce monde impérialiste sont privés des
droits qui leur reviennent du fait de leur humanité. Le cas de
Gemma est un exemple criant démontrant que la classe
ouvrière doit
s'unir et organiser pour priver l'élite impérialiste
dominante de son pouvoir de priver le peuple de ses droits.
Chaque jour, sans exception, plus
de 6 000 travailleurs quittent les Philippines à la
recherche d'un monde meilleur pour eux-mêmes et pour subvenir aux
besoins des membres de leur famille qu'ils ont laissés au pays.
En 2005, Gemma Concepcion était une de ces travailleuses.
La pauvreté et le chômage d'une économie
philippine dominée par les impérialistes étrangers
et leurs fantoches locaux ont fait en sorte qu'elle a dû quitter
son pays. Les impérialistes occidentaux et japonais ont
colonisé et pillé les Philippines pendant des centaines
d'années, y arrachant sa richesse sociale et l'empêchant
de développer une économie socialisée moderne de
production
industrielle de masse sous le contrôle des Philippins en
opposition au diktat impérialiste. Les monopoles miniers
canadiens sont depuis longtemps directement impliqués dans le
vol des ressources minérales des Philippines, s'engageant dans
la délocalisation des gens au niveau local et dans
l'expropriation de leurs terres et de leurs ressources
naturelles, en particulier les peuples autochtones qu'on nomme les
Lumad.
La lutte de Gemma Concepcion pour ses droits en
tant
que travailleuse et être humain
Gemma a accepté une offre d'emploi par le biais
d'une agence dans les Philippines pour un travail au Canada alors qu'on
lui promettait qu'elle pouvait devenir une résidente permanente
après une période déterminée de travail. En
échange, les trafiquants humains l'ont forcée à
leur remettre 14 000 $, somme qu'elle a
obtenue par la vente d'une partie des terres de sa famille.
Lorsque Gemma est arrivée à Toronto en
septembre 2005, elle ne s'était pas rendu compte que
l'agence de recrutement était en fait une opération de
traite des êtres humains et qu'on lui avait délivré
un faux
passeport
pour qu'elle puisse venir au Canada. Aussitôt qu'elle est
arrivée, un représentant de l'agence a confisqué
la documentation de
Gemma, la laissant « sans papiers ».
Son futur conjoint Enrico, qui était
arrivé au Canada l'année précédente,
était aussi une victime de traite des êtres humains.
Arrivés
au Canada, les deux ont travaillé pour une agence qui offrait
des services d'entretien ménager et se sont rencontrés
alors qu'ils travaillaient à l'entretien des classes et des
studios du Ontario College of Arts and Design (OCAD).
Ils ont élevé deux enfants et
étaient membres d'une église locale et ont
contribué à leur communauté. Aussi vivaient-ils
dans un état de terreur en tant que travailleurs «
sans papiers ». Leurs deux enfants nés au Canada ont
raté plusieurs années d'école publique de crainte
qu'ils ne soient ciblés comme le sont les enfants de
travailleurs
sans papiers.
L'AFSC a arrêté Gemma le 16
janvier 2016 et l'a détenue pendant dix jours, ce qui a
traumatisé sa famille. Le pasteur de l'église a
versé le cautionnement et la congrégation a
conseillé à Gemma et sa famille de communiquer avec
Migrante-Ontario — une organisation de défense de travailleurs
migrants philippins qui est la filiale
provinciale de Migrante-Canada.
En mars de l'année suivante, l'AFSC a
accordé un sursis à Gemma pendant que son dossier
était à l'étude. Son équipe juridique a
soumis une demande de résidence permanente en raison de
considérations humanitaires, ce qui a été
refusé. Cette décision a fait l'objet d'une
révision judiciaire à la Cour fédérale,
mais
le résultat n'a pas été
favorable à Gemma. Pendant ce temps, Migrante-Ontario a
organisé des campagnes de financement et des réunions
publiques pour faire connaître le cas de Gemma.
Par suite de la décision de la Cour
fédérale, l'AFSC a avisé Gemma qu'elle et sa
famille seraient déportées le 27 janvier. Le 25
janvier, une action d'urgence a été organisée au
centre-ville de Toronto pour faire connaître la situation que
vivaient Gemma et sa famille. Le même jour, son avocat a appris
que la demande de la Cour
suprême du Canada de suspendre la demande de déportation
avait échoué.
Rassemblement d'urgence à Toronto en appui à la famille
Concepcion le 25 janvier 2019
L'inhumanité envers les victimes du
colonialisme et le déni des droits
Ce qui est arrivé à Gemma et à sa
famille est injuste et inacceptable. L'élite dominante
canadienne n'assume aucune responsabilité pour la
création des conditions qui engendrent la migration de masse
venant de pays opprimés comme les Philippines ni pour l'abus que
subissent les personnes vulnérables aux mains de trafiquants
d'êtres humains.
Les autorités canadiennes font la sourde oreille lorsqu'il
s'agit des vies anéanties de victimes qui sont
criminalisées et déportées.
Gemma ne reçoit
aucune aide pour récupérer le 14 000 $
qu'on lui a volé ni pour les dix ans de dur travail qu'elle et
son conjoint ont accompli au Canada. Suffit-il de dire que leur
rétablissement aux Philippines sera difficile pour les deux
enfants qui ont été arrachés à leur
école et à leurs
amis.
L'État canadien doit rendre des comptes pour ce
crime contre Gemma et sa famille et les dizaines de milliers d'autres
travailleurs migrants qui ont été maltraités et
dont les droits ont été violés.
MacDonald Scott est un des membres de l'équipe
juridique qui a appuyé Gemma. Scott a dit qu'ils avaient
informé l'AFSC que Gemma était prête à
coopérer en cas d'enquête, mais il n'a pas reçu de
réponse. Il rappelle que la situation de Gemma est devenue
connue parce que plusieurs organisations l'ont appuyée et ont
fait valoir la justesse de sa
cause. Elle n'est pas la seule migrante à être
arrêtée, détenue et déportée comme si
elle était un fantôme plutôt qu'un être humain
avec des droits et dont le dilemme peut être expliqué de
façon historique et personnelle. Lors du rassemblement pour
Gemma et sa famille le 25 janvier, il a rappelé que lors de
l'élection du gouvernement libéral en 2015, Justin
Trudeau avait déclaré publiquement qu'il était
opposé à la traite des êtres humains et
s'était engagé à agir. Scott a demandé
à Trudeau d'agir ici et maintenant et de mettre fin à la
procédure d'expulsion de l'ASFC contre Concepcion, ce qu'il
refuse de faire.
Par le biais de programmes tels que le Programme des
travailleurs étrangers temporaires, le Programme des
travailleurs agricoles saisonniers et d'autres, l'État canadien
transforme les travailleurs partout dans le monde et en particulier
ceux des
pays pauvres et opprimés en proies vulnérables à
la traite des êtres humains et aux employeurs canadiens sans
scrupules, qui ne les perçoivent qu'en tant qu'objets bons
à exploiter et à jeter. Le Parti communiste du Canada
(marxiste-léniniste) appelle tous les Canadiens à s'unir
et à travailler ensemble pour doter le pays d'une nouvelle
direction par laquelle les droits de tous et toutes sont garantis sans
exception. Nous sommes une seule humanité ! Les
droits de tous sont inaliénables ! Organisons-nous et
luttons pour le Nouveau !
Cet article est paru dans
Volume 49 Numéro 17 - 4 mai 2019
Lien de l'article:
L'épreuve de la famille de Gemma Concepcion
Site Web: www.pccml.ca
Courriel: redaction@cpcml.ca
|