70e anniversaire de la création de l'OTAN

Non à l'OTAN! Démantelez l'OTAN! Faisons du Canada une zone de paix!

L'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) s'est toujours décrite comme une alliance créée à des fins défensives. En fait, l'OTAN est une alliance militaro-politique agressive conçue et créée le 4 avril 1949, pendant la guerre froide, sous prétexte de défendre l'Europe contre l'« invasion communiste » et suivant la prétention que le « mal » communiste et le totalitarisme constituaient une menace pour la liberté et la démocratie en Occident.

Depuis l'effondrement de l'Union soviétique et des démocraties populaires d'Europe de l'Est, l'OTAN a été élargie pour incorporer certaines des anciennes démocraties populaires. Sa raison d'être initiale étant disparue, d'autres prétextes ont été inventés pour justifier son maintien. En 1991, les chefs d'État des pays de l'OTAN ont déclaré que, bien que, même si la menace soviétique avait été « éliminée... et ne constituait donc plus un élément central de la stratégie des Alliés », « les risques qui subsistent pour la sécurité des Alliés sont multiples et multidirectionnels, ce qui les rend difficiles à prédire et à évaluer. »[1]

Dix ans plus tard, les attentats terroristes du 9 septembre 2019 aux États-Unis ont procuré une nouvelle raison d'être à l'OTAN, un nouvel ennemi à combattre, soit le « terrorisme ». Aujourd'hui on dit que le danger provient des États « autoritaires » et « voyous » qui menacent la « liberté » et cherchent à renverser la démocratie libérale et « l'ordre international basé sur des règles » que l'OTAN prétend défendre.


Les pays membres de l'OTAN en fonction de leur année d'adhésion

Le premier secrétaire général de l'OTAN, lord Ismay, a dit que la mission première de l'Alliance atlantique en Europe était de « garder les Américains à l'intérieur, les Russes à l'extérieur et les Allemands sous tutelle ».[2] Bien que l'OTAN mène aujourd'hui une guerre globale multi-dimensionnelles sur plusieurs fronts, utilisant ses propres forces et des forces inféodées comme « agents de chaos », le spectre d'une guerre majeure plane toujours sur l'Europe puisque les contradictions dans les rangs des grandes puissances européennes et entre elles et les États-Unis et même dans les rangs des impérialistes américains continuent de s'accentuer dans la rivalité pour le contrôle de l'Europe et la domination de l'Asie. Tout cela dans les conditions où les peuples d'Asie, d'Afrique, d'Amérique latine et des Caraïbes ne sont pas d'humeur à être dominés. Chaque grande puissance aspire à une plus grande part du butin de guerre mais les règles changent. Le président des États-Unis Donald Trump n'est pas en faveur de négociations avec les pays membres et menace de quitter l'OTAN s'il n'obtient pas ce qu'il veut. En ce moment, ce qu'il veut est que les autres membres augmentent considérablement leurs budgets militaires. Pendant ce temps, les puissances européennes consolident leurs propres forces de défense et des divisions sont exprimées au sein même de l'OTAN et au sein de chaque pays de l'OTAN, y compris les États-Unis, au sujet du rôle que doit jouer l'OTAN aujourd'hui. Son élargissement n'a pas résolu ni atténué les contradictions dans ses rangs, chaque grande puissance poursuivant des intérêts privés étroits, ce qui est contraire au concept de sécurité collective.

Aujourd'hui, les guerres dans lesquelles les impérialistes américains et les autres pays de l'OTAN sont engagés ne sont plus la politique par d'autres moyens, car ces puissances ne sont plus motivées par les intérêts de leur corps politique. Elles s'engagent davantage dans la destruction nationale que dans l'édification nationale et ne sont plus guidées par le besoin de servir ce qu'on appelait le bien public. Elles ont abandonné la Charte des Nations unies et l'état de droit international qui défend l'égalité des nations, grandes ou petites, leur droit à l'autodétermination et le principe de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures. Aujourd'hui, le but des guerres d'agression et d'occupation est de détruire les pays qui refusent de se soumettre au diktat des impérialistes américains et de leurs alliés. Ce sont des guerres de destruction et, comme il n'y a pas de politique, il n'y a pas de négociations de traités de paix qui entraînent des obligations et une responsabilité. Depuis l'intervention des États-Unis/OTAN dans les Balkans en 1999, où un prétexte humanitaire a été utilisé pour bombarder la Yougoslavie, jusqu'à la guerre du Golfe et aux guerres contre l'Afghanistan, l'Iraq, la Libye, la Syrie et d'autres pays, rien n'a été réglé. Maintenant, elles braquent leur attention sur le Venezuela.

À cet égard, la participation à l'OTAN affecte non seulement les questions militaires mais tous les aspects d'un État national et toute la vie politique du pays. Par le biais de son Bureau de la diplomatie publique et par d'autres moyens, l'OTAN porte une attention de premier plan à la manipulation politique des parlements, à la guerre de l'information et à la destruction de l'opinion publique. Elle travaille en conjonction avec les gouvernements, dont celui du Canada. L'OTAN a toujours joué un rôle dans la formulation des structures politiques qui peuvent être permises non seulement en Europe, aux États-Unis et au Canada mais, depuis l'effondrement de l'Union soviétique et des démocraties populaires, dans les tous les pays qui sont considérés comme des démocraties libérales ou étant « sur la voie de la démocratie », comme l'Ukraine par exemple. Tout pays qui refuse de s'y soumettre devient la cible de changement de régime de la part du bloc de l'OTAN.

Il n'est pas besoin d'être pacifiste pour être très préoccupé par une politique étrangère et de défense qui est gouvernée par les États-Unis et l'OTAN et qui investit tout dans des forces de déploiement rapide qui ne sont même pas conçues pour défendre notre propre pays. L'OTAN venait à peine d'être fondée en 1949 que les Canadiens ont commencé à demander le retrait du Canada de l'OTAN et une politique étrangère indépendante et ont fait valoir diverses perspectives à ce sujet. Les Canadiens se sont fortement opposés à la présence d'armes nucléaires en sol canadien dans les années 1960 et les années 1980 par des manifestations et d'autres actions à l'échelle du pays. Les manifestations et actions se poursuivent aujourd'hui dans les ports canadiens contre les « visites » des navires nucléaires des États-Unis et de l'OTAN tandis que les peuples de l'Arctique continuent de réclamer que la région soit une zone de paix.


Manifestation contre la visite de navires de guerre au port de Montréal, le 30 octobre 2004

Le Canada fournit des millions de dollars en fonds publics et en personnel aux agences de « promotion de la démocratie » de l'OTAN et des États-Unis pour organiser des coups d'État et des « révolutions colorées ». Depuis 2005, le Canada a parrainé et exploité le Centre d'information de l'OTAN à Kiev, qui relève du Bureau de la diplomatie publique de l'OTAN. En plus de veiller à l'intégration militaire des forces armées ukrainiennes à l'OTAN et d'exporter des armes, le Canada a participé à la création d'un réseau ramifié d'une centaine de bureaux d'information locaux pro-OTAN en Ukraine, dont beaucoup sont basés dans les universités. Ce réseau a été créé pour combattre l'opposition du peuple ukrainien à l'adhésion à l'OTAN et plus particulièrement aux « visites » de navires de guerre américains et de l'OTAN dans les ports de Crimée et de la mer Noire, pour isoler la Russie et imposer un changement de régime s'il y a refus de coopérer. Depuis 2007, le Centre d'information de l'OTAN coparraine le Forum sur la sécurité de Kiev de la Fondation Open Ukraine, qui a servi de modèle pour le Forum sur la sécurité internationale d'Halifax, créé en 2009 et organisé par le même personnel américain.

Le système de partis au Canada garantit que l'adhésion du Canada à l'OTAN soit un « fait accompli » et le « business as usual ». Les partis au Parlement ne contestent pas la conception de la souveraineté dans laquelle la prise de décision concernant les problèmes cruciaux de la guerre et de la paix est entre des mains étrangères. Aucun débat digne de ce nom n'a eu lieu au Parlement canadien sur l'adhésion à l'OTAN. Lors du vote au Parlement en 1949, tous les députés professant la coexistence pacifique avec l'Union soviétique de l'époque étaient soit limogés, sanctionnés ou absents. Aujourd'hui, quand on nous propose de faire de l'adhésion à l'OTAN une « valeur canadienne », cela n'est pas contesté par les partis politiques qui forment les gouvernements ou qui siègent au Parlement. Toute discussion à ce sujet est taboue. Dans les examens de la politique étrangère du Canada par les cercles officiels, les comités permanents du Parlement ou les médias monopolisés, il est tabou de remettre en question l'appartenance du Canada à l'OTAN. Cela étant, ceux qui soulèvent ces questions parmi le peuple sont traités de « marginaux » ou d'« extrémistes ». L'imposition de cette vision n'est pas seulement un assaut contre la conscience, c'est une désinformation pour que n'émerge pas de conscience collective qui se traduise par la demande que le Canada sorte de l'OTAN, que l'OTAN soit démantelée et que le Canada soit une zone de paix.

La nation innue du Labrador et de l'est du Québec (Nitassin) a organisé une série de manifestations au milieu des années 1980, appuyées partout au Canada, contre les plans de l'armée canadienne d'effectuer des essais en vol à basse altitude et des bombardements guidés au laser dans le centre et le sud du Labrador.

L'adhésion du Canada à l'OTAN constitue non seulement une atteinte à la souveraineté du peuple du fait qu'une puissance étrangère décide de toutes les questions liées à la guerre et à la paix au nom du peuple, mais même le Parlement n'a pas son mot à dire sur les questions de guerre et de paix. En effet, les questions de guerre et de paix sont des sujets qui relèvent du privilège exécutif ou de la prérogative royale. Par exemple, les États-Unis ont secrètement déployé des bombes nucléaires dans 27 pays et territoires pendant la guerre froide, y compris au Canada. Les accords n'étaient connus que du premier ministre et de quelques-uns de ses ministres. Le 28 août 1950, utilisant la prérogative royale, le premier ministre Louis Saint-Laurent a accepté secrètement le stockage de 11 bombes atomiques à Goose Bay, le site de stockage nucléaire américain le plus proche de l'Europe. Selon l'histoire secrète de la Section de la sécurité de la 43e escadre de bombardement, citée par le professeur John Clearwater dans son ouvrage Canadian Nuclear Weapons : The Untold Story of Canada's Cold War Arsenal, « les unités étaient entreposées dans une forêt, sur des routes en gravier de la base proprement dite ».

Puis le 17 août 1963, le gouvernement libéral de Pearson a accepté l'installation d'au moins 500 têtes nucléaires américaines au Canada. Le professeur Clearwater note qu'Ottawa a été très peu bavard au sujet de son armement nucléaire, en partie par crainte d'être critiqué pour son intégration à la machine de guerre du Pentagone. L'objectif était de marginaliser l'opposition des Canadiens à l'utilisation du territoire canadien pour les préparatifs de guerre impérialistes, à l'installation de bases militaires américaines sur le sol canadien et à la présence d'armes de destruction massive. En d'autres termes, l'existence de la prérogative royale et son utilisation pour imposer ce qui ne peut être justifié est un problème politique aussi important que l'interdiction des armes de destruction massive.

Un autre aspect qui mérite l'attention est que l'OTAN concentre aujourd'hui son attention sur la guerre cybernétique, la guerre de l'information et l'« ingérence dans les élections ». Les changements apportés à la Loi électorale du Canada par le projet de loi C-76 qui concernent la lutte contre l'« influence étrangère » et la surveillance des médias sociaux s'alimentent à la doctrine de sécurité nationale des États-Unis, à l'OTAN et à son groupe de réflexion le Conseil atlantique de même qu'aux agences du renseignement des Cinq yeux. Cela comprend le contrôle et la réglementation de la communication électorale et politique. Sous prétexte de la protection des électeurs, une forme de censure est introduite pour déterminer ce qui est légitime. En ce qui concerne les médias sociaux, cela affecte par exemple ceux qui sont considérés comme les « véritables croyants », c'est-à-dire ceux qui, dans le vocabulaire des services de renseignement, ceux deviennent sciemment ou non les dupes de la Russie, etc., et sont par conséquent des cibles légitimes de persécution. Les entreprises de médias sociaux ont posé des gestes contre des sites web alternatifs qui sont connus pour leurs critiques des politiques étrangères et domestiques des gouvernements des États-Unis et du Canada. Qu'on pense à Counterpunch, World Socialist Website, Global Research, Consortium News, Mediamatters, Commondreams, Democracy Now, Wikileaks, Truthout, The Intercept, VenezuelaAnalysis, TeleSUR, et d'autres.

Les peuples du monde se battent chaque jour pour réaliser leur aspiration à la paix. Partout dans le monde, lorsqu'ils affirment leurs droits et ceux de tous, ils traduisent leur volonté de paix, de liberté et de démocratie, volonté usurpée au moment de la création de l'OTAN, en une force politique qui réclame le pouvoir de décider de ses affaires. Répondre à l'appel de faire du Canada une zone de paix, c'est occuper l'espace du changement. L'appel à faire du Canada une zone de paix part entre autres du principe que la politique étrangère du Canada ne doit pas porter préjudice à d'autres peuples, comme c'est le cas actuellement.

Que l'OTAN survive ou non sous sa forme actuelle, il est certain que l'aspiration des peuples à la paix, à la liberté et à la démocratie est aujourd'hui favorisée par l'appel à faire de leurs pays des zones de paix et en s'unissant dans l'action pour établir des gouvernements antiguerre qui expriment une personnalité démocratique moderne pour qui la défense des droits de tous et toutes est un principe.

La force du désir de paix et de la défense des droits de tous ne peut être sous-estimée ou surestimée. Il faut s'opposer aux tentatives de briser ce mouvement et priver le peuple d'une conscience et d'une action collectives. Cela comprend une lutte idéologique contre les tentatives de faire croire que les interventions militaires à l'étranger sont maintenant faites par souci d'une « responsabilité de protéger », de « rétablissement de la paix », de défense d'un ordre international basé sur les règles et autres balivernes.

Les réunions organisées à l'occasion du 70e anniversaire de l'OTAN rassemblent des activistes et des experts de différents domaines qui prennent des positions de principe et soutiennent que l'existence de l'OTAN est incompatible avec le besoin d'une conception moderne et humaine de la sécurité fondée sur la défense des droits de tous, d'une politique étrangère indépendante basée sur l'engagement à faire du Canada une zone de paix et d'un projet d'édification nationale établi sur une base moderne.
À l'occasion du 70e anniversaire de la création de l'OTAN, contribuons à la résolution du problème de sortir le Canada de l'OTAN et de s'assurer que l'OTAN soit démantelée. Et surtout, quoi qu'il advienne de l'OTAN, contribuons à faire du Canada une zone de paix.

Manifestations au Canada dans les années 1970 et 1980 contre l'OTAN et les préparatifs de guerre impérialiste


Manifestation à l'occasion d'une rencontre ministérielle des pays de l'OTAN à Ottawa en 1963


Manifestation sur la rue Sparks à Ottawa, circa 1963, contre le consentement
donné par le gouvernement libéral de Pearson au déploiement de missiles nucléaires
américains en sol canadien


Un sit-in à l'entrée de la base de missile Bomarc à La Macaza, Québec, le 9 septembre 1964


Manifestation à l'occasion d'une réunion ministérielle des pays de l'OTAN à Ottawa en 1974


Manifestation à Vancouver contre un navire de guerre américain en visite, le 17 juillet 1982, pour exiger que le Canada se retire de l'OTAN et du NORAD

Manifestation à Toronto le 17 mars 1985 contre la visite de Reagan. Au milieu des années 80, des actions organisées par le PCC(M-L) contre les préparatifs de guerre impérialiste et le diktat américain ont eu lieu dans de nombreuses villes


Manifestation à Guelph contre les essais de missile Cruise le 14 juin 1985 devant les bureaux du député de la circonscription

Manifestation à Winnipeg le 19 janvier 1988 contre les essais de missiles de croisière au Canada

Notes

1. The Alliance's New Strategic Concept, OTAN, 8 novembre 1991

2. The Paradox of American Power, Joseph Nye, Oxford University Press, 2002, p. 33


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 12 - 30 mars 2019

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70e anniversaire de la création de l'OTAN: Non à l'OTAN! Démantelez l'OTAN! Faisons du Canada une zone de paix!


    

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