Audiences en comité sénatorial sur le projet de loi C-69

Des faussetés sur la nouvelle loi d'évaluation d'impact

Le Comité du Sénat sur l'énergie, l'environnement et les ressources naturelles a débuté ses audiences sur le projet de loi C-69 le 5 février. Ce projet de loi est un projet de loi omnibus qui remplacera l'Office national de l'énergie par la Régie canadienne de l'énergie et créera l'Agence canadienne d'évaluation d'impact en tant qu'agence responsable des évaluations d'impact sur des projets comme les oléoducs, les lignes de transmission électriques et les mines.[1]

Le comité entreprend maintenant une tournée dans neuf villes et soumettra son rapport final d'ici le 9 mai, à la suite de quoi le projet de loi ira en troisième lecture au Sénat.

Le titre entier du projet de loi C-69 est Loi édictant la Loi sur l'évaluation d'impact et la Loi sur la Régie canadienne de l'énergie, modifiant la Loi sur la protection de la navigation et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois. Il crée l'Agence canadienne d'évaluation d'impact en tant qu'autorité responsable des évaluations d'impact. Selon le projet de loi, son objectif est de prévoir « un processus d'évaluation des effets environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques des projets désignés en vue de la prévention de certains effets négatifs et de favoriser la durabilité ».

Les oligarques de l'énergie et les médias monopolisés ont dépeint le projet de loi C-69 comme une monstrueuse attaque contre l'industrie de l'énergie, peut-être même son arrêt de mort. La journaliste du Calgary Herald, Licia Corbell, écrit : « Si vous croyez qu'il est déjà difficile de faire construire un projet significatif en matière de ressources au Canada, vous n'avez encore rien vu. Le gouvernement fédéral de Justin Trudeau a conçu un projet de loi si destructeur qu'il va vraisemblablement reléguer aux oubliettes même le Programme énergétique national désastreux et sinistre de son célèbre père. » Le journaliste Don Braid écrit aussi dans le Herald que le projet de loi représente « un sérieux danger pour l'oléoduc de Trans Mountain. Ce monstre doit être abattu ».

Martha Hall Findlay, la présidente de la Canada West Foundation et ancienne députée libérale fédérale, dit que si le projet de loi C-69 est adopté, « on peut dire adieu à notre climat d'investissement. Les investisseurs - domestiques, étrangers, actuels et potentiels - sont unanimes. 'Si c'est adopté, nous partons d'ici', disent-ils. »

En ce qui concerne le gouvernement Trudeau, il a dépeint le projet de loi C-69 comme étant une amélioration substantielle par rapport à la loi actuelle adoptée en 2012 par le gouvernement Harper, alors qu'il lui ressemble beaucoup. Il dit que les améliorations comprennent un processus de planification qui tiendra compte de l'impact sur les droits des peuples autochtones au Canada et mettra un accent plus prononcé sur la considération des impacts des projets sur les droits des autochtones. Deuxièmement, les règles concernant qui peut obtenir un statut d'intervenant seraient ramenées à ce qu'elles étaient avant 2012. La loi de 2012 du gouvernement Harper avait réservé le statut d'intervenant à ceux qui sont directement affectés par un projet (l'oléoduc devait traverser votre territoire). Troisièmement, la loi ajoute un certain nombre de considérations à celles dont le Bureau de l'évaluation des impacts doit tenir compte.

Tout ceci est frauduleux et aucune de ces prétentions n'est fondée. Au-delà de toutes ces hyperboles, il reste que l'Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP) déclare maintenant qu'elle ne veut pas que le projet de loi soit tué. Tuer ce projet de loi « éliminerait des années de travail et ne donnerait pas plus de certitude à l'industrie », a dit Tim McMillan, président de l'ACPP. Le sénateur Grant Mitchell, qui parraine le projet de loi au Sénat, se dit ouvert aux amendements, et il en est de même du premier ministre et du ministre de l'Environnement, ce qui montre que les dés sont pipés. Pour satisfaire leurs revendications actuelles, les oligarques de l'énergie ne veulent pas préserver la loi telle qu'adoptée par le gouvernement Harper, mais saper encore plus le processus réglementaire. L'ACPP, dans les « objectifs à atteindre » de sa « plateforme électorale » en Alberta, demande que la période totale pour l'approbation d'un projet soit réduite de moitié et que des limites soient placées à l'autorité du Cabinet d'« arrêter le chronomètre » lors d'une étude de projet. L'association demande que le coût pour l'industrie soit réduit et que les mécanismes déjà substantiels pour payer les riches soient encore augmentés. Elle demande aussi que l'on continue à nier un statut d'intervenant aux citoyens concernés et notamment aux scientifiques lors des audiences d'évaluation d'impact.

Tout ceci se produit dans le contexte d'une concurrence frénétique pour le contrôle des ressources et des marchés et des plans grandioses des oligarques de l'énergie des sables bitumineux de déplacer leurs « concurrents », en particulier sur les marchés de la côte du Golfe des États-Unis et en Californie. On parle beaucoup des marchés asiatiques afin de faire oublier la réalité de la dépendance accrue sur les exportations vers les États-Unis.

Ce qui est à l'oeuvre dans la situation actuelle est le même vieux cycle d'expansion et de récession et de contraction et la « relance » sans emplois. Les ressources du Canada et le temps de travail des Canadiens sont utilisés dans la concurrence violente que se font les cartels internationaux et pour servir la machine et l'économie de guerre des États-Unis. Cela mène nécessairement à la destruction et à l'insécurité par la guerre, les sanctions, le « changement de régime » et d'autres moyens. L'environnement social et naturel, le besoin de mesures pour faire face au changement climatique et les droits des peuples autochtones sont tous censés être sacrifiés au profit de l'enrichissement de la minorité riche. C'est une direction qui est contraire à la celle requise pour bâtir une économie qui subvienne à ses besoins et repose sur la satisfaction des besoins du peuple et sur le commerce pour l'avantage réciproque.

L'obsession des gouvernements à servir les oligarques de l'énergie et les grandes banques, et les arrangements étatiques qui sont faits pour servir les intérêts privés démontrent l'ampleur de la crise à laquelle les partis cartellisés et les cercles dirigeants font face. C'est très clair. Ce n'est pas très joli comme spectacle, mais plus il est évident que les partis cartellisés et l'appareil d'État servent les riches et préservent leur privilège de classe, plus le besoin du renouveau de la démocratie devient évident lui aussi. La question de qui décide est devenue la question clé et un grand défi se pose à la classe ouvrière, celui de former ses politiciens ouvriers et de bâtir l'Opposition ouvrière au Parlement.

Note

1. Voir à ce sujet « Les amendements au processus d'évaluation d'impact environnemental sont de la poudre aux yeux », LML 29 septembre 2018


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 9 - 9 mars 2019

Lien de l'article:
Audiences en comité sénatorial sur le projet de loi C-69: Des faussetés sur la nouvelle loi d'évaluation d'impact - Peggy Morton


    

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