« Le mouvement des femmes socialistes de tous les pays répudie le droit de vote limité des femmes comme une falsification et une insulte au principe de l'égalité politique du sexe féminin. Il lutte pour la seule expression vivante concrète de ce principe : le suffrage universel de la femme ouvert à tous les adultes et lié par aucune condition de la propriété, du paiement des impôts, du niveau d'éducation ou toutes autres qualifications, qui excluent les membres de la classe ouvrière de la jouissance de ce droit. Elles continuent leur lutte, pas en alliance avec les réformistes du droit bourgeois des femmes, mais en alliance avec les partis socialistes et elles luttent pour le suffrage de la femme comme une des exigences qui, du point de vue du principe et de la pratique, est la plus importante pour la démocratisation du suffrage. » Déclarant que les partis socialistes dans tous les pays sont « tenus de se battre avec énergie pour l'introduction du vote des femmes », il affirme que le mouvement des femmes socialistes doit prendre part aux luttes organisées par les partis socialistes pour la démocratisation du suffrage, tout en s'assurant que dans ce combat, « il faut insister sur la question du suffrage universel des femmes à cause de son importance d'un point de vue des principes et de la pratique ». La résolution visant à créer la Journée internationale de la femme déclare que : « Afin de faire progresser l'émancipation politique des femmes, il est du devoir des femmes socialistes de tous les pays d'agiter infatigablement selon les principes ci-dessus mentionnés au sein des masses laborieuses ; de les éclairer par des discours et la littérature sur la nécessité sociale et l'importance de l'émancipation politique du sexe féminin et utiliser donc toutes les occasions de le faire. En menant cette propagande, elles doivent tirer le meilleur parti en particulier des élections à toutes sortes d'institutions politiques et publiques ». Les déléguées ont résolu que : « En accord avec les organisations politiques et syndicales du prolétariat, qui sont animées d'une conscience de classe dans leur pays, les femmes socialistes de toutes nationalités ont à organiser une Journée de la femme spéciale qui, en première ligne, doit promouvoir la propagande pour le suffrage des femmes. Cette demande doit être discutée en relation avec toute la question de la femme selon la conception socialiste des choses sociales. » L'année précédente, une « Journée de la femme » avait été organisée aux États-Unis, le dernier dimanche de février 1909, par le Comité national des femmes du Parti socialiste américain. Elle fut marquée par des manifestations pour les droits des femmes, notamment pour le suffrage des femmes ainsi que les droits des travailleuses, notamment dans l'industrie du vêtement. Cette journée de la femme a honoré les milliers de femmes impliquées dans les nombreuses grèves dans les premières années du XXe siècle dans plusieurs villes, dont Montréal, Chicago, Philadelphie et New-York. Ce fut une période où les femmes se sont jointes à la population active par milliers et ont lutté aux côtés des hommes pour s'organiser collectivement et améliorer leurs conditions brutales de travail. Plus tard, en 1909, les travailleurs de l'industrie du vêtement à New-York - dont 80 % étaient des femmes - ont quitté leur travail et ont marché pour les droits syndicaux, des salaires décents et des conditions de travail dans ce qu'on a appelé le « soulèvement des 20 000 ». L'arrêt de travail avait été appelé « grève du mouvement des femmes » et s'est poursuivi du 22 novembre 1909 jusqu'au 15 février 1910. La Ligue syndicale des femmes a fourni le cautionnement pour les grévistes arrêtés et d'importantes sommes pour les fonds de grève durant l'arrêt de travail. Premières célébrations de la Journée internationale de la femme Le 19 mars 1911 était la date
fixée pour la première Journée
internationale de la femme par la deuxième
Conférence
internationale
des femmes socialistes et, mettant en pratique leur
résolution,
des
rassemblements organisés ce jour-là en Autriche, au
Danemark, en
Allemagne et en Suisse furent suivis par plus d'un million de
femmes et d'hommes. « Le vote pour les femmes unira notre
force
dans la
lutte pour le socialisme » était l'appel de ces
rassemblements. En plus
de la revendication du droit d'élire et d'être
élues, elles réclamaient
le droit au travail et à la formation professionnelle et
la fin
de la
discrimination au travail. Une femme socialiste écrivait
à
l'époque : « Ce fut certainement la première démonstration du militantisme des travailleuses. Pour faire changement, les hommes sont restés à la maison avec les enfants et les épouses, les ménagères en captivité, sont allées aux réunions. Pendant les plus grandes manifestations de rue, dans lesquelles 30 000 femmes prenaient part, la police a décidé de retirer les bannières des manifestantes, les travailleuses ont pris position et résisté. Dans la bagarre qui a suivi, un bain de sang a été évité grâce à l'intervention des députés socialistes au Parlement. » L'année suivante, les femmes en France, aux Pays-Bas et en Suède prirent part à des actions pour marquer la Journée internationale de la femme. Dans la période précédant la déclaration de la Première Guerre mondiale, la célébration de la Journée internationale de la femme s'opposa à la guerre impérialiste et exprima la solidarité entre les travailleuses de pays différents en opposition à l'hystérie chauvine nationale des cercles dirigeants. En Europe par exemple, la Journée internationale de la femme était l'occasion d'envoyer des conférencières d'un pays dans un autre pour offrir leurs salutations. Les femmes russes célébrèrent leur première Journée internationale de la femme le dernier dimanche de février 1913 (dans le calendrier julien, ce qui correspondait au 8 mars dans le calendrier grégorien en usage ailleurs), sous les conditions brutales de la réaction tsariste. Il n'y avait aucune possibilité que des femmes organisent des manifestations ouvertes mais, dirigées par les femmes communistes, elles ont trouvé des façons de célébrer cette journée. Des articles sur la Journée internationale de la femme furent publiés dans les deux journaux légaux des travailleurs de l'époque, y compris les salutations de Clara Zetkin et autres. Un essai écrit en 1920 par une militante communiste de l'époque décrit la célébration de 1913 : « Durant ces années sombres, les réunions étaient interdites. Mais à Petrograd, à la Bourse Kalashaikovsky, ces travailleuses qui appartenaient au Parti ont organisé un forum public sur « La question féminine ». Le prix d'entrée était de cinq kopecks. C'était une réunion illégale mais la salle était remplie. Des membres du Parti ont pris la parole. Mais cette réunion animée 'fermée' était à peine terminée que la police, alarmée au sujet de la tenue d'une telle réunion, est intervenue et a arrêté plusieurs oratrices. « C'était d'une grande importance pour les travailleurs du monde que les femmes de Russie, qui vivaient sous la répression tsariste, devraient y participer et en quelque sorte reconnaître par des actions la Journée internationale de la femme. C'était un signe encourageant que la Russie se réveille et que les prisons et potences tsaristes soient impuissantes à vaincre l'esprit de lutte et de protestation des travailleurs. » Les femmes en Russie continuèrent de célébrer la Journée internationale de la femme de diverses manières au cours des années suivantes. Beaucoup de celles engagées dans l'organisation se retrouvèrent dans les prisons tsaristes alors que le slogan « pour le vote aux travailleuses » devenait un appel ouvert pour le renversement de l'autocratie tsariste. Le premier numéro de Femme ouvrière (Rabotnitsa), une revue pour les femmes de la classe ouvrière, fut publié en 1914. La même année, le Comité central bolchevik décida de créer un comité spécial chargé d'organiser des réunions pour la Journée internationale de la femme. Ces réunions eurent lieu dans les usines et lieux publics pour discuter des questions liées à l'oppression des femmes et pour élire les représentantes parmi celles qui participèrent à ces discussions et adoptèrent des propositions pour travailler sur le nouveau comité. Journée internationale de la femme de 1917 en Russie
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