Le prétexte pour faire des partis politiques des appendices de l'État

Lors de la Commission Charbonneau, le financement illégal de partis politiques par SNC-Lavalin a fait l'objet de longues interventions. Chaque détail a été examiné par la Commission, qui a révélé l'ampleur de ce financement illégal. Par contre, aucun représentant de SNC-Lavalin et des autres entreprises n'a été poursuivi pour ce financement illégal des partis au Québec, et aucun des partis visés ou de leurs candidats qui avaient accepté ou sollicité ces dons illégaux n'a été poursuivi ou ne s'est vu interdire d'être candidat à une élection.

Le financement illégal des partis politiques au Québec a plutôt été utilisé pour resserrer encore plus le contrôle de l'État sur les partis politiques pour en faire des appendices de l'État.

Le 10 juin 2016, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité le projet de loi 101, Loi donnant suite aux recommandations de la Commission Charbonneau en matière de financement politique. Cette loi prétend s'adresser au grave problème de corruption du système de partis révélée par la Commission Charbonneau. Elle prétend le faire en établissant des mécanismes par lesquels les citoyens peuvent tenir les élus responsables et redevables.

Or, c'est tout le contraire qui est fait. La « lutte à la corruption » exprimée par cette loi soumet les activités des partis politiques au contrôle de l'État et donne des pouvoirs policiers au Directeur général des élections du Québec (DGEQ), lui permettant de s'ingérer dans les affaires de ces organisations, de rendre la vie plus difficile aux partis politiques, surtout aux partis émergents, et d'institutionnaliser l'intimidation de ceux qui veulent participer à la vie politique.

En guise d'exemple, au nom de « contrer le faux bénévolat », la loi a ajouté des mesures de contrôle par lesquelles les partis doivent garantir que le travail bénévole est fait sans compensation ni contrepartie. Dorénavant, les représentants officiels, les délégués, les agents officiels et les adjoints doivent suivre une formation sur les règles de financement préparée par le DGEQ dans un délai prescrit. Au nom de l'imputabilité, les rapports financiers et les rapports des dépenses doivent être signés par le chef du parti, le candidat, le député ou, le cas échéant, le plus haut responsable désigné par l'instance autorisée de parti et accompagnés d'une déclaration concernant les règles relatives au financement et aux dépenses électorales. La loi prévoit une infraction pénale pour un électeur qui fait une fausse déclaration au sujet d'un prêt ou d'un cautionnement et confère à cette infraction le caractère de manoeuvre électorale frauduleuse. Dans le cadre de cette législation, les mesures de harcèlement des donateurs se sont accrues, parfois même avec des visites à leur domicile, ce qui est très intimidant pour les personnes ordinaires qui veulent participer aux affaires politiques. La Commission Charbonneau avait même recommandé que le donateur doive indiquer sur sa fiche de contribution le nom de son employeur, une mesure des plus intimidantes. Le gouvernement avait incorporé cette mesure dans son projet de loi, puis l'avait retirée face à l'opposition des électeurs. Ce sont des mesures de police qui n'ont rien à voir avec l'engagement des électeurs dans la politique, selon leur conscience, pour résoudre les problèmes de la société en faveur du peuple.

Faire des partis politiques des appendices de l'État ne résout pas le problème de la corruption qui se produit aux plus hautes instances, où les intérêts mondiaux privés usurpent le pouvoir d'État et les gouvernements. L'élite dirigeante corrompt tous les organes du pouvoir de l'État et les institutions gouvernementales, de sorte qu'il ne reste que les pouvoirs de police. Ce n'est que la lutte des travailleurs et du peuple pour le renouveau démocratique des institutions en investissant le peuple du pouvoir de décider, qui peut éliminer la corruption.


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 8 - 2 mars 2019

Lien de l'article:
Le prétexte pour faire des partis politiques des appendices de l'État - Geneviève Royer


    

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