La légitimité et les droits humains


Rassemblement pour la paix à Managua le 5 mai 2018. Sur la pancarte : « Pour la paix et le dialogue. Tous avec Daniel [Ortega]. »

Le meurtre de Miguel Ramos le 3 juillet 2018 met en lumière plusieurs aspects de la crise actuelle qui sévit au Nicaragua. Des forces se confrontent et revendiquent la légitimité touchant à des questions fondamentales de droits politiques et civils et de droits sociaux et économiques. En 1978 et 1979, un adolescent, Miguel, membre de la formation guérilla Front du Nord de Carlos Fonseca, luttait pour l'indépendance souveraine du Nicaragua. Le 3 juillet, il est mort pour cette même cause, abattu par des sympathisants du coup en cours de la droite appuyée par les États-Unis contre le gouvernement sandiniste du président Daniel Ortega. Miguel faisait partie d'un groupe de civils qui aidaient les autorités à démanteler un barrage routier mis en place par l'opposition à La Trinidad sur l'autoroute Panamerican à environ 20 km au sud d'Esteli. Le 3 juillet, Carlos Ascensio, l'ambassadeur du Salvador, a publié une lettre au nom de tous les ambassadeurs d'Amérique centrale au Nicaragua appelant à lever de tels barrages routiers à Jinotepe. Ce qu'il soulève corrobore d'un point de vue indépendant l'intimidation et l'extorsion violentes perpétrées par les gangs d'opposition qui dressent ces barrages depuis deux mois, étranglant l'économie du Nicaragua et violant les droits fondamentaux du peuple.

Ascensio dénonce la détention actuelle de 400 chauffeurs de camion et la saisie de leurs véhicules près de la ville de Jinotepe depuis plus d'un mois. Les chauffeurs, qui proviennent des quatre coins de l'Amérique centrale, ont été menacés et leurs véhicules endommagés. Les activistes de l'opposition politique qui contrôlent ces barrages refusent de libérer les chauffeurs et leurs véhicules parce qu'ils seraient « notre bouclier et notre atout pour remporter nos revendications dans ce dialogue ».

Un épicentre de meurtres

Ce n'est là qu'une des innombrables et graves violations des droits humains perpétrées par les forces de l'opposition de droite, ceux-là mêmes qui tentent d'instiguer un coup d'État au Nicaragua. Depuis deux mois, les barrages routiers mis en place par les paramilitaires et les hommes de main de l'opposition sont le centre de meurtres, de tortures, d'enlèvements, d'intimidation, d'extorsion et de criminalité. Les sympathisants du coup font fi de la réalité et accusent le gouvernement de la violence qui en résulte. Selon leur vision tordue des faits, des citoyens ordinaires qui s'organisent pour défendre leurs droits contre les bandes armées et violentes de l'opposition se métamorphosent en « paramilitaires sandinistes ».

Par exemple, l'incident dans lequel Miguel Ramos a été tué a été présenté par l'opposition comme une attaque paramilitaire du gouvernement contre des manifestants pacifiques. Ainsi, la mort de Miguel sera comptabilisée au nombre des victimes dans les rangs de l'opposition, bien que ce soient les militants de l'opposition qui sont responsables de sa mort. De nombreuses preuves audiovisuelles et autres exposent catégoriquement les nombreuses supercheries des organisations des droits humains de l'opposition financées par les États-Unis. La première liste de 55 personnes tuées, présentée de façon dramatique le premier jour du Dialogue national, a été totalement démentie. Il n'y a jamais eu de « massacre d'étudiants ».

Une violence sadique

D'autres preuves exposent la manipulation par les médias et les ONG des manifestations de l'opposition ou de la mort de femmes au cours de la crise. De nombreuses vidéos montrent la violence sadique d'activistes de l'opposition. Plusieurs journalistes comme Alex Anfruns ont expliqué le modus operandi systématique de déformation et de manipulation par les médias des attaques et des abus de l'opposition que les médias et les ONG de l'opposition présentent comme des violations des droits humains perpétrées par le gouvernement. Aucun média monopolisé occidental et seulement une poignée de médias alternatifs ont publié ce matériel ou toute autre version pour contredire les faux témoignages flagrants d'Amnistie internationale et de la Commission interaméricaine pour les droits de l'homme (CIPDH).

Comme elles l'ont fait pour le Venezuela, ces organisations n'ont pas pris le temps d'enquêter avec impartialité aucun des incidents dont ils font état et ne font que recycler la version des faits préparée pour elles par les ONG locales et médias financés par les États-Unis et rejeter du revers de la main les preuves présentées par les autorités du Nicaragua. Le directeur de la CIPDH, Paulo Abrao, a perdu toute crédibilité en tant qu'arbitre indépendant au cours d'une visite au Nicaragua en mai dernier lorsqu'il a annoncé publiquement son appui à l'opposition. Le processus d'enquête auquel devait participer un groupe d'experts de la CIPDH n'avait même pas débuté lorsque le 22 juin celle-ci a présenté son rapport final à la Commission permanente de l'Organisation des États américains (OÉA).

Un parti pris politique flagrant

Sans doute comme prix à payer pour éviter - du moins temporairement - un assaut économique et diplomatique de l'ampleur de celui contre Cuba et le Venezuela, le gouvernement du Nicaragua a accepté ces grossières irrégularités méthodologiques et le parti pris politique flagrant de l'OÉA et de sa filiale, la CIPDH. De son côté, la Commission pour la Vérité, la Justice et la Paix nommée par l'Assemblée nationale a cherché activement à avoir un échange d'information avec les organisations des droits humains de l'opposition. Comme l'a expliqué un des membres de la Commission, Cairo Amador : « Il s'agit pour tout le monde de fournir leurs données et leurs versions pour que nous puissions ultimement, tout le monde ensemble, contribuer à trouver la vérité. »

Mais comme l'a fait valoir le maire d'Esteli, Francisco Valenzuela, les conséquences de la tentative de coup d'État sont beaucoup plus vastes que la violation de droits civils : « Les dommages peuvent définitivement être classés en ordre d'importance. Premièrement, il y a la souffrance et les victimes que nous pleurons tous. Deuxièmement, il y a tout ce qui touche à l'économie et aux libertés du peuple, les barrages routiers qui empêchent la liberté de mouvement et qui ont nui à l'emploi. L'impossibilité d'expédier des biens et des produits pour l'exportation a provoqué d'énormes pertes financières. La plupart des entreprises au Nicaragua sont petites ou moyennes et elles ont été très gravement touchées. Un grand nombre d'entre elles ont fermé leurs portes. » Le ministre de l'Économie, Ivan Acosta, affirme : « Les prévisions de croissance pour l'économie étaient de 4,5 % à 5 %, mais nous pensons maintenant que l'économie a cessé de croître. Quelque 200 000 emplois ont été perdus, ce qui a des conséquences pour la sécurité sociale, le commerce, la demande domestique et l'activité productive réelle. »

Des pertes importantes

Les autorités municipales du Nicaragua signalent des pertes de véhicules, de machinerie et d'équipement de plus de 10 millions de dollars US et d'édifices et d'infrastructures de plus de 112 millions de dollars US. L'institut de formation technique du pays a subi des pertes de 80 millions de dollars US. Le ministère de l'Éducation affirme que plus de 60 écoles ont été attaquées et endommagées. Selon un rapport préliminaire du ministère de la Santé du Nicaragua en juin, 55 ambulances ont été détruites ou endommagées ainsi que des hôpitaux et des centres médicaux, suite à des attaques menées par l'opposition. Selon le ministère de l'Infrastructure et du Transport, il y a eu des pertes importantes, par exemple lorsque, lors d'un incident particulier, des activistes de l'opposition ont attaqué une usine de Sebaco et détruit l'équipement, causant des dommages d'une valeur de 1,5 million de dollars US.

« Nous voulons la paix, pas la violence ! »

On ne trouve aucun signe de ce niveau extraordinaire de violence et de destruction dans les rapports d'Amnistie internationale ni de la CIPDH, ni de la violation des droits fondamentaux d'employés du gouvernement et de la population locale. Ni ces organisations ni les médias occidentaux n'ont rendu public le rôle de ces criminels financés pour diriger les barrages routiers et pour mener des attaques. Le 30 juin, la police du Nicaragua a arrêté le dirigeant du M-13 salvadorien Oscar Rivas Carillo, qui a confirmé que lui et d'autres criminels étaient payés pour faire des barrages routiers, commettre des meurtres, incendier des édifices publics et attaquer des cibles économiques. Rivas et d'autres criminels ont travaillé avec des activistes de l'opposition appuyés par des intérêts d'entreprises de droite, des ONG financées par les États-Unis, des partis politiques de la droite et l'Église catholique.

De toute évidence, Amnistie internationale et la CIPDH ont délibérément camouflé la réalité et trompé l'opinion publique, se servant sans vergogne de leur image de défenseurs des droits humains, comme elles l'ont fait au Venezuela et à Cuba. Malgré tout, en dépit de la violence extrême et de la malhonnêteté flagrante de ses apologistes, le coup perpétré par l'opposition de droite appuyée par les États-Unis pour faire tomber le président Daniel Ortega est un échec. Les gens au Nicaragua appuient massivement les efforts pour retourner à la normale et trouver une solution politique à la crise. Les autorités du Nicaragua vont laisser la CIPDH jouer sa comédie pendant quelques mois encore avant que le cirque de l'OÉA ne rebrousse éventuellement chemin. Les dirigeants défaits de l'opposition espéraient pouvoir imposer leur coup, mais leur échec est dû à leur manque d'appui populaire. Maintenant, ils doivent accepter que le gouvernement sandiniste est prêt à poursuivre son trajet en tant que pouvoir souverain au Nicaragua. La mort de Miguel Ramos n'aura pas été en vain.

(Tortilla con Sal, le 4 juillet 2018. Traduit de l'anglais par LML)


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 1 - 19 janvier 2019

Lien de l'article:
La légitimité et les droits humains - Stephen Selton


    

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