Le Marxiste-Léniniste

Numéro 40 - 7 octobre 2017

Hommage à Ernesto Che Guevara
à l'occasion du 50e anniversaire
de son assassinat

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(A. Korda, 1960)

Chant à Fidel

Partons,
ardent prophète de l'aurore,
par les sentiers cachés et abandonnés,
libérer le vert crocodile que tu aimes tant.

Et si le fer vient interrompre notre voyage,
nous demandons un suaire de larmes cubaines
pour couvrir les os des guérilleros
emmenés par le courant de l'histoire américaine.
Rien de plus.

 - Ernesto Che Guevara
au départ du yacht
Granma vers Cuba en 1956

Hommage à Ernesto Che Guevara à l'occasion du 50e anniversaire
de son assassinat


Souvenirs
Che le journaliste - Gabriel Molina
Le Che en 1959 - Gabriel Molina
L'industrie du nickel : une audace et une passion irrésistibles
- Germán Veloz Placencia

Auprès du Che pendant la crise d'Octobre - Ronald Suárez Rivas
Rencontres avec Ahmed Ben Bella

Événements

8 octobre: Hommage à Che Guevara

Reportage photo
La vie de Che Guevara

Supplément

Les adieux 



Hommage à Ernesto Che Guevara à l'occasion du 50e anniversaire de son assassinat

Aujourd'hui, nous rendons un profond hommage à Ernesto Che Guevara, le combattant révolutionnaire indomptable et l'internationaliste prolétarien qui a inspiré et continue d'inspirer des millions de personnes dans le monde.

Originaire d'Argentine, ce médecin qui n'avait d'autre souhait que d'aider à mettre fin aux souffrances des peuples d'Amérique latine et du monde s'est joint sans hésiter au camarade Fidel et aux révolutionnaires cubains dans la Sierra Maestra dans la lutte pour libérer Cuba. Il s'est mérité le titre de Guerrier héroïque pour ses exploits, qui furent une contribution décisive à la défaite de la dictature cruelle de Batista en 1959 et au triomphe subséquent de la révolution. Le Che s'est par la suite consacré à l'établissement de la base économique qui allait garantir le bien-être du peuple et a joué un rôle central dans l'alphabétisation de tous les Cubains et à l'établissement de moyens de communication viables. Son nom est associé à la promotion du travail volontaire comme moyen de transformer la conscience des êtres humains afin que leur société assume toujours ses responsabilités sociales. Il a été un bel exemple de la personne humaine moderne, dont chaque action est guidée par les principes. Ses actions respiraient l'amour social et le souci pour l'être humain.

Leader exceptionnel, le Che mobilisait le peuple pour l'accomplissement des tâches nécessaires. Lorsque les États-Unis se sont engagés dans la subversion économique et ont lancé des attaques terroristes contre la révolution naissante, le Che n'a pas hésité et s'est joint aux rangs des combattants révolutionnaires pour mobiliser le peuple dans la riposte. Sa contribution à la lutte pour engager Cuba dans la voie socialiste et protéger la révolution a laissé une empreinte indélébile sur ce que Cuba représente aujourd'hui.

L'internationalisme du Che et l'internationalisme de Cuba ne font qu'un. Les deux reposent sur l'abnégation et sont exempts de l'arrogance et des sentiments étroits qui placent l'intérêt personnel en premier. Che Guevara était entièrement imprégné du désir d'engager les peuples du monde entier dans la lutte pour la liberté, portant haut levée la bannière de la lutte anti-impérialiste et anticoloniale en Asie, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Ernesto Che Guevara est mort héroïquement sur les champs de bataille de la Bolivie il y a cinquante ans et l'humanité pleure sa perte comme si c'était hier seulement qu'il avait rejoint les colonnes de martyrs communistes et révolutionnaires. Aujourd'hui, les peuples du Québec et du Canada, unis à l'héroïque peuple cubain et aux peuples révolutionnaires du monde, commémorent le cinquantième anniversaire de son assassinat par la méprisable CIA américaine en renouvelant leur engagement à défendre la Révolution cubaine dont Fidel, le Che, Raúl, Camilo, Vilma, Heida, Tania et leurs camarades ont été les architectes et tous les combattants guérilleros révolutionnaires cubains et les peuples qui ne font qu'un avec eux. Nous nous engageons une fois de plus à défendre le droit de toutes les nations à l'autodétermination dont fait intégralement partie, comme nous l'a enseigné le Che, le droit crucial de se défendre.

Venceremos ! Hasta la Victoria Siempre !

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Souvenirs

Che le journaliste

Nous commémorons ces jours-ci le cinquantième anniversaire de l'assassinat du commandant Ernesto Che Guevara après qu'il ait été blessé au combat en Bolivie en octobre 1967.

Nous nous souvenons de la trace profonde mais encore peu connue qu'il a laissée dans le journalisme de notre Amérique, un aspect de sa vie qui est éclipsé par l'ensemble de son oeuvre que nous devons célébrer dans la gloire et non en pleurant, comme le disait Fidel Castro.

Le Che était journaliste, comme Fidel, comme José Martí, avec pour mission non seulement de répandre l'amour des idées révolutionnaires, mais aussi de libérer l'excellence qui brûlait en eux, leur talent de communicateur.

Très peu de gens savent que non seulement le jeune Guevara a-t-il été correspondant pour l'Agencia Latina (AL) au Mexique pour les Jeux panaméricains du 12 au 26 mars 1955, presque deux ans avant l'expédition du Granma, mais que c'est lui qui a rédigé les articles et pris les photos publiés et crédités à l'AL, comme Severino Rosell l'a raconté au commandant William Gálvez.

Le guajiro Rosell et Fernando Margolles développaient et imprimaient les photos que le Che apportait afin de leur permettre de gagner quelque chose à l'agence argentine. Le Che était déjà solidement lié à Fidel et à Raúl Castro et aux révolutionnaires de l'île.

En 1957, le Che et Fidel créèrent Radio Rebelde et furent à l'origine de ses initiatives importantes. Sans eux, le monde des années 1950 n'aurait pratiquement rien su de ce qui se passait dans la Sierra Maestra. Tous deux consacrèrent un temps et un talent considérables à la transmission patiente de l'information par leurs émissions au sujet de la dizaine de guérilleros qui était parvenue à se regrouper à Cinco Palmas en 1956 et qui faisait des progrès continuels après ce que le Che décrit à juste titre comme un naufrage plutôt qu'un débarquement.

Radio Rebelde

En plus d'être un des meilleurs guérilleros dans les montagnes de la Sierra Maestra, le Che était le chroniqueur de la guérilla et, qui plus est, avec Fidel, l'architecte de la station Radio Rebelde qui transmettait au quotidien les nouvelles sur les actions de la guérilla au peuple cubain et aux peuples d'Amérique latine.

Ils ont fait entrer cette lutte dans le coeur de tous, « toujours conscients du principe fondamental qu'à plus long terme la vérité et les faits finissent par favoriser les peuples ».[1]

Par la voix de Violeta Casals, Jorge Enrique Mendoza, Orestes Valera et Ricardo Martínez, les nouvelles de la guérilla diffusées par Radio Rebelde devenaient à chaque jour la source d'information la plus importante et la plus fiable. La station de radio tourna en ridicule le dictateur Fulgencio Batista qui encore le 31 décembre 1958 affirmait à l'agence UPI [United Press International] qu'il avait complètement éliminé l'armée rebelle.

C'est pour cette raison que les révolutionnaires à Madrid ont décidé ce dernier soir de 1958 de retourner au combat pour soutenir par tous les moyens possibles ceux qui combattaient courageusement à Santa Clara avec le Che et Camilo. À 6 heures le matin du 1er janvier, ils avaient peine à croire que Batista avait été renversé.

Après la victoire, celui qui a joué un rôle décisif dans l'invasion avec Camilo Cienfuegos, comme Antonio Maceo en 1896, continua d'écrire pour plusieurs journaux, notamment Verde Olivo et Combate.

Son journalisme et son travail politique inlassables ne s'arrêtent pas là. Pour se faire une idée de l'ampleur de son oeuvre informationnelle, il suffit de jeter un regard sur les sept volumes d'environ 500 pages chacun de la collection El Che en la Revolutión Cubana compilée par son collaborateur Orlando Borrego Díaz.


Le Che rend visite à l'équipe du Verde Olivo, la revue hebdomadaire des Forces armées révolutionnaires de Cuba, le 3 juillet 1960. Il était un contributeur régulier de cette revue et de plusieurs autres publications.

Une nouvelle agence d'information latino-américaine

Le Che et Fidel furent les véritables fondateurs de Prensa Latina, une agence d'information latino-américaine ayant pour mission de briser le monopole détenu par les fameuses « p » (AP, UPI) en Amérique latine à l'époque.

« À la mi-janvier (1959), le Che a dit à sa mère qu'il attendait l'arrivée de Jorge Masetti, à qui ils allaient confier la tâche de créer une agence de nouvelles internationale. »[2]

Peu de gens savent que les fonds qui ont servi à créer l'agence provenaient du Mouvement du 26 Juillet. Et c'est le Che qui les livra durant ces débuts difficiles.

L'héroïque guérilla se rappelle peut-être à quel point il a souffert pour pouvoir toucher son salaire en tant que correspondant de l'agence argentine dans ces ides de mars 1959. Avec beaucoup d'effort et d'imagination, Prensa Latina a réussi à se maintenir depuis.[3]

Notes

1. El Che en la Revolutión Cubana, Volume VII, Orlando Borrego Editorial José Marti, 2017, p. 89

2. Celia, Che's Mother, Julia Constela, Editorial Sudamericana, Buenos Aires, 2004, p. 187

3. Tiré de Semanario Orbe

Gabriel Molina Franchossi a fondé l'Union des journalistes et écrivains de Cuba (UPEC) et a également été un des fondateurs et rédacteurs en chef des journaux Granma, Combate et Opina . Il a par ailleurs fondé l'Agence de presse latino-américaine à l'initiative de Fidel Castro et d'Ernesto Che Guevara avec pour mission spécifique de répandre la vérité en Amérique latine. Gabriel Molina a été vice-président de l'Institut cubain de la radio et télévision (ICRT), responsable à ce titre de l'information nationale, internationale et politique, après quoi il a occupé la fonction de directeur de Granma International pendant 29 ans, un hebdomadaire publié dans plusieurs langues. En 2000, il a reçu le Prix national d'excellence pour l'ensemble de ses réalisations.

(Prensa Latina, 14 mai 2017. Traduction : LML. Photos : Office des affaires historiques de Cuba)

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Le Che en 1959


Le Che lors d'une manifestation de masse devant l'ancien palais présidentiel à La Havane,
le 26 octobre 1959, pour dénoncer la provocation contre-révolutionnaire des États-Unis

À l'occasion du 80e anniversaire de la naissance d'Ernesto Che Guevara, le 14 juin 2008, le journaliste Gabriel Molina a réalisé une entrevue avec Héctor Rodríguez Llompart sur son expérience avec le guerrier héroïque qui, en 1959, est devenu l'un des dirigeants principaux du processus révolutionnaire à cause de sa détermination, de sa polyvalence et de ses capacités établies et à cause de la dynamique des événements bouleversants résultant de l'agression contre Cuba. Héctor Rodríguez Llompart rappelle la stratégie de Fidel Castro pour lutter contre le blocus et le rôle joué par le Che, qui aurait eu 80 ans le 14 juin 2008.

***

La Révolution cubaine a toujours été forcée de se défendre contre l'hostilité du gouvernement américain, qui remonte aussi loin que les jours de la Sierra Maestra.

Dès mars 1959, à peine trois mois après le triomphe de la lutte armée, le vice-président à l'époque, Richard Nixon, après une réunion qu'il avait eue avec Fidel à Washington, a convaincu le président Eisenhower que des mesures devaient être prises pour le renverser.

La même année, les États-Unis ont persuadé le gouvernement britannique d'annuler la vente d'avions de chasse Hunter à Cuba. Pour les autorités américaines, ces appareils auraient posé un problème pour l'invasion qu'elles préparaient et qui a eu lieu en avril 1961 à la baie des Cochons. Dans le même but, le navire français La Coubre a été saboté en mars 1960 ; l'explosion a eu lieu alors qu'une cargaison importante de munitions était déchargée sur les quais de La Havane. Des dizaines de Cubains et de Français ont été tués dans cet acte terroriste, attribué à la CIA à Cuba. En même temps, Washington a empêché un consortium de banques d'Europe occidentale d'approuver un prêt de 100 millions $ à Cuba.

À cette époque, le gouvernement révolutionnaire a adopté la tactique de représailles contre les coups économiques. Le 6 juin, lorsque les compagnies pétrolières Standard Oil, Texaco et Royal Dutch Shell ont refusé, sur les ordres du gouvernement américain, de raffiner le pétrole que Cuba avait acheté de l'Union soviétique, le gouvernement cubain n'a pas hésité à prendre le contrôle des raffineries moins d'un mois plus tard. La riposte du gouvernement Eisenhower a été d'encourager les exportateurs de pétrole et les compagnies maritimes à boycotter l'île.

Cuba a réagi en nationalisant les raffineries le 6 août.

Che Guevara a participé à tous ces événements et aux décisions qui s'imposaient, non seulement en tant que combattant et politicien, mais également en tant qu'économiste, ou plutôt en tant que stratège de l'économie avec Fidel, un rôle pour lequel il est moins connu.

Dès sa première responsabilité civile officielle en tant que directeur des industries de l'Institut de la réforme agraire, et également en tant que président de la Banque nationale en novembre 1960, et ministre des Industries à compter de 1962, il était de son devoir d'agir principalement dans le domaine de l'économie, pour mettre en oeuvre la ligne de diversification que la révolution avait tracée à la fois pour la production et le commerce international. Un témoin exceptionnel du parcours du commandant Guevara est Héctor Rodríguez Llompart, qui a rencontré le Che à la forteresse de La Cabaña, dont le commandant Guevara était le chef militaire, au début du 1959. Llompart était le commissaire municipal de Regla et lui a rendu visite avec le capitaine Miguel Angel Duque de Estrada, qui était responsable des tribunaux révolutionnaires. Voici quelques-unes de ses précieuses mémoires et évaluations.


Fidel et le Che aux funérailles de ceux qui ont été tués lors de l'attaque terroriste où le navire français La Coubre a explosé en mars 1960 alors qu'il déchargeait sa cargaison dans
le port de La Havane

Que vous souvenez-vous de ces premiers jours de l'agression ?

Les agressions de tous types du gouvernement américain contre Cuba ont commencé très tôt.

À l'agression armée contre les centres de production de l'île, les attaques terroristes et les menaces armées, la révolution a répondu par l'amélioration de l'organisation de ses appareils militaires et de sécurité, l'acquisition d'armes et la création des milices nationales révolutionnaires, des comités de défense de la révolution, etc.

Le soutien et la détermination de notre peuple à se battre pour la victoire avec le slogan « la patrie ou la mort » ont rendu les tranchées politiques imprenables.

Les plans d'agression économique étaient plus sournois, mais tout aussi dangereux

Comment le Che a-t-il participé à la lutte contre ces plans ?

La dépendance quasi totale au marché américain et nos liens économiques de 50 ans avec l'ancienne puissance coloniale ont rendu la situation de notre économie ouverte encore plus compliquée.

Il était essentiel de trouver d'autres marchés pour la vente de nos produits, ainsi que pour les marchandises importées.

À la fin de 1959, une exposition soviétique devait avoir lieu au Mexique et la délégation soviétique était dirigée par le vice-premier ministre Anastas Mikoyan.

À cette époque, j'étais un fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères, et c'est le commandant Guevara qui m'a informé que je devais partir pour le Mexique pour inviter officiellement Mikoyan à tenir l'exposition soviétique à La Havane et à présider personnellement, si possible, la mission soviétique.

À titre d'anecdote personnelle, je me souviens que les journaux ont annoncé la visite du Che ; le jour où je suis arrivé au Mexique, il y avait beaucoup de journalistes et de photographes à l'aéroport. Le journal El Universal a rapporté la nouvelle ce jour-là sous le titre : « Ils s'attendaient à un barbu, et c'est un homme rasé qui est arrivé. »

Après un certain nombre de revers liés à un congrès ecclésiastique qui avait lieu à Cuba à l'époque, la visite a été repoussée, et finalement a eu lieu en février 1960.

La délégation cubaine, dirigée par le commandant Guevara, et la délégation soviétique ont tenu un certain nombre de pourparlers sur la nécessité d'exporter notre sucre sur le marché de l'URSS, face à la suspension imminente des achats par les États-Unis.

Un accord commercial et un autre sur le crédit ont finalement été signés le 13 février 1960 par le commandant en chef [Fidel Castro] et Anastas Mikoyan.

En même temps, l'URSS a promis d'acheter 5 millions de tonnes de sucre cubain non raffiné sur cinq ans et nous a accordé un crédit de 100 millions $, remboursable sur 12 ans à 2,5 % d'intérêt.

À la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, le 25 mars 1964, au nom de notre gouvernement, le commandant Guevara a résumé cette première période comme suit : « Cette agression s'est ensuite caractérisée par des mesures visant à paralyser l'économie cubaine. L'idée, au milieu des 1960, était de priver Cuba du carburant dont elle avait besoin pour le fonctionnement de ses industries, les transports et les centrales électriques. Sous la pression du département d'État, les compagnies pétrolières indépendantes américaines ont refusé de vendre du pétrole à Cuba ou de mettre des pétroliers à sa disposition pour son transport. Peu de temps après, une tentative a été faite de priver l'île des devises fortes nécessaires au commerce extérieur. Le 6 juillet 1960, le président Eisenhower a réduit le quota de sucre de Cuba aux États-Unis à 700 000 tonnes, puis les États-Unis ont annulé totalement ce quota le 31 mars 1961, quelques jours après la création de l'Alliance pour le progrès et juste avant l'invasion de la baie des Cochons. Il a tenté de paralyser l'industrie cubaine en la privant de matières premières et de pièces détachées pour ses machines et, à cette fin, le 19 octobre 1960, le département du Commerce américain a publié une résolution interdisant l'expédition de nombreux produits sur notre île. Cette interdiction de commerce avec Cuba s'est intensifiée jusqu'au 3 février 1962, lorsque le président Kennedy a déclaré un embargo complet sur le commerce américain avec Cuba. »

Toutes leurs attaques ayant échoué, les États-Unis ont mis en place un blocus économique contre notre pays visant à empêcher d'autres pays d'avoir des relations commerciales avec nous. Tout d'abord, le 24 janvier 1962, le département du Trésor des États-Unis a annoncé qu'il interdisait l'entrée aux États-Unis de tout produit fabriqué, entièrement ou partiellement, avec des produits cubains, même s'ils étaient fabriqués dans un autre pays. Le 6 février 1963, à une autre étape qui a entraîné la mise en place d'un blocus économique complet, la Maison-Blanche a publié un communiqué de presse annonçant que les marchandises achetées avec l'argent du gouvernement américain ne pouvaient plus être embarquées sur des navires battant pavillon étranger dont le pays avait des relations commerciales avec Cuba depuis le 1er janvier de cette année-là. C'est ainsi qu'a commencé la liste noire, qui est maintenant appliquée à plus de 150 navires de pays qui ne se sont pas pliés au blocus illégal des États-Unis. Et dans une autre étape pour entraver le commerce avec Cuba, le 8 juillet 1963, le département du Trésor des États-Unis a gelé tous les actifs cubains sur le territoire américain et interdit tous les transferts d'argent à destination et en provenance de Cuba, ainsi que toute autre transaction en dollars par l'intermédiaire de pays tiers.

Quels étaient les objectifs de ce voyage ?

La décision de nous priver de carburant, de suspendre les achats de sucre cubain et d'autres formes d'agression économique était déjà mise en oeuvre en octobre 1960, lorsque, comme secrétaire adjoint du ministre des Relations extérieures, j'ai reçu un appel téléphonique de Jaime Barrios,[1] qui travaillait avec le Che, m'annonçant que j'allais me joindre dans les jours qui viennent à une délégation dirigée par le Che qui visiterait tous les pays socialistes. À ce moment-là, le Che nous parlait déjà beaucoup de la nécessité de bâtir des relations avec ces pays. J'en ai appris davantage plus tard à propos de cette mission, de son objectif premier de diversifier notre commerce en plaçant la plus grande partie de notre production sucrière sur ces marchés et en remplaçant la plus grande partie de nos importations par des produits de ces pays.


Premier voyage du Che en Union soviétique (1960)

Une fois en URSS, nous avons participé à une réunion d'urgence à Moscou à laquelle participaient presque tous les ministres des Affaires étrangères des pays socialistes. Pendant la réunion, le commandant Guevara a expliqué la situation sérieuse à laquelle la Révolution cubaine faisait face à cause de l'agression impérialiste et il a mis l'accent sur le besoin de placer quatre millions de tonnes de sucre sur ces marchés à un prix de quatre cents la livre. Ce prix était plus élevé que le prix à la Bourse de New York à ce moment-là.

Il a dit également que Cuba se devait d'acheter ses produits essentiels de ces pays.

Rappelez-vous qu'à ce moment-là, Cuba n'avait pas encore de ministère du Commerce extérieur et que nous ne possédions que peu d'information, et encore moins d'expérience, dans ce domaine. Tout ce que nous avions c'étaient de solides arguments politiques et une lettre signée par notre premier ministre, le commandant Fidel Castro, qui faisait état de la requête mentionnée plus haut et dont le porteur était le commandant Guevara.

Quels accords ont été conclus ?

Suite à ces négociations, l'URSS a promis d'acheter 2,7 millions de tonnes de sucre, la Chine, un million de tonnes et les autres pays socialistes 300 000.

En plus, la Corée, le Vietnam et la Mongolie en ont acheté des quantités symboliques en signe d'appui et de solidarité avec les pays socialistes.

À Moscou, on a aussi signé un accord multilatéral sur les paiements.

Avec comme objectif de conclure des accords de commerce qui comprenaient des listes de produits devant être achetés et vendus, des accords sur les paiements et des accords sur les crédits, la délégation dirigée par le Che a aussi visité la Tchécoslovaquie, la Chine, la Corée et la République fédérale d'Allemagne.

Pendant sa visite en Chine, et pour sauver du temps, le Che a décidé de visiter la République démocratique de Corée et de me confier la direction d'un petit groupe qui se rendrait au Vietnam et en Mongolie, deux pays avec lesquels nous avions aussi établi des relations diplomatiques à l'époque.

À la fin de son séjour à Berlin, le Che avait dû retourner à Cuba et nous a informés qu'il allait s'arrêter brièvement à Budapest et que la délégation que je dirigeais allait alors se rendre en Pologne, en Hongrie, en Roumanie, en Bulgarie et en Albanie.

Est-ce qu'on parlait déjà du besoin de changer la structure commerciale de Cuba ?

Après son retour à Cuba, le commandant Guevara est passé à la télévision le 6 janvier 1961 pour annoncer la signature des accords avec les pays socialistes. Il a déclaré :

« Ça été une tâche extrêmement difficile, une tâche difficile, parce que nous avons dû changer la structure de notre commerce en quelques mois seulement. De la fin de 1959, soit un an auparavant, Cuba est passée en 10 mois, soit en octobre lorsque le cycle a été complété, d'un pays ayant une structure entièrement coloniale, avec des systèmes de commerce domestique et extérieur entièrement dominés par les grandes compagnies d'importation dépendantes du capital monopoliste, à un pays dans lequel l'État exerce un monopole complet sur le commerce extérieur et un monopole sur une grande partie du commerce intérieur. »

Il a parlé aussi des difficultés additionnelles auxquelles nous faisions face parce que ces pays utilisaient le système métrique décimal alors que nous utilisions encore la méthode coloniale de peser les choses en livres et de les mesurer en verges et que nous avions des systèmes différents pour mesurer la pression ou un simple raccord de tuyau.

L'équipement électrique à Cuba utilisait 60 cycles alors que les pays socialistes utilisaient 50 cycles par seconde.

Bref, nous affrontions toutes sortes de difficultés mais nous étions déterminés à les surmonter et à en triompher face à ce dilemme qui nous était créé par l'agression impérialiste.

Ces expériences initiales ont donné lieu à des anecdotes intéressantes.

En Chine, par exemple, quand nous avons examiné la liste des produits devant être échangés, il y avait une différence de 3 millions $ à l'avantage de la Chine.

Avant de signer le protocole final, le premier ministre de l'époque, Chou En-lai, a dit au Che que la Chine ne devait pas avoir l'air d'importer plus de Cuba que ce qu'elle y exportait.

Il a donc été décidé d'établir un montant de 3 millions $ en exportation de produits d'arts et métiers parce qu'à ce moment-là nous ne pouvions penser à d'autres produits qui combleraient un besoin chez nous.

C'est de ce protocole dont faisaient partie les arts et métiers chinois que viennent toutes ces histoires qui ont circulé à La Havane sur les grandes quantités de cannes et de parapluies chinois qu'on trouvait dans nos magasins.

En fait, les Chinois nous ont envoyé du très bel artisanat qui, je suis certain, dépassait la valeur mentionnée plus haut.

J'avais toujours cru qu'eux comme nous n'appréciaient pas réellement ces produits merveilleux.

Au contraire, certains étrangers qui ont vécu à Cuba temporairement ont tiré profit de la situation et se sont enrichis par la vente illégale de ces trésors artistiques.

Une autre source d'anecdotes et de blagues a été les appareils de déneigement. Je pense qu'ils avaient réellement un rôle à jouer, parce que ces équipements ou des équipements semblables ont été achetés pour être mis à l'essai dans notre industrie minière.

Je n'oublierai jamais l'étonnement qui se lisait sur le visage du traducteur soviétique quand, lisant la liste des choses dont nous avions besoin, il est resté interdit quand il n'a pas vu une faute de frappe et a lu que nous avions besoin de milliers de « babines de singe » (bembas de mono) au lieu de « pompes manuelles » (bombas de mano).

Nous faisions des blagues entre nous au sujet de la décision du commandant Guevara d'acheter autant de viande en conserve que possible et toutes les machines-outils que nous pouvions trouver.

Nous avons réalisé, quelques mois plus tard, à quel point ces décisions étaient judicieuses lorsque, mobilisé à occuper des tranchées ou comme volontaire dans les plantations de canne à sucre, je me suis pris à trouver que la viande russe était un vrai régal après avoir tant grimacé en goûtant les premiers échantillons qu'ils nous avaient envoyés.

Nous avons éprouvé la même satisfaction quand nous avons réalisé que le problème créé par l'embargo sur les pièces de rechange pouvait être résolu par les machines-outils que nous avions achetées, alors qu'un camarade de la délégation avait d'abord dit qu'à la prochaine Fête des rois [le 6 janvier — LML], nous allions devoir convaincre les parents de donner en cadeau une machine-outil à chaque enfant.

Personnellement, je conserve un souvenir inoubliable de ces journées passées avec un homme aussi unique que le Che.

J'ai eu l'occasion de rencontrer des individus de premier plan comme Mao Tsé-Toung, Chou En-lai, Nikita Khrouchtchev, Walter Ulbricht, Pham Van Dong et d'autres dirigeants éminents du camp socialiste.

Mais, c'est avec une affection et une admiration spéciales que je me souviens de cette jeune femme agréable et dévouée qui nous a aidés comme traductrice en République démocratique d'Allemagne, Tamara Bunke Bider, et qui est passée à l'histoire plus tard sous le nom de Tania la guérillera.

Le 23 février, 1961, le ministère du Commerce extérieur a été créé et Alberta Mora nommée au poste de ministre.

Quels problèmes ces changements dans le commerce extérieur ont-ils créés et quel rôle le commandant Guevara a-t-il joué dans leur solution ?

Quelque temps après mon retour de voyage dans les pays socialistes, j'ai été nommé ministre adjoint au Commerce extérieur.

Pendant ces années d'organisation et de réadaptation de notre commerce extérieur, et même s'il avait de multiples responsabilités, le commandant Guevara a joué un rôle exceptionnel dans le soin apporté au ministère et dans sa conduite.

Pendant ces années, le Che a souvent parlé en public du commerce extérieur et parfois pour réfuter ceux qui, comme le [journal] Diario de la Marina, critiquaient avec malice les premiers accords avec l'Union soviétique. Il l'a fait lors d'un discours qu'il a prononcé à l'Université de La Havane le 2 mars 1960, et, quelques jours plus tard, le 20 mars, dans le cadre de la présentation inaugurale de l'émission de télévision « L'Université du peuple ». Il a parlé dans ces discours des principales difficultés auxquelles nous nous heurtions à ce moment-là. Il a dit ceci lors du discours qu'il a prononcé à un séminaire de planification en Algérie le 13 juillet 1963 :

« Notre commerce extérieur a changé complètement de partenaires. Alors qu'il se faisait à 75 % avec les États-Unis, il se fait maintenant à 75-80 % avec les pays socialistes. C'est un changement bénéfique pour nous dans chaque aspect, politique comme social, mais sur le front économique, il a fallu beaucoup de réorganisation.

Des centaines d'importateurs spécialisés avaient l'habitude de passer leurs commandes aux États-Unis par téléphone, et les produits arrivaient le lendemain par traversier, directement de Miami à La Havane. Il n'y avait rien à prévoir, rien à entreposer.

Tout cet appareil, débarrassé de ces techniciens, ennemis du gouvernement, a dû être établi dans ce qui a d'abord été la Banque de commerce extérieur de Cuba et plus tard le ministère du Commerce extérieur. Il a dû centraliser tous ces achats et les faire faire par des gens sans expérience, non plus immédiatement, non plus un jour d'avance par téléphone, mais deux mois d'avance, dans de longues discussions. En même temps, les matières premières portaient maintenant un nouveau nom. Plus encore : si vous allez dans une usine de ce pays aujourd'hui et voulez savoir quel type d'acier est utilisé pour une pièce de rechange spécifique, vous allez vous apercevoir qu'il y a un numéro dans le catalogue pour cette pièce, SKF-27 par exemple. Dans le catalogue de vente de cette compagnie, le SKF-27 correspond à une pièce spécifique ; comment allions-nous commander cette pièce dans les pays socialistes ? Nous avons dû procéder à des analyses de l'acier, fabriquer parfois une ou deux pièces en particulier. Une tâche presque impossible. Nous avons dû importer les machines ici à Cuba, où nous souffrions d'une pénurie de techniciens hautement qualifiés.

Ces problèmes étaient alors quotidiens à Cuba, et ils le sont toujours.

Était-il satisfait du dénouement de ces relations commerciales ?

Le Che a prévu et averti des difficultés et des obstacles qui, selon notre propre expérience des relations commerciales avec certains pays socialistes, ont mené ces derniers à adopter plus tard des méthodes capitalistes dans la conduite de leurs relations avec les pays sous-développés.

À cet égard, voici ce qu'il a dit lors du discours qu'il a prononcé à Alger le 24 février 1965 lors du Deuxième séminaire économique de solidarité afro-asiatique :

« Le socialisme ne peut exister sans que ne s'opère dans les consciences une transformation qui provoque une nouvelle attitude fraternelle à l'égard de l'humanité, aussi bien sur le plan individuel au sein de la société qui construit ou qui a construit le socialisme que, sur le plan mondial, vis-à-vis de tous les peuples qui souffrent de l'oppression impérialiste. »

Note

 1. Jaime Barrios, un Chilien, a été tué le 11 septembre 1973 au palais de la Moneda.

(Juin 2008. Traduction : LML)

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L'industrie du nickel : une audace et
une passion irrésistibles

Le commandant Ernesto Guevara avait un intérêt particulier pour le développement de l'industrie du nickel à Cuba et il y a consacré sa vision stratégique et ses talents organisationnels.


Che Guevara et Raúl Castro lors d'une tournée des mines à Moa

Le journaliste de Granma Germán Veloz Placencia a interviewé l'ingénieur Demetrio Presilla Lopez qui a joué un rôle clé dans la reprise de la production nationale du nickel. Voici le rapport de Veloz Placencia.

Demetrio Presilla Lopez évoque ce jour de décembre 1960 où le commandant Ernesto Che Guevara, alors responsable du Département de l'industrialisation de l'Institut national de la Réforme agraire (INRA), lui demanda de mettre en marche l'usine récemment construite à Moa par une compagnie nord-américaine, qui avait été abandonnée le 9 avril de cette même année, dans le cadre des mesures économiques adoptées par le gouvernement des États-Unis pour étouffer la Révolution cubaine.

Le Che parlait posément, mais son esprit bouillonnait face à la nécessité de relancer l'industrie, rappelait systématiquement Demetrio Presilla, Héros du travail de la République de Cuba, décédé à Moa en mars 2006.

Presilla se souvenait qu'au cours de la conversation, il avait ajouté quelques commentaires et des questions sur les difficultés qu'il y aurait pour placer le produit final sur le marché international, ce à quoi le Che avait répondu en lui demandant de se charger de mettre l'usine en marche. Quant à lui, il serait responsable des intrants pour la production et de la vente du nickel.

Une telle assurance convainquit Presilla que la tâche qu'on lui avait confiée n'avait pas de marche arrière. Le Che était convaincu de la possibilité de réussite de cette entreprise, à laquelle il consacra sa vision stratégique fine et une capacité d'organisation qui l'avaient déjà distingué durant la guérilla.

Infatigable et prévoyant

Le Che se montra également infatigable. Selon la chronologie élaborée par le journaliste Camilo Velasco, dans laquelle il décrit la relation du Che avec l'industrie du nickel, ce dernier se réunit aussi à La Havane, vers la mi-décembre, avec un groupe de 17 ingénieurs et techniciens qui avaient participé, avec des spécialistes étasuniens, à la mise au point et aux essais de l'usine inactive de Moa. Une installation contrôlée par l'INRA le 5 août de la même année, à laquelle on donna le nom de Commandant Pedro Sotto Alba.

En réalité, au cours de cette année, l'INRA fut très actif quant à la récupération du nickel. Le 19 août, il nationalisa officiellement la compagnie minière Cayo del Medio, qui exploitait les gisements de Cayo Guan et d'autres mines.

À cette décision vint s'ajouter, le 24 octobre la Résolution No 16 de l'Institut cubain des mines qui décréta la nationalisation de l'industrie du nickel de Nicaro, laquelle reçut immédiatement le nom de Commandant René Ramos Latour.

Le 6 janvier 1961, alors que se déroulait la traditionnelle Journée des Rois mages, le Che s'exprima à la télévision, où il annonça la signature d'accords avec des pays socialistes et l'engagement de l'Union soviétique de détacher des techniciens pour coopérer au lancement de l'usine de nickel.

Auparavant, en décembre 1960, une délégation de ce pays avait effectué une visite à Moa afin de connaître la technologie utilisée dans cette industrie.

Complètement immergé dans sa mission, à la fin du mois d'avril 1961, lors d'une conférence à l'Université populaire, le commandant Ernesto Guevara, alors ministre des Industries (il avait été nommé à ce poste le 2 février de cette année) souligna que le fer, le nickel et le cuivre étaient les produits de base de l'industrie minière cubaine, auxquels il fallait ajouter le cobalt et le chrome. Il déclara par ailleurs que l'une des plus grandes richesses potentielles étaient les latérites [roches rouges], qui se trouvaient au nord de l'Oriente cubain, dans les zones de Nicaro, Moa et jusqu'à Baracoa.

Quant à l'usine Commandant Pedro Sotto Alba, en signalant qu'elle serait probablement mise en marche dans une période proche, il affirma qu'elle devrait être considérée comme une réalisation du gouvernement révolutionnaire, puisqu'elle n'avait pas fonctionné auparavant.

En parcourant le cours de l'année 1961, notre admiration pour la capacité de travail du Che ne put que croître. En mai, à La Havane, il reçut une délégation conduite par le vice-ministre de l'Économie de l'Union soviétique, venu pour examiner la conclusion d'accords futurs pour l'achat du nickel cubain. En août, à la première rencontre nationale de production de cette branche qu'il dirigeait, le Che affirma que l'usine René Ramos Latour, à Nicaro, entreposait à ce moment 7 620 tonnes, ce qui représentait une légère augmentation par rapport à la même période de l'année précédente.

Puis, en octobre, il annonça la décision de construire, dans un avenir proche, dans la province d'Oriente, une aciérie qui utiliserait comme matière première le fer et le nickel de la région de Moa et Nicaro.

Les étapes suivantes furent tout aussi dynamiques et créatives. Il est logique de penser que les critères du Che furent retenus pour d'autres mesures essentielles adoptées par le gouvernement révolutionnaire, notamment la création, en juillet 1963, du Centre de coordination pour le Plan de développement du Nord de la province d'Oriente (Plan Nord), dont l'objectif fondamental était de stimuler l'industrie du nickel.

La présence du Che dans les usines du nickel

Les principaux leaders de la révolution avaient coutume d'être présents sur les lieux en transformation, pour se rendre compte des faits par eux-mêmes. Ainsi, le commandant Ernesto Che Guevara effectua des visites régulières, dont il faisait ensuite des rapports détaillés, sur les zones et les installations liées à la production de nickel.

Tout comme Camilo Velasco, la journaliste et historienne Maria Julia Guerra rapporte dans sa chronologie des visites du Che dans la province d'Holguin que celui-ci se rendit pour la première fois dans la localité de Nicaro, le 20 janvier 1961, pour visiter les installations de l'usine de nickel, où il eut un entretien avec les travailleurs.

Il visita également le village, où il s'entretint dans le parc avec les habitants sur la nécessité de travailler dur pour créer les richesses du pays.

Un an plus tard, il se rendit de nouveau à l'usine, où il revint à plusieurs reprises en 1963. Lors de l'une de ses visites, il participa à un Conseil de direction extraordinaire du conseil de l'entreprise Consolidada de Niquel.

À propos du premier échange du Che avec les ouvriers de l'usine René Ramos Latour, Manuel Galban Sopeña, alors très engagé dans la relance de la production de nickel, a raconté que le commandant était arrivé sans prévenir, à bord d'une jeep. « Il a observé les cours que je donnais à un groupe de collègues sur les procédés et le rapport sur la métallurgie ; il a posé plusieurs questions, puis il a pris congé en nous conseillant de continuer ainsi. »

Sa première visite dans la région de Moa eut lieu le 26 mai 1961. Il était accompagné par le commandant Raúl Castro Ruz, Aleida March et Vilma Espin. Ils se rendirent à l'usine Pedro Sotto Alba et à la mine Cayo Guan. En constatant la façon dont vivaient les travailleurs de la mine de chrome, le Che déclara qu'il fallait améliorer les conditions de vie en construisant des logements décents.

En janvier 1963, en plus de Nicaro, le Che se rendit à Moa. Il eut des réunions avec les dirigeants des organisations révolutionnaires des deux villages et les cadres administratifs et syndicaux des usines René Ramos Latour et Pedro Sotto Alba. Il refit une visite à Punta Gorda et à la mine Cayo Guan.

Il revint à Moa en septembre 1964 pour avoir des échanges avec les mineurs de l'usine de chrome et vérifier le bon fonctionnement de l'usine Commandant Pedro Sotto Alba. Là, il annonça à Juan Rodriguez Guerrero, secrétaire général du Bureau syndical, que lors de son prochain voyage il se réunirait avec les travailleurs.

Il respecta son engagement à la fin de novembre 1964, ce qui fut sa dernière visite dans la région. Il arriva accompagné, entre autres, de José Cardona Hoyos, dirigeant du Parti communiste colombien. Au cinéma Ciro Redondo, il présida l'assemblée des travailleurs de l'usine Commandant Pedro Sotto Alba. Dans son allocution, il affirma que cette industrie était l'une de celles qu'il aimait le plus.

Un droit reconnu par le peuple

Le 11 janvier 1984, à Moa, au nord du gisement de minerai de Punta Gorda, l'usine Commandant Ernesto Che Guevara fut mise en service. Conçue pour produire du nickel et du cobalt, ce qu'elle fait avec une reconnaissance internationale, elle porte ce nom en l'honneur de l'engagement et du talent démontrés par le guérillero héroïque à la tête du processus de relance de l'industrie nationale de nickel. Son audace fut décisive pour la matérialisation du Plan de développement de la côte nord de l'Oriente cubain.

Fidel et les plus hautes autorités du Parti et du gouvernement avaient promis que la première grande usine de ce type construite par la révolution avec l'aide du camp socialiste, en particulier de l'URSS, ne pouvait pas porter un autre nom que celui d'Ernesto Che Guevara. Une décision qui fut approuvée par Cuba tout entière.

(Granma International, 23 août 2017. Photo : A. Korda)

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Auprès du Che pendant la crise d'Octobre


Oscar montre une photo de la Grotte de los Portales, où se trouvait le poste de
commandement du Che lors de la crise d'Octobre.

Grotte de los Portales, octobre 1962. Depuis son poste de commandement, le commandant Ernesto Che Guevara examine avec plusieurs officiers la composition des forces ennemies qui menacent d'attaquer le pays.

Le lieutenant Luis Gonzalez Pardo, chef de la section d'informations, lit les renseignements sur la 82e division aéroportée de l'armée des États-Unis qui, selon les rapports, sera chargée de lancer les opérations.

Après avoir mentionné le nombre énorme d'avions, Luis fait un commentaire à son chef : « Commandant, ils vont nous cacher le ciel... »

Le Che l'écoute sans sourciller. Après la défaite fulgurante de la dictature et l'attaque mercenaire de Playa Giron, il ne doute pas un instant du courage du peuple cubain, si bien que la réponse à son officier du renseignement fuse nette et précise : « Et alors, mon gars, c'est mieux... on se battra à l'ombre. »

Cette anecdote nous a été rapportée par Oscar Valdés Buergo, à l'époque sergent adjoint du Che, chef militaire à Pinar del Rio, et donc un homme proche du guérillero héroïque lorsque celui-ci assumait le commandement de la province durant l'invasion par Playa Giron et durant la crise d'Octobre.

Aidé par un dossier rempli de notes, de coupures de journaux, de croquis et de photographies, cet ancien combattant de la clandestinité à Vueltabajo parle avec nostalgie de ces journées « intenses et mouvementées » au cours desquelles il eut l'occasion d'être aux côtés du Che.

À 80 ans, il revoit avec clarté le Che, vêtu d'un treillis, un pistolet à la ceinture et coiffé de son béret noir frappé de l'étoile. « Durant l'attaque de Playa Giron, son séjour avec nous fut de courte durée, à cause de la blessure accidentelle qu'il s'était faite au visage, alors que pendant la crise d'Octobre, il resta pendant plusieurs semaines à la tête de la province », se souvient Oscar . « À cette époque, le Che avait établi son commandement dans la Grotte de los Portales (appartenant à la municipalité de La Palma). Il sortait à l'aube presque tous les jours pour parcourir le territoire et revenait à la nuit tombée. »

Parmi les anecdotes qui parlent d'elles-mêmes de la personnalité du guérillero légendaire, Oscar raconte que personne ne connaissant jamais l'heure exacte de son retour, on lui avait proposé d'installer un poêle à bois dans la grotte, sur lequel les aliments de ceux qui travaillaient à l'extérieur jusqu'à des heures avancées de la nuit pourraient être maintenus au chaud, car la cuisine centrale de l'unité était éloignée. « Au début, le Che refusa, car il pensait qu'ils avaient l'intention de lui préparer un meilleur repas qu'au reste de la troupe, et bien que finalement il ait accepté, lorsqu'il se déplaçait dans les alentours, il vérifiait systématiquement si tous les soldats avaient reçu le même repas que lui. »

De ces journées de tension au cours desquelles le monde se trouva au bord d'un conflit nucléaire, Oscar se souvient qu'à une occasion, le Che revint très en colère, car un groupe de miliciens et de soldats qui oeuvraient des tranchées lui avait demandé combien de temps durerait l'exercice.

« Ce jour-là, il ordonna aux principaux chefs d'aller informer homme par homme du grave danger qu'encourait le pays.

« Le 26 octobre, après avoir entendu le commandant en chef donner l'ordre d'ouvrir le feu sur tout avion qui violerait l'espace aérien, il ordonna le renforcement de la défense antiaérienne.

« Il donna également l'ordre de désarmer une mitrailleuse de 12,7 millimètres, et avec des cordes et l'aide d'un groupe de paysans de la région, ils la transportèrent pièce par pièce et l'installèrent au sommet de la colline. »

« Il fit monter une antenne radio afin de pouvoir capter les stations étrangères. Plusieurs camarades qui parlaient d'autres langues étaient chargés de les écouter à plein temps, afin de le tenir informé de l'évolution de la situation.

« À l'occasion, lors d'une réunion, il demanda aux chefs d'unité lesquels d'entre eux écoutaient la radio étrangère. Le silence fut total. Seul le premier lieutenant Narciso Ceballos, chef de la division de Guane, leva la main et dit : "Moi, commandant, parce qu'on m'a dit que vous le faisiez..." ».

« Les soldats pensaient que le Che allait lui faire une remontrance. Au contraire, il l'a félicité, avant de rappeler aux autres camarades qu'il fallait être informé et connaître l'ennemi. »

Le Che était un homme très direct, nous dit Oscar, cependant « il parlait à voix basse et très poliment ». Pendant le temps où il fut le haut responsable politique et militaire de Pinar del Rio, il se déplaça dans toute la province, y compris la péninsule de Guanahacabibes, mais surtout sur la côte nord, près de la capitale du pays.

« Les chefs des unités et des principales entités de la province allaient le voir dans la grotte pour faire leur rapport. Il régnait une grande agitation, à l'époque », indique-t-il.

Néanmoins, poursuit-il, il y avait aussi des moments de quartier-libre pendant la soirée, où le Che sortait pour bavarder avec les gens, il lisait, jouait une partie d'échecs ou s'arrêtait pour regarder les autres jouer, et faisait des commentaires à haute voix quand il y avait une mauvaise action de jeu, pour se moquer d'eux.

« Un soir, alors que je lisais un livre sur la vie des Hispanos à New York, il s'arrêta près de moi et me dit :"Quand tu l'auras fini, prête-le moi". »

« Un peu plus tard, il revint et me dit : "Je suis venu chercher ce que je t'avais demandé". Il a pris le livre et je ne l'ai jamais revu. » L'issue de la crise d'Octobre est connue. Oscar raconte qu'à son retour d'une réunion à La Havane, le Che rassembla les autorités politiques et militaires de la province pour leur expliquer que, sans en informer Cuba, l'Union soviétique avait conclu un accord avec les États-Unis pour le retrait des missiles nucléaires de notre pays, et il eut des mots très durs à propos d'une telle décision.

Cinquante-cinq ans après ces journées, Oscar se dit fier d'avoir eu la possibilité d'être aux côtés du guérillero héroïque dans un moment décisif de l'histoire de la révolution et que cela reste l'une des expériences les plus extraordinaires de sa vie.

« Je me sens honoré de la confiance qui m'a été accordée pour cette importante mission », dit-il.

« Le Che était un homme qui donnait toujours l'exemple, et n'ordonnait rien qu'il ne soit pas capable de faire lui-même.

« Les gens aimaient parler avec lui. Nous l'admirions beaucoup. C'était quelque chose de très important pour nous tous », conclut-il.

(Granma, 21 septembre 2017)

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Rencontres avec Ahmed Ben Bella


Le Che est accueilli à l'aéroport international d'Alger par le premier ministre algérien Ahmed Ben Bella le 3 juillet 1963 à l'occasion du premier anniversaire de l'indépendance de l'Algérie.

En octobre 1997, à l'occasion du 30e anniversaire de l'assassinat de Che Guevara, Ahmed Ben Bella, un des chefs du Front de libération nationale de l'Algérie et premier président de l'Algérie, faisait paraître dans Le Monde diplomatique un article sous le titre Ainsi était le « Che », dans lequel il raconte les nombreuses rencontres qu'il a eues avec Che Guevara de 1962 à 1965, à Alger, « qui était alors une terre d'asile pour tous les anti-impérialistes du monde », juste avant le coup d'État militaire qui a chassé son gouvernement du pouvoir en Algérie.

Parmi les souvenirs de ses rencontres avec Che Guevara, il rappelle la première fois qu'ils se sont rencontrés. C'était en 1962, au moment où l'Algérie venait juste d'accéder à l'indépendance et dans les mots de Ben Bella « en tant que chef de ce gouvernement, je devais assister, en ce mois de septembre 1962, à New York, à la session de l'ONU pour la levée symbolique du drapeau algérien au-dessus du siège des Nations unies ». Dans le cadre de cette visite en Amérique, il devait rencontrer le président des États-Unis, John F. Kennedy, puis se rendre par après à Cuba.

« Plus que d'une visite, il s'agissait surtout d'un acte de foi marquant nos engagements politiques. L'Algérie souhaitait souligner publiquement sa totale solidarité avec la Révolution cubaine, particulièrement en ces moments difficiles de son histoire », a écrit Ben Bella. Lorsqu'il a rencontré Kennedy à la Maison-Blanche le 15 octobre 1962, au moment de la crise entre Cuba et les États-Unis sur le stationnement de missiles en sol cubain,[1] Ahmed Ben Bella a demandé à Kennedy : « Allez-vous vers une confrontation avec Cuba ? », ce à quoi Kennedy répondit : « Non, s'il n'existe pas de fusées soviétiques ; oui, dans le cas contraire. » Le président américain a même tenté de le décourager de se rendre à Cuba par des menaces à peine voilées que son avion pourrait se faire abattre par les contre-révolutionnaires cubains basés à Miami. « [J]e lui rétorquai que j'étais un fellaga [combattant algérien en lutte pour l'indépendance de son pays -- ndlr] et que les menaces des harkis algériens ou cubains ne m'intimidaient pas », a-t-il répondu au président des États-Unis d'Amérique.


Fidel et le Che rencontrent Ahmed Ben
Bella en 1962.

Dès que la délégation conduite par Ben Bella met le pied sur le sol de Cuba, elle est accueillie par « une liesse populaire indescriptible ». Ce qui s'est produit par après « donne une idée des rapports totalement dénués de protocole qui devaient [...] être la caractéristique essentielle, la norme des liens unissant la Révolution cubaine et la révolution algérienne, et des liens personnels qui m'ont lié à Fidel Castro et à Che Guevara ». Sa délégation n'a eu le temps que de déposer les valises pour immédiatement se mettre à « discuter à bâtons rompus » pendant des heures et des heures avec Fidel, Raoul et Che Guevara ainsi que les autres dirigeants qui les accompagnaient, « bousculant le protocole », ce qui a donné lieu à des discussions politiques et des débats passionnés, suivi d'un programme de visites à travers le pays.

Ahmed Ben Bella écrit plus loin que cette solidarité entre eux a été soudée pour toujours lorsqu'il y eu en octobre 1963 une tentative par le gouvernement marocain de provoquer militairement l'Algérie et de menacer le nouveau gouvernement révolutionnaire algérien, grâce à l'appui des États-Unis qui fournissaient secrètement des hélicoptères et pilotes pour transporter les troupes marocaines sur le front. Durant cet épisode appelé « l'affaire de Tindouf », « [n]otre jeune armée, tout juste sortie d'une lutte de libération, qui ne possédait encore ni couverture aérienne — puisque nous n'avions pas un seul avion — ni forces mécanisées, fut attaquée par les forces armées marocaines sur le terrain qui lui était le plus défavorable », c'est-à-dire le désert. Ben Bella rappelle dans ses souvenirs de Che Guevara que le gouvernement algérien a pu compter sur l'assistance du président égyptien Nasser qui leur a fourni une couverture aérienne et de « Fidel Castro, Che Guevara, Raúl Castro et les dirigeants cubains qui nous envoyèrent un bataillon de vingt-deux blindés et plusieurs centaines de soldats » qui étaient sous le commandement, entre autres, de Che Guevara.

L'auteur écrit que les dirigeants cubains « n'hésitèrent pas à envoyer leurs chars au secours de la révolution algérienne en danger », ce qui les conduira plus tard « à intervenir au-delà de l'océan Atlantique, en Angola et ailleurs ». Étant des gouvernements révolutionnaires qui s'aidaient mutuellement, Ahmed Ben Bella raconte les échanges qu'il avait en octobre 1962 lors de sa visite à Cuba avec Fidel Castro. Ce dernier « avait tenu à honorer la promesse que son pays nous avait faite de fournir une aide » équivalente à environ 4 millions $, explique le président algérien. « Compte tenu de la situation économique de Cuba, elle devait nous être envoyée, non pas en devises, mais en sucre. Malgré mon refus, car je considérais qu'à ce moment Cuba avait encore plus besoin de son sucre que nous, il ne voulut rien entendre. »

Il poursuit : « Environ un an après cette discussion, un navire battant pavillon cubain accosta au port d'Oran. Avec la cargaison de sucre promis, nous eûmes la surprise de trouver deux dizaines de chars et des centaines de soldats cubains accourus à notre secours. C'est sur une feuille arrachée d'un cahier d'écolier que Raúl Castro m'envoyait un bref message pour annoncer ce geste de solidarité. Bien sûr, nous ne pouvions laisser ce bateau repartir vide, aussi nous le remplîmes de produits algériens et, sur le conseil de l'ambassadeur Jorge Serguera, nous y ajoutâmes quelques chevaux barbes. Ainsi commença entre nos deux pays un troc à caractère non commercial, placé sous le sceau de la solidarité et qui, au gré des circonstances (et des contraintes), fut un élément original de nos relations. »

L'ancien président algérien ajoute que « Che Guevara était particulièrement conscient des restrictions innombrables qui entravent et affaiblissent une véritable action révolutionnaire, de même que des limites qui affectent toute expérience, fût-elle la plus révolutionnaire, dès l'instant où elle est confrontée directement ou indirectement avec les règles implacables de la loi du marché et de la rationalité mercantile. Il les dénonça publiquement lors de la Conférence afro-asiatique qui se tint à Alger en février 1965. » Plus loin Ben Bella explique que « la situation qui prévalait en Afrique laissait espérer d'immenses potentialités révolutionnaires et avait conduit le 'Che' à considérer que le maillon faible de l'impérialisme se trouvait sur notre continent et qu'il devait désormais y consacrer ses forces ».


Le Che est accueilli au Ghana en 1965.

L'auteur a fait remarquer au Che « que ce n'était peut-être pas la meilleure façon d'aider à la maturation révolutionnaire qui se développait sur notre continent. Si une révolution armée peut et doit trouver des soutiens étrangers, elle doit cependant créer ses propres ressorts internes sur lesquels s'appuyer. N'empêche, Che Guevara tenait à ce que son engagement fût total et physique. » Le Che s'est rendu plusieurs fois en Angola et au Congo-Brazzaville et a même refusé l'avion particulier que le président Ben Bella voulait mettre à sa disposition pour assurer une plus grande discrétion à ses déplacements. Celui-ci poursuit : « J'alertai alors les ambassadeurs d'Algérie dans toute la région pour qu'ils se mettent à sa disposition. Je le revis à chacun de ses retours d'Afrique noire et nous passions de longues heures à échanger nos idées. À chaque fois, il revenait impressionné par la fabuleuse richesse culturelle du continent, mais peu satisfait de ses rapports avec les partis marxistes des pays qu'il avait visités et dont les conceptions l'irritaient. »

Parallèlement à l'action du Che, le gouvernement algérien a mené durant cette même période « une autre action pour le sauvetage de la révolution armée de l'ouest du Zaïre », écrit Ahmed Ben Bella. En accord avec Nyerere de Tanzanie, Nasser d'Égypte, Modibo Keita du Mali, N'Krumah du Ghana, Kenyatta du Kenya et Sekou Touré de la Guinée, « l'Algérie a fait sa contribution en envoyant des armes via l'Égypte à travers un véritable pont aérien, tandis que l'Ouganda et le Mali étaient chargés de fournir des cadres militaires. C'est au Caire, où nous étions réunis sur mon initiative, que nous avions conçu ce plan de sauvetage et nous commencions à l'appliquer lorsqu'un appel désespéré nous fut adressé par les dirigeants de la lutte armée », rappelle l'auteur dans ses mémoires. Malgré les efforts des gouvernements de ces pays, écrit-il, « notre action intervint trop tard et cette révolution fut noyée dans le sang par les assassins de Patrice Lumumba ».

« Durant l'un de ses séjours à Alger, écrit-il, Che Guevara me fit part d'une demande de Fidel. Cuba étant sous étroite surveillance, rien ne pouvait être sérieusement organisé en direction de l'Amérique latine pour acheminer des armes et des cadres militaires qui avaient été entraînés à Cuba. L'Algérie pouvait-elle prendre le relais ? La distance n'était pas un handicap majeur, bien au contraire, elle pouvait jouer en faveur du secret qui conditionnait le succès même d'une opération de cette importance. Ma réponse fut bien sûr un 'oui' spontané. Et aussitôt commença la mise en place des structures d'accueil pour les mouvements révolutionnaires d'Amérique latine, placées sous le contrôle direct de Che Guevara. » L'auteur rappelle que « les représentants de tous ces mouvements révolutionnaires se transportèrent à Alger, où je les rencontrai à maintes reprises en compagnie du 'Che'. Un état-major regroupant les mouvements s'établit dans les hauts d'Alger. [...] Il s'inquiétait beaucoup et craignait que le secret du lieu où se préparaient les actions armées ne soit éventé et que nos ennemis ne s'aperçoivent de la véritable nature des sociétés d'import-export que nous avions implantées en Amérique du Sud. »

Vers la fin de son récit, Ahmed Ben Bella écrit que « Che Guevara était parti d'Alger lorsque eut lieu le coup d'État militaire du 19 juin 1965 contre lequel, d'ailleurs, il m'avait mis en garde. Son départ d'Alger, puis sa mort en Bolivie et ma propre disparition pendant quinze années doivent être étudiés dans le contexte historique qui marqua le reflux ayant suivi la phase des luttes de libération victorieuses. Ce reflux [...] sonna le glas, après l'assassinat de Lumumba, des régimes progressistes du tiers-monde et entre autres de ceux de N'Krumah, de Modibo Keita, Soekarno, Nasser, etc. »

Ahmed Ben Bella nous rappelle que « cette date du 9 octobre 1967 inscrite en lettres de feu dans nos mémoires évoque une journée incommensurablement sombre pour le prisonnier solitaire que j'étais, alors que les radios annonçaient la mort de mon frère et que les ennemis que nous avions combattus ensemble entonnaient leur sinistre chant de victoire ».

Pour lui, le 9 octobre 1967 est une date importante car « depuis trente ans, Che Guevara interpelle nos consciences. Par-delà le temps et l'espace, nous entendons l'appel du 'Che' qui nous somme de répondre : oui, seule la révolution peut parfois faire de l'homme un être de lumière. Cette lumière, nous l'avons vue irradier de son corps nu, étendu quelque part au fond du Nancahuazu, sur ces photos parues dans les journaux des quatre coins du monde, alors que le message de son dernier regard continue de nous atteindre jusqu'au tréfonds de l'âme. »

Selon l'ancien président d'Algérie, « le 'Che' était un preux, mais un preux conscient, au corps affaibli par l'asthme [...] Qui a lu son Journal de Bolivie sait avec quelle santé délabrée il a dû faire face aux terribles épreuves physiques et morales qui ont parsemé son chemin. »

« Il est impossible de parler du 'Che' sans parler de Cuba et des relations particulières qui nous unissaient tant son histoire, sa vie, sont liées à ce pays qui fut sa seconde patrie avant qu'il ne se tourne vers là où l'appelait la révolution », conclut Ahmed Ben Bella.

Note

1.  Le 22 octobre 1962, le président John F. Kennedy a provoqué la « crise des missiles cubains », ou la crise d'Octobre. Il a ordonné un embargo total de Cuba, a menacé d'envahir l'île et a placé les troupes américaines en état d'alerte nucléaire. Washington exigeait le retrait des missiles nucléaires soviétiques installés à Cuba suivant un commun accord de deux gouvernements souverains. Les travailleurs et paysans cubains ont répondu en se mobilisant massivement à la défense de la révolution. Face à la détermination du peuple cubain, et sachant qu'un assaut contre Cuba entraînerait des pertes énormes du côté américain, le président Kennedy a ouvert des négociations avec le premier ministre soviétique Nikita Khrouchtchev, qui a décidé de retirer les missiles sans consulter le gouvernement de Cuba.

Ahmed Ben Bella a été le dirigeant du Front de libération nationale d'Algérie qui a mené la lutte pour l'indépendance contre la France. Il a été président du gouvernement révolutionnaire des travailleurs et paysans porté au pouvoir après la victoire de 1962. Ce gouvernement a été renversé par un coup d'État contre-révolutionnaire dirigé par le colonel Houari Boumediene en juin 1965.

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Événements

8 octobre: Hommage à Che Guevara

Ottawa


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Vancouver


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Reportage photo

La vie de Che Guevara


Ernesto Guevara de la Serna a été le premier enfant de Celia de la Serna et Ernesto Guevara Lynch, une famille argentine de classe moyenne. On le voit ici avec sa mère à l'âge d'un
mois à Rosario en Argentine en juillet 1928.


Ernesto et ses parents avec ses quatre frères et soeurs en congé à Mar del Plata en
Argentine en 1943


Ernesto à 12 et 15 ans alors qu'il vivait à Alta Gracia à Cordoue et à 20 ans à Buenos Aires.
Alors qu'il était enfant, sa famille a quitté Rosario pour le climat plus sec d'Alta Gracia en
raison de son asthme virulent. Le jeune Che était un avide sportif, apprécié par ses
professeurs et ses pairs pour sa maturité, son enthousiasme, son indépendance et son
mépris du danger, et pour les standards élevés qu'il s'imposait.


Ernesto à sa première année à l'école de médecine de Buenos Aires en 1947 - on le voit
dans la rangée du haut, sixième à partir de la droite, avec un grand sourire


Ernesto, tenant le ballon, avec son équipe de rugby à Buenos Aires en 1949


Ernesto a effectué son premier voyage à travers l'Argentine en 1951, sur une bicyclette à moteur. Il a notamment visité son ami Alberto Granado à Cordoue (au centre). Il a pris la direction nord-est pour visiter les provinces les plus pauvres du pays, Santiago del Estero, Tucumán, Salta, Jujuy, Catamarca et La Rioja, revenant par San Juan, Mendoza, San Luis et s'arrêtant au sud à Nahuel Huapí. Il a parcouru un total de 4 500 kilomètres.


Ernesto avec ses amis en Argentine, dont Alberto Granado, en octobre 1951, alors que les deux préparent leur voyage à travers l'Amérique latine, relaté dans les « Carnets de voyage ». Les deux amis ont pris un congé d'études d'un an pour ce périple de neuf mois qui a compris le Chili, le Pérou (Cuzco, Macchu Pichu et Lima), Bogota en Colombie et Caracas au Venezuela.


Alberto et Ernesto sur leur radeau, le Mambo-Tango, qui les a amenés à la colonie de lépreux au Pérou où ils ont été docteurs. Les injustices et les souffrances du peuple ont poussé le Che vers la politique révolutionnaire. Leur voyage s'est terminé le 26 juillet 1952 au Venezuela et Ernesto est retourné à Buenos Aires via Miami pour compléter ses études de médecine.


Le 12 juin 1953, Ernesto a reçu son diplôme de médecine et a entrepris le 7 juillet un second périple à travers le continent avec son ami d'enfance Carlos « Calica » Ferrer, posé ici avec le Che en Bolivie. Leur objectif était d'atteindre Caracas où les attendait Alberto Granado.


Plus tard en 1953, Ernesto est retourné en Bolivie, au Pérou et en Équateur et a atteint le Panama et le Costa Rica où il a rencontré pour la première fois les révolutionnaires cubains
qui avaient pris part à l'assaut de la Caserne de Moncada à Santiago de Cuba,
le 26 juillet 1953. Il a rencontré Calixto Garcia puis Antonio Nico Lopez au Guatemala.
À gauche : le Che au Costa Rica en 1953 ; à droite : en route vers le Guatemala pour
appuyer le gouvernement progressiste de Jacobo Arbens.


Après que le gouvernement Arbens ait été renversé par un coup, Ernesto s'est rendu au Mexique où il est arrivé le 21 septembre 1954.


À Mexico, les événements évoluent rapidement. Ernesto s'est marié avec Hilda Gadea (posée ici lors de leur lune de miel à Chichen Itza) et ils ont leur première fille Hilda Beatriz (posée avec le Che alors que les membres du Mouvement du 26 juillet sont en prison à Mexico). Il rencontre le dirigeant du Mouvement du 26 juillet, Fidel Castro, dans la maison de la cubaine María Antonia Gonzále, au 49 de la rue Emparán.


Le Mouvement du 26 juillet commence à s'entraîner à la guerre de guérilla. Son instructeur, un vétéran de l'armée cubaine, remarque les aptitudes du Che. A gauche : escalade du mont Popocatepel, au Mexique, le 12 octobre 1955 ; à droite : entraînement aux armes,
à Mexico, en 1956.


Les membres du Mouvement du 26 juillet incarcérés en 1956 au centre de détention de Miguel-Schultz au Mexique après avoir été arrêtés en vertu des lois sur l'immigration


La première photo de Fidel et Che ensemble, en prison à Mexico en 1956. Dans une lettre à ses parents datée du 6 juillet 1956, Che écrit : « ... mon avenir est lié à la Révolution cubaine. Je vais triompher à ses côtés ou mourir là-bas ».

Le 25 novembre 1956, 82 membres du Mouvement du 26 juillet embarquent sur le Granma sous le couvert de l'obscurité dans le port de Tuxpan, à Veracruz, au Mexique. Ils entreprennent un voyage de 13 jours jusqu'à Playa Las Coloradas dans la province d'Oriente.


Une carte qui montre le périple de Che à travers Cuba dans la période avant et après le triomphe de la Révolution cubaine. Cliquer pour agrandir.


  Che et Fidel dans la Sierra Maestra, le 8 octobre 1957.


En 1958, Raúl et Che dans le camp retranché de l'armée rebelle sur la montagne de la Sierra de Cristal dans la province d'Oriente. Che s'est joint au Mouvement du 26 juillet pour être son médecin de combat, mais à cause de ses qualités exceptionnelles de chef, il a été fait commandant militaire dans l'armée rebelle.


Les guérilleros cubains de la 4e colonne de l'armée rebelle dirigée par Che Guevara célèbrent le Nouvel An 1958. La colonne autonome du Che a commencé ses opérations à la fin de juillet 1957 et a été la première troupe à émerger de la force de guérilla originale.


Le 24 février 1958, Radio Rebelde est fondée par Fidel, le Che et l'armée rebelle dans les montagnes de la Sierra Maestra. Ses émissions qui rapportent directement les combats
contre l'armée de Batista et dénoncent la dictature ont mobilisé le peuple cubain et
démoralisé l'ennemi.


Che s'adresse aux résidents de Fomento dans la province de Las Villas en novembre 1958.
C'est la première ville de la région qui a été libérée par les forces rebelles dirigées par le Che avant la libération complète de la région. Elles se sont ensuite déplacées vers le centre de Cuba pour la bataille décisive de Santa Clara.


La bataille de Santa Clara en décembre 1958. À gauche : le 29 décembre 1958, l'armée rebelle a utilisé des tracteurs pour faire dérailler un train blindé rempli de troupes ennemies et d'armes. À droite : Che avec Santa Clarans, le 31 décembre 1958, après avoir mené l'armée rebelle à la victoire ; à sa gauche, sa compagne révolutionnaire et future épouse
Aleida March. Peu de temps après la défaite de l'armée de Batista à Santa Clara, celle-ci
s'est entièrement rendue.



Che, Fidel et Camilo Cienfuegos sont accueillis lors d'un grand rassemblement à La Havane,
le 8 janvier 1959, après que Fidel ait traversé le pays avec l'armée rebelle lors de la Caravane historique de la victoire.


En 1959, Che et le commandant de l'armée rebelle Camilo Cienfuegos de qui il était très proche. Aujourd'hui, les deux sont côte à côte sur la place de la Révolution, avec le portrait du Che sur l'édifice du ministère de l'Intérieur et celui de Camilo sur l'édifice du ministère de l'Informatique et des Communications. Camilo est mort plus tard pendant l'année dans un écrasement d'avion. Le Che a plus tard donné à son fils le prénom Camilo.


Le deuxième mariage du Che, avec Aleida March, le 2 juin 1959. Aleida a évoqué leur temps passé ensemble dans la lutte armée : « Je ne peux pas dire que je suis la secrétaire du Che parce que je suis une combattante. J'ai combattu à ses côtés dans la campagne de Las Villas
et ai pris part aux combats. Je fus donc son ordonnance... Quand c'est devenu pratiquement impossible pour moi de continuer de vivre à Santa Clara, à cause de mes activités révolutionnaires, j'ai décidé de me joindre à ceux qui combattaient la dictature en
prenant les armes. »


Che à Gaza, en 1959. Cette visite faisait partie d'une longue tournée en Europe, en Afrique et
en Asie, du 12 juin au 8 septembre, où il était chargé de développer des relations
diplomatiques et commerciales avec Cuba.


Visite en Inde en juillet 1959. À gauche : le Che examine la machine-outil Lathe dans une
usine de New Delhi ; à droite : en entrevue à Delhi Radio.


À gauche : le Che est accueilli par le président yougoslave Josip Broz Tito.
À droite : en visite au Pakistan.


À gauche : en compagnie du président Kusno Sukarno en Indonésie ; à droite : il est accueilli par le président Gamal Abdel Nasser lors de sa visite en Égypte.


Sur la place Rouge en 1960 lors de sa visite à Moscou


Le Che visite la RPDC (à gauche) et rencontre le président Mao en Chine (à droite) en 1960.


4 mars 1960 : un acte terroriste détruit le navire français La Coubre à La Havane. La photo la plus célèbre du Che a été prise le 5 mars 1960 par Alberto Korda lors des grandes
funérailles en hommage aux victimes de ce sabotage contre-révolutionnaire.


Premier mai 1960, à Santiago de Cuba. Pendant les deux premières années de la révolution, Che y est retourné pour participer aux célébrations du Premier Mai.




Le Che a appelé les Cubains à participer au travail volontaire afin de créer la conscience
dont la société nouvelle a besoin. Il a lui-même donné l'exemple, se joignant aux travailleurs après avoir complété ses tâches comme ministre de l'Industrie ou les fins de semaine. En haut : dans une plantation de canne à sucre avec son vieil ami Alberto Granado (qui s'est établi à Cuba à l'invitation du Che en 1960) et Aleida March. Au centre : au port de La Havane en 1961 avec Orlando Borrego, son collègue au ministère de l'Industrie, un économiste qui a édité
sept volumes des écrits du Che. En bas à gauche : le Che, un joueur d'échecs passionné et doué, dans une partie après avoir terminé son travail volontaire en 1962.
À droite : pendant une pause avec des travailleurs d'une usine de ciment à Artemisa
dans la province de Pinar del Rio en 1964.



La campagne historique d'alphabétisation à Cuba a été l'initiative du Che et de Fidel et a élevé le taux d'alphabétisation à 96 %. Le 21 décembre 1961, ils se sont joints aux travailleurs cubains de l'alphabétisation pour marquer par des célébrations la fin de cette campagne d'un an.


Le Che s'adresse aux jeunes à une réunion de l'Union des jeunes communistes
le 20 octobre 1962.


Le Che s'est assuré que les travailleurs voient la nécessité de contribuer à la révolution, soulignant les mérites de ceux qui excellaient dans leur domaine par des événements
comme celui-ci en juin 1962, une des cérémonies mensuelles tenues pour reconnaître les travailleurs qui se sont distingués.


Le Che visite les travailleurs de la raffinerie de sucre Ñico Lopez à La Havane en 1963.


Fidel, Raúl et le Che en 1963


Allocution du Che aux Nations unies le 11 décembre 1964 en tant que chef de la
délégation cubaine


Le Che, Aleida et leurs enfants en 1965



Le Che a quitté Cuba en 1965 pour s'engager dans la lutte armée pour la libération nationale dans d'autres pays. Il a mobilisé une dizaine de combattants cubains le 24 avril 1965 pour se joindre aux rebelles dans la République démocratique du Congo qui combattaient le régime pro-impérialiste de Kinshasa établi par le coup organisé par les États-Unis et la Belgique. Patrice Lumumba, le premier président élu lorsque le Congo a remporté son indépendance
en 1960, a été assassiné lors du coup.


Pendant sa tournée en Afrique en 1965, le Che rencontre Agostinho Neto et les combattants du MPLA à leur quartier général à Brazzaville au Congo.


Le Che est retourné discrètement à Cuba en provenance du Congo et a préparé son départ pour la Bolivie. Sur cette photo prise à Pinar del Rio en 1966, il avait changé son apparence (il est troisième à partir de la droite) et s'entraînait avec d'autres guérilleros pour se préparer à la lutte armée en Bolivie.


Le Che et les guérilleros de l'Armée bolivienne de libération nationale partagent le souper
de Noël en 1966.


En compagnie d'un fermier local en 1967, dont il a soigné les enfants. Le fermier l'a dénoncé aux autorités boliviennes peu après.




  Le 13 octobre 1997, le cortège funèbre transporte les restes du Che de la place de la Révolution à La Havane au mausolée du Che nouvellement construit où ils seront déposés le jour suivant. Les restes du Che avaient été identifiés trois mois plus tôt en Bolivie, le 12 juillet 1997, par une équipe d'archéologues et d'experts légistes cubains.


Le 17 octobre 1997, la fille du Che, Aleida Guevara, rend hommage à la mémoire de son père au mausolée du Che à Santa Clara, avec à ses côtés Fidel, Raúl et d'autres dirigeants
du peuple cubain.


Le monument et le mausolée de Che Guevara à Santa Clara, Villa Clara.

Vidéos 







Extraits du célèbre discours du Che à l'Assemblée générale de l'ONU en tant que chef de délégation, le 11 décembre 1964. 

Affiches de l'OSPAAAL

Che Guevara a souvent été chargé de représenter la Révolution cubaine naissante dans le cadre des relations avec d'autres pays et de forums internationaux. Dans les années qui ont suivi son assassinat, l'Organisation de solidarité avec les peuples d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine a commémoré le Che et son esprit internationaliste par une série d'affiches. Cliquer pour agrandir.



(Photos et vidéos: www.fidelcastro.cu, OSPAAAL, The Che Handbook, Cuban Office of Historical Affairs, Cien Imagenes de la Revolucion Cubana, Centro de Estudios Che Guevara, Ecured, Granma, A. Korda, R.A. Torres, O. Salas, L. Noval, J. Nilsson, Prensa Latina, Kaldari, M.S. Johnson)


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