Numéro 55 - 19 avril 2016
Le premier budget Trudeau
Les dépenses en infrastructure
pour payer les riches,
consolider l'édification d'empire
et renforcer les privilèges de classe
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LML publie ci-dessous
le deuxième article de la série « Le premier budget
Trudeau » dans laquelle est discutée le budget
fédéral présenté par le gouvernement
libéral le 22 mars 2016. Une motion pour approuver le
budget est actuellement débattue à la Chambre des
communes et ce débat se poursuit le mardi 19 avril.
Le premier article de cette série a été
publié dans LML Numéro 45
du 30
mars 2016.
***
Les libéraux de Justin Trudeau présentent
le budget fédéral de dépenses en infrastructures
comme quelque chose qui existe dans un monde enchanté sans
contexte ni rapport avec quoi que ce soit, du moins pas avec des
relations économiques, politiques et sociales identifiables. On
ne trouve aucune trace dans le budget de 2016 des
conditions concrètes d'un Canada dominé par les
privilèges de classe et le droit de monopole de l'oligarchie
mondiale et de ses monopoles. Il ne contient rien sur la situation
concrète de la base manufacturière détruite en
Ontario, au Québec et ailleurs ou sur les conséquences
dévastatrices des licenciements massifs des travailleurs du
secteur de
l'énergie.
La contradiction d'une
économie socialisée, qui est parfaitement capable de
produire suffisamment pour répondre aux besoins de tous, mais
est apparemment paralysée et empêchée de le faire,
n'est ni expliquée ni abordée sous l'angle de fournir une
nouvelle direction pour résoudre le problème de
l'édification nationale. Comment un pays
possédant une classe ouvrière qualifiée et
instruite, et l'immense potentiel des forces productives modernes et
des ressources naturelles infinies peut-il être enfermé
dans le carcan du chômage massif permanent, de
l'insécurité des personnes vivant dans la pauvreté
et de la dégradation des conditions sociales ? Le budget
de 2016 refuse
de s'attaquer aux contradictions apparentes d'un Canada en crise et
présente plutôt un conte de fées d'une nation et
d'un peuple acclamant les programmes d'infrastructure de l'État
conçus pour payer les riches et consolider les privilèges
de classe et une orientation de l'économie qui a
été discréditée dans la pratique.
Les plans de l'infrastructure sont formulés en
termes prometteurs qui par magie parsèmeront la classe
ouvrière de la bénédiction d'emplois et de
bonheur. Ce discours ensoleillé est destiné à
aveugler les travailleurs et les soumettre à une élite
dirigeante qui refuse de faire face aux problèmes du pays quand
ils se présentent. Bien entendu,
certains emplois seront nécessairement créés parce
que c'est le
seul moyen de construire quelque chose, mais en réalité
la poudre magique de la richesse sociale publique ne sera pas
répandue sur les travailleurs, mais sur les riches et leurs
monopoles pour renforcer leur droit de monopole et leur domination sur
tous les Canadiens, pour empêcher les gens
de formuler une nouvelle direction prosociale pour l'économie,
libre de l'étreinte des ploutocrates, et de se battre pour elle.
On lit dans le budget de 2016 que 120
milliards de dollars apparaîtront du monde souterrain de
l'oligarchie financière internationale et seront
dépensés sur une période de 10 ans.
Toutefois, un montant presque identique disparaît dans les
caisses de ces mêmes bailleurs de fonds comme paiement
d'intérêts sur la dette
nationale qu'ils détiennent. Cela crée un flot d'argent
pour le moins étrange dans le Trésor
fédéral venant d'emprunts privés qui est presque
immédiatement retourné à la même oligarchie
financière entraînant une augmentation sans cesse
croissante de la dette nationale sous son contrôle et des
paiements d'intérêts toujours plus importants dans ses
comptes.
Quant à l'argent de l'infrastructure publique
elle-même et son utilisation, les fonds iront dans les comptes
des sociétés privées mondiales de
l'ingénierie, de la construction, financière, de la
machinerie lourde, des sociétés de gestion et
d'approvisionnement. Les propriétaires et les dirigeants
d'entreprises se réjouiront que l'argent public qu'ils
reçoivent contre la valeur ajoutée que produisent leurs
travailleurs élargisse leur propriété et
contrôle de la richesse sociale et consolide leurs
privilèges de classe et de bâtisseurs d'empire.
Tout le pouvoir et les
richesses sont transférés aux monopoles privés
mondiaux. Les contrats d'infrastructure seront lucratifs pour les
propriétaires et les dirigeants d'entreprises qui sont choisis
pour le travail. Le processus de distribution des contrats garantit un
combat sauvage qui comprendra toutes les formes de pressions
politiques, de
malversations et de corruption. Le point important pour les vainqueurs
est d'avoir des contacts sociaux et politiques en place et sous leur
contrôle pour garantir qu'ils reçoivent les contrats
à un prix qui augmente considérablement leur
propriété et leur contrôle de la richesse sociale.
Tel est le monde néolibéral où les
intérêts privés puissants
manipulent les gouvernements et leurs institutions publiques avec un
système corrompu de contrepartie.
D'autres retombées pour les riches proviennent
de la valeur de l'infrastructure elle-même. Aucune
économie moderne ne peut fonctionner sans infrastructures
matérielles et sociales. Les entreprises qui exportent, qui sont
la majorité des plus grandes entreprises au Canada, auront leurs
« corridors de transport » et leurs «
portes »
construites avec des fonds publics. Cela signifie que les fonds publics
investis dans les infrastructures de transport ne gèleront pas
leur richesse sociale privée dans des projets qui ne
génèrent des rendements que sur de longues
périodes et ne sont pas particulièrement liquides.
On lit dans le budget de 2016 que les
dépenses d'infrastructure seront consacrés à
« une économie qui est mieux placée pour tirer
profit du potentiel du commerce mondial.... [Avec] pour objectif de
mettre en place des corridors commerciaux rapides et efficients qui
permettent aux exportateurs canadiens de tirer pleinement avantage du
commerce international. »
L'élite dominante est obsédée par
le commerce et c'est un grand problème pour le pays. Même
le secteur manufacturier canadien, comme celui de la production de
véhicules, est orienté vers les échanges
commerciaux et non la demande intérieure. Le commerce
international dépend de ceux qui achètent ce que
produisent les Canadiens. Cela
signifie que l'économie dépend des autres et n'est ni
indépendante ni stable. Il suffit de regarder la gravité
de la situation dans le secteur de l'énergie, parce qu'il est
dépendant des échanges commerciaux.
L'élite dominante canadienne est une section de
l'oligarchie financière mondiale. Elle refuse de penser à
construire ou de proposer une infrastructure essentielle à une
économie indépendante basée sur la fabrication,
les programmes sociaux et des services publics qui garantissent les
droits et le bien-être du peuple, qui s'appuie sur l'abondance
des matières premières du Canada, mais ne dépend
pas d'elles au détriment de l'édification nationale. Dans
une économie indépendante et diversifiée, le
commerce international basé sur l'avantage réciproque
complète l'économie intérieure, ce qui conduit
à la stabilité et la sécurité pour le
peuple dans le cadre du projet d'édification nationale. De
plus, une infrastructure sociale et matérielle
véritablement publique sera financée, construite et
gérée comme une entreprise publique avec la plus grande
quantité possible de la valeur ajoutée produite par les
travailleurs remise au trésor public et disponible pour servir
l'intérêt public et l'édification nationale
à l'avantage de tous les Canadiens et non
de quelques privilégiés.
Avec le budget Trudeau
de 2016, la direction de l'économie reste celle des
bâtisseurs d'empire et reste fermement dans les mains des riches
et de leurs privilèges de classe. La grande richesse sociale
réelle et potentielle du pays est mobilisée par
l'État pour consolider l'emprise des riches sur
l'économie et son orientation. La valeur que
les travailleurs produisent, reproduisent et transfèrent par
leur temps de travail en construisant les infrastructures
planifiées et financées par l'État est sous le
contrôle de l'élite impérialiste dominante. Leurs
entreprises privées s'enrichissent et leur pouvoir social,
politique et économique est renforcé. La richesse sociale
ajoutée que produisent les
travailleurs en construisant les infrastructures sera mise au service
des intérêts privés étroits des riches, ce
qui renforcera également leur droit de monopole et leur pouvoir
sur les intérêts publics et le droit public.
Le droit et le pouvoir de monopole renforcés qui
viennent des infrastructures sociales et matérielles
bâties par des intérêts privés mais
financées par l'État, que les entreprises consomment sans
échanger ou payer la valeur, sont présentés comme
étant incontestablement bons pour l'économie et l'emploi.
L'élite dominante n'admettra jamais que
de tels projets, qui existaient également dans le Plan d'action
économique du gouvernement Harper, ont pour but de payer les
riches et de consolider la construction d'empire et les
privilèges de classe. Le système capitaliste transitoire
est en crise, en partie parce que ces plans de l'État
empêchent de donner une nouvelle direction à
l'économie afin
d'achever la transition à la production industrielle de masse en
accord avec les rapports de production socialisés qui correspond
à une économie socialisée libérée
des privilèges de classe.
Les plans de l'État pour payer les riches et
consolider la construction d'empire et les privilèges de classe
visent à déjouer les efforts pour trouver une solution
aux problèmes économiques, à bloquer la marche en
avant pour fournir une nouvelle direction qui donnera le contrôle
aux producteurs réels, la classe ouvrière, et dont le but
ne sera
plus la recherche du profit privé pour les monopoles, mais la
garantie du bien-être du peuple.
La mobilisation du facteur humain/conscience sociale et
la création de rapports de production socialisés dans le
cadre d'un projet d'édification nationale prosocial permettront
la création d'une économie socialisée stable,
indépendante et diversifiée qui fait du commerce
international basé sur l'avantage réciproque, combat et
se développe en
dehors de l'emprise du système des États
impérialistes et de son libre-échange dominé par
les monopoles privés.
Le Canada a besoin d'une nouvelle direction pour son
économie qui s'oppose à la construction d'empire des
monopoles et de leurs profits privés pour les
privilégiés.
Le Canada a besoin d'une nouvelle direction pour
l'édification nationale sous la direction des producteurs
réels qui génère des profits publics dans
l'intérêt du plus grand nombre.
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