Le Marxiste-Léniniste

Numéro 84 - 29 avril 2009

Les gouvernements et les entreprises doivent s'acquitter de leurs responsabilités sociales

Les propriétaires du capital veulent des droits sans devoirs, des droits de propriété
sans responsabilité sociale. L'opposition de la classe ouvrière organisée veut une
alternative centrée sur l'être humain où les droits et les responsabilités sont harmonisés,
où les travailleurs et la société ont le premier droit de réclamation à la valeur
ajoutée selon de nouveaux arrangements.

L'autorité politique et économique actuelle détache arbitrairement les entreprises qui opèrent dans l'économie socialisée de leurs responsabilités sociales en tant que propriétaires et directeurs de l'économie. Une société moderne ne peut pas fonctionner avec cette séparation et cette négation de la responsabilité sociale.

Parlant de l'impact dévastateur des mises à pied sur vie des travailleurs, Rolf Gerstenberger, président de la section locale 1005 des Métallos, a fait remarquer que beaucoup parmi les milliers de travailleurs mis à pied au Canada sont inadmissibles à l'assurance-emploi et que parmi ceux qui sont admissibles, beaucoup ont déjà épuisé ou vont bientôt épuiser leurs prestations et seront forcés de faire une demande d'assistance sociale.

« Ils se retrouvent dans des situations difficiles et se demandent ce qu'ils peuvent faire », a-t-il dit à la conférence de presse du 1005 le 15 avril. « Cela a un véritable effet ravageur dans la vie des gens et le 1005 n'a pas du tout l'intention d'accepter la propagande qui dit que les travailleurs doivent prendre leur mal en patience et attendre la reprise de l'économie. C'est un problème réel et il faut des mesures d'urgence. »

À part prendre des mesures d'urgence pour assurer la poursuite de la production de biens et services lorsque des entreprises privées font faillite, Rolf a présenté deux demandes générales concernant la responsabilité sociale envers les travailleurs mis à pied :

1) Les entreprises et les gouvernements ont la responsabilité sociale de pourvoir aux besoins des travailleurs mis à pied au même niveau que lorsqu'ils travaillaient jusqu'à ce qu'ils retournent travailler.

2. Les entreprises ont la responsabilité sociale d'ou bien contribuer la valeur ajoutée nécessaire pour soutenir leurs employés pendant qu'ils ne travaillent pas, ou bien renoncer à leur droit de propriété de cette partie de l'économie socialisée qu'ils contrôlent. Une nouvelle entreprise publique se chargerait de répondre aux besoins de l'économie socialisée et de la responsabilité sociale envers les travailleurs et la société, suivant un plan discuté et approuvé par les travailleurs, la communauté et le gouvernement.

Les mesures proposées sont justes si l'on reconnaît le principe que dans une économie socialisée moderne, les travailleurs ont des droits du fait qu'ils sont les producteurs de la valeur ajoutée et les fournisseurs des services et que l'autorité politique et économique a la responsabilité sociale de faire respecter ce principe.

L'économie socialisée est la seule source de valeur ajoutée pour la population et la société

Que les travailleurs mis à pied soient maintenus à leur niveau de vie par l'assurance-emploi ou un autre programme social pour la durée de leur période de chômage, il demeure qu'il est juste et justifié que l'autorité politique et économique fasse respecter cette condition de la société moderne. La question se pose maintenant à savoir où l'État prend la valeur ajoutée nécessaire.

Les entreprises se plaignent qu'elles ne peuvent pas se permettre d'entretenir leurs travailleurs mis à pied parce que leurs bénéfices de société ont diminué, étant donné que les travailleurs ne produisent pas de valeur ajoutée ou ne fournissent pas de services. C'est une conséquence de la dissociation entre la propriété et du contrôle d'une partie de l'économie socialisée et les responsabilités sociales qui en découlent. Les entreprise veulent réclamer la valeur ajoutée produite par les travailleurs mais refusent d'assumer les responsabilités sociales qui découlent de la propriété et du contrôle.

Les propriétaires du capital embauchent des travailleurs lorsqu'ils sont assurés que le travail va augmenter leur capital. Ils les mettent à pied lorsqu'ils croient que la valeur ajoutée qu'ils produisent n'augmentera pas leur capital à cause d'une baisse des ventes, de la concurrence, de la baisse du prix du gros en-dessous du prix de production ou autre raison. Le droit commercial et l'autorité économique et politique actuelle supposent a priori que la justification donnée par les propriétaires du capital pour fermer une usine et mettre des travailleurs à pied, quelle qu'elle soit, les libère automatiquement de toute responsabilité sociale envers ceux qui sont mis à pied, c'est-à-dire ceux qui étaient la source des bénéfices de l'entreprise. Cette conception du monde centrée sur le capital, ce droit commercial et cette autorité ont un effet destructeur et antisocial et ont clairement fait leur temps. Ils ne correspondent pas aux conditions modernes et ne peuvent être tolérés dans une société dont la base économique est socialisée et qui se caractérise par la grande production industrielle employant les meilleures réalisations de la science et de la technologie.

Les entreprises supposent tout simplement que les travailleurs seront disponibles lorsqu'elles en auront besoin et qu'elles peuvent s'en défaire lorsqu'elles n'en ont plus besoin. Le droit commercial et l'autorité actuelle leur donnent le droit de supplanter les droits des travailleurs. Les propriétaires du capital rejettent leurs responsabilités envers les travailleurs et la société, et supposent nonchalamment que les travailleurs mis à pied vont recevoir des prestations d'assurance-chômage, d'assurance-santé ou de bien-être ou vont se débrouiller d'eux-mêmes. Ils refusent la responsabilité sociale mais ils veulent continuer d'être propriétaires d'une partie de l'économie socialisée et de décider de son sort. C'est à la fois irresponsable et dysfonctionnel.

Le phénomène permanent des mises à pied a comme conséquence qu'il y a en tout temps plus d'un million et demi de travailleurs en chômage, qui ne produisent pas de valeur ajoutée et ne fournissent pas de services. Il manque généralement d'emploi, dans certaines régions plus que d'autres, et la production de la valeur ajoutée pour répondre aux besoins de la société et de ses programmes sociaux est réduite de façon considérable. C'est une situation qui nécessite des mesures d'urgence et une alternative centrée sur l'être humain.

Les entreprises ont le privilège de profiter de leur propriété d'une partie de l'économie socialisée et refusent d'assumer le responsabilité que cela entraîne envers les travailleurs et la société lorsqu'elles réduisent la production, ferment des usines ou recourent à la sous-traitance à l'étranger, mais elles s'attendent quand même à ce que les travailleurs soient disponibles lorsqu'elles en auront besoin à nouveau et que les infrastructures économiques et sociales seront en place et opérationnelles. Il faut contester cette pensée et pratique antisociale et injuste. Ce système, cette pensée et cette autorité centrés sur le capital ne conviennent pas à condition d'une économie socialisée. Les travailleurs et leurs alliés doivent y opposer une alternative centrée sur l'être humain.

La crise économique est une crise pour les travailleurs et la société dans son ensemble, pas seulement pour ses différentes parties détenues en propriété privée

Les fermetures et les mises à pied créent une crise pour les individus, les collectifs et les affaires de l'État. Comment l'État peut-il s'acquitter de ses responsabilités sociales si les entreprises qui possèdent et contrôlent l'économie socialisée lui enlèvent les moyens de le faire ? L'État doit répondre à cette privation des moyens matériels de résoudre la crise en restreignant le droit de monopole et en prenant des mesures d'urgence pour récupérer la valeur ajoutée des entreprises et en assumer la propriété publique si elles refusent de maintenir la production et les services. On ne peut pas permettre aux entreprises de résoudre leur crise sur le dos du reste de la société. Nous avons vu que les entreprises refusent de prendre en considération le bien-être général de l'économie et du pays et qu'elles cherchent à sauver leurs empires mondiaux aux dépens de leurs installations au Canada, transférant le fardeau aux travailleurs avec les mises à pied et les demandes de concessions et insistant pour que l'État vienne au secours de leur capital avec des fonds publics. En plaçant leurs intérêts étroits en premier, elles rendent la situation d'ensemble pire pour les travailleurs et la société, et elles contribuent à approfondir et à prolonger la crise.

Les programmes sociaux nécessaires au maintien des travailleurs mis à pied doivent être vus comme une assurance socialement nécessaire, financée par la valeur ajoutée que le gouvernement perçoit régulièrement à titre d'impôts des sociétés. Présentement, le gouvernement ne dispose pas d'un fonds d'assurance adéquat parce que les entreprises paient le moins d'impôts possible. Les travailleurs sont forcés de s'appuyer sur les programmes existants, comme l'assurance-emploi, qui est inadéquate et à court terme, ou l'assistance sociale, qui est dérisoire et une attaque contre la dignité du travail. L'autorité politique a la responsabilité historique d'instituer des mesures d'urgence.

Mesures d'urgence

(D'autres propositions de mesures d'urgence sont discutées dans Le Marxiste-Léniniste du 22 avril 2009, numéro 79)

La somme nécessaire pour maintenir les travailleurs à leur niveau pendant toute la durée des mises à pied doit devenir une dette sociale pour l'entreprise qui fait les mises à pied, dette qu'elle devra rembourser au gouvernement lorsque la production reprendra après un maximum de trois mois d'oisiveté. L'entreprise doit commencer à rembourser cette dette à la société au plus tard trois mois après qu'un travailleur a été mis à pied, que celui-ci ait été rappelé ou pas. Cette dette sociale entraîne un droit de rétention du gouvernement sur la propriété de l'entreprise et il peut l'exercer si celle-ci ne paie pas. Si l'entreprise est incapable ou refuse de rembourser sa dette sociale une fois la date d'échéance dépassée, le gouvernement pourrait amorcer des procédures pour saisir la propriété et en faire une entreprise publique.

Les aciéries Stelco doivent continuer de produire. US Steel : utilisez-les ou perdez-les !

Dans le cas des mises à pied chez Stelco, par exemple, le monopole US Steel devrait déjà être tenu de commencer à rembourser sa dette sociale pour la première série de mises à pied. Les métallos ne devraient pas être forcés d'opter pour la retraite anticipée parce que les prestations d'assurance-emploi sont inférieures aux prestations de pensions et qu'ils pourraient bientôt épuiser leurs prestations d'assurance-emploi. US Steel doit être forcé par l'autorité gouvernementale de payer les métallos mis à pied au même niveau qu'avant.

Les mesures d'urgence doivent forcer US Steel à respecter son obligation sociale de maintenir les métallos mis à pied au niveau où ils étaient lorsqu'ils travaillaient et l'obliger à rembourser l'État pour tout l'argent public versé aux travailleurs mis à pied. S'il refuse de payer sa dette sociale, l'autorité gouvernementale a l'obligation de commencer les procédures légales pour la saisie de la propriété de Stelco en vue d'en faire une entreprise publique, de rallumer les hauts fourneaux et de rétablir la production à pleine capacité.

Les entreprises ne devraient pas avoir le droit d'abuser de leur propriété et du trésor public comme elles le font lorsqu'elles abandonnent les travailleurs à leur sort, sans assumer de responsabilité envers eux, l'économie et la société. Nous vivons dans une économie socialisée. Les actions des propriétaires du capital affectent directement la société, l'économie et le bien public, surtout le bien-être des travailleurs et des communautés dans lesquelles ils vivent. Elles ne tiennent compte que de leur intérêt étroit lorsqu'il est question des besoins de la société et de l'économie. Les propriétaires du capital refusent de participer à toute activité économique qui n'augmente pas leur capital. C'est en contradiction avec les besoins sociaux d'une économie complètement intégrée et avec les besoins des travailleurs qui doivent travailler et produire dans le cadre de l'économie socialisée pour vivre. Lorsque les entreprises ferment leur partie de l'économie socialisée, elles l'empêchent de produire de la valeur ajoutée et de fournir des services à pleine capacité. Elles sont protégées par un droit commercial dépassé qui défend le droit de monopole et le droit à la propriété privée des différentes parties de l'économie socialisée quand elles abandonnent leur responsabilité sociale et bafouent le droit public et le bien public. Cela ne doit pas être toléré. Le mouvement organisé de la classe ouvrière doit exercer des pressions sur l'autorité gouvernementale pour qu'elle restreigne le droit de monopole et adopte des mesures d'urgence et une alternative centrée sur l'être humain.

Selon le droit commercial actuel, les entreprises ont le droit d'embaucher des travailleurs et de s'en servir pour augmenter leur capital, mais ce même droit commercial ne les oblige pas à soutenir ces travailleurs lorsqu'elles considèrent qu'il n'est plus possible d'augmenter leur capital pour une raison ou une autre. Le droit commercial actuel reconnaît la nécessité de règles régissant l'activité des propriétaires du capital dans une économie socialisée, mais sans identifier la condition centrale de la société moderne : c'est-à-dire que les travailleurs ont des droits du fait qu'ils sont les producteurs de la richesse et les fournisseurs des services, et tous les membres de la société ont des droits du fait qu'ils sont des êtres humains. Le droit commercial actuel ne reconnaît pas que les droits des propriétaires du capital doivent être subordonnés aux droits des travailleurs et de la société. Il faut un droit commercial moderne qui change cette équation.

La société n'a pas d'autre source de valeur ajoutée que les travailleurs qui produisent dans le cadre d'une économie socialisée, mais le droit commercial déclare que les propriétaires des différentes parties de l'économie socialisée ont le premier droit de réclamation à la valeur ajoutée produite par les travailleurs et le droit de fermer la production si cela n'augmente pas leur capital. C'est une pensée et une pratique dépassées qui ne correspond plus au fait que ces parties privées de l'économie socialisée sont la seule source de valeur ajoutée pour les travailleurs, la société et ses programmes sociaux. D'autre part, le rôle que joue une partie donnée de l'économie socialisée intégrée est plus important pour la survie de la société que pour les intérêts étroits de ceux qui la possèdent et la contrôlent. Il faut de nouveaux arrangements où les décisions concernant la direction de l'économie sont publiques et appartiennent au peuple souverain, en particulier à la classe ouvrière. Les intérêts et les droits de l'ensemble doivent avoir préséance sur les droits de propriété de la minorité privilégiée. Le mouvement organisé de la classe ouvrière doit imposer une définition moderne du droit commercial qui reconnaît les droits des travailleurs en tant que travailleurs et que le droit de propriété des différentes parties de l'économie socialisée est subordonné aux droits des travailleurs et de la société.

Un autre aspect de la demande que les travailleurs reçoivent le même niveau de salaires et d'avantages sociaux lorsqu'ils sont mis à pied concerne la santé générale de l'économie socialisée, en particulier au niveau de la communauté. L'économie socialisée doit maintenir un certain niveau de demande pour les biens et services, au risque de sombrer dans la crise. Les travailleurs mis à pied doivent continuer de recevoir le même revenu, sinon c'est l'économie socialisée qui en souffre, surtout dans les communautés ou les régions où les mises à pied sont nombreuses.

Le cercle vieux de la production et de l'arrêt de production, de l'embauche et du licenciement, de l'expansion du capital et de la faillite doit cesser. Les entreprises font partie de la société et elles ont des responsabilités sociales. Elles ne peuvent pas être vues comme étant séparées de leur fonction dans l'économie socialisée. Les responsabilités envers les travailleurs ne se terminent pas lorsqu'ils sont mis à pied. Les responsabilités envers la société ne se terminent pas lorsque les entreprises réduisent la production ou ferment leurs portes. Le facteur humain/conscience sociale doit introduire la pensée rationnelle et la planification en matière d'économie.

Les fermetures et faillites et l'irresponsabilité doivent avoir des conséquences. Les propriétaires du capital monopoliste doivent assumer les conséquences sociales de leur échec lorsqu'ils ferment des opérations et jettent les travailleurs à la rue. Les propriétaires des différentes parties de l'économie socialisée sont d'abord responsables envers les travailleurs, la société et l'économie dans son ensemble et ensuite envers elles-mêmes en tant que propriétaires du capital.

On ne peut plus blâmer les marchés, le comportement et les mauvaises décisions pour les échecs de l'entreprise. L'échec des entreprises ou leur refus de s'acquitter de leurs responsabilités sociales signifie que l'entreprise publique et une alternative centrée sur l'être humain doivent avoir préséance sur le droit à la propriété privée des différentes parties de l'économie socialisée. Il est possible de surmonter la crise si la valeur ajoutée de l'entreprise publique est réinvestie dans la communauté sous forme de salaires, d'avantages sociaux et de pensions, si les gouvernements réinvestissent dans la société et les programmes sociaux les réclamations qu'ils font à la valeur ajoutée et si l'on augmente l'investissement dans les usines et les machines et par d'autres mesures pro-sociales, comme le contrôle public du commerce du gros et le développement d'une économie indépendante qui répond à ses besoins.

Les propriétaires du capital veulent des droits sans devoirs, des droits de propriété sans responsabilité sociale. L'opposition de la classe ouvrière organisée veut une alternative centrée sur l'être humain où les droits et les responsabilités sont harmonisés, où les travailleurs et la société ont le premier droit de réclamation à la valeur ajoutée selon de nouveaux arrangements.

Les travailleurs ont des droits du fait qu'ils sont les producteurs de la valeur ajoutée et les fournisseurs des services.

Les membres de la société ont des droits du fait qu'ils sont des êtres humains.

Luttons pour un droit commercial moderne et une alternative centrée sur l'être humain !

Les aciéries Stelco doivent continuer de produire. US Steel : utilisez-les ou perdez-les !

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