Le Marxiste-Léniniste

Numéro 43 - 2 mars 2009

Pour le cinquième anniversaire
du coup d'État en Haïti


Pour le cinquième anniversaire du coup d'État en Haïti
Troupes d'occupation étrangère, hors d'Haïti! Liberté et justice pour Haïti! - Réseau d'action Canada-Haïti
L'occupation étrangère accroît les souffrances - Roger Annis, Green Left Weekly
Les leçons d'Haïti - Yves Engler
Le racisme et la pauvreté en Haïti - John Maxwell, www.haitiaction.net

États-Unis
Arrêtez les déportations des Haïtiens! Légalisation maintenant! - Voice of Revolution

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Pour le cinquième anniversaire
du coup d'État en Haïti

Le 29 février était le cinquième anniversaire du coup d'État en Haïti et cette année les organisations membres du Réseau d'action Canada-Haïti et d'autres tiennent des assemblées publiques et une tournée pan-canadienne du journaliste et cinéaste Kevin Pina, avec le visionnement de son plus récent film Haiti : "We Must Kill the Bandits". Le film porte sur les lendemains du coup d'État de 2004 et montre que le Canada et les autres « amis d'Haïti » dans la communauté internationale ont chassé Aristide du pouvoir « pour détruire par la violence le mouvement du peuple haïtien pour le changement ». Selon Kevin Pina, « l'histoire, l'ampleur et la trajectoire du mouvement populaire des pauvres en Haïti, connu sous le nom de Lavalas », ne sont rien de moins que l'expression de l'« esprit des peuples des Caraïbes et de l'Amérique latine qui veulent être maîtres de leur destin. Les efforts pour détruire le parti Lavalas, menés d'abord par le gouvernement de Paul Martin et continués par celui de Stephen Harper, ne sont pas une intervention désintéressée. Ils représentent une forme brute d'intervention pour changer le paysage politique d'un autre pays par le meurtre, les faux emprisonnements et l'exil forcé. »

Le film a été visionné à Montréal le 18 février. Pour les autres visionnements et événements entourant l'anniversaire du coup d'État au Canada, cliquer ici.

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Troupes d'occupation étrangère, hors d'Haïti!
Liberté et justice pour Haïti!

Déclaration à l'occasion du cinquième anniversaire
du renversement du gouvernement élu en Haïti

En février cette année, le peuple haïtien commémore le cinquième anniversaire d'un événement marquant dans sa longue et fière histoire. Mais ce ne sera pas une célébration. Ce sera plutôt l'occasion de vives protestations pour condamner le renversement du gouvernement élu du président Jean-Bertrand Aristide le 29 février 2004. Ce sera l'occasion de condamner les décennies de domination étrangère qui ont amené le pays à la ruine, une situation qui s'est aggravée depuis 2004.

Le coup d'État illégal de 2004 a eu un impact extrêmement négatif sur le tissu social d'Haïti : rupture des services gouvernementaux, y compris l'éducation et la santé ; augmentation de la pauvreté ; déclin de la production agricole ; augmentation de la violence des gangs favorables au coup, des forces militaires étrangères et de la Police nationale d'Haïti ; augmentation de l'émigration d'Haïtiens instruits ; et accroissement des tensions au sein des familles à cause de tout ce qui précède.

L'économie affaiblie d'Haïti a de plus subi les contre-coups d'ouragans qui ont frappé l'île en succession rapide l'été dernier. Des centaines de personnes sont mortes et la production agricole a été lourdement endommagée. Les Gonaïves, quatrième plus grande ville du pays, gît toujours sous un mètre de boue séchée et durcie.

Les gouvernements étrangers se sont engagés à contribuer une centaine de millions de dollars en secours après les tempêtes. Presque rien n'a été reçu. C'est dans la suite des choses : depuis cinq ans l'ONU et les pays participants dépensent des centaines de millions de dollars chaque année pour soutenir leur mission militaire de 9 000 personnes mais presque rien pour le développement social et économique.

Le Canada a soutenu le renversement du gouvernement du président Aristide et des milliers d'autres élus en 2004. Des soldats des États-Unis, de la France et du Canada se sont adjoints des groupes de droite haïtiens pour consolider cet acte illégal. Les trois grandes puissances ont reçu le feu vert du Conseil de sécurité de l'ONU. Ils ont installé un régime de violation des droits humains de 2004 à 2006 qui a mené le pays à la ruine.

Aujourd'hui, les 9 000 policiers et soldats étrangers, provenant des trois grandes puissances ci-mentionnées, contrôlent le pays avec l'approbation du Conseil de sécurité de l'ONU. Ces trois puissances jouent un rôle prépondérant dans le financement du gouvernement haïtien et ont donc une influence importante sur ses précises de décisions politiques.

Le gouvernement canadien et son Agence canadienne de développement international disent dépenser 110 millions $ par année pour venir en aide à Haïti. Mais très peu de cet argent se rend aux simples Haïtiens. L'argent sert en majeure partie à soutenir les institutions de la domination étrangère, y compris les ONG et les agences de propagande qui ont soutenu le coup d'État de 2004 ou qui ont maintenu un silence complice durant les années qui ont suivi.

Les persécutions politiques qui remontent au coup d'État de 2004 se poursuivent. Elles comprennent notamment :

* Ronald Dauphin, toujours emprisonné après cinq ans.

* Le leader du mouvement pour les droits politiques Lovinsky Pierre-Antoine qu'on a « disparu » le 12 août 2007 et dont on est toujours sans nouvelles. Aussi incroyable que cela puisse paraître, son cas n'est pas mentionné dans le rapport de 2007 du Groupe de travail de l'ONU sur les disparitions forcées ou involontaires.

La doctrine de « la responsabilité de protéger » fut un des piliers idéologiques du renversement de 2004. Aujourd'hui, elle sert de plus en plus à justifier l'intervention militaire contre beaucoup de pays parmi les plus pauvres de la terre : du Venezuela à Cuba, du Soudan au Zimbabwe. Les leçons d'Haïti ont donc cette valeur additionnelle pour les peuples du monde.

Les Haïtiens luttent pour reconquérir la souveraineté de leur pays. Le mois dernier, le 16 décembre, des dizaines de milliers d'Haïtiens ont marché dans les rues de Port-au-Prince et ailleurs au pays pour réaffirmer leur opposition à l'occupation étrangère.

Le Réseau d'action Canada-Haïti tiendra des activités publiques dans au moins sept villes canadiennes pour commémorer le coup d'État de 2004 en Haïti, avec conférenciers et visionnement de films. Vers la fin mars, nous parrainons une délégation de syndicalistes qui ira passer une semaine en Haïti. Nous continuons d'aider à l'envoi de fournitures médicales aux intervenants de la santé. Nous vous invitons, vous et votre organisation, à vous joindre à nous lors de ces événements, à les co-parrainer. Participez à nos projets. Nous encourageons les médias locaux et nationaux à se joindre à nous dans l'examen de la situation en Haïti aujourd'hui.

NOUS DEMANDONS :

* Des réparations pour le peuple haïtien pour tous les dommages causés par l'occupation étrangère au cours des cinq dernières années.

* Une enquête sur les assauts des forces militaires de l'ONU à Cité Soleil le 6 juillet 2005 et le 22 décembre 2006. L'ONU est accusée par les résidants de la ville de « massacres » qui ont coûté la vie à des dizaines de personnes. Pas une seule organisation internationale de défense des droits humains n'a jusqu'à présent entrepris d'enquêter sérieusement les allégations de la communauté.

* La libération de tous les prisonniers politiques, dont Ronald Dauphin. Qu'on mette fin à l'effroyable surpeuplement des prisons en Haïti.

* Que le Groupe de travail de l'ONU sur les disparitions forcées ou involontaires mène une enquête indépendante sur la disparition de Lovinsky Pierre-Antoine.

* Une enquête indépendante sur le rôle du Canada dans le renversement du gouvernement élu d'Haïti en 2004. L'enquête doit rendre publics tous les documents relatifs à la réunion de l'« Initiative d'Ottawa sur Haïti » tenue sur les abords du lac Meech, au Québec, les 31 janvier et 1er février 2003, où furent conçus les plans en vue de renverser le gouvernement haïtien. Elle doit faire un examen complet des programmes d'aide du Canada en Haïti, y compris la participation prépondérante au système judiciaire toujours dysfonctionnel et au service de police nationale d'Haïti.

Pour communiquer avec le Réseau d'action Canada-Haïti et ses chapitres :

Roger Annis, Vancouver 778 858 5179
Chris Semrick, Nanaimo 250 616 7009
Regan Boychuk, Calgary 403-479-8637
Macho Philipovich, Wpg 204 783 2571
Niraj Joshi, Toronto 416 731 2325
Stuart Neatby, Ottawa 613 293 9480
Nik Barry Shaw, Montréal 514 225 5984
Tracy Glynn, Frédéricton 506 458 8747

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L'occupation étrangère accroît les souffrances

Il y a cinq ans, le 29 février 2004, le président élu d'Haïti, le populaire Jean-Bertrand Aristide, était renversé par une rébellion paramilitaire de droite avec le soutien matériel et politique indispensable des États-Unis, de la France, du Canada et de sa voisine la République dominicaine.

Des dizaines, voir des centaines, de milliers d'Haïtiens vont sans doute commémorer cet événement à la fin du mois avec des expressions de colère dirigées contre l'occupant étranger qui s'est emparé du contrôle de leur pays et l'a mené à la ruine.

L'organisme du Conseil de sécurité de l'ONU connu sous l'acronyme MUNISTAH joue un rôle dominant dans les affaires du pays depuis 2004. C'est la seule mission politique/militaire de l'histoire de l'ONU à intervenir dans un pays membre sans l'assentiment de son gouvernement ou des forces politiques majeures du pays.

La MUNISTAH comprend un personnel militaire, policier et administratif de 10 000 personnes. Elle dépense environ 600 millions $US par année, le double du budget annuel du gouvernement national d'Haïti.

Le Brésil a joué le rôle dirigeant pour ce qui est de l'aspect militaire de l'opération.

Le 16 décembre dernier, des dizaines de milliers d'Haïtiens ont manifesté dans tout le pays pour protester contre la brutalité des patrouilles policières et militaires de la MUNISTAH. Ils ont condamné la mission pour son refus d'utiliser ses ressources pour combattre l'écrasante pauvreté dans ce pays.

Un pays en ruine

La situation en Haïti s'est aggravée à tous les niveaux depuis 2004. La pauvreté et la faim sont à la hausse. La production agricole est faible et a subi les contre-coups de quatre ouragans de suite l'été dernier.

La malnutrition est répandue et des poches de famines sont apparues après les tempêtes. On estime que le taux de chômage est de 80 %.

La moitié des enfants d'Haïti ne vont pas à l'école. La moitié de ses neuf millions d'habitants n'ont pas accès à des soins médicaux. À ce chapitre, la situation serait bien pire encore si ce n'était des réseaux de cliniques administrés par le gouvernement cubain, Zanmi Lasanté (fondé par le docteur Paul Farmer et son projet Partenaires en Santé) et Médecins sans frontières.

Le peuple haïtien est à bout de patience et veut que la mission cesse. Les manifestations de mécontentement grandissent.

La visite du président René Préval à Washington au début de février a été l'occasion d'une autre expression de la colère populaire. Il a rencontré la secrétaire d'État Hillary Clinton. Il fut le premier chef étranger à le faire. Il a demandé à son gouvernement et aux institutions financières internationales une aide immédiate de 100 millions $ pour Haïti.

« La stabilité politique a été rétablie, a-t-il dit, mais ce qu'il faut c'est créer des emplois. »

Préval a également demandé que cesse la pratique suivant laquelle toute l'aide monétaire des États-Unis à Haïti passe par des organisations non gouvernementales (ONG). Elle devrait plutôt aller directement au gouvernement souverain, qui selon René Préval peut faire un meilleur travail dans la plupart des cas.

Nous assistons à une situation explosive en Haïti, non seulement parce que tant d'argent des ONG est gaspillé en salaires étrangers et en bureaucratie mais aussi parce que les grandes puissances se servent des ONG comme d'une arme contre la souveraineté haïtienne.

La plupart des grandes ONG internationales qui se trouvent en Haïti ont ou bien soutenu le renversement d'Aristide en 2004, ou bien été complices par leur silence.

Les organisations des droits de l'homme comme Amnistie international et le Human Rights Watch basé à Washington ont pour la plupart gardé le silence devant les violations des droits humains du régime mis en place par les puissances étrangères entre 2004 et 2006, et ont une part de responsabilité dans l'emprisonnement, l'exil ou le meurtre de milliers de sympathisants d'Aristide.

Les affrontements politiques grandissent

De récents événements montrent que la « stabilité politique » n'a pas été rétablie depuis l'élection de René Préval en février 2006.

Au début de février, le Conseil électoral provisoire chargé de surveiller le déroulement des élections au pays a annoncé qu'il avait refusé d'inscrire tous les 17 candidats qui voulaient se présenter pour Fanmi Lavalas à l'élection sénatoriale du 19 avril prochain. Il s'agit du parti fondé par Aristide et ses collègues en 1996. Douze des 30 sièges du Sénat doivent être soumis à une élection.

Le Conseil a cité des inexactitudes dans les formulaires de mise en candidatures de ces 17 candidats. Après avoir rendu sa décision publique, le Conseil a quitté ses bureaux et barré les portes par crainte de la colère que cela allait provoquer.

À cause de divisions au sein du parti Lavalas, celui-ci présente deux listes de candidats à l'élection.

Un retour d'Aristide ?

Le Fanmi Lavalas s'était vu interdire de participer à l'élection de 2006 dans le contexte de la vague de répression politique du régime en place entre 2004 et 2006.

Les conditions se sont améliorées quelque peu quelques mois plus tard, avec la tenue d'une élection parlementaire imparfaite, mais la répression avait beaucoup affaibli la capacité du parti à profiter des ouvertures politiques qui suivirent l'élection de René Préval.

Des voix s'élèvent dans les milieux populaires en faveur d'un retour du président chassé par la force, ce qui veut également dire un retour des réformes progressistes que son gouvernement avait instituées et tenté d'instituer.

Aristide vit en exil en Afrique du Sud. En Haïti et parmi les deux millions d'Haïtiens vivant à l'étranger, on se demande quand il pourra retourner chez lui.

Sa sécurité serait vulnérable. Les puissances étrangères feraient sans doute tout en leur pouvoir pour bloquer son retour, parce qu'Aristide serait sans doute accueilli par de grandes manifestations de joie, ce qui ferait mentir les prétentions qu'il était un chef impopulaire dont le « retrait » en 2004 avait été bien accueilli par la majorité.

Un retour d'Aristide créerait des attentes parmi la population qui seraient difficiles à satisfaire, vue l'hostilité des puissances étrangères et le fait qu'elles ont la main sur les cordons de la bourse du gouvernement et de l'État.

Forum de Boston

Un forum public à Boston le 27 janvier a permis de faire ressortir que le non-respect de la souveraineté d'Haïti vient, selon les participants, de ce que le pays est pauvre et sous-développé.

Un des conférenciers, Brian Concannon, de l'Institut for Justice and Democracy in Haiti (IJDH), basé en Orégon, a expliqué en entrevue qu'il est difficile pour les grandes puissances d'aider à l'amélioration du système judiciaire d'Haïti à cause de leur appui au coup d'État de 2004 et de la vague de persécution politique qui a suivi.

Elles n'ont aucune crédibilité auprès des Haïtiens lorsqu'elle font des remontrances aux juges et aux officiers de police d'Haïti à propos du respect des lois et des droits humains.

L'IJDH travaille en partenariat avec le plus important office des droits humains en Haïti, le Bureau des avocats internationaux.

Concannon espère que la nouvelle administration à Washington mettre fin à la pratique flagrante d'intervention qui a mené au coup d'État de 2004.

Mais il ajoute que des changements plus en profondeur sont nécessaires. « Les États-Unis en particulier doivent mettre fin à la longue et triste histoire d'ingérence dans les affaires politiques d'Haïti. C'est le point de départ pour un changement auquel nous pourrons croire en Haïti, le respect de la souveraineté du pays et des choix politiques de son peuple. »

Paul Farmer, auteur de The Uses of Haiti et fondateur du groupe renommé Partenaires en Santé, a dit à la réunion de Boston : « Des dix pays dans lesquels j'ai travaillé, c'est en Haïti que les politiques de privatisation et de détournement de l'aide et des fonds de charité vers des agences privées plutôt que publiques sont le plus poussées à l'extrême. »

« Au cours des huit dernières années aux États-Unis, par exemple, la grande majorité de l'aide à Haïti est passée par le secteur privé — ONG, groupes religieux, etc. Très peu est allé aux agences du secteur public.

« Bien entendu, il est difficile de savoir ce que les gouvernements haïtiens feront [si le financement étranger leur était remis directement] parce qu'ils doivent constamment se soucier de la possibilité d'être renversés par un coup d'État violent. »

Le partenaire de Partenaires en Santé en Haïti, Zanmi Lasanté, possède un réseau de cliniques médicales qui atteint un million de personnes, jusque dans les régions les plus éloignées.

L'acteur Matt Damon a pris la parole à la réunion pour parler de sa visite en Haïti en septembre 2008, après que le pays ait été frappé par les ouragans. Il avait été invité par la vedette internationale de la musique originaire d'Haïti Wyclef Jean à faire une tournée des régions ravagées.

Il a qualifié la pauvreté qu'il a vue de « presque indescriptible. Une pauvreté extrême, des gens qui vivent avec seulement 1,25 $ par jour ou moins, des catastrophes naturelles, des ouragans, en plus. Aucun être humain ne devrait être obligé de vivre de cette façon. »

Damon a dit qu'Haïti a besoin d'« un plan Marshall », en référence à la reconstruction massive en Europe après la Deuxième Guerre mondiale.

* Roger Annis est allé en Haïti en 2007 comme partie d'une délégation d'enquête sur les droits humains. Il est le coordonnateur du Réseau d'action Canada-Haïti et son affilié à Vancouver, le Haiti Solidarity BC. Le forum du 27 janvier à Boston peut être visionné sur le site web de Partenaires en Santé.

(Traduit de l'anglais par Le Marxiste-Léniniste)

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Les leçons d'Haïti

Haïti peut vous en apprendre beaucoup sur la dure réalité des affaires sociales.

Ce qui est sans doute le plus grand exemple de libération de l'histoire de l'humanité est sorti des griffes de l'économie de plantation dans sa forme la plus barbare.

La Révolution haïtienne de 1791-1804 fut à la fois un lutte contre l'esclavage, le colonialisme et la suprématie blanche. Infligeant la défaite aux empires français, britannique et espagnol, elle mena à la libération de tous sans égard à la couleur de la peau, des décennies avant que cette idée ne trouve preneur en Europe ou en Amérique du Nord.

Malheureusement, l'histoire d'Haïti démontre aussi avec quelle fluidité l'Europe (et l'Amérique du Nord) est passée du colonialisme formel au néo-libéralisme. Formellement « indépendant » pendant plus de deux siècles, ce sont les forces extérieures qui ont longtemps façonné les affaires de ce pays.

L'isolement, l'asphyxie économique, la dépendance par la dette, la diplomatie de la canonnière, l'occupation, les dictatures soutenues de l'extérieur, les programmes d'ajustement structurel et de « promotion de la démocratie », Haïti a connu la manipulation politique étrangère sous ses différentes formes.

Un coup d'État très canadien

Plus récemment, le gouvernement élu de Jean-Bertrand Aristide fut déstabilisé puis renversé le 29 février 2004 par les États-Unis, la France et le Canada, ce qui a été suivi d'une vague de répression politique et marqué le début de l'occupation de l'ONU, qui continue à ce jour.

À l'approche du cinquième anniversaire du coup d'État, il y a trois leçons importantes à retenir de cette intervention. D'abord, la doctrine de la « responsabilité de protéger » parrainée par le Canada, que beaucoup veulent inscrire dans le droit international, n'est guère plus qu'un prétexte pour l'intervention impérialiste. Les porte- parole du Parti libéral ont invoqué « la responsabilité de protéger » pour couper l'aide et envahir Haïti, et pourtant l'intervention a mené à la ruine d'une population déjà appauvrie.

De gardiens de la paix en guerriers de classe

La deuxième leçon est que les « gardiens de la paix » peuvent servir à mener une guerre de classes brutale. Durant les deux années qui ont suivi le coup d'État, les soldats de l'ONU ont apporté un appui indéfectible et indispensable à l'offensive violente de la police contre les communautés pauvres et contre des manifestations pacifiques réclamant le retour du gouvernement élu.

Les forces onusiennes ont aussi participé directement à cette campagne de pacification politique par la violence, avec ses nombreuses offensives « anti-gang » dans les quartiers pauvres de Port-au-Prince. Les plus horribles de ces assauts ont eu lieu le 6 janvier 2005 et le 22 décembre 2006 et fait ensemble 35 morts et des dizaines de blessés parmi la population civile de forte densité à Cité Soleil (un bastion d'appui à Aristide).

En avril 2008, les troupes onusiennes ont démontré encore une fois que leur objectif premier en Haïti est de défendre le statu quo. Elles sont intervenues dans des émeutes qui ont eu lieu face à la montée fulgurante des prix des aliments et tué plusieurs manifestants. (On voit l'horrible brutalité des forces de l'ONU dans le film de Kevin Pina, Haiti : The UNtold Story, qui sera présenté partout au Canada dans les semaines qui viennent.)

Haïti : un laboratoire d'ONG complices

Enfin, Haïti offre un exemple de comment des ONG aux prétentions « progressistes », financées par des gouvernements occidentaux, agissent comme instrument de l'impérialisme. Parce qu'elle est une société très vulnérable où les ONG ont beaucoup d'influence, Haïti est en quelque sorte un laboratoire pour les ONG. Selon certaines estimés, c'est en Haïti que l'on trouve le plus grand nombre de ONG de soutien au développement per capita de tous les pays du monde et la vaste majorité des services sociaux du pays sont administrés par des ONG haïtiennes ou étrangères.

Leur position d'influence en Haïti offre un clair aperçu des pires tendances des ONG financées par les gouvernements occidentaux. Beaucoup d'ONG ont joint leur voix à celles de l'administration Bush, d'Ottawa et d'une poignée de groupes armés qui appelaient au renversement du président démocratiquement élu d'Haïti en 2004. S'ils se sont plaints à plusieurs reprises de violations des droits humains sous le gouvernement élu, ces groupes (Développement et paix, Droits et démocratie, Oxfam Québec, Alternatives, etc.) ont fermé les yeux sur l'accroissement des atteintes aux droits humains après le coup d'État et certains ont même nié qu'elles ont eu lieu.

Un rapport publié par Alternatives (le plus grand partisan du Forum social mondial au Québec) en janvier 2008, avec l'aide financière du gouvernement fédéral, donne un aperçu de l'attitude coloniale des ONG face à Haïti : « Dans un pays comme Haïti, où la culture démocratique n'a jamais eu prise, le concept de bien commun, d'élection et de représentation se limite aux élites instruites, et en particulier à ceux qui ont reçu une formation citoyenne au sein des mouvements sociaux. » Selon Alternatives, les Haïtiens ne sont pas assez malins pour savoir ce qui est bon pour eux, à moins d'avoir été éduqués par une ONG étrangère. (Pour un compte-rendu détaillé du rôle des ONGs financées par des gouvernements occidentaux en Haïti, voir les trois derniers rapports de Press for Conversion ou Damming the Flood de Peter Hallward.)

Quand on cherche à faire entendre raison à ces gens, on s'aperçoit que l'information factuelle et l'argument rationnel ont très peu d'impact sur des groupes qui reçoivent des millions de dollars du gouvernement canadien pour leur travail en Haïti. Il est très difficile de poursuivre des objectifs progressistes dans un pays considéré comme « plus haute priorité » dans les coulisses du pouvoir à Ottawa.

Et avec l'intervention en Haïti, qui n'attire pas autant l'attention, disons, que l'invasion de l'Irak, ces ONG subissent moins de pression de la base pour abandonner leurs bienfaiteurs gouvernementaux.

Contrairement à ce que l'on pourrait croire au Canada, les ONG financées par les gouvernements occidentaux font l'objet de beaucoup de critique en Haïti. La plupart des Canadiens aux idées progressistes les considèrent comme faisant partie de la solution au problème de la pauvreté mondiale, mais dans les pays où ces groupes vont « aider », ils ne sont pas vus du même oeil. Des voix provenant de tout l'éventail politique d'Haïti se sont élevées contre les ONG de soutien au développement qui contribuent à saper le gouvernements haïtien.

Il y a quelques mois, le journal de gauche Haïti Progrès qualifiait les ONG du pays de « mafia » et le 5 février le président d'Haïti, René Préval, demandait à Washington de cesser d'acheminer l'aide par la voie des ONG.

En fin de semaine, le 28 février, des milliers d'Haïtiens vont encore une fois manifester contre le coup d'État et exprimer leur opposition à la responsabilité de protéger, aux casques bleus de l'ONU et aux ONG financées par les gouvernements occidentaux.

* Yves Engler est l'auteur du livre qui paraîtra bientôt The Black Book of Canadian Foreign Policy et de plusieurs autres. Si vous désirez aider à l'organisation d'une rencontre dans le cadre de la tournée de promotion du livre en mai et juin, écrivez à : yvesengler[point]hotmail[point]com.

(Traduit de l'anglais par Le Marxiste-Léniniste)

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Le racisme et la pauvreté en Haïti

Le peuple haïtien est aussi pauvre que puissent l'être des êtres humains. Selon les statisticiens de la Banque mondiale et les autres qui spéculent sur combien de seigneurs peuvent danser sur la tête d'un paysan, Haïti doit être le deuxième, troisième ou quatrième plus pauvre pays au monde.

Dans le cas de Haïti, les statistiques importent peu.

Lorsqu'un grand nombre de gens sont réduits à manger littéralement du sol (de la terre ou de l'argile), il est impossible d'imaginer un degré de pauvreté plus scandaleux, plus épouvantable, plus dégradant et plus inhumain.

En octobre 2008, le président de la Banque mondiale a visité Haïti. Cet homme, Robert Zoellick, est un capitaliste expert en questions financières, un ancien partenaire de la banque d'investissements Goldman Sachs dont les 22 000 courtiers ont gagné chacun en 2007 des primes annuelles moyennes de plus de 600 000 $.

L'an passé, Goldman Sachs a payé plus de 18 milliards $ en primes à ses courtiers, soit 50 % de plus que le PIB produit par les 8 millions de Haïtiens.

Le président de Goldman a reçu plus de 70 millions $ et ses lieutenants, tels que le fut à un moment donné Zoellick, ont chacun empoché plus de 40 millions $.

Il doit être évident pour quiconque qu'une personne comme Robert Zoellick va être totalement perplexe devant la situation en Haïti quand on sait que son allocation pour divertissement pourrait probablement nourrir la population entière pendant un jour ou deux. Il n'est pas difficile d'imaginer que M. Zoellick ne puisse pas comprendre pourquoi Haïti a besoin d'un moratoire sur la dette.

Haïti est actuellement forcée par la Banque mondiale et ses frères sangsues tels que le Fonds monétaire international (FMI), de payer plus de 1 million $ par semaine pour satisfaire les dettes encourues par les (dictatures appuyées par les États-Unis de) Duvalier et des tyrannies successives. Haïti doit rembourser cette dette pour prouver qu'elle est admissible à « l'aide » des Institutions financières multilatérales (IFM).

Un million de dollars par semaine pourrait subvenir aux besoins en nourriture de tout le monde Haïti, ne serait-ce qu'à un niveau minimal (ne pas être forcé de manger des tartines faites de terre). Au lieu de cela, les Haïtiens exportent cet argent pour payer les salaires de gens tels que Zoellick.

Mais Zoellick ne voit pas les choses ainsi. Selon le site de la Banque mondiale, la banque est en affaires pour éliminer la pauvreté. Au rythme qu'elle le fait en Haïti, j'estime que la Banque mondiale sera en affaires pour éliminer la pauvreté pour 18 000 ans encore

Les raisons pour lesquelles Haïti vit dans l'état actuel sont très simples. Il y a quatre ans de cela, les États-Unis, le Canada et la France, qui se considèrent tous comme des nations civilisées, se sont associés pour renverser le gouvernement démocratique de Haïti. Ils ont fait cela pour plusieurs raisons toutes aussi excellente l'une que l'autre :

- Il y a 200 ans de cela, Haïti a défait les grandes puissances de l'époque, la France (par deux fois), la Grande-Bretagne et l'Espagne, afin d'établir son indépendance et pour abolir l'esclavage dans les plantations. C'est impardonnable.

- Malgré qu'au début du siècle précédent, elle ait été bombardée, mitraillée et occupée par les États-Unis, malgré l'appui américain à une armée haïtienne tyrannique et brutale maintenue pour garder les autochtones à leur place, les Haïtiens ont persévéré à reconquérir leur indépendance. Ayant renversé Duvalier et ses successeurs, les Haïtiens ont entrepris d'élire comme président un petit prêtre noir de paroisse qui est devenu leur héros en défiant les forces du mal et de la tyrannie.

- Le nouveau président de Haïti, Jean-Bertrand Aristide, a refusé de vendre (privatiser) les quelques avoirs détenus par le gouvernement (avant tout, les services publics) ;

- Aristide a aussi insisté que la France devait à Haïti plus de 25 milliards $ en remboursement, qui est le prix du sang extorqué à Haïti au XIXe siècle, à titre de prétendue indemnisation payée à la France pour la perte de sa plus riche colonie et pour permettre à Haïti d'avoir le droit de commercer à l'échelle internationale ;

- Aristide a menacé l'hégémonie de la classe dirigeante des « élites », en grande partie expatriées, dont les liens américains leur permettaient de continuer l'exploitation parasitaire et le pillage économique d'Haïti suite à l'occupation américaine.

- Comme Cuba, on croit que Haïti possède dans sa zone économique d'immenses réserves pétrolières sous-marines, plus grandes que les réserves actuelles des États-Unis

- Haïti demeure une base idéale à partir de laquelle attaquer Cuba.

L'attitude américaine envers Haïti est fondée historiquement sur la désapprobation américaine d'un État noir libre non loin de ses côtes où a fleuri une économie basée sur les plantations maintenues par des esclaves. Cette attitude était exprimée de manière concise par Thomas Jefferson qui déclara qu'un homme noir équivaut à trois cinquième d'un homme blanc. Cette remarque devint un archétype dans la bouche de William Jennings Bryan, le secrétaire d'État sous le président Woodrow Wilson, qui protesta auprès de Wilson en déclarant : « Imaginez ! Des nègres qui parlent français ! »

Ils semblent bien évident que les Haïtiens ne savent pas se tenir à leur place. En février 2004, l'Institut républicain international, sous la gouverne de John McCain et avec l'aide du secrétaire d'État Colin Powell, USAID et la CIA, a enlevé de force Aristide et son épouse et les a transportés vers la République Centrafricaine en tant que « fret » à bord d'un avion normalement affrété pour « extradé » les terroristes vers l'Égypte, le Maroc et l'Ouzbékistan, selon une entente conclue avec les États-Unis afin de les torturer.

Avant que M. Zoellick se rende en Haïti la semaine dernière, la Banque mondiale a annoncé que la visite de M. Zoellick « soulignerait l'appui tangible de la Banque envers ce pays ». M. Zoellick d'ajouter : « Il faut donner une chance à Haïti. La communauté internationale a besoin de relever ce défi et d'appuyer les efforts du gouvernement et du peuple haïtien. »

« Si Robert Zoellick veut accorder une chance à Haïti, il devrait commencer en annulant sans condition la dette de Haïti », a déclaré Brian Concannon de l'Institut pour la justice et la démocratie en Haïti. « Au lieu de cela, la Banque mondiale qui a été prétendument fondée pour combattre la pauvreté, continue d'insister sur le remboursement de la dette alors que les Haïtiens crèvent de faim et sont littéralement embourbés. »

« Après plus de quatre ouragans en un mois et une escalade de la crise alimentaire, c'est scandaleux qu'on demande à Haïti d'attendre encore six mois avant de voir un allégement de sa dette », a déclaré Neil Watkins, coordonnateur national pour Jubilee USA Network.

« La dette d'Haïti est à la fois onéreuse et odieuse », a ajouté le docteur Paul Farmer de Partenaires en Santé. « Les paiements tuent littéralement les gens, puisque chaque dollar envoyé à Washington pourrait être utilisé pour fournir des soins de santé, des programmes en nutrition et alimentation, de l'infrastructure dont il y a un urgent besoin et de l'eau potable. La moitié des prêts furent donnés aux Duvalier et aux autres dictatures et dépensés pour des articles de luxe présidentiels et non pour des programmes de développement pour les démunis. M. Zoellick devrait s'avancer et appuyer le gouvernement haïtien en annulant la dette maintenant. »

« L'annulation sans condition de la dette est le premier pas pour s'attaquer à la crise humanitaire en Haïti », selon Nicole Lee, directrice de TransAfrica Forum. « Il y a aussi un urgent besoin d'un changement de la politique américaine envers Haïti, d'une situation ou elle confine le pays à un endettement constant à une situation qui appuie le développement de solutions domestiques durables. »

Les citations mentionnées dans ce texte proviennent d'un appel des organisations citées dans cet article.

Tout autre commentaire serait superflu.

(Traduit de l'anglais par Le Marxiste-Léniniste)

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États-Unis

Arrêtez les déportations des Haïtiens!
Légalisation maintenant!

Le Service de l'immigration et des frontières (Immigration and Customs Enforcement, ICE) prévoit déporter 30 000 Haïtiens, dont plusieurs ont vécu ici pendant plusieurs années avec des enfants ou des conjoints qui sont citoyens. ICE se prépare à capturer les personnes impliquées et à les détenir dans des camps d'internement à Miami. Il a déjà placé 598 personnes dans ces camps et en a obligé 243 à porter des bracelets électroniques aux chevilles. Les Haïtiens sont criminalisés et déportés, bien que plusieurs d'entre n'ont commis aucune infraction.

À l'audition des ordres de déportations, des activistes à Miami ont immédiatement organisé une manifestation. Ils demandent la fin des arrestations et des déportations des Haïtiens, le droit de travailler et la libération immédiate des centaines d'Haïtiens et autres immigrants emprisonnés dans des centres de détentions à la grandeur du pays. Les camps de détention offrent des conditions épouvantables, pourtant les Haïtiens et autres sont obligés d'y rester pour des périodes prolongées.

C'est une punition particulièrement inhumaine et cruelle que d'obliger des dizaines de milliers d'Haïtiens à rentrer chez-eux en ce moment, alors que les gens à Haïti font face à des conditions où ils n'ont « ni maison, ni emploi, ni nourriture ». Les tempêtes et ouragans qui ont frappé Haïti équivalaient à 10 Katrina. Le rétablissement a été d'autant ralenti par le fait que les États-Unis font tout pour s'assurer que les dettes d'Haïti ne soient pas annulées, que les réparations ne soient pas versées et que même les envois d'argent des Haïtiens vivant aux États-Unis soient arrêtés alors que des dizaines de milliers d'entres eux sont déportés. Nous disons NON ! Non aux déportations ! Légalisation pour les Haïtiens et tous les immigrants maintenant !

Les activistes dénoncent également la pratique de deux poids deux mesures du gouvernement qui permet aux Cubains d'obtenir immédiatement la citoyenneté alors que les Haïtiens et tous les autres immigrants se voient nier un statut légal et des dizaines de milliers sont déportés. Dans les deux cas, les actions du gouvernement sont conçues pour nuire à la lutte des peuples pour leurs droits, incluant leur droit de tracer leur propre voie de développement, libre de l'ingérence étrangère.

Cinquième anniversaire du coup d'État contre Haïti appuyé par les États-Unis

L'impérialisme américain a garanti qu'Haïti demeure un des pays les plus pauvres au monde. Les impérialistes n'ont jamais pardonné au peuple haïtien de s'être soulevé et d'avoir aboli l'esclavage alors que cette pratique existait toujours aux États-Unis. Ils lui ont imposé des dictateurs impitoyables, tels les Duvalier. Plus récemment, les États-Unis étaient derrière le coup d'État de 2004 qui a renversé le président démocratiquement élu, Jean-Bertrand Aristide, et l'a envoyé en exil. Les institutions financières dominées par les États-Unis telles la Banque mondiale et de Fonds monétaire international (FMI) refusent toujours d'annuler les dettes d'Haïti, même quand le pays a été ravagé par les grandes tempêtes. Les États-Unis et la France, le colonisateur qui a précédé les États-Unis, ont tous les deux refusé de payer des réparations pour les crimes et la destruction en Haïti.

Malgré tout cela, le peule haïtien va de l'avant imperturbable, résistant à l'impérialisme et son esclavage et luttant pour ses droits nationaux et sociaux. En décembre, de nombreuses manifestations ont eu lieu pour exiger le départ de toutes les puissances étrangères d'Haïti, le retour d'Aristide et que des réparations soient payées maintenant. Le 28 février, le cinquième anniversaire du coup d'État, d'autres actions auront lieu.

Voice of Revolution salue le peuple haïtien et ses contributions à la lutte contre l'impérialisme et demande des réparations immédiates, l'annulation des dettes et la fin des déportations !

* Voice of Revolution est publié par l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis.

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