Numéro 7
Juillet 2024
Non à la création d'un gouvernement de
guerre au
Canada !
Sortons le Canada de l'OTAN ! Démantelons l'OTAN !
Vaste opposition à l'OTAN et à la
prise
de contrôle américaine de l'économie et des institutions
du
Canada
• Opposition à la mainmise du Pentagone sur le projet de mine de graphite à ciel ouvert au Québec
• Appropriation du
sous-sol du Québec et
du Canada par les États-Unis
• La pétition
« Pas
de nickel pour le génocide »
dépasse trois mille signatures
• Tentative honteuse de rallier les Canadiens aux préparatifs de guerre lors de la fête du Canada
Une série de lois anti-travailleurs adoptées au Québec
La Loi 51, Loi modernisant l'industrie de la construction
Projet de loi
69, Loi
assurant la gouvernance responsable
des ressources énergétiques
• Opposition vive et immédiate d'organisations syndicales à la privatisation accrue d'Hydro-Québec
Le vol flagrant des biens publics en Ontario
• Les grévistes de la Régie des alcools de l'Ontario défendent leurs droits et les droits de tous
• Entrevue
avec un
travailleur de longue date
de la Régie des alcools de l'Ontario
• Privatisation systématique de la LCBO
• Un recours effréné aux pouvoirs de police de l'exécutif pour imposer la privatisation
Un autre exemple flagrant de vol du bien public
• Des intérêts privés prennent le contrôle du conseil municipal de Vancouver
Élection partielle dans la circonscription fédérale de Toronto–St. Paul's
• Prise de position en faveur du renouveau politique
• La signification de la défaite libérale
Non à la création d'un gouvernement de
guerre au
Canada !
Sortons le Canada de l'OTAN ! Démantelons l'OTAN !
Une loi ratifie les protocoles de l'OTAN de 1952 pour permettre les installations de l'OTAN au Canada
Alors que de plus en plus de voix au Canada et dans le monde s'élèvent contre l'expansion dangereuse et belliqueuse de l'OTAN et exigent sa dissolution, le Parti marxiste-léniniste du Canada (PMLC) a appris que le gouvernement Trudeau a glissé dans le budget 2023 une loi visant à ratifier des accords de l'OTAN datant de l'époque de sa fondation. Ces accords permettent l'établissement d'opérations militaires de l'OTAN au Canada. Le gouvernement Trudeau présente la chose comme étant sans importance, laissant entendre qu'il s'agit tout simplement de ratifier des arrangements qui ont été conclus à l'époque, mais la réalité est que l'adoption de cette loi en catimini montre quelle attention est portée à la demande actuelle des États-Unis/OTAN de faire du Canada une zone de guerre.
Cela se fait en permettant une plus grande pénétration de l'OTAN dans diverses sphères de la vie du Canada, depuis la recherche dans les universités à l'incitation financière aux jeunes entreprises dans les technologies pour qu'elles mettent leurs compétences au service de l'agression, de la destruction et de la guerre, l'installation d'institutions de l'OTAN au Canada jusqu'à la militarisation tous azimuts de la culture. Cela comprend notamment des projets liés à l'intégration de l'économie canadienne à l'économie de guerre des États-Unis, y compris le rachat de mines par le Pentagone et des stratagèmes pour payer les riches pour les véhicules électriques et les infrastructures afin d'améliorer les corridors de transport, d'énergie, de communication et de sécurité entre le Canada, les États-Unis et le Mexique.
L'attention à régler tous les moindres détails montre certainement à quel point le gouvernement canadien est déterminé à mettre en place les conditions de guerre.
Les dernières manigances du gouvernement Trudeau se trouvent enterrées dans les 430 pages de son budget 2023, adopté par le biais du projet de loi C-47 qui modifie la Loi sur les privilèges et immunités (OTAN) de 1985. Cette loi devient maintenant la Loi sur les privilèges et immunités de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord et de tout quartier général militaire international ou de toute organisation militaire internationale institués en vertu de ce traité.
L'élément clé de cette loi est l'approbation parlementaire (ratification) de la Convention sur le Statut de l'OTAN, des représentants nationaux et du personnel international de septembre 1951 et du Protocole de Paris d'août 1952 qui régit le statut des quartiers généraux et des installations militaires internationaux dans les États membres. La loi précise également qu'à l'avenir, le gouverneur en conseil est autorisé à « prendre les décrets qu'il estime nécessaire [...] à tout quartier général militaire international ou à toute organisation militaire internationale institués en vertu du Traité de l'Atlantique Nord afin de leur permettre d'exercer leurs pouvoirs et fonctions au Canada ».
Ces mesures législatives sont nécessaires pour que deux installations de l'OTAN, dont les libéraux avaient annoncé l'installation au Canada, puissent voir le jour : le Centre d'excellence de l'OTAN pour le changement climatique et la sécurité (CECCS) et le Bureau régional pour l'Amérique du Nord de l'Accélérateur d'innovation de défense pour l'Atlantique Nord (DIANA). Nonobstant les prérogatives de l'exécutif en matière d'affaires étrangères et militaires, le simulacre de démocratie exige qu'il fasse ratifier « démocratiquement » les deux accords. Il a donc enterré la nouvelle loi dans le budget 2023 de 430 pages qu'il a fait adopter par le Parlement.
Cela montre, entre autres, qu'il est grand temps que les Canadiens chassent les partis cartellisés du Parlement et ne permettent pas aux gouvernements de parti corrompus de continuer à faire passer des mégaprojets de loi par la voie rapide jusqu'à la sanction royale. En outre, les questions cruciales liées à la guerre et à la paix, à l'économie et à la manière de résoudre les conflits internationaux doivent engager directement les Canadiens et les Canadiennes, qui doivent pouvoir s'exprimer dans le cadre d'un processus qui ne soit pas soumis à la manipulation des factions dirigeantes.
La loi visant à étendre la machine de guerre américaine au Canada a été adoptée sans plus tarder par la Chambre des communes et le Sénat. La Commission des finances a renvoyé la partie du projet de loi C-47 relative à l'OTAN à la Commission de la défense nationale, sans en délibérer. Au Sénat, la discussion a duré environ une heure. Blair Brimmell, chef de section pour le changement climatique et la politique de sécurité aux Affaires mondiales et directeur intérimaire du CECCS, a expliqué au Sénat qu'il s'agissait en fait d'une « organisation militaire internationale » qui nécessitait la ratification des deux accords.
Une sénatrice lui a demandé : « Pourquoi faire cela maintenant ? Pourquoi ne l'a-t-on pas fait avant ? Il s'agit d'un vieux protocole; il est en place depuis de nombreuses années. Je serais curieuse de savoir pourquoi cela arrive maintenant. »
Blair Brimmell a expliqué : « Je vous remercie de cette question. Elle est excellente. Nous nous la sommes posée lorsque nous avons constaté que le Canada n'avait pas encore ratifié cet accord de 1952, bien que nous l'ayons signé en 1952. Nous avons procédé à un examen approfondi du texte du Protocole de Paris et n'avons trouvé aucune raison juridique ou politique pour laquelle le Canada n'aurait pas pu le ratifier avant. Bien que nous ne puissions pas dire avec certitude pourquoi le Canada ne l'a pas ratifié avant, il se pourrait simplement qu'il n'y ait pas eu de besoin pressant de le faire avant. Le Canada n'a jamais accueilli de quartiers généraux de l'OTAN ou d'organisations militaires internationales accréditées par le Conseil de l'Atlantique Nord, mais il le fera désormais. »
Un autre sénateur a demandé : « Pourquoi utiliser le projet de loi d'exécution du budget pour la mise en oeuvre d'un protocole au titre de la Loi sur les privilèges et immunités ? Je suppose que c'est parce que c'est une condition préalable pour organiser le tout, mais ce n'est pas un processus habituel. »
Mme Brimmell a expliqué qu'« il est urgent de ratifier le Protocole de Paris et de s'en servir pour donner un statut approprié au centre d'excellence et pour accorder au centre, ainsi qu'à son personnel, les privilèges et les immunités ».
Le décret d'août 2023 autorisant le CECCS expliquait également : « Une explication plausible de l'absence de ratification du Protocole de Paris est qu'il n'était pas prévu jusqu'à présent que le Canada accueille un quartier général ou une organisation militaire internationale de l'OTAN. Les Centres d'excellence étant désormais considérés par l'OTAN comme des organisations militaires internationales, et le Canada ayant été choisi comme hôte du CECCS, la ratification est nécessaire pour permettre l'octroi des privilèges et immunités couverts par le Protocole de Paris. »
Le Centre d'excellence de l'OTAN sur le changement climatique et la sécurité a ensuite ouvert ses portes à Montréal à la fin de 2023 et devrait être entièrement doté en personnel et opérationnel d'ici la fin de 2024.
Plus récemment, le 10 juin, un décret a été enregistré pour établir que le DIANA est une filiale officielle de l'OTAN. Il stipule que « le décret est nécessaire pour établir le Bureau régional nord-américain du DIANA, qui appuiera la relation déjà solide et favorable entre l'OTAN, les alliés et les partenaires de l'OTAN et le gouvernement du Canada ».
En novembre 2022, lors du Forum d'Halifax sur la sécurité internationale, le Canada avait déjà annoncé qu'il accueillerait le DIANA. La ministre de la Défense Anita Anand s'est vantée que l'objectif du DIANA est « de faciliter la coopération entre les opérateurs militaires et les meilleures jeunes entreprises de l'Alliance, les chercheurs scientifiques et les entreprises spécialisées dans la technologie pour la résolution de problèmes essentiels de défense et de sécurité rencontrés par les alliés ».
La ministre a ajouté : « Grâce à un écosystème d'innovation florissant qui soutient les activités de plus de 300 jeunes entreprises du secteur des sciences et de la technologie ainsi qu'à la présence de plusieurs centres de recherche et universités de renom et de la flotte canadienne de l'Atlantique, Halifax constituerait un environnement propice au soutien du DIANA dans l'avenir. »
Ce front des préparatifs de guerre de l'OTAN s'occupera de ce qu'elle appelle les « technologies émergentes et perturbatrices ». Le DIANA dirigera la recherche publique et privée dans les domaines de l'intelligence artificielle, des données, de l'autonomie, des technologies quantiques, de la biotechnologie, des technologies hypersoniques, de l'espace, des nouveaux matériaux et de la fabrication, ainsi que de l'énergie et de la propulsion.
Outre le lieu d'accueil princiap d'Halifax, qui devrait disposer d'un bureau permanent d'ici l'été 2025, un deuxième « bureau satellite » sera créé dans la région du Grand Toronto. Prévu pour 2025-2026, il est décrit comme « un espace administratif principalement utilisé pour les réunions, le dialogue et la collaboration, et la gestion des relations, afin de tirer pleinement parti du centre d'innovation de calibre mondial de la région ».
L'annonce parue dans la Gazette du Canada, le journal officiel du gouvernement canadien, donne des exemples des immunités et privilèges accordés aux établissements de l'OTAN au Canada. Il s'agit de l'inviolabilité des locaux, des documents et des archives, de l'immunité de juridiction, de l'exonération des impôts directs (c'est-à-dire de l'impôt sur le revenu), du remboursement des taxes de vente (par exemple la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée) et de l'exonération des droits et taxes de douane.
Le personnel de l'OTAN et de la DIANA se voit accorder « l'immunité de juridiction en ce qui concerne les actes accomplis par eux dans l'exercice de leurs fonctions officielles (y compris leurs paroles et écrits); l'immunité, pour eux-mêmes, leurs conjoints et leur famille qui résident avec eux, à l'égard de toutes mesures restrictives relatives à l'immigration; l'exonération d'impôts sur les salaires et émoluments qui leur seront payés par l'Organisation; le droit d'importer en franchise de droits et de taxes leur mobilier et effets personnels à l'occasion de leur première prise de fonctions au Canada; le droit d'importer temporairement en franchise leur automobile privée ».
Le gouvernement déclare que l'octroi de « certains privilèges et immunités aux fonctionnaires de l'OTAN et du DIANA, aux représentants des États membres et aux experts en mission lorsqu'ils sont au Canada » est « essentiel pour qu'ils puissent exécuter leurs fonctions adéquatement au Canada ».
Il déclare en outre que l'établissement du bureau régional nord-américain de la DIANA au Canada « appuiera la relation déjà solide et favorable entre l'OTAN, les alliés et les partenaires de l'OTAN et le gouvernement du Canada ».
Le gouvernement a annoncé que « le décret met en oeuvre les obligations du Canada aux termes de l'accord d'Ottawa et sera considéré favorablement par l'OTAN, les alliés de l'OTAN, et par d'autres intervenants ».
Les Canadiens noteront que tous les coûts liés à ces projets sont exclus de l'engagement du Canada à consacrer 2 % du PIB au budget aux dépenses militaires d'ici 2032, tel qu'annoncé au Sommet de l'OTAN à Washington. Les sycophantes de l'OTAN au Canada doivent notamment penser qu'il est plus sûr d'installer ces centres au Canada, et non en Europe, étant donné la révolte actuelle des peuples européens contre les bases et installations de l'OTAN en Europe et les dangers que l'OTAN fait peser sur les peuples du monde. Mais les méthodes utilisées par les gouvernements canadiens pour maintenir le peuple à l'écart du pouvoir décisionnel, quelle que soit leur couleur politique, ne changent rien au fait que les Canadiens et les Canadiennes sont épris de paix, qu'ils ont sacrifié leur vie pour la paix à maintes reprises et qu'ils ne soutiendront pas l'utilisation du Canada comme base de guerre.
Faisons du Canada une zone de paix !
Sortons le Canada de l'OTAN ! Démantelons
l'OTAN !
Un épisode ignoble
d'ingérence
étrangère américaine dans les affaires
du Canada à un moment crucial de l'après-Deuxième
Guerre
mondiale
Le pays qu'on appelle le Canada est né en tant que partie intégrante de l'empire britannique. Il a participé à la guerre des Boers pour le compte de l'empire britannique, dans le cadre de son projet d'empire, ainsi qu'à la Première Guerre mondiale. Il a envahi la Russie soviétique en 1918, comme l'un des 14 pays soutenant l'Armée blanche antibolchevique dans une tentative infructueuse de renverser la révolution russe. Après la Deuxième Guerre mondiale, il s'est joint aux impérialistes anglo-américains pour lancer la guerre froide et a permis aux États-Unis d'établir le NORAD, puis l'OTAN, et de s'approprier la souveraineté canadienne à la place des Britanniques. En outre, à ce jour, le Canada a un monarque britannique comme chef d'État et continue de faire partie du Commonwealth britannique dirigé par le même monarque britannique.
Tout cela a informé et imprégné la conception de la souveraineté du Canada qui se résume à prêter allégeance, en paroles et dans les faits, au seigneur et maître. Il a rejoint le contingent américain qui est intervenu dans la guerre de Corée sous le drapeau des Nations unies de 1950 à 1953, commettant les crimes les plus odieux contre le peuple coréen et sa nation. Il s'est rallié à toutes les mesures impérialistes anglo-américaines qui ont transformé le front uni des peuples du monde entier contre le fascisme nazi et le militarisme japonais, pour la paix, la liberté et la démocratie, en une croisade anticommuniste virulente sous les auspices de laquelle des crimes incalculables contre l'humanité ont été commis au cours des 75 dernières années. Toute cette histoire montre comment les États-Unis ont pris possession du Canada de la cave au grenier, ce qui représente un grave danger pour le Canada et pour la paix mondiale à l'heure actuelle.
L'épisode sordide qui s'est déroulé au début des années soixante, lorsque le président américain John F. Kennedy est intervenu directement dans un coup d'État électoral pour favoriser l'élection du premier ministre qu'il préférait, constitue un excellent exemple de l'ingérence des États-Unis dans les affaires politiques du Canada. Cette affaire a fait couler beaucoup d'encre, sans pour autant qu'on en tire les conclusions qui s'imposent. Au contraire, l'affaire est réduite à un conflit de personnalité entre John F. Kennedy et John Diefenbaker, tandis que les besoins de paix, de liberté et de démocratie d'après-guerre ont été abandonnés au profit des objectifs anticommunistes de la guerre froide.
L'adhésion du Canada à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) au moment de la création de celle-ci il y a 75 ans, en avril 1949, était un sujet très controversé, bien qu'on ait prétendu qu'il s'agissait d'un acte souverain. Pour citer le ministre des Affaires extérieures de l'époque, Lester B. Pearson, s'adressant à la Chambre des communes une semaine avant la signature officielle du traité, ceux qui ont « le privilège de signer ce traité [...] le signerons, sur le plan concret autant que théorique, en tant que représentants – et, à vrai dire, en tant que serviteurs – du parlement du Canada et de tout le peuple du Canada, à l'exception de ceux qui partagent des croyances communistes et qui s'agitent en marge de notre vie nationale ».
Malgré cette interprétation inspirée de la guerre froide du fait que les Canadiens n'ont jamais fait partie d'aucune discussion au sujet de l'OTAN, il y avait même au sein de la classe dirigeante beaucoup de préoccupations, intérêts et opinions différents sur l'adhésion du Canada à l'OTAN. La controverse tournait entre autres sur la question de savoir si le Canada pouvait conserver sa souveraineté et son indépendance au sein d'une alliance militaire dominée par les États-Unis et ses visées hégémoniques, en tant que « dirigeants du monde libre ». On se posait ainsi des questions sur le rôle de l'OTAN en tant qu'instigatrice d'une militarisation renouvelée et en tant que menace aux Nations unies et à l'espoir qu'elle serait un instrument de médiation et de résolution de conflit, et non de la puissance militaire américaine.
Les projets des États-Unis pour le Canada furent exprimés le 9 février 1950 dans une note interne du département d'État au président de l'époque, Harry Truman. On y soulignait que « nos engagements et nos risques sont si vastes et importants que le Canada, d'un point de vue militaire, doit être considéré comme faisant partie intégrante des États-Unis ». On y affirmait que le Canada était « l'avenue la plus logique dans l'éventualité d'une attaque en règle contre les États-Unis ». « Nonobstant les engagements [au sein de l'OTAN] et l'extension de la doctrine de Monroe au Canada, il serait nécessaire de protéger le Canada immédiatement contre toute menace. »
Pendant presque toute la décennie, c'est le 17e ministère parlementaire du premier ministre Louis St-Laurent qui était au pouvoir (de novembre 1948 à juin 1957). Lester B. Pearson était ministre d'État aux Affaires extérieures sous St-Laurent. Lui et le gouvernement libéral avait acquis une réputation d'être à l'entière disposition des États-Unis, en particulier en raison des ambitions de Pearson d'intégrer le Canada dans l'OTAN. En octobre 1950, en réponse aux critiques envers « ses politiques ouvertement pro-américaines », tel qu'exprimé par l'historien Arthur Lowe, Pearson a rétorqué que « [le Canada] est aux prises avec le problème de tenter d'influencer la politique des États-Unis qui protégera à la fois nos intérêts et notre conception de ce qui est bon pour le monde ».
Dans ce contexte, John Diefenbaker est devenu le chef du Parti progressiste conservateur en 1956 et de son gouvernement minoritaire en 1957. Il a ensuite remporté un gouvernement majoritaire lors des élections générales de 1958.
Diefenbaker a subi les critiques des États-Unis au sujet du commerce du Canada avec la Chine et Cuba. Pendant la crise des missiles à Cuba, Diefenbaker s'est attiré le mépris de Kennedy lorsqu'il a appelé à une enquête indépendante sur ce qui se passait à Cuba lorsque les États-Unis ont divulgué des images satellite sur la présence militaire soviétique à Cuba. Diefenbaker voulait consolider le commerce avec les pays du Commonwealth, tandis que les efforts des États-Unis étaient consacrés au développement de l'Union européenne, y compris encourager la Grande-Bretagne à devenir membre de l'Union européenne, ce à quoi Diefenbaker s'opposait ouvertement, croyant que ce serait néfaste pour le Commonwealth. Les États-Unis voulaient que le Canada se joigne à l'Organisation des États américains (OÉA) – et Diefenbaker s'y opposait. La principale pomme de discorde était les hésitations de Diefenbaker en ce qui concerne l'installation d'armes nucléaires au Canada.
En avril 1962, le parlement a été dissous et une élection a été fixée pour le 18 juin 1962. Kennedy a décidé d'intervenir directement dans l'élection avec un coup d'État électoral flagrant pour se débarrasser de Diefenbaker, un des exemples les plus sordides d'ingérence étrangère dans les affaires politiques du Canada. Malgré tout cela, aujourd'hui encore, le processus électoral est vanté comme étant l'occasion pour les Canadiens de choisir leurs propres représentants, et lorsqu'il s'agit de parler d'ingérence étrangère dans les affaires du Canada, l'ingérence des États-Unis n'est même pas mentionnée. Lors des élections de 1963, de connivence avec l'équipe de campagne libérale, Kennedy a manoeuvré ouvertement et secrètement pour installer Lester B. Pearson au poste de premier ministre, lui qui avait à maintes reprises été d'une grande utilité pour les États-Unis.
La campagne pour subvertir Diefenbaker était en cours même avant l'annonce des élections. C'était une campagne ouverte contre Diefenbaker. Au début de 1962, un sénateur républicain de New York est venu au Canada et lors d'un interview avec la CBC il a dit : « J'ai toujours considéré que le Canada était un de nos alliés les plus fiables [...] et pour cette raison je n'arrive pas à comprendre le manque de collaboration de la part des autorités canadiennes à imposer des sanctions économiques contre Cuba – et contre la Chine rouge, d'ailleurs [...] chaque vente qui consolide l'économie cubaine renforce l'emprise de Castro sur le peuple cubain et appuie la dictature. »
Diefenbaker ne cachait pas le fait que son hésitation à se plier aux exigences des États-Unis, en particulier sur la question du déploiement d'armes nucléaires au Canada, était due à l'opinion publique au pays. Lorsque l'ambassadeur des États-Unis au Canada et sous-secrétaire des Affaires politiques, Livingston Merchant, l'a rencontré pour lui proposer une entente militaire, y compris le déploiement d'armes nucléaires, Diefenbaker lui a dit qu'il était sensible à l'opinion publique canadienne et que les opinions aux sein des Affaires extérieures étaient partagées. Au sujet des divisions au sein du public, il a dit à Merchant que les opposants n'étaient « ni des communistes ni des fainéants ».
En vue de la visite de Diefenbaker en février 1961, le secrétaire d'État américain Dean Rusk avait préparé une note d'information sur le Canada pour Kennedy. Typiquement, les questions cruciales comme la guerre et la paix étaient présentées comme des conflits de personnalité et la prise de position de Diefenbaker sur ces questions était présentée comme étant du tâtonnage et de l'indécision qui laissaient planer de graves dangers d'infiltration communiste en Amérique du Nord. Dans sa note à Kennedy, Rusk a dit que les États-Unis devaient prendre en compte « une attitude canadienne d'introspection et de nationalisme, [...] un complexe d'infériorité qui se manifeste par une certaine sensibilité face à toute menace envers la souveraineté canadienne, réelle ou fictive. Ainsi, l'élément essentiel à prendre en compte pour ce qui est du Canada est plutôt d'ordre psychologique. » Rusk a laissé entendre que le Canada serait fiable en matière de politique internationale et que les Canadiens étaient « bien intentionnés face aux États-Unis et croient que chacun des pays a inexorablement besoin de l'autre. » Prédisant ce que Diefenbaker dirait sans doute lors de sa rencontre avec Kennedy, Rusk a écrit que Diefenbaker « sera fortement intéressé par tout ce qui peut remonter son prestige. Il pourrait même vous laisser entendre que l'antiaméricanisme est si présent au Canada qu'il se verra obligé d'avoir recours à des politiques nationalistes. »
Toujours selon l'analyse de Rusk, le cabinet de Diefenbaker était désuni, son budget de la défense était « stagnant » et il était possible qu'il y ait « une tendance vers une sorte de neutralité inconsciente qui pourrait se développer advenant un relâchement des liens de défense avec les États-Unis ». Les États-Unis devraient alors « promouvoir parmi les Canadiens une meilleure compréhension et une acceptation du concept d'une interdépendance militaire intégrale », a conseillé Rusk.
Il ne faut pas oublier que Diefenbaker était également un ardent défenseur de la justice sociale et d'une vision du Canada fondée sur sa compréhension de l'égalité et des droits. Mais tout cela a été balayé derrière des plaintes concernant son nationalisme et son populisme. Tout cela trahit la tentative délibérée de s'assurer que le peuple soit tenu à l'écart de toute discussion sur la manière de réaliser ses aspirations à la paix, à la liberté et à la démocratie.
Suite à sa rencontre avec Kennedy en mai 1961, le premier ministre a découvert un document oublié par un conseiller américain. Le notoire « mémorandum Rostow » contenait une liste d'objectifs fixés par les États-Unis, espérant « inciter » le Canada dans cette direction. Dans les reportages portant sur les relations entre le Canada et les États-Unis durant la crise des missiles cubains, l'importante question des relations entre le Canada et les États-Unis a été réduite à une affaire que Diefenbaker était « en colère », cet incident ayant « réaffirmé ce qu'il soupçonnait, que les États-Unis cherchaient à dominer le Canada. Le camp de Kennedy était aussi en colère : Diefenbaker refusait de retourner le mémorandum, à l'encontre du protocole diplomatique qui veut que de telles notes soient retournées. Leur relation ne s'améliorerait jamais tout à fait après cet incident. »
« Diefenbaker a finalement accepté de mettre les troupes canadiennes en état d'alerte, tandis que tous les autres membres de l'OTAN appuyaient un blocus et acceptaient de venir en aide aux États-Unis dans l'éventualité d'une attaque. Cependant, en raison de son hésitation à agir face à la situation, Diefenbaker a réagi seulement après que la crise ait atteint son paroxysme. En outre, sous les conseils du ministère de la Défense, l'armée canadienne avait déjà adopté des mesures de mise en état d'alerte. Ultimement, Diefenbaker finirait par croire que l''arrogance' de Kennedy avait menacé l'Amérique du Nord et aurait pu mener à une guerre nucléaire[1]. »
Dans un rapport de novembre 1961 de l'ambassadeur des Étast-Unis Livingston T. Merchant, Kennedy fut informé que « les Conservateurs étaient en perte d'appui public et devenaient de plus en plus antiaméricains ». Son message au président était que « seule l'amitié de Pearson et des libéraux étaient dignes de la confiance des États-Unis ».
Selon la version racontée par divers historiens, lorsque les élections ont été déclenchées, Kennedy a invité Pearson à un souper à Washington en compagnie d'autres récipiendaires du prix Nobel. Pearson a dit à Kennedy qu'il serait heureux d'y participer, mais que cela ne passerait pas, car Diefenbaker contesterait sans doute une visite à la Maison-Blanche par un chef de l'Opposition.
Kennedy a alors proposé que Pearson se rende aux États-Unis pour y recevoir un diplôme à titre honorifique. Il a proposé Harvard et le Massachusetts Institute of Technology, mais après que Pearson l'eut informé qu'il avait déjà reçu des diplômes honorifiques de ces institutions, Kennedy a dit qu'il s'arrangerait pour qu'il en reçoive un du Collège de Boston le même jour que le gala des récipiendaires du prix Nobel le 29 avril 1962. (Notez que le Canada s'est arrangé pour que le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg reçoive le prix d'excellence Louis St-Laurent de l'Association du Barreau canadien à la veille du sommet du 75e anniversaire de l'organisation à Washington, lors d'une réunion de l'Association canadienne pour l'OTAN, au moment-même où le Canada subissait la pression d'augmenter à 2 % du PIB son financement militaire conformément à la demande de l'OTAN.)
Des 175 invités au gala donné en 1961, Kennedy a choisi d'entrer dans la pièce accompagné de Pearson. L'événement a été largement médiatisé au Canada. À un moment donné, Kennedy a mentionné que le prétexte du prix Nobel ne devait pas être « trop évident ».
Cet appui à Pearson, qui ressemble à toutes fins pratiques à celui d'Obama à Justin Trudeau en tant que premier ministre, n'est pas le genre d'ingérence étrangère que les agences de renseignement canadiennes ont en tête lorsqu'elles parlent de « l'ingérence étrangère dans les affaires politiques du Canada ». Néanmoins, l'ingérence en question a pris beaucoup d'autres formes qu'un simple appui.
L'élection de Kennedy en 1960 avait été dirigée par le gérant de campagne et enquêteur Lou Harris. L'innovation de Harris était d'avoir régulièrement recours à des sondages à l'intention des membres du parti pour montrer aux stratégistes électoraux comment mener une campagne. De concert avec les directeurs de campagne au Canada, Kennedy a déployé Harris pour faire élire Pearson. À la surface, Harris a été appelé à aider Pearson par le directeur de la campagne libérale, Walter Gordon, et Keith Davey, qui est plus tard devenu sénateur. Kennedy s'est arrangé pour que Harris puisse entrer clandestinement au Canada et oeuvrer à la campagne de Pearson sans attirer l'attention[2]. L'auteur John Boyko, dans son livre Cold Fear, raconte : « Pour la première fois en politique électorale, l'échantillonnage aléatoire a été utilisé pour mettre en corrélation et analyser les quantités massives de données pour ensuite s'en servir pour former le candidat et le message en se fiant à des faits mathématiquement prouvables plutôt qu'a des intuitions en vase clos. »
Lors d'un interview de Alexander Panetta de la Presse canadienne avec Lou Harris en 2013, alors que Harris avait 92 ans, celui-ci parle de son « implication clandestine » dans l'élection de 1962 et de son « moment de gloire ».
Dans cet interview, Harris remémore comment il « avait fait de nombreux voyages au Canada pendant les campagnes de 1962 et de 1963, ayant embauché 500 femmes pour faire des appels téléphoniques dans le cadre du projet de recherche sur l'opinion publique le plus élaboré de l'histoire politique du Canada. Il faisait en sorte que le rôle qu'il jouait soit le plus discret possible. Harris affirme qu'il avait un faux passeport, gracieuseté d'amis au sein du gouvernement américain. Il portait le nom de Lou 'Smith' – le nom de fille de sa mère. »
John English, le biographe de Pearson, a dit à Alexander Panetta de la Presse canadienne : « Un président américain ne devrait pas s'ingérer dans les élections canadiennes. Et sans aucun doute, c'est ce qu'a fait Kennedy, et il n'a pas agi correctement avec un premier ministre canadien. »
Harris est décédé en 2016. Il a dit à Panetta au cours de l'interview de 2013 qu'il voulait écrire un livre, mais qu'il ne divulguerait pas les « détails des techniques de sondage qu'il avait introduites au Canada ». Ce qui est connu, c'est que ses techniques faisaient partie d'une prise de contrôle des partis politiques par des professionnels du marketing et des stratégistes au point que c'est eux qui décideraient des politiques qui seraient adoptées et promues. » En 1962, un gouvernement conservateur minoritaire fut élu; en 1963, il y a eu une autre élection avec l'aide de Lou Harris et les libéraux ont remporté la majorité. Asa McKercher, ancienne assistante archiviste à Bibliothèque et Archives Canada, a écrit un article publié dans International Journal en 2011, dans lequel elle écrit :
« Analysant les résultats des élections fédérales canadiennes de 1963, qui ont donné la victoire au Parti libéral après six ans de règne des progressistes conservateurs, l'ambassadeur américain Walton Butterworth a prédit que le Canada serait désormais 'plus stable, plus responsable, plus sophistiqué et généralement plus coopératif qu'à aucun moment depuis 1958'. Le fait que Butterworth ait choisi cette année-là comme étant d'une telle importance est intéressant, mais pas surprenant. Bien que le conservateur John Diefenbaker soit devenu premier ministre du Canada à la tête d'un gouvernement minoritaire en 1957, ce n'est qu'à l'occasion d'une élection éclair en mars 1958 qu'il a remporté une majorité écrasante de sièges à la Chambre des communes, la plus importante de l'histoire du Canada à ce moment-là. Ancien avocat et député de longue date, Diefenbaker est un populiste ardent qui accède au pouvoir à la faveur d'une vague croissante de nationalisme – certains parleraient d'anti-américanisme – qui prend de l'ampleur au Canada en raison du malaise des Canadiens face aux liens économiques entre leur pays et le mastodonte du sud. Le caractère populiste et nationaliste de Diefenbaker n'est un secret pour personne. Ses affrontements avec John Kennedy, le président américain de 1961 à 1963, sont bien connus et ont fait l'objet d'une grande partie de l'histoire académique et populaire. Ce qui est moins connu, et moins étudié, c'est la façon dont les relations entre le Canada et les États-Unis se sont déroulées entre 1957 et 1961, lorsque Dwight Eisenhower était le président américain[3]. »
Aujourd'hui, l'opposition à l'OTAN est devenue un « tabou » et les partis cartellisés de toutes les couleurs ne sourcillent même pas lorsque les États-Unis et l'OTAN dictent ce que le Canada devrait faire. Au contraire, ils perçoivent l'ingérence étrangère qui est favorable à l'OTAN comme étant une influence positive alors qu'ils criminalisent et attaquent toute contestation de l'adhésion du Canada à l'OTAN ou de ses campagnes bellicistes, accusant les opposants d'être des « ennemis de l'État » ou des « agents ennemis ». Pendant ce temps, les dépenses militaires au Canada augmentent en flèche, non seulement pour financer l'OTAN mais pour établir les institutions de l'OTAN en sol canadien, construire des bases militaires dans l'Arctique et plus encore.
Ce sont là les agissements d'un gouvernement de guerre et ils doivent être pris très au sérieux par les Canadiens soucieux de paix qui trouvent toujours moyen de faire en sorte que ce sont eux qui fixent la direction de l'économie et du pays, et non ceux qui ont usurpé le gouvernement du Canada au service de l'OTAN et de la guerre. Le pas le plus important et le plus décisif, si nous voulons apprendre de l'histoire, est de s'opposer à la conception du monde de la guerre froide de la classe dirigeante, qui transforme tout en une question de politique de la personnalité, d'excentricités et de conflits personnels, tandis que la conversation substantielle sur les questions de guerre et de paix est réduite au silence. La tâche la plus importante est de briser le silence en veillant à ce que les Canadiens eux-mêmes établissent leur propre point de vue avantageux dans la discussion au sujet des événements actuels. Il est grand temps que le Canada déclare son indépendance et adopte toutes les politiques nécessaires pour qu'il soit une zone de paix. Il en revient aux peuples du Canada, y compris le Québec, les peuples autochtones et métis de le faire.
Notes
2. « Dealing with Diefenbaker : Canada-US relations in 1958 », Asa McKercher, International Journal, Autumn 2011
Opposition à la mainmise du Pentagone sur le projet de mine de graphite à ciel ouvert au Québec
Le 16 mai, le département de la Défense des États-Unis (DoD) a annoncé le financement de la minière Lomiko Metals Inc. (Lomiko) à la hauteur de 8,35 millions de dollars américains pour développer un projet de mine à ciel ouvert de graphite dans la Petite-Nation. Le ministère fédéral canadien de l'Énergie et des Ressources naturelles a ajouté une subvention de 4,9 millions de dollars canadiens.
Le site du projet de graphite de La Loutre est situé entre Duhamel et le Lac-des-Plages, sur le territoire des Premières Nations Kitigan Zibi Anishinabeg (KZA). Les Premières Nations KZA font partie de la Nation algonquine et le territoire KZA est situé dans les régions de l'Outaouais et des Laurentides.
Cette annonce a soulevé la colère des gens de la région et une opposition très large s'est organisée. Il n'est pas question que les résidents de la Petite-Nation servent les visées militaires du Pentagone, déclarent-ils. De nombreuses organisations et municipalités ont pris la parole pour dénoncer la production de guerre et la militarisation généralisée du sous-sol de la Petite-Nation. Le projet n'a pas l'appui des communautés et organisations locales, ont-elles dit. Bien au contraire. Elles dénoncent cette appropriation du territoire québécois à des fins militaires.
Des porte-paroles ont dit :
David Pharand, Maire de Duhamel, co-porte-parole de l'Alliance Municipalités de Petite-Nation Nord (AMPNN) : « Avec cette annonce combinée du gouvernement canadien et du Département de la Défense des États-Unis, comme élus, ce qu'on perçoit, c'est que ce qui était déjà un refus social de ce projet minier est en train de se transformer en colère sociale. Plus que jamais nos citoyens ressentent qu'on ne tient absolument pas compte d'eux ».
Louis St-Hilaire, président du Regroupement de Protection des Lacs de la Petite-Nation et porte-parole de la Coalition québécoise des lacs incompatibles avec l'activité minière (QLAIM ) : « Ça fait cinq ans qu'on nous répond que cette mine sera associée à un projet de transition écologique, Et voilà qu'on découvre dans vos pages que cette mine dont personne ne veut servira à l'industrie militaire. C'est absolument inacceptable. »
Claude Bouffard, coordonnateur du Comité citoyen d'opposition au projet minier La Loutre (CCOPML) : « Ottawa et Washington, avec la complicité de Québec, sont prêts à sacrifier la Petite-Nation pour faire la guerre. Sacrifice et guerre sont des mots qui vont bien ensemble. Mais ça ne change rien, les gens d'ici vont continuer de se défendre et de tout faire pour empêcher ce projet... Jusqu'ici, la population s'était surtout mobilisée pour des raisons environnementales et le risque réel que constitue ce projet pour les lacs environnants (lac Simon, lac Doré, lac des Plages, etc. [...] Mais là, on parle de complètement autre chose. C'est rendu que nos ressources serviront aux besoins de l'armée américaine et qu'elles se retrouvent impliquées dans la guerre froide qui oppose la Chine aux États-Unis. Ce n'est plus du tout la transition énergétique et l'électrification des transports dont on nous parlait. »
Rébecca Pétrin, directrice générale, Eau Secours : « Dans le sillon de tous ces projets miniers se trouvent systématiquement des lacs, des rivières et des sources d'eau souterraines sacrifiées. Cette réalité est déjà très préoccupante, mais de constater que ces sacrifices seront faits pour le compte de la militarisation américaine, c'est tout simplement inadmissible. Nos gouvernements doivent comprendre la gravité des enjeux et agir en conséquence », a dit
Rodrigue Turgeon, avocat, coporte-parole de la Coalition Québec meilleure mine (CQMM), la contrepartie de Mining Watch Canada au Québec : « Militariser un projet minier nocif et rejeté par la population avant même de procéder à une évaluation environnementale est un acte de violence inouï du système envers les gens et la nature que nos gouvernements sont censés défendre et non attaquer ».
Jamie Kneen, coresponsable du programme national, MiningWatch Canada : « L'ingérence frontale de l'armée américaine confirme ouvertement le détournement de la propagande de 'transition énergétique' de la politique canadienne de mise en valeur des minéraux au profit d'une vocation essentiellement militaire ».
Pierre Jasmin, secrétaire général des Artistes pour la paix : « Mentir aux amis écologiques des zones récréotouristiques que le sacrifice de leurs terres servira la transition vers les énergies renouvelables pour sauver la planète, est honteux, alors qu'on fait le contraire, en soutenant le militarisme qui en accélère la destruction ».
L'opposition au projet minier ne date pas d'hier
Depuis des années, Lomiko Metals et le gouvernement du Québec entre autres, avait fait la promotion de ce projet minier comme étant essentiel à la transition énergétique et à l'électrification des transports. L'investissement massif du Pentagone est inacceptable et le fait que ce soit annoncé avant même la réalisation des évaluations environnementales constitue un double affront.
Déjà en 2022, le Regroupement de protection des Lacs de la Petite-Nation,(RPLPN) avait reçu l'appui de nombreuses municipalités pour sa position que les activités minières soient interdites dans les zones désignées par la Municipalité régionale de comté (MRC) de Papineau comme étant réservées à la villégiature, au récréo-tourisme, à l'éco-tourisme et à la foresterie. Le 15 mai 2022, la résolution avait reçu l'appui de 13 municipalités et d'au moins 13 entreprises et organismes[1].
En mai 2023, environ une centaine de mémoires avaient été produits lors des consultations publiques du gouvernement du Québec sur l'encadrement de l'activité minière au Québec, dont celui de l'Association pour la protection de l'environnement du Lac-des-Plages (APELDP), et de plus de 25 provenant des membres de la coalition QLAIM.
Le 6 août 2023, 450 personnes avaient manifesté dans les rues de Lac-des-Plages contre ce projet minier. Des dizaines de pancartes contre l'activité minière avaient alors été affichées partout dans la région.
Dans les Hautes-Laurentides en août 2022, des citoyens de Mont-Laurier et des environs étaient préoccupés de voir le développement d'une mine de graphite dans le secteur du Parc régional du réservoir Kiamika. La lettre de l'Association des propriétaires du réservoir Kiamika (APRK) à la Northern Graphite avait alors exprimé une vive opposition au projet :
« Compte tenu d'une forte probabilité que des impacts
négatifs
soient ressentis tels le bruit, la poussière, la
circulation de
camions lourds, la détérioration du milieu, la réduction
de la
biodiversité, l'acidification de la nappe phréatique et
des eaux
environnantes, les effets sur la santé physique et
psychologique; et compte tenu des conséquences négatives
de ces
impacts sur la quiétude des résidents et la valeur des
propriétés, deux éléments majeurs de notre mission,
l'APRK a
exprimé son opposition à ce projet d'exploitation d'une
mine de
graphite dans notre voisinage et se joindra à une action
concertée visant à faire obstacle à ce
développement. »
Les gens de la région s'organisent
Le 7 juillet, l'Association des propriétaires du Lac Simon (APLS) a tenu à Chénéville son assemblée générale annuelle qui a traité entre autres du projet minier La Loutre et des actions sont planifiées par l'Alliance des municipalités de la Petite-Nation Nord (AMPNN).
Le dimanche 11 août à 10 h, le Regroupement de protection des lacs de la Petite-Nation organise la projection du film Malartic sur la réalité d'un village minier, suivi d'une discussion sur cet enjeu. La projection aura lieu au 63, rue Hôtel-de-Ville, Salle Danny Legault, Chénéville.
Note
1. Le nom des municipalités qui ont endossé la résolution : Duhamel, Lac-des-Plages, Papineauville, Montebello, Saint-André Avellin, Thurso, Notre-Dame-de-Bonsecours, Plaisance, Ripon, Chénéville, Montpellier, Lac Simon, Val-des-Bois, Bowman, Mulgrave-et-Derry, Mayo, St-Sixte, Notre-Dame-de-la-Salette, Namur, Notre-Dame-de-la-Paix, Canton-de-Lochaber-Partie-Ouest, Boileau, Lochaber, Fassett, St-Émile-de-Suffolk.
Le nom des entreprises et organismes qui ont endossé la résolution : Lauzon-Foresterie (Fiducie), l'Association des Chasseurs, Pêcheurs, Trappeurs et Archers de la Petite-Nation (ACPTA-Petite-Nation), le Conseil régional de l'environnement et du développement durable de l'Outaouais (CREDDO), Kenauk Nature, le Conseil Régional de l'Environnement des Laurentides (CRE Laurentides), Conservation de la nature Canada, la Coalition pour que le Québec ait meilleur MINE, le Regroupement des associations pour la protection des lacs et cours d'eau des Hautes-Laurentides ( RAP-HL), la Fondation Biodiversi-Terre, les Associations de Québec Solidaire Papineau et Pontiac, l'Association de Protection de l'environnement des Hautes-Laurentides (APEHL) et Eau Secours.
(Avec des informations de : Journal de Montréal, Info de la Lièvre, Association des propriétaires du Lac Simon, Eau Secours, Coalition québécoise des lacs incompatibles avec l'activité minière, Association pour la Protection de l'Environnement du Lac des Plages et département de la Défense des États-Unis)
Appropriation du sous-sol du Québec et du Canada par les États-Unis
Ressources naturelles Canada et le département américain de la Défense ont aussi annoncé qu'ils co-investissent environ 32,5 millions de dollars dans Fortune Minerals qui travaille sur un projet de bismuth et de cobalt dans les Territoires du Nord-Ouest. Le département américain de la Défense a dit que ces investissements font partie de sa stratégie industrielle de défense nationale et renforcent les chaînes d'approvisionnement nord-américaines de matériaux. Le 3 juin, Robert P. Sanders, consul général des États-Unis à Montréal, a confirmé que d'autres projets liés aux minéraux critiques seraient éventuellement financés par Washington. « Il y en a d'autres dans le processus », a-t-il dit, ajoutant qu'un des buts est de réduire leur « dépendance envers la Chine ».
Les médias ont rapporté que la ministre Maïté Blanchette Vézina semblait surprise de l'annonce. En conférence de presse, elle a dit que le développement de projets miniers doit aller de pair avec l'acceptabilité sociale. « Ce dossier démontre toute l'importance de respecter notre champ de compétence pour s'assurer de la meilleure intégration possible des projets dans les milieux dans lesquels ils s'implantent. » Par contre, le 25 avril dernier, durant l'étude des crédits du ministère québécois des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF), elle a exprimé son objectif de « développer une filière et une chaîne d'approvisionnement en énergie pour la transition du gouvernement américain ».
Mais il n'y aura jamais d'acceptabilité sociale pour la guerre et l'agression. Le peuple du Québec a une fière tradition de s'opposer à la participation du Canada aux guerre d'agression et d'occupation contre d'autres peuples du monde, comme il le fait par milliers depuis des mois contre la participation du Canada au génocide du peuple palestinien. Les gens de la Petite-Nation ne donnent pas leur place en ce sens.
La pétition « Pas de nickel pour le génocide » dépasse trois mille signatures
La pétition « Pas de nickel pour le génocide » a été lancée par le Groupe de travail « Pas de nickel pour le génocide en solidarité avec la Palestine » (Sudbury) le 12 juin. Elle appelle à une interdiction de la vente du nickel à Israël et aux fabricants d'armes qui approvisionnent Israël. Parrainée par le député de Timmins-Baie James, Charlie Angus, le 6 juin elle a recueilli sa 3000e signature en seulement 25 jours. Au 16 juillet, la pétition a recueilli 3 397 signatures. Elle a été signée par des gens des 10 provinces, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest.
Le nickel, dont on dit qu'il est le matériau de guerre idéal lorsqu'en alliage avec d'autres métaux, accroît considérablement leur puissance et leur résistance à la corrosion et aux chaleurs extrêmes. Servant d'abord au blindage lors de la Première Guerre mondiale, le nickel est aujourd'hui utilisé à des fins militaires multiples : dans les moteurs d'avions à réaction, les chars d'assaut et les chars blindés, la coque des bombes, de l'artillerie et des munitions, les drones et les navires de guerre, ainsi que dans de nombreuses composantes d'armes létales modernes. Le Groupe de travail « Pas de nickel pour le génocide » estime que près de 1 % du nickel canadien est intégré aux instruments de la mort d'Israël.
Nous exigeons que le Canada interdise la vente de nickel à Israël, directement ou par le biais de fabricants d'armes qui fournissent ces armes à Israël. Quarante pour cent du nickel utilisé aux États-Unis provient du Canada. Ce nickel sert à fabriquer des armes comme les bombes MX-80 et les avions de combat F-16 qui les larguent. Le Canada a interdit la vente d'armes à Israël. Nous estimons que les États-Unis achètent pour près de 50 millions de dollars de nickel canadien pour la fabrication d'armes envoyées en Israël. C'est plus que la vente d'armes en tant que produits finis du Canada à Israël. Ce nickel est utilisé comme matière première dans la fabrication d'armes valant des milliards de dollars. Si nous interdisons la vente d'armes en tant que produits finis à Israël, ne devrions-nous pas aussi interdire la vente de matières premières qui font partie des composantes de ces armes, ne serait-ce que par souci de rigueur ?
Les Canadiens font savoir qu'ils ne veulent pas que les ressources du Canada et le travail de notre peuple contribuent à la campagne de génocide israélien à Gaza. Ils veulent plutôt que notre terre et notre travail fassent une utilisation du nickel qui est favorable à la paix et à l'humanité. Cette pétition offre aux Canadiens une façon concrète d'être solidaires avec la Palestine et de contribuer à arrêter le flot d'armes et de munitions vers Israël.
Comme elle a recueilli plus de 500 signatures, elle sera lue au Parlement par le député de Timmins-Baie James et le gouvernement devra y répondre dans un délai de 45 jours.
Pétition au gouvernement du Canada
Attendu que :
L'État d'Israël mène une campagne de génocide contre le peuple de Palestine en menant des actions militaires aveugles contre la population civile, tuant et mutilant plus de cent mille personnes et détruisant l'infrastructure physique et sociale de Gaza;
Une grande partie des armes utilisées dans ce génocide est fournie à l'État d'Israël par les États-Unis et d'autres pays de l'OTAN;
Le nickel est une matière première importante dans la fabrication de ces armes;
Quarante pour cent du nickel utilisé par le secteur manufacturier américain provient du Canada;
La population canadienne ne veut pas que les ressources naturelles de son pays ou le produit de son travail contribuent à cette campagne de terreur et de meurtre de masse;
Le gouvernement du Canada a interdit les nouveaux contrats de vente d'armes à Israël;
Le gouvernement du Canada peut adopter des programmes qui favorisent le développement de l'utilisation pacifique du nickel.
Nous soussignés, citoyens et résidents du Canada, prions le gouvernement du Canada :
1. D'interdire la vente de nickel à Israël et aux fabricants d'armes qui approvisionnent Israël;
2. D'exiger des acheteurs de nickel canadien qu'ils certifient qu'ils ne revendront pas de nickel canadien à Israël ou aux fabricants d'armes qui approvisionnent Israël.
La pétition est ouverte jusqu'au 10 octobre et tout citoyen ou résident canadien ayant quatorze ans et plus peut la signer en se rendant sur le site la Chambre des communes ici.
Tentative honteuse de rallier les Canadiens aux préparatifs de guerre lors de la fête du Canada
Le 1er juillet, jour du 157e anniversaire de la Confédération par proclamation royale de 1867, également connu sous le nom de fête du Canada, le gouvernement a organisé un méprisable défilé aérien militaire, se vantant qu'il s'agissait du plus important défilé aérien des 20 dernières années. Le défilé aérien comprenait plus de 45 aéronefs de la plupart des flottes de l'Aviation royale canadienne (ARC), ainsi que plusieurs avions et hélicoptères historiques et du « futur ».
Les avions, dont certains sont stationnés à l'aéroport de Gatineau, ont survolé la colline du Parlement vers 13 h, avant la cérémonie officielle de la fête du Canada au parc des Plaines-LeBreton. Parmi les aéronefs participants figuraient l'avion d'entraînement CT-156 Harvard II, les avions de transport CC-177 Globemaster et CC-330 Husky, les avions de combat CF-188 Hornets, ainsi que les hélicoptères CH-148 Cyclone, CH-147 Chinook, CH-149 Cormorant et CH-146 Griffon. Les CF-188 Hornet ont été utilisés dans le cadre de l'opération Echo, nom de code des frappes aériennes des Forces armées canadiennes lors des bombardements de l'OTAN sur la Yougoslavie en 1999. Entre le 24 mars et le 10 juin de cette année-là, les avions canadiens ont effectué 684 sorties en 224 missions et largués près de 230 000 kg de bombes à gravité et à guidage de précision sur les infrastructures civiles.
Cette « célébration » ou « Parade dans le ciel » fait partie des activités en cours depuis le 1er avril 2024 pour souligner le 100e anniversaire de l'ARC, qui vise à honorer son « patrimoine distinct », en mettant l'accent sur « les contributions à la sécurité nationale, à la paix internationale et à la stabilité mondiale ». Les sites Web du gouvernement indiquent que, depuis sa formation en 1924, l'Aviation royale du Canada « a servi les Canadiens en temps de paix et en temps de guerre » et a joué un rôle essentiel pendant la Deuxième Guerre mondiale, atteignant son « âge d'or » vers la fin des années 1950, avec des dizaines d'escadrons de combat « au-dessus des lignes du front pendant la guerre froide ».
Il s'agit d'une référence directe à la participation du Canada aux Forces intégrées de l'OTAN en Europe, immédiatement après l'adhésion du Canada à l'OTAN en 1949. On dit que l'Aviation royale du Canada a été la deuxième force, après l'armée de l'air des États-Unis, en nombre d'aéronefs modernes fournis aux forces de l'OTAN partout en Europe à l'époque. Ces engagements envers l'OTAN ont donné lieu à un bond gigantesque dans la production d'armements, si bien qu'à son apogée, au début des années 1950, les Forces armées canadiennes ont absorbé plus de 50 % du budget fédéral total. De 1951 à 1959, le Canada s'est classé au quatrième rang des membres de l'OTAN pour ce qui est des dépenses militaires par habitant.
Même si, de facto, c'est le président des États-Unis qui, en tant que commandant en chef de l'OTAN et du NORAD, met les Forces armées du Canada en action lorsqu'une situation d'urgence est déclarée, en vertu de la Constitution du Canada les FAC font partie intégrante des arrangements politiques anachroniques qui sont célébrés le jour de la fête du Canada et qui privent le peuple de son pouvoir. Dans un article de Wikipédia intitulé « La monarchie du Canada et les Forces armées canadiennes » on peut lire :
« 'Le roi du Canada' est 'le commandant en chef des Forces canadiennes et lui-même et d'autres membres de la famille royale canadienne' occupent des 'postes honorifiques dans diverses branches et divers régiments, incarnant ainsi la relation historique de la Couronne avec ses forces armées. Cette conception découle du système de monarchie constitutionnelle du Canada et de ses 500 ans d'histoire monarchique. [...] Le rôle de la Couronne canadienne dans les Forces armées canadiennes est établi par le droit constitutionnel et le droit législatif. La Loi constitutionnelle de 1867 stipule que le commandement en chef de ces forces doit « continuer à relever de la Reine' et la Loi sur la défense nationale stipule que 'les Forces canadiennes sont les forces armées de Sa Majesté levées par le Canada'. [...]
« Officiellement, il y a une chaîne de commandement directe entre le monarque et le gouverneur général, par l'intermédiaire du chef d'état-major de la Défense, tous les officiers qui détiennent la Commission du roi et, par leur intermédiaire, tous les membres des Forces canadiennes. Aucune autre personne, y compris le premier ministre, les autres ministres ou les fonctionnaires, ne fait partie de la chaîne de commandement; aucune autre personne n'a d'autorité de commandement dans les Forces canadiennes, une disposition maintenue pour s'assurer que 'l'armée est un agent et non un maître de l'État'. [...]
« Le monarque délivre des lettres patentes, connues sous le nom de Commission du roi, aux officiers commissionnés de l'Armée canadienne, de la Marine royale canadienne et de l'Aviation royale canadienne. De plus, tous les règlements des Forces canadiennes sont établis par le souverain dans les Ordonnances et règlements royaux. [...] Les déclarations de guerre, la mobilisation des troupes et l'organisation des Forces relèvent toutes de la prérogative royale. L'approbation parlementaire directe n'est pas nécessaire; toutefois, le Cabinet peut la demander, et la Couronne au Parlement est responsable de l'affectation des fonds nécessaires au financement des forces armées. »
À l'heure actuelle, le Canada participe à la prolongation de la guerre par procuration menée par les États-Unis et l'OTAN en Ukraine et il est le complice criminel du génocide du peuple palestinien par Israël. Organiser un tel événement belliciste pour souligner la fête du Canada, qui serait consacrée à célébrer « la richesse et la diversité de la culture canadienne », est une attaque directe contre la conscience du peuple et une glorification ouverte et extrême des crimes de guerre et du génocide. Dans les circonstances d'aujourd'hui, elle sert à amplifier le traumatisme vécu par la communauté palestinienne de la région d'Ottawa-Gatineau, dont les membres ont perdu des familles entières aux mains de ces bâtisseurs d'empire et de ces destructeurs de nation.
Rien qu'au cours des dernières années, des mesures importantes ont été prises pour remettre en question le fondement même de la Confédération de 1867, notamment à la suite de la découverte des tombes anonymes d'enfants autochtones dans tout le Canada et du refus de députés de l'Assemblée nationale du Québec de prêter serment d'allégeance au roi Charles III. Il y a un besoin objectif de nous débarrasser de ces vieux arrangements et d'abolir la prérogative royale sur laquelle repose la Constitution.
Cette démonstration de prouesses militaires par l'Aviation royale du Canada a jeté une ombre sur le corps politique canadien. Il a souligné la nécessité impérieuse d'une constitution moderne qui se débarrasse une fois pour toutes des structures archaïques basées sur ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvernés, les questions cruciales liées à la guerre et à la paix étant placées entre les mains du peuple, et non des partis cartellisés au service d'intérêts privés étroits où la production de guerre et les entrepreneurs privés dominent. Le message sous-jacent du spectacle aérien est que les élites protégeront leurs positions de pouvoir et de privilèges et relègueront le peuple à un rôle de spectateur quoi qu'il arrive. Les Canadiens ne sont pas d'accord.
Une série de lois anti-travailleurs adoptées au Québec
Les plans de restructuration et privatisation du gouvernement Legault en opposition à l'édification nationale moderne
Le gouvernement Legault poursuit l'adoption de mesures et de lois qui remettent les ressources humaines et naturelles pratiquement directement entre les mains de grands intérêts privés. Cela ne va pas sans une grande opposition du peuple au Québec face à un gouvernement dont la définition d'autonomie et de nationalisme est celle de se défaire de tout ce qui l'empêche de répondre aux exigences des intérêts privés étroits et de l'économie de guerre des États-Unis.
C'est dans ce contexte qu'il faut examiner les récentes activités du gouvernement Legault. Le 23 mai, l'Assemblée nationale adoptait la Loi 51, Loi visant à moderniser l'industrie de la construction. Le 9 mai, il déposait le projet de loi 61 Loi édictant la Loi sur Mobilité Infra Québec et modifiant certaines dispositions relatives au transport collectif et le projet de loi 62 Loi visant principalement à diversifier les stratégies d'acquisition des organismes publics et à leur offrir davantage d'agilité dans la réalisation de leurs projets d'infrastructure.
Avec la Loi 51, le gouvernement s'attaque de
front aux
travailleurs de la construction pour imposer une plus
grande
mobilité de la main-d' uvre, permettre aux employeurs
d'exiger
des compagnons dans de nombreux métiers qu'ils effectuent
des
travaux qui ne figurent pas dans leur certificat de
compétence,
et augmenter l'embauche de travailleurs non formés sur
les
chantiers de construction, mettant en danger la sécurité
des
travailleurs qu'ils prétendent aider, et sapant les
normes de
sécurité qui touchent tous les travailleurs et
potentiellement
le public aussi, et affaiblissant encore plus les
organisations
de défense des travailleurs. Tout cela se fait au nom de
l'augmentation de la productivité et de l'efficacité dans
l'organisation du travail pour répondre aux exigences des
entreprises privées.
Avec les projets de loi 61 et 62 sur les projets d'infrastructure, le gouvernement ouvre les portes toutes grandes à la privatisation accrue pour l'octroi des projets d'infrastructure publics.
Le projet de loi 61 établit Mobilité Infra Québec qui est la seule à avoir la compétence à l'égard d'un projet complexe de transport dont le gouvernement lui a confié la planification ou la réalisation. Le projet de loi permet entre autres à Mobilité Infra Québec d'acquérir, de gré à gré ou par expropriation, les immeubles qu'elle juge nécessaires dans le cadre de sa mission pour son propre compte ou pour le compte du gouvernement, d'une municipalité locale, d'une société de transport en commun, du Réseau de transport métropolitain ou de l'Autorité régionale de transport métropolitain. Tout cela dans le contexte de l'intégration des corridors de transport, de communication, d'énergie et de sécurité à travers l'Amérique du Nord, c'est-à-dire l'intégration du Mexique et du Canada dans l'économie de guerre des États-Unis.
Dans son projet de loi 62, le gouvernement a introduit le concept de « contrat de partenariat dans une approche collaborative » et supprimé avec l'article 4 le terme « public-privé » de la Loi sur les contrats des organismes publics. Dans les faits, le gouvernement n'abolit pas les contrats public-privé. Il les élargit en devenant lui-même uniquement un distributeur de capitaux aux entreprises privées qui pourront maintenant participer à la conception, à la réalisation, au financement, à l'entretien et à l'exploitation d'une infrastructure publique en plus d'établir un partage de risques et de responsabilités entre le gouvernement et le privé pour le financement, l'entretien et l'exploitation. La mantra quant à cette approche collaborative est le partage du savoir-faire, le partage de solutions novatrices et des meilleurs approches.
Cette « nouvelle façon de faire » existe déjà lorsqu'il a été démontré que le cabinet conseil multinational privé McKinsey a participé à mettre sur pied la Banque de l'Infrastructure du Canada alors qu'un ancien partenaire de McKinsey s'est retrouvé comme PDG de cette banque, pour offrir des contrats à McKinsey[1].
De même, McKinsey a déjà une oreille attentive auprès de certaines sociétés d'État dont Hydro-Québec qui a déjà versé des millions de dollars à McKinsey pour l'aider à gérer ses barrages[2]. Le ministère de la Santé du Québec a utilisé leur service lors de la pandémie de COVID de même que le ministère de l'Économie du Québec [3][4][5].
Le projet de loi 62 prévoit le partage des risques, des gains et des pertes, les contrats possibles avec des consortiums, les contrats de gré à gré. Selon les données produites par le Secrétariat du Conseil du trésor, le recours au gré à gré a augmenté de 30 % ces trois dernières années. En comparaison, le recours à l'appel d'offres public n'a augmenté que de 8 % pendant la même période. Cela crée des situations où des entreprises peuvent décider de ne pas participer à des appels d'offre en attendant le recours au gré à gré.
Ces contrats permettent aux intérêts privés de conclure des ententes, sans publication d'avis d'intention, dans les cas où aucune soumission conforme n'a été déposée en réponse à un appel d'offres, que le contrat réponde ou non au besoin exprimé dans le cadre de l'appel d'offres et que l'attributaire satisfasse ou non aux exigences de l'appel d'offres.
Dans son mémoire, l'Autorité des marchés publics souligne : « [...] cette façon de faire pourrait avoir le caractère insidieux où des entreprises ne soumissionneraient pas sur des contrats en attendant de recevoir une invitation à conclure un contrat de gré à gré, et ce, particulièrement pour les régions où il y a déjà peu de concurrence. Les coûts de réalisation pourraient ainsi être plus élevés qu'anticipés lors du lancement de l'appel d'offres ». Des consortiums peuvent être créés pour profiter de cette situation.
D'autre part, il faut rappeler qu'il y a neuf ans la Commission Charbonneau, une commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, créée en 2011, qui a révélé entre autres l'existence de systèmes de corruption et de collusion parmi ceux qui contrôlent ce secteur, publiait son rapport. Son mandat officiel était d'éradiquer la collusion et la corruption dans l'octroi des contrats publics dans la construction, de révéler les liens possibles entre cette corruption et le financement des partis politiques et l'infiltration possible de l'industrie de la construction par le crime organisé. Une des recommandations du rapport était d'assurer un meilleur développement de l'expertise interne en construction, ce qui, entre autres, est totalement écarté. Tout cela est jeté maintenant à la poubelle. Loin d'éliminer la corruption, les partis cartellisés, le gouvernement et ses ministres ont pris le relais en agissant comme le crime organisé, utilisant leurs positions de pouvoir et de privilège pour agir en toute impunité afin de payer les riches et d'intégrer le Québec aux objectifs de guerre des États-Unis.
On se rappellera les ententes secrètes entourant SNC-Lavalin qui a montré que ce sont les travailleurs du Québec et du Canada qui font les frais de la corruption et la collaboration des grandes entreprises et de l'État.
Pour s'en tirer avec ses stratagèmes corrompus pour payer les riches, le gouvernement présente la thèse simpliste selon laquelle les problèmes des projets d'infrastructure sont dus aux retards et aux coûts élevés causés par l'insistance des travailleurs pour que les salaires, les conditions de travail et les mesures de sécurité, y compris la formation, soient maintenus. La solution, selon lui, est de collaborer pour le plus grand bien et d'éliminer ces problèmes. D'une part, il faut plus de souplesse, mobilité et polyvalence des travailleurs qui sont jetables de toute façon, et d'autre part, il faut dorénavant des contrats de partenariat avec une approche collaborative qui régleront les problèmes de lenteur et de coûts élevés.
Il est clair que le gouvernement pousse plus loin son plan néolibéral de mettre toutes les ressources humaines, matérielles et naturelles de la société à la disposition des grands intérêts privés au nom de la rapidité nécessaire à moindre coût, qui est censée donner lieu à des retombées bénéfiques pour le peuple.
Les Québécoises et les Québécois ne sont pas dupes face aux sagas de nombreux projets d'infrastructure publiques, avec les études, les urgences, les non urgences, les renvois de balles, les consultations auprès de grands experts, qui finissent par leur coûter le double ou le triple de l'évaluation initiale. La destruction de tout le potentiel humain et l'expertise humaine au Québec du secteur public est son ordre du jour pour servir les ambitions des oligarques les plus puissants, en contradiction avec les intérêts du peuple.
Ils s'opposent systématiquement à la privatisation en santé, en éducation et dans tous les secteurs publics de l'économie, car cela est fait pour détruire tout ce qui concerne le domaine public et le remettre sur un plateau d'argent aux intérêts privés étroits. Quand le gouvernement parle de soucis de rapidité et de diminution des coûts, il ne leurre personne. Ce qui le préoccupe avant tout est la rapidité avec laquelle il veut répondre aux exigences de l'oligarchie financière pour s'accaparer des richesses du Québec : notre électricité, nos mines, nos routes, nos sols. Les récents projets de loi et lois qui touchent Hydro-Québec, l'énergie, les mines et ces trois derniers, confirment cet empressement.
Notes
1. Voir « Des liens étroits entre McKinsey et la Banque de l'infrastructure du Canada », Thomas Gerbet, Radio-Canada, 3 février 2023
2. Voir « Hydro-Québec a versé des millions de dollars à McKinsey pour l'aider à gérer ses barrages», Thomas Gerbet, Radio-Canada, 26 octobre 2022 [https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1927738/mckinsey-hydro-quebec-consultants-barrages-affaires]
3. Voir « Dans l'ombre, la firme McKinsey était au coeur de la gestion de la pandémie au Québec », Thomas Gerbet, Radio-Canada, 30 septembre 2022
4. « Un survol de l'emprise des firmes de consultation et des gestionnaires de fonds d'investissement sur la gouvernance », Pierre Soublière, Le Marxiste-léniniste mensuel, octobre 2022
5. Voir « Un mystérieux contrat avec McKinsey au ministère de l'Économie du Québec », Thomas Gerbet et Daniel Boily, 25 avril 2023
La Loi 51, Loi modernisant l'industrie de la construction
Les travailleurs de la construction s'opposent à ce que leurs conditions de travail soient soumises aux intérêts privés et défendent leur dignité
Le 1er février, Jean Boulet, ministre du Travail, a déposé le projet de loi 51 Loi modernisant l'industrie de la construction, à l'Assemblée nationale. Le 23 mai, le projet de loi était adopté et sanctionné le 28 mai.
Le document final contient 24 pages et modifie 3 lois et 7 règlements. Trente-et-un mémoires ont été déposés à la Commission de l'économie et du travail. Une majorité provenait des corps de métiers de la construction. Vingt organisations ont été entendues lors des consultations particulières et auditions publiques à la mi-mars.
La Loi 51 fait partie de l'intensification des actions du gouvernement permettant d'aller plus loin dans la restructuration de l'État québécois visant à mettre ses ressources humaines et naturelles au plein contrôle d'intérêts privés, en plus de permettre la criminalisation des citoyens exprimant leur opposition.
Déjà en mai 2023, le ministre Boulet avait tenu une conférence organisée par la Chambre de commerce de Montréal mettant l'emphase sur ces objectifs :
- moderniser les pratiques de l'industrie;
- augmenter la productivité sur les chantiers;
- développer des solutions favorisant la rétention de la main-d'oeuvre et l'ajout des salariés issus de groupes sous-représentés;
- hausser l'efficacité globale de l'industrie.
Avec la Loi 51, le gouvernement s'attaque de plein fouet aux travailleurs de la construction pour imposer une plus grande mobilité de la main-d'oeuvre, accroître la polyvalence des travailleurs, c'est-à-dire faciliter et augmenter l'embauche de travailleurs non formés sur les chantiers, saper les normes de sécurité sur ceux-ci et affaiblir toujours plus les organisations de défense des travailleurs. Tout cela est fait au nom d'accroître la productivité et l'efficacité dans l'organisation du travail pour répondre aux exigences des entreprises privées.
Les nombreux mémoires et interventions lors des consultations faites par les représentants de différents corps de métier de la construction et leur organisation syndicale se sont opposés à la thèse du gouvernement que l'ouverture des bassins de la main d'oeuvre, l'introduction de la polyvalence de ceux-ci et l'embauche de travailleurs non formés équivalent à une meilleure productivité et efficacité. C'est la compétence professionnelle qui est garante d'efficacité, d'efficience et de productivité dans l'industrie de la construction, augmentant la sécurité au travail, ont-ils répété et répété.
On se souviendra de la lutte des grutiers du Québec du 2018 qui s'étaient opposé à la décision de la Commission de la construction du Québec (CCQ) et du gouvernement d'abolir l'exigence qu'un grutier obtienne un Diplôme d'études professionnelles (DEP) pour opérer une grue. Le DEP avait été établi comme un programme rigoureux de formation de 870 heures donné par des instructeurs professionnels qui avait réduit de beaucoup les accidents dans le secteur. Le gouvernement a imposé la mise sur pied à sa place d'un programme de formation de 150 heures qui se donne directement sur les chantiers et qui est sous la responsabilité des employeurs[1].
Polyvalence des travailleurs
La notion de polyvalence est introduite aux articles 80, 81 et 82 de la Loi 51 en modifiant le Règlement sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre de l'industrie de la construction[2]. À l'article 79, le gouvernement modifie ce règlement par l'insertion, à la fin de la définition d'« activité partagée », de « ou selon le cas, par un titulaire d'un certificat de compétence-occupation, lorsque cela est prévu à l'annexe E et dans la mesure prévue à cette annexe ».
Il existe trois types de certificat de compétence : il y a compétence-occupation, compétence-apprenti et compétence-compagnon.
L'article 80 de la Loi, le paragraphe suivant est ajouté à la fin de l'article 4 du Règlement :
« La personne qui exerce une occupation est également autorisée à exercer une activité partagée lorsque cela est prévu à l'annexe E et dans la mesure prévue à cette annexe. Lorsqu'elle exécute une activité partagée, cette personne est réputée exercer dans son titre occupationnel. ».
L'article 81 modifie le règlement en insérant, après l'article 4 :
« 4.0.1. Malgré l'article 4, un compagnon peut exercer une tâche non comprise dans la définition de l'annexe A qui s'applique à son métier lorsque cette tâche s'inscrit dans le respect du principe de polyvalence dans l'organisation du travail.
« Constitue de la polyvalence le fait d'exercer des tâches qui satisfont à l'ensemble des conditions suivantes :
1 ces tâches sont reliées à celles prévues à la définition du métier de ce compagnon;
2 elles s'inscrivent dans une même séquence de travail et permettent l'avancement des travaux, incluant ceux de préparation et de finition;
3 elles sont de courte durée dans une journée de travail.
« Le principe de polyvalence n'est pas applicable à l'opération de grues de tout genre ainsi qu'aux travaux relatifs à la stabilité ou à la capacité portante d'une structure. Il ne s'applique pas non plus aux tâches relevant des métiers d'électricien, de tuyauteur, de mécanicien en protection-incendie, de frigoriste ou de mécanicien d'ascenseurs. ».
L'article 82 de la Loi modifie le règlement en ajoutant le paragraphe suivant à la fin de l'article 5.8 :
« Lorsque cela est prévu à l'annexe E et dans la mesure prévue à cette annexe, la personne titulaire d'un certificat de compétence-occupation valide qui a suivi et réussi la formation professionnelle reconnue par la Commission pour cette activité partagée est admissible à l'examen de qualification relatif à cette activité partagée. »
Comme plusieurs l'ont indiqué, un certificat de compétence-occupation est détenu par une personne qui n'a aucune pratique sur le terrain et le chantier. Elle a suivi une formation générale de la CCQ. C'est un fardeau de plus pour celui qui est compagnon ou apprenti et cela augmente les risques de danger à la sécurité des travailleurs et du public et laisse place à l'arbitraire des employeurs.
Et plus encore, comme l'a indiqué le mémoire de la FTQ et plusieurs autres corps de métier, « si l'entrée de main-d'oeuvre des non-diplômés par les ouvertures de bassins apparaît comme une solution à court terme, elle crée un grave problème à long terme sur le plan de la rétention de la main-d'oeuvre. La formation initiale est le socle du développement des compétences et elle est un facteur clé de la rétention de la main-d'oeuvre. Pour le métier de charpentier-menuisier, c'est 41 % des non-diplômés qui quittent après 5 ans, contre 21 % chez les diplômés. De manière générale, les données démontrent qu'un nouveau travailleur diplômé cumulera plus d'heures par année dans l'industrie qu'un travailleur non-diplômé. La CCQ démontre que plus les heures travaillées sont élevées dans la première année, plus le taux d'abandon diminue. »
Mobilité des travailleurs
Concernant la mobilité des travailleurs, le gouvernement élimine toute embûche à celle-ci. À compter du 1er mai 2025, le gouvernement met fin à toute clause d'une convention collective qui limite la mobilité de ceux-ci. C'est en fait un décret qui retire cet aspect des négociations sur leurs conditions de travail.
L'article 96 indique : « Cesse d'avoir effet, à compter du 1er mai 2025, toute clause d'une convention collective au sens de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction qui limite la mobilité des salariés pouvant être affectés partout au Québec en vertu d'un règlement pris en application du paragraphe 13 du premier alinéa de l'article 123.1 de cette loi ou qui restreint la liberté des employeurs d'embaucher de tels salariés. »
L'intervention accrue de l'État dans les relations de travail et les conventions collectives a été dénoncée. Le gouvernement ajoute d'ailleurs d'autres clauses en légiférant pour contrôler davantage les organisations concernées.
« 42.2. Au plus tard le premier jour du sixième mois qui précède la date d'expiration de la convention collective prévue à l'article 47, les associations de salariés représentatives, l'association sectorielle d'employeurs et l'association d'employeurs doivent transmettre par écrit aux autres parties leurs demandes, leurs offres ainsi que des propositions sur l'ensemble des matières pouvant faire l'objet des négociations.
« 42.3. Les négociations doivent commencer entre les associations de salariés représentatives et, selon leurs rôles respectifs, l'association sectorielle d'employeurs ou l'association d'employeurs, et elles doivent se poursuivre avec diligence et bonne foi. À cette fin, les associations peuvent convenir d'une structure et de modalités de négociation. »
Souci trompeur de la diversité
D'entrée de jeu, le gouvernement modifie la Loi R-20, Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. Il introduit entre autres l'objectif d'améliorer l'offre de main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, notamment en mettant en place des mesures favorisant l'attraction et la rétention de ce qu'il appelle « la main-d'oeuvre représentative de la diversité de la société québécoise ou issue d'autres groupes sous-représentés dans l'industrie ».
Le gouvernement apporte diverses modifications relatives aux « femmes, à la diversité et aux groupes sous-représentés » dans a Loi 51, qui sont présentés comme des grands idéaux pour dire qu'ils veulent attirer une main-d'oeuvre bon marché. Ces catégories sont définies comme « une personne autochtone, une personne appartenant à une minorité visible ou ethnique, un immigrant ou une personne handicapée ». En réponse, de nombreux représentants syndicaux insistent sur l'importance de la formation professionnelle à tous égards, quelle quel soit.
Nouvelle ingérence dans les relations de travail
Plus loin, à l'article 5, il crée un comité des relations du travail dans l'industrie de la construction dont le but est :
« 1. d'étudier toute question ayant trait aux relations du travail dans l'industrie de la construction et aux conditions de travail des salariés, à l'exception de celles relevant du conseil d'administration de la Commission, du Comité sur la formation professionnelle dans l'industrie de la construction ou du Comité sur les avantages sociaux de l'industrie de la construction;
« 2. d'échanger sur toute situation problématique vécue dans le cadre des relations du travail dans l'industrie de la construction ou sur toute mésentente portant sur l'un des sujets prévus à une convention collective, dans l'optique de prévenir ou de régler tout différend pouvant mener à un grief et, le cas échéant, d'informer la Commission de toute interprétation convenue concernant une clause d'une convention collective. »
Augmentation des mesures criminalisant l'opposition des travailleurs
Finalement, les différentes amendes prévues à la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction sont augmentées, doublées voire triplées, et détaillées aux articles 26, 27, et 33 à 58. Les cas d'amendes possibles sont nombreuses, pour n'en mentionner que quelqu'uns :
« - Quiconque moleste, incommode ou injurie un membre ou un employé de la Commission dans l'exercice de ses fonctions, ou autrement met obstacle à tel exercice, commet une infraction et est passible d'une amende;
« - Quiconque tente de commettre une des infractions prévues dans la présente loi, ou aide, ou incite quelqu'un à commettre ou tenter de commettre une telle infraction commet une infraction et est passible de la peine prévue pour une telle infraction;
« - Quiconque ordonne, encourage ou appuie une grève, un ralentissement de travail ou un lock-out contrairement aux dispositions de la présente loi ou y participe est passible, s'il s'agit d'un employeur, d'une association, d'un membre du bureau ou d'un représentant d'une association, d'une amende de 9 556 $ à 95 543 $ pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel cette grève, ce lock-out ou ce ralentissement existe et dans tous autres cas, d'une amende de 239 $ à 1 157 $ pour chaque jour ou partie de jour. »
La Loi 51 comporte de nombreuses autres caractéristiques notables. Il n'en demeure pas moins que l'objectif du ministre Boulet de « moderniser la Loi de la construction au Québec » a pour but de répondre aux exigences des intérêts privés et les plans de restructuration de l'État à leurs fins, dont ceux de satisfaire les besoins en infrastructure qui visent à une plus grande intégration aux corridors énergétiques et de commerce des États-Unis. Tout au long des consultations, les différents représentants des corps de métier de la construction ont défendu leur expertise, la dignité de leur travail, leur connaissance du milieu et les conditions nécessaires à la sécurité de tous. Même si la Loi est sanctionnée, cela ne les arrêtera pas de parler en leur propre nom pour défendre leurs droits, leur sécurité et celle de tout le peuple.
Notes
1. Voir « Actions inacceptables du gouvernement du Québec – les grutiers de retour au travail : la lutte continue », Forum ouvrier, 26 juin 2018
Projet de loi 69,
Loi
assurant la gouvernance responsable
des ressources énergétiques
Opposition vive et immédiate d'organisations syndicales à la privatisation accrue d'Hydro-Québec
Le 6 juin, le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, a déposé à l'Assemblée nationale du Québec, le projet de loi 69, Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives.
Le projet de loi de 56 pages s'inscrit dans le cadre de la restructuration de l'État pour mieux servir les grands intérêts privés supranationaux, plus particulièrement à intégrer les ressources du Québec aux corridors de transport d'énergie des États-Unis. Le projet de loi 69 accordera au ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie de nouveaux pouvoirs dont ceux « d'établir et de mettre en oeuvre un plan de gestion intégrée des ressources énergétiques » du Québec. Dans le préambule du projet de loi, il est mentionné qu'une partie de ce plan « précise la cible des approvisionnements en électricité aux fins de la satisfaction des besoins en cette matière des marchés québécois par Hydro-Québec au terme d'un horizon qu'il indique ». Le projet de loi permettra aux compagnies d'électricité privées de conclure des contrats gré à gré avec Hydro-Québec pour exploiter les ressources naturelles encore inexploitées du Québec en mettant « à la disposition d'Hydro-Québec des immeubles ou des forces hydrauliques du domaine de l'État » et en retirant à Hydro-Québec « l'obligation d'obtenir l'autorisation du gouvernement ».
De nombreuses organisations, dont des syndicats, ont publié des déclarations le même jour s'opposant au projet de loi 69.
Le Syndicat canadien de la fonction publique-Québec (SCFP-Québec)
Le SCFP-Québec déclare que le projet de loi 69 « est un pas de recul gigantesque pour les personnes citoyennes du Québec ».
Le SCFP-Québec qui représente plus de 16 000 membres dans le secteur de l'énergie, déclare : « C'est un jour sombre pour l'histoire du Québec. Le service public d'électricité, incarnée par Hydro-Québec, a permis des avancements sociaux économiques quasi miraculeux. Au contraire, aujourd'hui, nous assistons à une avancée pour les entreprises privées et les fonds d'investissement. Les travailleurs et travailleuses y perdront au change assurément », de dire Pierre-Guy Sylvestre, économiste du SCFP-Québec .
Le SCFP-Québec souligne que la tarification dynamique, qui sera mise en place à partir du 1er avril 2026, « est une mesure régressive qui pénalisera les ménages à faibles revenus », estimant que des efforts devraient plutôt être faits pour l'efficacité énergétique : « Diminuons la demande résidentielle , commerciale et institutionnelle en améliorant la performance des équipements de chauffage et de l'éclairage, plutôt que d'appliquer une tarification inéquitable », d'ajouter Patrick Gloutney, président du SCFP-Québec.
La Confédération des syndicats nationaux(CSN)
La CSN a émis un communiqué le 6 juin intitulé « Projet de loi 69 – Il faut rester complètement maîtres chez nous » qui dit :
« Le projet de loi 69 ouvre la porte à plus de production d'électricité privée, notamment par son article 38 [1], qui permet à une entreprise de produire de l'électricité et de la distribuer à un client situé sur un terrain adjacent. »
« La hausse à 100 mégawatts (MW) maximum, plutôt que les 50 MW actuels, de la production hydroélectrique privée, est une autre voie par laquelle de nouveaux producteurs privés pourraient apparaître.
« Malgré certains points positifs, comme la planification des besoins à long terme, le projet de loi [du ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie] Fitzgibbon ne ferme pas la porte à des projets privés. Ces derniers risquent de ne pas bénéficier d'acceptabilité sociale et d'empêcher l'atteinte d'une vision d'ensemble quant à ce qui sera produit à long terme », souligne Caroline Senneville, présidente de la CSN. La planification devrait permettre d'éviter les mauvaises surprises et permettre de prendre en compte l'ensemble des besoins sociaux, économiques et environnementaux du Québec.
La CSN s'oppose aux modifications importantes des tarifs : « Deux éléments de l'encadrement de la tarification disparaîtront après 2026 : la tarification dynamique ne serait plus seulement optionnelle et la tarification domestique pourrait varier en fonction de l'intensité énergétique. Le modèle de tarification pourrait donc changer radicalement à partir de 2026 en fonction de la consommation. » C'est un fait bien connu que les frais liés au chauffage d'une résidence ou d'un logement sont la part la plus importante d'une facture d'électricité, pouvant aller jusqu'à 55 % du montant total. Or, comme l'indique le communiqué de la CSN, « certaines personnes moins fortunées n'ont pas les moyens de rénover leur maison. C'est encore plus vrai pour les locataires aux prises avec un logement qui est une passoire thermique ».
La CSN dénonce le partenariat public-privé pour de l'énergie « propre » où Hydro-Québec prend tous les risques. Elle estime que « le modèle de développement du secteur éolien au Québec est intenable dans sa forme actuelle et souhaite qu'Hydro-Québec soit le seul maître d'oeuvre en la matière ».
Ce à quoi fait allusion la CSN est le fait que depuis 2003,sous le gouvernement libéral de Jean Charest, Hydro-Québec a commencé à signer des contrats d'achat d'électricité auprès de producteurs privés d'énergie éolienne. Dans de nombreux cas, ces contrats ont garanti aux entreprises privées un tarif fixe que Hydro-Québec s'engageait à payer et à subventionner, quel que soit le prix de l'électricité sur les marchés nord- américains, ce qui a entraîné des pertes énormes à Hydro-Québec dans les périodes de surplus d'électricité[2].
Dans le cas de la période présente dite de grandes demandes d'électricité « propre » c'est Hydro-Québec qui garantira aux entreprises privées un tarif pour l'électricité produite, sachant que dès 2026 Hydro-Québec se retrouvera en déficit de production d'énergie alors que la société d'État devra honorer tous ses contrats d'exportation ferme d'électricité vers les États-Unis ainsi que pour fournir en électricité « propre » toutes les nouvelles installations de production de composantes de batteries et d'extraction/raffinage de minéraux critiques tels que le lithium, le nickel, le scandium, le titane, le niobium et l'aluminium, pour en nommer que quelques uns[3].
La CSN conclut en déclarant qu'elle « va étudier le projet de loi plus en profondeur pour mieux comprendre tous ses impacts sur les travailleuses et les travailleurs concernés ».
La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
« [...] le ministre concentre beaucoup de pouvoir dans ses propres mains en s'appropriant une portion significative des dossiers provenant du ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parc et du ministère des Ressources naturelles et des Forêts », écrit la FTQ.
Les arrangements que le projet de loi 69 mettra en place sont ceux où Hydro-Québec « ne soit plus contrainte de procéder uniquement par appels d'offres. Elle pourra par exemple conclure des contrats d'approvisionnement de gré à gré, [...] développer elle-même de nouveaux approvisionnements ou établir des partenariats » et où les projets n'auront pas besoin de passer devant la Régie de l'énergie pour être approuvés[4].
Il a été révélé en 2022 que le gouvernement Legault et Hydro-Québec ont fait appel régulièrement à des firmes de consultants prives dont la plus célèbre est l'entreprise multinationale américaine de conseil en gestion McKinsey pour les conseiller sur la préparation et l'octroi de contrats gré à gré sans appel d'offres, faisant fi de l'expertise à l'interne au sein de la fonction publique du gouvernement et parmi les ingénieurs de la société d'État. Le nouveau vice-président exécutif – stratégies et finances, Hydro-Québec, Maxime Aucoin, est lui-même un ancien employé de la société de conseil en gestion McKinsey. Il faut donc prévoir qu'avec le projet de loi 69 cette tendance va se maintenir et s'accélérer.
« Comme le diable se cache dans les détails, la FTQ prendra le temps d'étudier attentivement ce projet de loi ambitieux de 56 pages. Pour la FTQ, il y a ici des enjeux démocratiques. Il faut craindre la politisation de l'avenir énergétique. Tout ne peut se décider au coin d'une table par un seul ministère », déclare la présidente de la FTQ, Magali Picard.
« Il y a aussi un enjeu de transparence et de vie chère. Par exemple, le fait qu'Hydro-Québec puisse se départir de certains actifs au profit du privé nous inquiète. Il y a aussi tout le débat à venir quant à la modulation tarifaire résidentielle. Le gouvernement plafonne à 3 % les tarifs résidentiels jusqu'en 2026, mais après 2026, il arrive quoi ? », s'interroge la présidente. « Pour la FTQ, Hydro-Québec doit rester maître d' oeuvre de ses projets », conclut le communiqué.
Notes
1. Projet de loi 69, Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives, Article 38 :
L'article 60 de cette loi [Loi sur la Régie de l'énergie] est modifié :
- par le remplacement, dans le premier alinéa, de « d'exploiter un réseau de distribution d'électricité » par « de distribuer de l'électricité à un consommateur »;
- par le remplacement du deuxième alinéa par les suivants :
« Ce droit n'empêche pas quiconque de consommer l'électricité qu'il produit.
Ce droit n'empêche pas quiconque produisant de l'électricité de source renouvelable de la distribuer à un seul consommateur pour les besoins des installations de ce dernier, dans la mesure où ces installations sont situées sur un emplacement adjacent au site de production et que le gouvernement autorise, aux conditions qu'il détermine, cette distribution. »
2. Voir « Le rôle attribué à Hydro-Québec par le gouvernement Charest, Pas du tout un projet de 'bâtisseur', Correspondant de Québec », Le Marxiste-Léniniste, numéro 78, 1er mai 2010
3. Voir « La 'copropriété' des lignes de transmission d'Hydro-Québec avec le fonds spéculatif Blackstone », Le Marxiste-Léniniste mensuel, avril 2023
4. « Projet de loi no 69 pour moderniser les lois entourant l'énergie », ministère de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, 6 juin 2024
Le vol flagrant des biens publics en Ontario
Les grévistes de la Régie des alcools de l'Ontario défendent leurs droits et les droits de tous
Les travailleurs de la Régie des alcools de l'Ontario (LCBO), membres du Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (SEFPO), ont entamé une grève le 5 juillet, avec un vote de grève de 97 %. Ils réclament une plus grande sécurité d'emploi et la fin des plans du gouvernement Ford visant à étendre la privatisation de la vente d'alcool – ils disent au gouvernement : Gardons-la publique !
Plutôt que de privatiser la vente d'alcool, le syndicat propose que la LCBO s'agrandisse, construise davantage de magasins, augmente les heures d'ouverture et crée davantage de postes permanents à temps plein et à temps partiel. Loin de protéger les travailleurs contre les licenciements et les fermetures de magasins, la direction de la LCBO s'est opposée, lors des négociations, au renouvellement des protections de l'emploi prévues dans la convention collective actuelle.
Le syndicat a exposé ses principales préoccupations et la raison de l'échec des négociations lors d'une conférence de presse tenue le 4 juillet. Colleen MacLeod, présidente du comité de négociation du SEFPO, a déclaré : « Nous avons été très clairs sur le fait que nous ne reculerons pas dans notre lutte pour assurer un avenir solide à la LCBO et aux services publics financés par les revenus de la LCBO. » Elle a ajouté que le principal problème non résolu est la récente décision du premier ministre Doug Ford d'autoriser la vente d'alcool dans les dépanneurs et les magasins à grande surface, décision qui devait initialement être prise le 1er août.
Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a intensifié ses attaques contre les travailleurs en grève de la LCBO en annonçant, le 15 juillet, qu'à compter du 18 juillet les cocktails prêts-à-boire et les caisses de 24 bières pourront être vendus dans les épiceries autorisées.
Le 4 juillet, Colleen MacLeod a souligné que cette décision aura de graves répercussions sur les revenus de la LCBO, réduisant le bénéfice annuel de 2,5 milliards de dollars de la société d'État, qui contribue au financement des services publics. La province compte déjà 2 300 détaillants privés, dont des épiceries, des vignobles et des distilleries, des magasins de bière et des petits magasins généraux autorisés à vendre de l'alcool.
Le syndicat demande notamment au gouvernement de revenir sur sa décision de rendre les prêts-à-boire disponibles dans les dépanneurs et les épiceries, ce que le gouvernement refuse de faire, déclarant : « Si le SEFPO est maintenant prêt à reconnaître que les prêts-à-boire sont une question de politique publique et ne devraient pas être discutées dans le cadre des négociations, nous l'encourageons vivement à répondre à notre offre du 4 juillet. »
L'expansion des ventes de vin, de bière, de cidre et de boissons prêtes à boire dans les dépanneurs, les grandes surfaces et les supermarchés supplémentaires était initialement prévue pour 2026, mais en mai, Doug Ford a annoncé que son gouvernement remettait 225 millions de dollars à la LCBO pour rompre un contrat qui devait expirer en 2026, afin d'accélérer l'expansion des ventes d'alcool dans environ 8 500 nouveaux établissements à compter du 1er août 2024.
Les travailleurs de la LCBO exigent des garanties que le commerce de gros, l'entreposage et la distribution, ainsi que tout travail lié à l'expansion de la vente de bière, soient effectués uniquement par des membres du SEFPO, et non par des entrepreneurs du secteur privé, ainsi que des garanties qu'aucun magasin ne fermera et qu'aucun travailleur ne sera licencié ou ne verra ses heures de travail réduites. À l'heure actuelle, 70 % des 9 000 travailleurs de la LCBO sont des employés occasionnels, sans garantie d'heures de travail ou d'avantages sociaux, et avec peu de possibilités d'accéder à des postes permanents à temps partiel ou à temps plein.
Les travailleurs reçoivent un large soutien sur leurs
piquets
de grève de la part des travailleurs des secteurs privé
et
public, y compris des infirmières et des travailleurs de
l'éducation de toute la province.
Pendant ce temps, le gouvernement Ford s'emploie activement à saper les efforts des grévistes, en fournissant une carte interactive indiquant où les gens peuvent acheter de l'alcool pendant la grève, et en menaçant de rouvrir 32 magasins d'alcool trois jours par semaine si la grève dure plus de deux semaines. Un travailleur d'un entrepôt de la LCBO à Mississauga signale également que des briseurs de grève sont amenés pour remplir les commandes.
La lutte des travailleurs de la LCBO pour dire Gardons-la publique ! s'inscrit dans le vaste mouvement des travailleurs de l'Ontario et de leurs communautés contre les plans de destruction du gouvernement Ford, qui visent à céder les services de santé, l'éducation, les programmes sociaux et les sociétés de la Couronne à des intérêts privés étroits. Les travailleurs présentent et exigent des solutions qui avantagent le public.
LML salue l'esprit combatif des travailleurs de la LCBO et appelle tout le monde à se joindre aux travailleurs sur leurs lignes de piquetage ! Exprimez votre appui à leur juste cause ! Dénoncez la tentative antisociale et antiouvrière de Ford de contourner les syndicats et d'établir des liens directs individuels avec des travailleurs anonymes, au nom desquels il prétend ensuite parler. C'est une fraude de A à Z.
Pour trouver un lieu de piquetage à proximité, cliquez
ici.
Entrevue avec un travailleur de longue date de la Régie des alcools de l'Ontario
Ce qui suit est une entrevue avec un travailleur ayant 30 ans d'expérience à la Régie des alcools de l'Ontario (LCBO) et membre du Syndicat des employés de la fonction public de l'Ontario (SEFPO), présentement en grève pour de meilleurs salaires, des meilleurs avantages sociaux et une meilleure sécurité d'emploi, et contre les plans du gouvernement Ford de privatiser davantage cette société d'État.
LML : La question de la sécurité d'emploi est une des principales revendications des travailleurs de la LCBO. Quelle est la situation actuelle et que faut-il pour protéger les droits des travailleurs à la lumière de l'expansion accrue des ventes de bière et de spiritueux et de boissons prêtes à boire dans le secteur privé ?
Travailleur de la LCBO : Ce qu'il faut, c'est une solide garantie que les travailleurs vont conserver leur emploi en dépit des plans du gouvernement Ford de privatiser davantage la LCBO, sans quoi tout cela n'est qu'une demande d'indemnité de licenciement. Cette grève n'est pas que pour les salaires et les conditions de travail. Les 9 000 travailleurs de la LCBO jouent un rôle important dans l'économie de l'Ontario au niveau local et provincial et contribuent aussi à l'économie du Canada. Par leur travail, ils génèrent un profit net pour l'Ontario de 2,8 milliards de dollars annuellement et 80 % de ces sommes viennent de la vente au détail.
Il y a une autre facette de cette grève dont le gouvernement ne parle pas et qui est d'intérêt pour tous les travailleurs de la LCBO. Les stratagèmes du gouvernement Ford visant à brader de plus en plus la LCBO aux intérêts privés, tels que la famille Weston, sont présentés au public comme une question de multiplier les « choix » et de faciliter l'accès aux produits alcoolisés.
Nous sommes particulièrement préoccupés par la vente de bière et de vin, et surtout de boissons cocktail et prêts à boire – ces derniers étant la catégorie de boissons dont les ventes augmentent le plus – au Loblaw's ou dans d'autres grands magasins au détail. Le problème est que ces boissons sont les préférés des jeunes – étant sucrés, fruiteux, et ne goûtant pas l'alcool. Les ados seront particulièrement vulnérables au fait que ces boissons seront facilement accessibles et ils sont moins rigoureusement cartés que dans les magasins de la LCBO où les travailleurs prennent au sérieux leur responsabilité sociale de ne pas vendre ces boissons aux mineurs, ce pour quoi ils ont été formés.
Ces boissons cocktail sont populaires et les ventes sont très profitables, et c'est pourquoi la famille Weston les reluquent. Le premier ministre Ford a même nommé un membre de la famille Weston, qui contrôle Loblaw's, au conseil d'administration de la LCBO et nous nous demandons bien quelles tractations secrètes ont bien pu se faire pour en arriver là.
LML : Vous avez souligné que la privatisation de la LCBO n'est pas quelque chose de nouveau. Pouvez-vous nous expliquer comment cette société d'État a lentement mais sûrement été démantelée et des sections entières cédées à des monopoles privés ?
Travailleur de la LCBO : Depuis que la LCBO a ouvert ses portes en 1927, son fonctionnement est au centre de débats politiques. Élection après élection, les électeurs ont rejeté les partis qui préconisent sa privatisation. Plutôt que de prendre en compte la volonté démocratique du peuple, les gouvernements ont tenté de tromper le public en mentant et en prétendant que la privatisation n'était pas à l'ordre du jour, tout en vendant discrètement l'entreprise peu à peu au secteur privé. L'ordre du jour de gouvernements successifs, et en particulier celui de Ford, est aussi d'attaquer les syndicats. Les travailleurs de la LCBO ont produit des profits nets pour la province de l'Ontario année après année et nous avons été une main-d'oeuvre stable.
C'est la première fois que les travailleurs de la LCBO partent en grève pour défendre leurs droits en tant que travailleurs et pour obtenir une convention collective juste et équitable, qui protège nos emplois et la LCBO elle-même, qui représente un bénéfice net pour l'Ontario et le Canada. En plus d'attaquer nos emplois et notre moyen de subsistance, c'est un vol flagrant qui transforme une entreprise publique qui contribue aux fonds publics en une entreprise privée qui bénéficie à des intérêts privés.
LML : Pouvez-vous parler des propositions du syndicat voulant que le gouvernement augmente ses investissements dans les points de vente de la LCBO, qu'il prolonge les heures d'ouverture et qu'il augmente le nombre de magasins et le personnel permanent, etc. ?
Travailleur de la LCBO : Le syndicat est ouvert aux négociations sur plusieurs points, mais l'essentiel de nos revendications est simple. Il faut cesser d'offrir des postes occasionnels sans horaire fixe, ce qui fait en sorte que les travailleurs n'ont aucune sécurité, pas heures garanties et aucune garantie de pouvoir subvenir à leurs besoins. Les employés occasionnels constituent près de 70 % de la main-d'oeuvre de la LCBO. Des gens travaillants sont forcés de tout sacrifier en espérant contre toute attente obtenir un poste permanent et une certaine stabilité plus tard. C'est une violation brutale et cynique des droits des travailleurs et cela fait en sorte qu'il devient impossible pour un grand nombre de personnes de travailler pour la LCBO.
Le SEFPO a lancé il y a longtemps l'appel à construire davantage de magasins de la LCBO et d'accroître les heures d'ouverture et le personnel pour répondre à la demande. Nous voulons une permanence pour les travailleurs occasionnels, qu'ils ne soient pas traités comme des esclaves sans régime de retraite, sans avantages sociaux et sans heures garanties. Les gens travaillants ne devraient pas être forcés de tout sacrifier en entretenant un vague espoir d'obtenir un salaire décent dans un avenir lointain.
Le syndicat a appelé à la consolidation de la LCBO en tant que bien public qui appuie les communautés locales, l'industrie du tourisme et les autres secteurs de l'économie. C'est pourquoi nous invitons le public, nos voisins et les autres travailleurs à être solidaires, de venir nous retrouver sur les lignes de piquetage alors que nous défendons nos droits et ce qui est dans l'intérêt public en Ontario.
Privatisation systématique de la LCBO
Le gouvernement Ford met en oeuvre depuis longtemps un plan de privatisation de la Régie des alcools de l'Ontario (LCBO). Sa plus récente mesure visant à élargir la vente d'alcool dans les épiceries et les dépanneurs fait suite à la privatisation des « services spécialisés » et des services en ligne durant les années 2020-2021.
Les services spécialisés sont la vente de produits qui ne sont pas vendus aux points de vente de la LCBO. Des entités privées, dont plusieurs sont des grandes entreprises, font affaires directement avec les producteurs de vin, de bière et de produits alcoolisés en tant que leurs représentants de ventes officiels dans la province. La LCBO devient alors l'intermédiaire dans ces transactions.
Avant 2021, la LCBO offrait ce service à partir de son siège social au centre-ville de Toronto, où y travaillaient des employés syndiqués. C'était un édifice où se trouvaient à la fois un bureau et un entrepôt et des travailleurs syndiqués traitaient les commandes et s'occupaient de la distribution. Au nom de la modernisation, y compris la construction d'un nouveau siège social pour remplacer l'ancien, la LCBO a choisi de ne pas consolider le caractère public de ses opérations, et certainement pas de garder les employés syndiqués. Elle a plutôt embauché un monopole mondial privé – la division d'approvisionnement alimentaire de DHL Group (anciennement Deutsche Post) – pour se charger d'importantes sections de l'entreprise.
En mai 2020, dans son annonce du changement, la LCBO a dit de DHL que c'était « un leader des solutions à l'approvisionnement alimentaire, ayant une expérience importante dans la logistique et l'entreposage de boissons alcoolisées dans un environnement réglementé ». Non seulement DHL a-t-il pris en charge le service spécialisé, mais la LCBO a annoncé qu'il allait « s'implanter et opérer un centre de distribution pour nos opérations secondaires et en ligne, y compris le commerce en ligne, la boutique Vintages en ligne et les services spécialisés ».
À ce moment-là, la LCBO déclarait que la sous-traitance de ce travail signifierait des « performances et une productivité accrues, des processus améliorés, une meilleure exploitation et chaîne d'approvisionnement ainsi qu'un meilleur service à nos clients ».
Le service DHL Trillium Supply Chain, une entreprise massive d'entreposage à Caledon, au nord de Toronto, a pris son envol en 2021, lorsque des employés syndiqués ont reçu une indemnisation de départ volontaire, d'autres ayant été mutés ou leur travail au LCBO terminé d'une manière ou d'une autre.
Le gouvernement Ford a changé les lois sur les boissons alcoolisés en 2019 pour autoriser les épiceries à vendre du vin et de la bière. Maintenant, des ventes privées seront autorisées dans un plus grand nombre d'épiceries et de dépanneurs non seulement du vin et de la bière, mais de boissons dites « prêtes-à-boire ».
Les dépanneurs peuvent obtenir un permis moyennant des
frais
annuels de 500 dollars, tandis que les épiceries doivent
payer 3
250 dollars par année. Les deux permis autorisent les
détenteurs
de vendre et de faire des livraisons de bière, de cidre,
de vins
et de produits alcoolisés prêts-à-boire. Les épiceries
actuelles
détentrices de permis peuvent vendre des produits
prêts-à-boire
dès le 18 juillet et les dépanneurs dès le 5 septembre.
Les
nouveaux détenteurs de permis en épicerie peuvent
commencer à
vendre dès le 31 octobre. À cette date, tous les
dépanneurs,
épiceries et magasins à grande surface de l'Ontario
pourront
vendre de la bière, du cidre, du vin et des boissons
alcoolisées
prêtes à boire, s'ils le souhaitent.
Cela crée un précédent qui permet aux grandes chaînes alimentaires et aux monopoles « alimentaires » de consolider leur domination en assumant la distribution de boissons alcoolisés. Il faut s'attendre à ce qu'ils exercent leur pouvoir économique pour contrôler les prix et d'autres éléments cruciaux de l'entreprise.
Pour le moment, la LCBO est le seul grossiste de boissons alcoolisées. Elle se réserve le droit de fixer les prix et les taxes. Présentement, les augmentations de prix par la LCBO sont fortes. La Commission des alcools et des jeux de l'Ontario informe qu'« en tant que grossiste exclusif, la LCBO coordonne avec toutes les sources d'approvisionnement ». Cela comprend la LCBO elle-même, le Beer Store, qui appartient aux monopoles de la bière, et les producteurs ontariens. Cela comprend aussi les compagnies qui opèrent sous la bannière des services spécialisés de la LCBO. Les détaillants vont payer la LCBO directement et la LCBO va payer les sources d'approvisionnement. Les livraisons de la LCBO aux détaillants est prise en main par des compagnies de logistiques.
Le revenu généré par la LCBO
Pour l'année se terminant le 31 mars 2008, la LCBO avait des ventes nettes de 4,13 milliards de dollars, y compris un profit (ou dividende) de 1,35 milliards de dollars contribuant aux revenus généraux du gouvernement de l'Ontario. C'est le montant que le trésor public pourrait perdre si la LCBO décidait de privatiser dans l'intérêt du profit privé. Pendant l'année en question, elle avait recueilli 383 millions de dollars en taxes de vente provinciales et versé un autre 458 millions à Ottawa en taxe de vente fédérale (TPS).
Au cours des cinq années précédentes, les profits de la LCBO ont atteint près de 6 milliards de dollars pour la province. L'agence fonctionnait à ce moment-là avec une marge de profit de 48,9 %. Les montants de la LCBO consacrés aux réclamations des travailleurs en salaires et en avantages sociaux et en frais d'exploitation en tant que pourcentage des ventes nettes étaient de seulement 16,1 % au cours des années 2007-2008.
Aujourd'hui, si on se fie à son rapport annuel, les points de vente semblent avoir généré un profit d'au moins 1,9 milliards, c'est-à-dire 75 % de l'argent que la LCBO a donné à la province.
Mike Crawley de la CBC explique comment la LCBO génère présentement ses profits et comment les choses vont changer avec les réformes du gouvernement Ford – y compris le plan du premier ministre de vendre des boissons alcoolisées spécialisées dans les dépanneurs et les épiceries. Il écrit :
« À chaque année, la LCBO rapporte près de 2,5 milliards de dollars au gouvernement ontarien...
« Les points de vente de la LCBO – les 680 magasins qui sont présentement fermés en raison de la grève – comptent pour près de 80 % du revenu brut de la société d'État, selon son plus récent rapport annuel. Le reste vient surtout de la LCBO en tant que distributrice dans les bars, les restaurants et les supermarchés. [...]
« [Le premier ministre de l'Ontario] Doug Ford insiste pour dire que les réformes n'affecteront aucunement les coffres provinciaux. Cependant, des sources de l'industrie et un document interne de la LCBO obtenu par CBC News laissent entendre que les changements siphonneront des centaines de millions de dollars des fonds publics à chaque année. »
La raison est que la LCBO offre ses produits aux dépanneurs et aux épiceries en fonction d'une « ristourne de grossiste », 10 % de moins que le prix avant la taxe de vente harmonisée.
Analyse des revenus de la LCBO en 2023
Mike Crawley explique que les revenus bruts de la LCBO ont été de 7,41 milliards de dollars en 2023. « La plus grande partie de ce montant, soit 5,87 milliards, vient des points de vente de la LCBO et des ventes directes en ligne aux consommateurs », écrit-il.
Les autres contributeurs les plus importants sont :
- Les établissements licenciés (bars, restaurants et autres) : 598 millions;
- Les épiceries : 410 millions;
- Les points de vente de la LCBO : 252 millions;
- Le Beer Store : 229 millions.
En soustrayant les chiffres suivants du 7,41 milliards en ventes totales de la LCBO, on arrive à un revenu net pour la LCBO de 2,46 milliards, lesquels sont allés au gouvernement provincial.
- 3,78 milliards en coûts de production (y compris le prix demandé par les fournisseurs, la taxe d'excise et le transport)
-1,19 milliards en réclamations des travailleurs en salaires et avantages sociaux, et en dépenses, y compris les frais administratifs
Si on se fie à l'information du rapport annuel, souligne le journaliste, les points de vente semblent générer un profit d'au moins 1,9 milliards, ce qui représente plus de 75 % des sommes qui vont à la province.
La LCBO dit que les coûts de production représentent 51 cents de chaque dollar en revenu, tandis que les montants réclamés par les travailleurs et les dépenses représentent 16 cents pour chaque dollar, laissant 33 cents en revenu pour chaque dollar en revenu brut. Trente-trois pour cent des 5,87 milliards en revenus des points de vente représentent un total de 1,95 milliards de dollars en revenu net.
Comment la LCBO fixe le prix de ses produits
Selon Mike Crawley, la LCBO obtient son profit de la même façon qu'à peu près tous les grossistes : en vendant des produits à des prix plus élevés qu'elle ne les paie aux fournisseurs. Il souligne cependant : « Ce qui différencie la LCBO de presque tous les autres grossistes : les calculs qui servent à fixer les prix sont standardisés et accessibles au public. »
Pour des exemples de la fixation des prix sur le site web de la LCBO, cliquer ici.
(National Union of Public and General Employees, CBC Life)
Un recours effréné aux pouvoirs de police de l'exécutif pour imposer la privatisation
Le pillage des biens publics de l'Ontario se fait de façon de plus en plus accélérée par le biais de privatisations décidées par le gouvernement, qui se sert de ses pouvoirs exécutifs impunément. Les gouvernements précédents l'ont aussi fait sous forme de partenariats publics-privés (PPP) et d'autres stratagèmes pour que les fonds publics financent les profits privés. Cela siphonne d'énormes montants de valeur ajoutée de l'économie pour les remettre entre les mains des ultra-riches qui détruisent les sociétés pour s'enrichir davantage et conserver leurs positions de privilège. Ces « partenariats » ont servi à attaquer les salaires et les conditions de travail de la classe ouvrière. Entretemps, le gouvernement, par son emprise sur le pouvoir décisionnel, impose l'austérité sur la classe ouvrière afin de piller encore plus les fonds pour leurs stratagèmes.
En 2014, le gouvernement libéral de Kathleen Wynne annonçait qu'il allait vendre de l'immobilier à Toronto, vendre ses parts à GM et établir un groupe de travail pour « étudier » d'autres biens gouvernementaux – Hydro One, Ontario Power Generation et la Régie des alcools de l'Ontario (LCBO). L'objectif était de recueillir des fonds pour un soi-disant Fonds Trillium créé pour financer de l'infrastructure et le transport collectif d'un montant de 29 milliards de dollars sur dix ans. L'annonce a été faite au nom de grands idéaux mais ce qui est arrivé sous le gouvernement libéral est ce qui arrive présentement sous le gouvernement Ford. Tout est décidé dans le dos des Ontariens qui ne participent à aucune évaluation des biens ou des projets d'infrastructure.
L'opposition à l'ordre du jour d'austérité d'un gouvernement de partis cartellisés après l'autre se poursuit depuis que le gouvernement néodémocrate de la taupe libérale Bob Rae a ouvert la porte avec sa trahison sous forme de loi imposant un gel de salaires aux travailleurs du secteur public et aux fonctionnaires. Il a imposé ce qui s'appelle maintenant les « journées Rae », qui exigeaient des travailleurs du secteur public qu'ils prennent 12 journées de congé par année non rémunérées. La classe dirigeante avait encensé ces mesures néolibérales qui devaient épargner 2 milliards de dollars au gouvernement de l'Ontario, sans avoir recours aux mises à pied des travailleurs du secteur public.
Vint ensuite le gouvernement conservateur de Mike Harris en 1995, qui a lancé une attaque antisyndicale brutale et la braderie et la privatisation des avoirs publics. Cela a été le commencement d'une habitude chez les riches de priver les travailleurs de ce qui leur appartient de droit – des salaires et des conditions de travail et une retraite en fonction du niveau de vie qu'ils se sont créés, ainsi que le droit à la santé et à l'éducation, en tant que standard atteint par la société, pour eux-mêmes et pour leurs familles. Pour ce qui est de l'infrastructure dont a besoin la classe ouvrière, elle pourrait facilement être financée de telle façon à ne pas être destructrice pour l'économie et le peuple si tel est le mobile, et si les gouvernements arrêtent de payer les riches et augmentent le financement des programmes sociaux. Les revenus générés par la LCBO et qui bénéficient au gouvernement sont un exemple de comment on peut procéder.
En continuant d'apprendre de l'expérience des
travailleurs déjà
acquise dans la lutte contre l'offensive antisociale, la
classe
ouvrière peut continuer d'établir de nouveaux repères lui
permettant d'avancer son propre programme prosocial pour
la
société. La lutte des travailleurs de la LCBO contre la
privatisation vise à défendre leurs propres moyens de
subsistance, leur niveau de vie et leurs conditions de
travail
contre toute tentative de transformer tous les
travailleurs en
main-d'oeuvre bon marché et jetable. C'est aussi une
lutte pour
ouvrir à la société une voie vers l'avant qui peut
garantir le
bien-être de tous et toutes.
(Archives du LML)
Un autre exemple flagrant de vol du bien public
Des intérêts privés prennent le contrôle du conseil municipal de Vancouver
Des intérêts privés ont pris le contrôle du Conseil municipal de Vancouver, un bel exemple de ce qui se produit à tous les niveaux de gouvernements au Canada. Le maire actuel de Vancouver, Ken Sim, est un riche homme d'affaires qui a gagné les élections municipales de 2022 par un coup monté. Ken Sim est le co-propriétaire d'une compagnie privée mondiale de soins de santé portant le nom de Nurse Next Door. Sa mainmise sur l'Hôtel de ville de Vancouver – avec sa clique de co-conspirateurs portant le nom de « A Better City (ABC) » – semble avoir été, somme toute, assez facile, avec son argent et celui de riches donateurs et ses connections avec l'élite dirigeante locale, dont les médias de masse.
Sim et sa clique de ABC entraînent la ville dans une plus grande privatisation de ses fonctions et de l'espace public, forts de leurs pouvoirs exécutifs. À l'abri de l'état de droit, ce sont en fait des pouvoirs de police. Un aspect significatif de ce programme est de ne pas chercher à régler les nombreux fléaux sociaux qui existent à Vancouver, y compris la pauvreté, l'itinérance, la vétusté des infrastructures publiques et la désuétude des services publics. La ville a plutôt embauché 100 agents de police de plus alors que les personnes dans le besoin doivent compter sur la générosité de riches philanthropes et d'entreprises privées pour gérer les symptômes des crises, sans que les problèmes à la source ne soient jamais abordés. Ainsi, des multimillionnaires et des entreprises privées sont promus comme étant des leaders et des sauveurs, à contrecourant de l'orientation moderne voulant que le peuple s'investisse du pouvoir et contrôle l'économie socialisée et la politique.
Ken Sim et sa clique de ABC profitent de la situation pour enrichir des compagnies privées et leurs propriétaires. Dans le même temps, on empêche les travailleurs et les travailleuses de faire valoir leurs opinions et leur perspective de renouveau démocratique, d'une nouvelle direction prosociale et d'un nouvel objectif pour l'économie.
Les oeuvres de bienfaisance sont au centre des solutions du maire aux fléaux sociaux. Il participe à des événements d'oeuvres de bienfaisance, où il s'engage à faire des dons, qu'il puise à même sa fortune personnelle, équivalents aux dons recueillis, D'un geste pour indiquer qu'il n'a qu'à téléphoner à un de ses riches amis, c'est ainsi qu'il compte réparer le train pour enfants au parc Stanley. Pour lui, la détérioration de l'infrastructure et des services publics est l'occasion de mettre en oeuvre son plan de privatisation, ce qui profite aussi à sa compagnie privée de soins de santé. Il prétend que la privatisation est une alternative aux taxes, une notion qu'il invente pour justifier son action. Dans le même temps, il n'est pas contre l'augmentation des frais d'utilisateur au municipal, une forme de taxe sur les services publics, une mesure autoritaire qui s'applique à tout le monde, peu importe le revenu.
Par exemple, le Conseil de ville contrôlé par ABC a adopté des frais de stationnement pour les gens qui veulent profiter de la plage Spanish Bank, un site qui est à toutes fins pratiques inaccessible par transport en commun. La longue plage, avec ses dunes qui s'étendent jusqu'à la baie de Burrard à marée basse est située à Point Grey, possiblement le quartier résidentiel le plus opulent et ayant les maisons les plus riches au Canada. C'est là que se trouve la résidence privée de Ken Sim, sans aucune commune mesure avec les conditions sociales et de vie de la plupart des travailleurs.
L'ordre du jour de privatisation du maire Sim comprend une proposition de parrainage permettant à une entreprise de prêter son nom à un service public ou à un parc et que des compagnies privées puissent s'occuper de propriétés publiques. Par exemple, le Centre aquatique de Vancouver, qui est dans un état de détérioration avancé, ferait une collecte de fonds après avoir été renommé le Centre aquatique Lululemon. Pour remplacer ou réparer la piscine extérieure désuète de Kitsilano, le maire propose des investissements privés pour créer une entreprise publique-privée. Pour le spectacle de feux d'artifice en juillet à la plage English Bay, il a fermé le meilleur site tout au long du mois de juillet pour permettre à des intérêts privés d'y installer des kiosques et vendre de la nourriture, des boissons et des sièges aux rares personnes qui peuvent se le permettre au cours de l'événement de trois jours. La campagne de privatisation de Ken Sim touche aussi au système public de bibliothèques.
Afin de pouvoir augmenter le contrôle et la privatisation des endroits et des services publics, son groupe ABC a proposé au gouvernement provincial d'éliminer la Commission des parcs de Vancouver. Les membres élus de la commission s'y objectent, la plupart d'entre eux ayant été des candidats de ABC, qui se voient maintenant montrer la porte. Le gouvernement néodémocrate a accepté de démanteler la commission et de céder ses fonctions au Conseil municipal mais compte le faire après les élections provinciales du 19 octobre.
Une des principales initiatives de Ken Sim en tant que maire a été de changer les règlements de zonage pour permettre aux promoteurs immobiliers de construire de plus grands édifices dans toute la ville et d'accroître la densité démographique. Pour y arriver, il doit changer des règlements qui interdisent une trop grande densité et que de nouvelles constructions empêchent les résidents de voir les montagnes et la mer. Le maire prétend qu'en autorisant les promoteurs à remplir les « espaces vides » et à augmenter la densité démographique, ce sera une solution à la crise du logement et de l'itinérance et attirera plus de gens à vouloir vivre dans le centre-ville.
Au Canada, comme partout ailleurs, les alternatives aux mégacités à haute densité ne sont jamais discutées de façon sérieuse. Les grandes entreprises veulent que les gens soient entassés pour que les riches puissent obtenir leur profit maximum. Elles exigent que le logement social soit construit par des compagnies privées à des prix exorbitants et qu'aucune entreprise publique ne soit établie pour construire, fournir et entretenir des logements pour la population et que la valeur produite reste dans la communauté publique sous le contrôle du peuple.
Le fait que les intérêts privés se saisissent de gouvernements met en lumière la nécessité du renouveau démocratique. En établissant un système politique et une constitution modernes, les citoyens doivent s'investir du pouvoir de décider et de contrôler toutes les affaires qui affectent leur vie.
Élection partielle dans la circonscription fédérale de Toronto–St. Paul's
Prise de position en faveur du renouveau politique
L'élection fédérale partielle du 24 juin à Toronto–St. Paul's a été marquée par le travail d'un ensemble de gens et d'organisations déterminés à exposer le processus électoral dysfonctionnel et antidémocratique qui viole le droit des citoyens de participer au processus décisionnel. Une position audacieuse a été prise par ceux qui ont participé au Projet du bulletin de vote le plus long et par d'autres qui ont utilisé l'élection partielle pour discuter des questions qui préoccupent le peuple, allant de la réforme électorale au logement et à la pauvreté, en passant par la complicité du Canada dans le génocide contre le peuple palestinien. Bien qu'un représentant des partis cartellisés ait « gagné » l'élection, des progrès concrets ont été réalisés dans la lutte politique pour la réforme électorale et le renouveau démocratique au Canada.
En plus des candidats des partis cartellisés, 78 candidats étaient inscrits. Sur les 84 candidats inscrits sur le bulletin de vote, le plus long de l'histoire des élections fédérales canadiennes, ces 78 candidats représentaient des petits partis, le Parti marxiste-léniniste (PMLC), le Parti marijuana, le Parti rhinocéros et le Parti centriste, ainsi que des indépendants. Le fait qu'il y ait eu autant de candidats et qu'Élections Canada ait dû présenter un bulletin de vote de 90 cm de long et de 30 cm de large était une manifestation concrète du désir des Canadiens de réformer le système électoral.
L'objectif des organisateurs du Projet du plus long bulletin de vote a fait du sens pour les 12 543 personnes de la circonscription qui ont signé les documents de mise en candidature pour leurs candidats, exprimant une volonté de rompre avec le statu quo et de soutenir une approche différente de la participation aux élections. L'une des propositions du Projet est la création d'une assemblée constituante chargée de rédiger une nouvelle loi électorale. Cela permettrait aux Canadiens de décider quel genre de système électoral ils veulent, qui ne serait pas un système qui permettrait à un parti politique de « gagner » et de gouverner avec les votes d'à peine 17 % des électeurs admissibles, dans lequel les électeurs perdent leurs droits lorsqu'ils votent, sans aucun moyen de demander des comptes aux élus.
Au cours de l'élection partielle, Le Marxiste- Léniniste, Supplément du mensuel a déclaré : « Le Projet du bulletin de vote le plus long est une expression courageuse et significative de la volonté des Canadiens qui, en plus de réclamer un renouveau démocratique, prennent des mesures pratiques pour se donner les moyens d'agir, notamment en bâtissant leur capacité d'organisation pour se faire entendre. »
Le Projet de bulletin de vote le plus long a été
présenté dans
les médias comme une nouveauté au mieux et une nuisance
au pire,
notamment le fait que les résultats le soir des élections
ont
été retardés en raison de la taille du bulletin de vote
et ainsi
de suite. Cependant, dans le travail de porte-à-porte que
le
PMLC a effectué dans la circonscription pour populariser
son
candidat et le Projet de bulletin de vote le plus long,
de
nombreuses personnes ont exprimé leur enthousiasme pour
l'initiative conçue pour attirer l'attention sur la
nécessité de
changer le scrutin uninominal à un tour.
LML félicite tous les candidats et les organisateurs du Projet du bulletin de vote le plus long, le candidat du PMLC, Meñico Turcotte, pour leur travail courageux pendant les élections pour ouvrir l'espace au renouveau électoral et démocratique afin que ce soit le peuple qui soit habilité à choisir et à élire ses propres pairs à des fonctions publiques, et non les partis cartellisés qui défendent les intérêts des riches. Les résultats obtenus sont de bon augure pour la prochaine élection partielle dans la circonscription de Verdun, au Québec, ainsi que pour les élections fédérales de 2025.
Sur les 84 934 électeurs inscrits, 36 954 ont voté, ce qui donne un taux de participation de 43,51 %. Les candidats des libéraux, des conservateurs, du NPD et du Parti vert ont obtenu 40.48 % des votes admissibles, ce qui signifie que 59.52 % des électeurs n'ont pas voté pour eux, ont refusé de voter et plus d'un millier d'électeurs ont voté pour les indépendants et les candidats des petits partis qui ont participé au Projet du bulletin de vote le plus long. De plus, 590 électeurs ont signé l'engagement pris par le groupe Toronto–St. Paul pour la Palestine de ne pas voter pour des candidats qui refusent de prendre position pour un cessez-le-feu et les droits du peuple palestinien.
Le « gagnant », le conservateur Don Stewart, banquier de Bay Street et champion du militarisme, a remporté la victoire avec 15 565 voix, soit 18,32 % des électeurs, ce qui, selon les médias traditionnels, est une « victoire éclatante » sur la candidate libérale, Leslie Church, qui a obtenu 14 932 voix, soit 633 de moins que le « gagnant ».
L'initiative prise par le groupe non partisan Toronto–St. Paul's pour la Palestine a été d'utiliser l'élection partielle pour mettre la question de l'appui du Canada à Israël devant les électeurs et d'exiger des candidats des partis cartellisés qu'ils prennent position sur le génocide en cours contre les Palestiniens. Fidèles à eux-mêmes, les candidats des partis cartellisés ont éludé la question, en donnant des réponses vagues ou en tentant de s'écarter de la question posée, en s'en prenant à ce qu'ils appellent une montée de l'antisémitisme à Toronto. LML félicite les militant de Toronto–St. Paul's pour la Palestine d'avoir tout mis en oeuvre pour mettre à l'ordre du jour le génocide américano-israélien en Palestine et la complicité du Canada.
La signification de la défaite libérale
Les médias avaient pratiquement donné la libérale Leslie Church vainqueur de l'élection fédérale partielle du 24 juin à Toronto–St. Paul's lorsque, tard dans la nuit, alors que 189 des 192 sondages faisaient état de résultats, l'avance a basculé en faveur du candidat conservateur Don Stewart, qui a ensuite remporté le siège. Les résultats définitifs donnent à Stewart environ 42 % des voix contre la candidate libérale Leslie Church, qui a obtenu environ 40 % des bulletins de vote exprimés. Le NPD a obtenu 11 % des voix et le Parti vert 2,9 %. Les candidats inscrits sur le bulletin de vote le plus long ont obtenu entre 97 voix (Meñico Turcotte du Parti marxiste-léniniste du Canada a obtenu la troisième place avec 59 voix) et aucune voix dans le cas d'un indépendant. Le nombre total de votes pour les candidats du bulletin de vote le plus long a été de 1079 (2,9 %).
Maintenant que l'élection partielle est terminée, les
médias
disent aux Canadiens que Justin Trudeau « a vu sa
popularité
chuter alors que l'inflation, la crise du coût de la vie,
les
prix élevés des maisons et l'augmentation des niveaux
d'immigration suscitent le mécontentement des
électeurs ».
Aucune mention n'est faite du fait que le Canada bafoue
l'État
de droit international lorsqu'il fournit des armes et des
colons
et soutient le génocide du peuple palestinien. On ne
parle pas
non plus des crimes commis par l'OTAN et des dangers de
l'expansion de l'OTAN en Asie-Pacifique et dans
l'Arctique
canadien ou du soutien du Canada au régime néonazi en
Ukraine et
bien d'autres choses encore.
Avec un peu plus de 36 954 votes sur plus de 82 891 électeurs, il est difficile d'accepter la conclusion du cartel de l'establishment politique canadien selon laquelle une différence de 2 % de votes entre la candidate libéral et le candidat conservateur indique une chute de la popularité des libéraux et une hausse de la popularité des conservateurs. C'est étirer les choses un peu trop pour le discours politique au Canada.
Cela vise délibérément à détourner l'attention des Canadiens de la nécessité de renouveler le processus politique et d'adopter une nouvelle loi électorale qui mette fin au gouvernement des partis, qui mette fin au financement public des partis politiques, qui finance le processus électoral et non les partis et qui permette aux électeurs de voter en toute connaissance de cause.
Le langage utilisé dans les journaux et sur les ondes
est pour
le moins hyperbolique. Des déclarations hyperboliques
sont,
selon les termes d'un dictionnaire, « de petits chiens
aux
grands aboiements : ne les prenez pas trop au
sérieux ». Mais leur intention de déclarer quels
sont « les
enjeux » sur lesquels les Canadiens devraient voter lors
d'une
élection est toujours évidente.
« Voici le verdict : Trudeau ne peut pas continuer
comme
ça », a écrit le leader conservateur Pierre
Poilievre sur
X. « Il doit déclencher une élection sur la taxe carbone
dès
maintenant. »
Comme le montrent une fois de plus les résultats de l'élection partielle de Toronto–St. Paul's, le choix du représentant d'une circonscription par le scrutin majoritaire uninominal à un tour tourne en dérision le concept même de représentation. Il est grand temps de le remplacer par un système choisi par l'électorat sur la base duquel il pourra s'investir du pouvoir de décider.
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