Session d'automne de l'Assemblée nationale du Québec
La privatisation des services publics et la braderie des ressources naturelles reprennent de plus belle
Le 10 septembre 2024, la session d'automne de l'Assemblée nationale du Québec s'est ouverte sur un ordre du jour qui poursuit la privatisation des services publics et la braderie des ressources naturelles à une échelle toujours plus grande. Une série de projets de loi accélère cette braderie et fait payer aux Québécois les infrastructures nécessaires. Tout cela contribue à l'établissement de corridors de transport et d'énergie et à la chaîne d'approvisionnement en minéraux critiques nécessaires à l'économie de guerre des États-Unis.
Avant que l'Assemblée nationale n'ajourne pour l'été, le 9 mai, le gouvernement Legault déposait le projet de loi 61, Loi édictant la Loi sur Mobilité Infra Québec et modifiant certaines dispositions relatives au transport collectif. Cette nouvelle agence, Mobilité Infra Québec, sera dotée d'un conseil d'administration et aura, elle-seule, compétence à l'égard d'un projet complexe de transport que lui confie le gouvernement.
Le projet de loi 62, Loi visant principalement à diversifier les stratégies d'acquisition des organismes publics et à leur offrir davantage d'agilité dans la réalisation de leurs projets d'infrastructure, a aussi été déposé le 9 mai. On y introduit l'expression « contrat de partenariat ... dans une approche collaborative » qui se substitue au terme « partenariat public-privé (PPP) », maintenant abandonné.
Ce que le gouvernement appelle un « nouveau type de contrat » et une « approche collaborative » est en fait une méthode bien connue qui consiste à donner des fonds publics à des intérêts privés étroits pour faire le travail de la fonction publique. Le « cabinet-conseil » supranational McKinsey & Company affirme que, depuis sa création en 1926, « McKinsey fonctionne comme un partenariat mondial unique, uni par un ensemble de valeurs fortes et par la volonté d'apporter des changements positifs et durables ». Elle a également été chargée par le gouvernement fédéral de mettre en place la Banque de l'Infrastructure du Canada, tandis qu'un ancien partenaire de McKinsey a fini par devenir PDG de cette banque pour offrir des contrats à McKinsey.
Les projets de loi 61 et 62 sur les projets d'infrastructure démontrent l'intention du gouvernement Legault d'intensifier la privatisation pour l'octroi des projets d'infrastructure publics, dont les projets d'expansion d'Hydro-Québec.
Le 6 juin, l'ancien ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, a déposé à l'Assemblée nationale le projet de loi 69, Loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives. Le projet de loi fait partie intégrante de la restructuration de l'État pour mieux servir les grands intérêts privés supranationaux, plus particulièrement à intégrer les ressources en électricité du Québec aux corridors de transport d'énergie des États-Unis. Le projet de loi 69 accordera à la nouvelle ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie de nouveaux pouvoirs, dont celui « d'établir et de mettre en oeuvre un plan de gestion intégrée des ressources énergétiques » du Québec. C'est un fait bien connu qu'Hydro-Québec a déjà signé des contrats d'exportation de l'énergie électrique dite « verte » vers les États-Unis et d'autres projets sont en voie d'être réalisés.
Le sous-sol du Québec est aussi mis à la disposition du pillage avec le projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur les mines et d'autres dispositions, déposé le 28 mai par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts du Québec, Maïté Blanchette Vézina. Les organisations de défense de l'environnement se sont vivement opposées à ce projet de loi qui, selon elles, est loin de mettre fin au régime archaïque de « free mining ». Le « free mining » donne aux entreprises minières toutes sortes de passe-droit pour extraire du sous-sol québécois les minéraux critiques tant convoités, non seulement par l'industrie des véhicules électriques, mais aussi par le département de la Défense des États-Unis pour son industrie de guerre.
On a l'exemple en mai dernier du financement, à coup de plusieurs dizaines de millions de dollars, par le département de la Défense des États-Unis et Ressources naturelles Canada de l'étude de faisabilité par Lomiko Metal d'un projet de mine de graphite dans la région de la Petite Nation, au sud-ouest du Québec. Ce même département de la Défense américain vient d'annoncer le 26 septembre un financement de 18 millions de dollars dans l'entreprise de Colombie-Britannique appelée Nano One Materials. Celle-ci a implanté une usine pilote à Candiac, au sud de Montréal, pour la production de phosphate de fer lithié (LFP), la seule usine de ce type en Amérique du Nord.
Le LFP est le matériau actif des cathodes des batteries rechargeables au lithium-fer-phosphate. Déjà en 2016, le U.S. Army Research Laboratory (ARL) avait financé à près de 10 millions de dollars la recherche et le développement chez Hydro-Québec d'une pile rechargeable lithium-cobalt-phosphate portative. Cette pile a vu le jour en 2018 pour répondre aux spécifications du Pentagone.
Un contingent de la marche pour l'environnement, le 27
septembre, pour protester contre l'exploitation minière
dans la
région de la Petite Nation et d'autres régions du
Québec
Tout cela montre que ces projets de loi que le gouvernement prévoit faire adopter cet automne sont loin de contribuer au développement d'une économie qui sert avant tout à assurer la sécurité énergétique du Québec et du Canada et au développement d'une économie qui sert les besoins du peuple. Ces lois et les stratagèmes qui les accompagnent sont une façon de mettre les ressources naturelles du Québec à la disposition de l'économie de guerre des États-Unis.
Les Québécois comme les Canadiens ne souscrivent pas à cette conception du monde qui désinforme sur les véritables enjeux de la lutte pour un avenir radieux pour eux-mêmes et pour toute l'humanité. Plus précisément, ils rejettent cette notion que pour avoir une économie « verte » il faut que l'économie du Québec et du Canada soit intégrée à la machine de guerre des États-Unis ou soumise à des stratagèmes pour payer les riches.
Cet article est paru dans
Volume 54 Numéro 8-9 - Août-Septembre 2024
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