Nettoyage ethnique et dépossession dans les mots du Dr Ismail Zayid

Cette communication a été présentée à l'origine par le Dr Ismail Zayid lors de la Conférence sur la Palestine de Vancouver le 23 mai 1999 sous le titre Cinquante ans de nettoyage ethnique et de dépossession. Il y a maintenant 76 ans que la Palestine a été divisée et l'aperçu du conflit donné par le Dr Zayid est plus pertinent que jamais.

Le Dr Ismail Zayid est né et a grandi à Beit Nouba, en Palestine. Il a étudié à Jérusalem, a fait ses études de médecine à l'université de Londres et a émigré au Canada en 1972. Il est l'auteur de deux livres, Palestine : A Stolen Heritage et Sionism : The Myth and the Reality, et est président fondateur de l'Association Canada Palestine. À la fin des années 1990, il a pris sa retraite de son poste de professeur de pathologie et de chef du département de la pathologie anatomique à la faculté de médecine de l'Université Dalhousie de Halifax.

« Une nation a promis à une seconde le territoire d'une troisième »


Manifestation à l'occasion du centenaire de la déclaration Balfour, Mississauga,
Ontario, 4 novembre 2017

Le conflit israélo-palestinien est souvent décrit comme un conflit très complexe. Je tiens à vous dire que le problème est fondamentalement très simple et qu'il a été résumé, dans les mots d'un simple agriculteur palestinien de Jéricho – cité par feu Frank Epp, alors président du Conrad Grebel College de l'Université de Waterloo – qui lui a dit : « Notre problème est très simple. Un étranger est venu et a pris nos terres, nos fermes et nos maisons, et nous a mis à la porte. Nous avons l'intention de revenir. Cela prendra peut-être cent ans, mais nous reviendrons. »

Voilà, en résumé, le problème palestinien et l'essence de ce conflit. Un pays, la Palestine, a été démantelé, son peuple déraciné et remplacé par un peuple étranger rassemblé de tous les coins du monde et un nouvel État, Israël, a été créé à sa place. Cette tragédie, et le conflit qui s'en est suivi, et qui a entraîné des guerres à répétition au Moyen-Orient, est une conséquence directe de l'introduction du sionisme politique au Moyen-Orient.

Inévitablement, un peu d'histoire s'impose ici. C'est le 2 novembre 1917 qu'Arthur Balfour, ministre britannique des Affaires étrangères, a publié sa fameuse déclaration sous la forme d'une lettre adressée à Lord Rothchild. Elle se lisait ainsi :

« Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l'établissement en Palestine d'un foyer national pour le peuple juif ..., étant clairement entendu que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte soit aux droits civiques et religieux des communautés non juives existant en Palestine. »

Il est intéressant de noter que le mot de six lettres « arabe » n'apparaît pas une seule fois dans ce document. Désigner les Arabes qui constituaient à l'époque 92 % de la population de la Palestine et possédaient 98 % de ses terres, comme communautés non juives, n'est pas seulement absurde, c'est délibérément frauduleux. Inutile de vous dire que cette lettre n'a aucune légalité, car la Palestine n'appartenait pas à Balfour pour assumer de tels actes de générosité. Le Dr Arnold Toynbee a décrit avec justesse le rôle des Britanniques dans la publication de ce document :

« Nous prenions sur nous de donner quelque chose que nous n'avions pas à donner. Nous avons promis à une tierce partie des droits d'une sorte ou d'une autre dans le pays des Arabes palestiniens. »

De même, le célèbre écrivain juif, Arthur Koestler, l'a bien résumé lorsqu'il a décrit la Déclaration Balfour comme un document par lequel « une nation a promis à une seconde le territoire d'une troisième ».

Le 29 novembre 1947, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté sa résolution no 181 qui recommande la partition de la Palestine en un État juif sur 56 % du territoire, un État arabe sur 42 % du territoire et une zone internationale à Jérusalem. À l'époque, les juifs, dont une grande partie étaient constituée d'immigrants récents ou illégaux, représentaient un tiers de la population de la Palestine et possédaient 5,6 % de ses terres. Dans la région qui a été attribuée à l'État juif, la moitié de la population était arabe (musulmans et chrétiens) et l'autre moitié juive.

Il est intéressant de noter combien les temps ont peu changé depuis 1947, lorsque les États-Unis ont obtenu de l'Assemblée générale qu'elle retarde un vote « pour gagner du temps afin d'amener, par la coercition, certains pays d'Amérique latine, d'Asie et d'Afrique à se conformer à leurs propres vues ».

Le sous-secrétaire d'État des États-Unis, Sumner Welles, a déclaré :

« Par ordre direct de la Maison-Blanche, toutes les formes de pression, directes et indirectes, ont été utilisées pour s'assurer que la majorité nécessaire serait obtenue. »


Tout ce qui reste : les villages palestiniens occupés et dépeuplés par Israël en 1948, Walid Khalidi, Éd., Institut d'études palestiniennes, 1992. En 1948, dans le cadre de l'achèvement de sa politique de « nettoyage ethnique », Israël a poursuivi, dans une tentative de destruction de l'existence nationale palestinienne, une politique de destruction de biens et d'expropriation de terres arabes. Un processus systémique a entraîné la destruction totale de 378 villes et villages palestiniens.

Par la suite, des combats ont éclaté entre Arabes et Juifs et au début de 1949, à la fin des combats, Israël occupait 78 % de la Palestine et environ 750 000 Palestiniens terrorisés avaient été chassés ou avaient fui leurs foyers.

La genèse de cet exode émane du concept inhérent à l'idéologie sioniste de création d'un État juif pur en Palestine, libre d'Arabes. Le puissant ordre du jour politique qui existe aujourd'hui en Israël, en tant que politique de « transfert de Palestiniens » d'Israël et des territoires occupés, n'est pas nouveau. Theodor Herzl a écrit dans son journal en 1897, à l'occasion du premier Congrès sioniste mondial de Bâle, en Suisse, où il a présenté ses plans pour créer un État juif en Palestine, que :

« Nous essaierons de chasser la population pauvre (arabe) au-delà de la frontière en lui procurant de l'emploi dans les pays de transit, tout en lui refusant tout emploi dans son propre pays [...]. Le processus d'expropriation et de déplacement des pauvres doit être mené discrètement et avec circonspection. » (Extrait de R. Patai, éd., The Complete Diaries of Theodor Herzl, Vol I.)

Ben Gourion, dans un discours prononcé au plénum du 20e Congrès sioniste à Zurich le 7 août 1937, déclarait :

« Le transfert d'habitants (arabes) a eu lieu par le passé, dans la vallée (Jerzeel), dans le Sharon (la plaine côtière) et ailleurs. Nous connaissons les actions du Fonds national juif à cet égard. Maintenant le transfert doit s'organiser à une échelle tout à fait différente. Dans de nombreuses parties du pays, une nouvelle colonisation juive ne sera pas possible sans le transfert de la paysannerie arabe. Le transfert de la population est ce qui rend possible un plan très vaste de peuplement (juif). Heureusement, le peuple arabe possède de grandes zones vides (hors de Palestine). Le pouvoir juif dans le pays, qui ne cesse de croître, augmentera également nos possibilités de mener le transfert à grande échelle. Vous devez vous rappeler que cette méthode contient une idée sioniste et humaine importante, de déplacer des parties d'un peuple (c'est-à-dire, les Arabes de Palestine) vers leur propre pays et de les installer sur des terres vides [en Syrie, en Transjordanie et en Irak]. » (Benny Morris, Looking Back : A personal assessment of the Zionist Experience, Tikkun. 13 : 40-49, 1998)

Et c'est reparti ! Expulser un peuple de sa patrie, nous dit-on maintenant, est une « idée sioniste humaine ». Le professeur Israël Shahak l'a bien résumé : « Vous ne pouvez pas avoir un sionisme humain; c'est une contradiction dans les termes. »

Dans une lettre adressée en 1937 à son fils Amos, Ben Gourion lui confie que lorsque l'État juif sera créé, « nous expulserons les Arabes et prendrons leur place ». Et lors de sa visite à Nazareth nouvellement conquise en juillet 1948, Ben Gourion s'est exclamé : « Pourquoi les Arabes sont-ils restés ici ? Pourquoi y en a-t-il tant ? Ne les avez-vous pas expulsés ? »

Joseph Weitz, qui était le représentant en chef de l'Agence juive, a rapporté dans le numéro du 29 septembre 1967 de Davar, l'organe de l'Histadrout, que lui et d'autres dirigeants sionistes ont conclu, en 1940, qu'il n'y avait « pas de place pour les deux peuples ensemble dans ce pays ». Il en vient à conclure que la réalisation des objectifs sionistes exigeait « une Palestine, ou au moins une Palestine occidentale (à l'ouest du Jourdain) sans les Arabes ». Il a écrit qu'il fallait « transférer les Arabes d'ici vers les pays voisins, les transférer tous et seulement après ce transfert, le pays pourrait absorber des millions de nos frères ». Voilà, en substance, le fondement de la politique du « nettoyage ethnique » que les forces sionistes ont adoptée en 1948 pour éliminer, par le massacre et par la guerre psychologique, la quasi-totalité de la population arabe dans la région. Le territoire palestinien qu'ils ont conquis par des moyens militaires représente 78 % de la Palestine.

Le 9 avril 1948 a été perpétré le massacre du village de Deir Yassin près de Jérusalem, où 250 hommes, femmes et enfants ont été assassinés de sang-froid et massacrés par le groupe terroriste Irgun Zwei Leumi, avec l'approbation du commandant des forces sionistes officielles de Jérusalem, David Shaltiel; le Haganah, comme l'a récemment documenté Yitzhak Levi, un officier vétéran du renseignement israélien, a joué un rôle décisif dans cette expulsion. Ironiquement, le village de Deir Yassin avait conclu un accord de paix avec ses voisins juifs de Givat Shaul. Ce massacre n'était pas unique et de nombreux massacres similaires ont été perpétrés par les forces sionistes et les forces israéliennes pendant cette guerre. Un article paru le 6 mai 1992 dans le journal de Tel Aviv Hair, écrit par Guy Erlich, documente des preuves rassemblées par le journaliste juif américain Dan Kortzman, auteur de Genesis 1948, et l'historien Ariyeh Yitzhaki, d'au moins vingt grands massacres d'Arabes et de plus d'une centaine de massacres commis par les forces israéliennes. Yitzhak Levi écrit :

« Pour beaucoup d'Israéliens, c'était facile de s'accrocher à la fausse prétention que les Arabes avaient quitté le pays parce que c'était ce que leurs dirigeants avaient ordonné. C'est un mensonge total. La cause fondamentale de la fuite des Arabes a été la peur de la violence des Israéliens, et cette peur était fondée dans la réalité. »

Le chercheur en histoire Uri Milstein, célébré en Israël comme le dissipateur des mythes, confirme l'évaluation de Yitzhak Levi sur l'ampleur des massacres et va même plus loin :

« Si Yitzhaki prétend qu'il y avait des meurtres dans presque tous les villages, puis-je dire que jusqu'à la création d'Israël tous les cas de combats ont pris fin par un massacre d'Arabes. Il y a eu des massacres d'Arabes durant toutes les guerres d'Israël, mais je ne doute pas que la guerre d'Indépendance ait été la plus sale. »

Dans le village de Duweima, un village arabe près d'Hébron, occupé sans combat par le bataillon 89 de la 8e brigade, quelque 80 à 100 civils ont été assassinés de sang-froid par les occupants. Plus tard, encore plus de civils ont été assassinés. Dans le village de Safsaf :

« Cinquante-deux hommes ont été attachés avec une corde, descendus dans une fosse et abattus. Dix ont été tués. Des femmes ont demandé grâce. Il y a eu trois cas de viol dont le viol d'une jeune fille de quatorze ans et quatre autres personnes ont été tuées. »

La politique de massacre comprenait, entre autres, une campagne de guerre psychologique, dont la terreur pour forcer les Palestiniens à fuir. Leo Heiman, officier de réserve de l'armée israélienne qui a combattu en 1948, écrit en juin 1964 dans Marine Corp Gazette :

« Alors qu'une panique incontrôlée se répandait dans tous les quartiers arabes, les Israéliens ont fait venir des jeeps surmontées de haut-parleurs qui diffusaient des enregistrements de 'sons d'horreur'. Ceux-ci comprenaient des cris, des gémissements et des lamentations remplies d'angoisse de femmes arabes, les hurlements de sirènes et le bruit des cloches d'alarme d'incendie, interrompus par une voix sépulcrale qui disait en arabe 'sauver vos âmes, vous les fidèles : les juifs utilisent des gaz toxiques et des armes atomiques. Sauvez-vous, au nom d'Allah ! »

Des méthodes plus subtiles de guerre psychologique ont été utilisées par Yigal Allon, le commandant du Palmach, une force d'élite de la Haganah, qui est devenu plus tard ministre israélien des Affaires étrangères. Il écrit en 1948 dans Ha Sepher Ha Palmach :

« J'ai rassemblé tous les mukhtars juifs (chefs), qui ont des contacts avec les Arabes dans différents villages, et leur ai demandé de chuchoter aux oreilles de certains Arabes qu'un grand renfort juif est arrivé en Galilée et qu'il va brûler tous les villages de la Houla. Ils devraient conseiller à ces Arabes, à titre d'amis, de s'échapper pendant qu'il est encore temps. La rumeur s'est répandue dans toutes les régions de la Houla. La tactique a atteint entièrement son but. »

Lorsque les Arabes ne se sont pas enfuis, comme c'était escompté, une combinaison de terreur et d'expulsion physique a été utilisée, comme dans le cas des villes de Lydda et Ramleh qui ont été occupées le 10 juillet 1948. Yitzhak Rabin le rapporte dans ses mémoires publiées dans le New York Times du 23 octobre 1979 :

« Alors que les combats étaient encore en cours, nous devions nous attaquer au problème du sort de la population civile, qui comptait environ 50 000 personnes. Nous sommes allés marcher à l'extérieur, Ben Gourion nous a accompagnés et Allon a réitéré sa question : 'Qu'est-ce qu'on doit faire de la population ?' B.G. a agité la main dans un geste qui disait : 'Chasse-les !' »

Un des crimes de guerre israéliens s'est produit à cet endroit. Après la reddition de Lydda, un groupe d'hommes palestiniens s'est réfugié dans la petite mosquée Dahmash. Le commandant du troisième bataillon du Palmach, Moshe Kalman, a donné l'ordre de tirer plusieurs missiles sur la mosquée. La force qui a attaqué la mosquée a été surprise par le manque de résistance. Elle a trouvé les restes des combattants arabes collés aux murs de la mosquée. Un groupe de 20 à 50 résidents de la ville a ensuite été amené pour nettoyer la mosquée et enterrer les restes. Quand ils ont terminé leur travail, ils ont également été abattus et jetés dans les tombes qu'ils avaient eux-mêmes creusées. Le journaliste juif américain Dan Kortzman a appris l'événement de Moshe Kalman en travaillant sur son livre, Genesis 1948, qui décrit la guerre de l'Indépendance.

« Rabin et ses officiers ont chassé ces 60 000 civils de leurs maisons par la terreur, avec des avions qui volaient à basse altitude au-dessus de leurs têtes tirant ici et là sur des personnes et les forçant à courir. Le spectacle d'hommes, femmes et enfants terrorisés qui fuyaient l'horreur sous un soleil de plomb, après avoir parcouru 25 km jusqu'au village de Beit Nouba, où je les ai vus de mes propres yeux, est une scène que je n'oublierai jamais. Tout cela réfute et contredit la propagande sioniste que les Palestiniens ont quitté leurs foyers volontairement et en réponse aux appels lancés par leurs dirigeants. »

Il est peut-être pertinent de rappeler que cette pièce de propagande sioniste a d'abord été démolie par le Dr Erskine Childers qui a examiné les enregistrements de surveillance américains et britanniques de toutes les émissions provenant du Moyen-Orient tout au long de 1948. En 1961, il rapporte dans le Spectator :

« En 1948, il n'y a pas eu un seul ordre, appel ou suggestion d'évacuer la Palestine par aucune des stations de radio arabes, à l'intérieur ou à l'extérieur de la Palestine. Par contre, il y a de nombreux enregistrements d'appels et de directives transmis en arabe aux civils palestiniens de demeurer en place. »

Les documents historiques démontrent clairement que le problème des réfugiés de Palestine a été créé en réponse à une politique sioniste claire qui a consisté à expulser de la terre de Palestine son peuple. Chaim Weizmann, le premier président d'Israël, décrit ce processus avec beaucoup de satisfaction comme « le défrichement miraculeux de la terre ». Cependant, le médiateur de l'ONU, le comte Folke Bernadotte de Suède, déclare dans un rapport présenté à l'ONU :

« Ce serait une offense aux principes de la justice élémentaire si ces innocentes victimes du conflit se voyaient refuser le droit de retourner chez elles alors que les immigrants juifs affluent en Palestine, et, en fait, pavent la voie à une menace, celle du remplacement permanent des réfugiés arabes qui ont été enracinés dans la terre pendant des siècles. »

Le comte Bernadotte a payé cher pour avoir énoncé ce principe évident : le 17 septembre 1948 il a été assassiné à Jérusalem par la bande terroriste Stern, sur les ordres directs de Yitzhak Shamir. Toutefois, l'Assemblée générale des Nations unies a décidé, le 11 décembre 1948, dans sa résolution no 194 :

« De permettre aux réfugiés qui le désirent de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins, et que des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers ».

L'application de cette résolution, ainsi que la résolution no 181 du 29 novembre 1947, ont été réaffirmées et ont été transformées en conditions d'admission d'Israël à l'ONU dans la résolution no 273 du 11 mai 1949.

Malgré cela et malgré les résolutions répétées de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité de l'ONU qui ont exigé la mise en oeuvre de la résolution 194 sur le retour des réfugiés, Israël continue de défier cette volonté internationale et, essentiellement, on peut dire que son adhésion aux Nations unies est illégitime, compte tenu de son refus de respecter les conditions qui lui ont été imposées. Non seulement cela, Israël a procédé en 1967, après l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, à l'expulsion de plus de 300 000 réfugiés palestiniens de leurs foyers ou de camps de réfugiés. Beaucoup d'entre eux ont été essentiellement expulsés une deuxième fois. La résolution 237 du Conseil de sécurité, en date du 14 juin 1967, invitait le gouvernement d'Israël à faciliter le retour de ces réfugiés, et les résolutions similaires de l'Assemblée générale des Nations unies à cet effet ne sont toujours pas appliquées.

Il est évident pour quiconque a été témoin de l'histoire de cette région que les Palestiniens sont toujours déterminés à retourner dans leur patrie et que leur lutte continue malgré les massacres répétés et une politique orchestrée de génocide qui nie leur existence nationale. Leurs sacrifices ont été documentés et se poursuivent, malgré la politique israélienne de terrorisme d'État et le bombardement continu de leurs camps de réfugiés au Liban et les pratiques oppressives qui sont utilisées contre eux par l'occupation de la Cisjordanie et de Gaza. Le regretté Dr Frank Epp décrit la tragédie du peuple palestinien en ces termes :

« Rarement un peuple a souffert en silence tant d'injustices pendant si longtemps, en attendant que les puissances en place soient en mesure de réparer le mal infligé. »

De même, c'est le distingué philosophe lord Bertrand Russell qui a déclaré, lors d'une conférence internationale en 1970, ce qui suit :

« La tragédie du peuple palestinien est que son pays a été 'donné' par une puissance étrangère à un autre peuple pour la création d'un nouvel État, ce qui a eu pour résultat que des centaines de milliers d'innocents sont devenus d'une manière permanente sans foyer. Leur nombre augmente encore, et combien de temps encore le monde est-il prêt à endurer ce spectacle de cruauté gratuite ? Il est tout à fait évident que les réfugiés ont droit à une patrie d'où ils ont été chassés, et le déni de ce droit est au coeur du conflit qui persiste. Aucun peuple dans le monde n'accepterait d'être expulsé en masse de son pays; comment quelqu'un pourrait-il exiger que le peuple de Palestine accepte une punition que personne d'autre ne tolérerait ? Une résolution juste et permanente de la question des réfugiés dans leur patrie est un ingrédient essentiel de tout véritable règlement au Moyen-Orient. »


La vie à Ramleh, juste avant l'expulsion de 60 000 habitants des villes de Ramleh et Lydda

Les Palestiniens quittent « volontairement » en 1948. (À droite) Manifestation de masse à Ramleh en 1962.

La question de la terre

En 1948, lorsqu'Israël a mené à terme sa politique de « nettoyage ethnique », il a poursuivi, dans le but de détruire l'existence nationale palestinienne, une politique de destruction de biens et d'expropriation de terres arabes. Un processus systémique a entraîné la destruction totale de 378 villes et villages palestiniens.

En 1948, les propriétés juives totales, louées et détenues, représentaient moins de 6 % de la superficie totale de la Palestine. Pour amplifier ces chiffres, un des actes de pillage les plus choquants de l'histoire moderne a eu lieu. Une série de soi-disant lois ont été rapidement promulguées pour exproprier les millions d'hectares et les milliers de fermes et de commerces et les centaines de villes et villages entiers qui appartenaient aux réfugiés arabes expulsés. Ces lois comprenaient les Règlements d'urgence en matière de défense, l'Ordonnance sur les zones abandonnées (1949), les Articles d'urgence sur l'exploitation des terres non cultivées (1947-1949), la Loi sur la propriété des absents (1950) et la Loi sur l'acquisition des terres (1953).

Cet acte de pillage ne s'est pas limité aux biens des réfugiés qui avaient été expulsés du pays mais s'est étendu aux Arabes qui sont restés sur leurs terres. En vertu d'une réglementation, n'importe quelle zone pouvait être fermée par les autorités pour des raisons de sécurité et ses habitants arabes en étaient exclus. Elle serait déclarée « abandonnée » ou « non cultivée ». En vertu d'une autre loi, elle serait remise à d'autres, généralement des juifs, pour qu'ils la cultivent. De nombreux citoyens arabes qui n'avaient jamais quitté la partie de la Palestine qui est devenue Israël se sont retrouvés loin de leurs terres et de leurs maisons pendant un certain temps au cours du processus d'occupation, d'annexion et de transfert de population israéliens. À leur retour, on leur a interdit l'accès à leurs villages, devenant ainsi des absents, et leurs biens ont été saisis. Ces Arabes ont mérité le titre orwellien de « absents présents ». Où trouver une telle entité sinon dans le dictionnaire sioniste ?

Moshe Keren, un écrivain juif, a décrit les lois comme « un vol en règle avec une couverture légale. »

De cette manière, les autorités israéliennes ont confisqué la totalité des biens, meubles et immeubles des 750 000 réfugiés expulsés, et plus d'un million de dounams de terres appartenant à des Arabes qui étaient restés en Israël après 1948 ont été saisis.

Les terres arabes expropriées ont été transférées au Keren Kaymeth, le Fonds national juif (FNJ), dont les lois interdisent la location des terres aux Arabes ou l'utilisation de la main-d'oeuvre arabe. Ce sont clairement des lois racistes. Uri Avnery a déclaré à la Knesset : « Si nous devons expulser les cultivateurs arabes de la terre qui était officiellement la leur, et qui a été remise aux juifs, nous agirions conformément au verset qui dit : 'Tu as tué et tu as aussi hérité'. »

Ce ne sont là que quelques-unes des méthodes qui ont été utilisées et des lois qui ont été promulguées pour exproprier les Arabes restés en Israël et pour les soumettre à la discrimination.

L'occupation de 1967

La politique israélienne de nettoyage ethnique et d'expropriation s'est poursuivie dans les territoires occupés lors de la guerre d'agression de 1967, y compris la Cisjordanie et Gaza. Cela s'est traduit en partie par la destruction totale d'un certain nombre de villages et de villes de Cisjordanie, dont mon propre village, Beit Nouba. Avec les villages voisins d'Imwas (le village biblique d'Emmaüs) et de Yalu, Beit Nouba, a été systématiquement dynamité, rasé au bulldozer et effacé de la surface de la terre les 9 et 10 juin 1967, un crime de guerre commis sur les ordres directs d'Yitzhak Rabin, chef d'état-major de l'armée israélienne à l'époque et, plus tard, premier ministre d'Israël et, ironie du sort, lauréat du prix Nobel de la paix. À la honte de tous les Canadiens, l'infamie appelée Parc du Canada, payée par les dollars canadiens déductibles des impôts, se dresse aujourd'hui sur les ruines d'Imwas, de Yalu et de Beit Nouba.

Moshe Dayan, le ministre de la Défense de juin 1967, est cité par le général Arieh Bar-On, le secrétaire militaire de Dayan, comme ayant déclaré lors d'une réunion du Commandement général, en septembre 1967, qu'« au début de la guerre et pendant la guerre, nous avons mené des opérations pour détruire des villages, à des fins sionistes que je partage pleinement ». Dans son livre publié récemment en hébreu, Signature personnelle – Moshe Dayan dans la guerre des six jours et après, le général Bar-On écrit :

« Encourager l'émigration des Arabes de Judée et de Samarie (sic – la Cisjordanie) était en effet la politique de tout le système, qui était sous sa domination (de Dayan). »

Ravager la Palestine

Plus de 300 000 Palestiniens sont devenus des réfugiés à la fin de juin 1967, et certains pour la deuxième fois. Cela est le résultat d'un « encouragement » direct et d'une politique planifiée par Israël.

Le Conseil de sécurité a adopté la résolution 237 le 14 juin 1967, ordonnant le retour des réfugiés palestiniens de 1967 dans leurs foyers, mais Israël a refusé de s'y conformer.


L'article 53 de la quatrième Convention de Genève de 1949, dont Israël est signataire, stipule : « Il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l'État ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives. »

La politique israélienne dans les territoires occupés continue de bafouer le droit international, la quatrième Convention de Genève et les résolutions répétées du Conseil de sécurité des Nations unies. Ces politiques comprennent la démolition de maisons palestiniennes et l'expropriation de biens. Plus de 70 % de la superficie de la Cisjordanie a été expropriée depuis 1967 pour la création de colonies juives illégales. Outre la destruction de villages entiers, des milliers de maisons ont été démolies, à titre de punition collective ou faute de permis de construire. De tels permis sont régulièrement refusés aux Palestiniens pour construire sur leurs propres terres.

Rien que dans la bande de Gaza, 40 % de cette minuscule zone a été expropriée pour accueillir illégalement 5 000 colons juifs. Les 60 % restants accueillent environ un million de personnes, ce qui en fait une zone avec la plus forte densité de population au monde. La grande majorité de ces personnes sont des réfugiés expulsés de leurs foyers en Palestine en 1948.

La catégorie de « propriété publique » sous le mandat britannique dérivait de celle connue sous le nom de miri sous le système ottoman de régime foncier (comme les terres communes dans les provinces canadiennes avant 1867). Toutefois, outre le domaine d'État, de nombreuses autres sous-catégories ont été incluses dans cette dernière catégorie, qui englobait toute une série d'usufruits et de baux privés et communaux.

Dans un processus systématique de privation économique, plus de 230 000 oliviers et vergers dans les territoires occupés de 1967 ont été déracinés et rasés au bulldozer. C'est ironique, quand on sait que les colons sionistes sont venus en Palestine avec le mythe qu'ils étaient là « pour faire fleurir le désert ».

En référence à ce mensonge et au slogan sioniste d'Israel Zangwill de 1906, « La Palestine est une terre sans peuple pour un peuple sans terre », il peut être pertinent de citer d'autres sionistes juifs.

Dans La vérité sur Eretz-Israël de 1891, Ahad Ha'am, l'écrivain et philosophe juif russe, écrit :

« Nous avons l'habitude de croire, à l'étranger, que la Palestine est une terre presque entièrement désolée, un désert non cultivé [...]. En réalité elle ne l'est pas : sur toute cette terre, il est difficile de trouver un champ de terre arable non semée. »

Le comportement des colons juifs envers les Arabes le dérangeait. Ils n'avaient pas appris de l'expérience en tant que minorité au sein d'une population plus large, mais avaient réagi avec la cruauté des esclaves qui étaient soudainement devenus des rois, traitant leurs voisins avec mépris. Les Arabes, écrivait-il, voient et comprennent le sens des intentions sionistes dans le pays et « le jour où la présence de notre peuple prendra une dimension telle qu'elle empiète, de peu ou de beaucoup, sur les positions des autochtones, ce n'est pas de bon gré qu'ils nous céderont la place. Il nous faut traiter la population locale avec amour, conformément au droit et à la justice. Or que font nos frères dans le pays d'Israël ? Ils ont été serfs en diaspora. Et maintenant qu'ils peuvent jouir d'une liberté sans contrainte, comme c'est toujours le cas pour un esclave devenu roi, ils deviennent eux-mêmes des despotes. Ils traitent les Arabes avec hostilité et cruauté. »

L'éthique était au coeur du nationalisme d'Ahad Ha'am, et jusqu'à la fin de sa vie, il a dénoncé tout compromis fondé sur l'opportunisme politique. En 1913, protestant contre un boycott juif du travail arabe, il écrivit à un ami : « Je ne peux pas supporter l'idée que nos frères soient moralement capables de se comporter ainsi envers les humains d'un autre peuple, et malgré moi, la pensée me vient à l'esprit : 'si c'est ainsi maintenant, à quoi ressembleront nos relations avec les autres si, à la fin des temps, nous parvenons vraiment au pouvoir en Eretz Israël ? Et si c'est cela la venue du Messie, je ne veux pas le voir venir. »

Nous voyons aujourd'hui la déclaration prophétique d'Ahad Ha'am complètement accomplie...

Le processus d'expropriation des terres et de création de colonies illégales, alors que les maisons palestiniennes sont rasées au bulldozer et que leurs arbres sont déracinés, se poursuit après la mascarade appelée « Processus de paix au Moyen-Orient » et les « Accords d'Oslo », un processus qui a légitimé l'occupation et sapé l'ordre international et la volonté de notre peuple.

Parlant de paix, il est intéressant de noter que Ben Gourion a accordé aux dirigeants arabes plus de crédit qu'ils ne le méritent lorsqu'il a déclaré en 1956 :

« Je ne comprends pas ton optimisme. Pourquoi les Arabes feraient-ils la paix ? Si j'étais, moi, un leader arabe, jamais je ne signerais avec Israël. C'est normal : nous avons pris leur pays. » (Cité par Nahum Goldmann dans Le Paradoxe juif : Conversations en français avec Léon Abramowicz, Stock, 2001)

Une autre observation qui est pertinente ici est la référence continue à la nécessité de la sécurité israélienne et les accusations de terrorisme dirigées par Israël et les médias et politiciens occidentaux contre les Palestiniens, qui sont manifestement censés arroser de bouquets de fleurs les Israéliens qui les ont expulsés de leurs villes et villages et continuent à détruire leurs maisons au bulldozer, à déraciner leurs arbres et à assassiner, incarcérer et torturer leurs hommes, femmes et enfants. Fait intéressant, le général canadien Eedson Louis Millard Burns, chef d'état-major de l'Organisme des Nations unies chargé de la surveillance de la trêve (ONUST) ne s'attendait pas à cela. Il a écrit dans son livre Between Arab and Israeli, 1962 :

« Il me semblait symptomatique d'un certain aveuglement face aux réactions humaines d'autrui que tant d'Israéliens disaient ne pas comprendre pourquoi les Arabes chassés de leurs terres continuaient à haïr et à essayer de blesser ceux qui les avaient chassés. » (p. 162)

Commentant l'hypocrisie occidentale, Noam Chomsky a déclaré que la politique du Parti travailliste israélien s'était adaptée à l'hypocrisie occidentale, alors que l'ancien ministre israélien, Binyamin Ben-Eliezer, décrivait leur politique menée « de telle sorte que l'Occident puisse prétendre qu'il ne comprend pas. »

La vieille ville de Jérusalem en flammes en 1948. L'armée sioniste attaque et détruit une partie de Jérusalem, expulsant 80 000 Palestiniens. (Le YMCA est à droit)

Après avoir annexé unilatéralement Jérusalem en 1967, les sionistes ont mis le feu à l'historique Mosquée al-Aqsa, achevée en 705 de l'ère commune.

4 avril 2002 : Un Palestinien âgé se voit refuser l'accès à Jérusalem à un poste de contrôle de l'armée israélienne. Les habitants de Jérusalem doivent désormais utiliser des cartes d'identité.

Jérusalem

Le sort de Jérusalem est un enjeu majeur pour déterminer le cours futur de la paix ou du conflit au Moyen-Orient. Jérusalem a été une ville palestinienne tout au long de l'histoire, malgré des périodes d'occupation par des forces étrangères envahissantes. La même résolution des Nations unies 181 du 29 novembre 1947, qui a permis la création d'Israël, stipulait que Jérusalem devait être une entité internationale (corpus separatum). Sur les 41 villages entourant Jérusalem-Ouest, 37 ont été détruits par Israël en 1948. Plus de 80 000 Palestiniens ont été chassés de Jérusalem-Ouest en 1948. L'annexion de Jérusalem-Est en 1967 par Israël est illégale et constitue une violation du droit international et un défi aux résolutions du Conseil de sécurité. Toutefois, Israël poursuit sa politique de nettoyage ethnique et d'expropriation à Jérusalem depuis 1967.

Israël a détruit la totalité du quartier maghrébin, un site religieux islamique historique, pour créer une place juive, en face du mur des Lamentations. Le gouvernement israélien a agrandi la municipalité de Jérusalem pour la multiplier par dix et l'a annexée.


Ci-dessus: Le « Grand Jérusalem »

Depuis 1967, Israël a systématiquement mené une politique de judaïsation de Jérusalem. Quatre-vingt-cinq pour cent des terres annexées ont été expropriées pour créer des colonies juives et des maisons réservées aux juifs, entourant et étouffant Jérusalem-Est arabe.

Les résidents arabes de Jérusalem-Est sont traités comme des étrangers munis de cartes d'identité spéciales, comme des « résidents permanents » à Jérusalem. Ces cartes sont confisquées aux habitants de Jérusalem, s'ils sont forcés de travailler ou de vivre en dehors de Jérusalem, alors qu'eux et leurs ancêtres vivent dans la ville depuis des milliers d'années. Pourtant, les juifs de New York ou de Toronto peuvent s'installer à Jérusalem à leur guise.

Depuis septembre 1993, et la mascarade d'Oslo, une fermeture stricte a été imposée à Jérusalem pour les Palestiniens de Cisjordanie, pour qui Jérusalem est un centre économique, médical, culturel, éducatif et religieux. Les musulmans et les chrétiens sont privés d'accès à leurs lieux de culte religieux. Depuis lors, des centaines de personnes ont été tuées et blessées, plus de 500 familles ont vu leur maison démolie, plus de 1000 personnes ont vu leur droit de vivre à Jérusalem, la ville de leur naissance, enlevé, tandis que les juifs de Moscou ou de New York peuvent s'installer à Jérusalem quand ils le souhaitent. Des milliers de personnes ont été arrêtées, torturées et emprisonnées. Des terres continuent d'être expropriées pour créer des colonies juives en territoire palestinien et des milliers de personnes se retrouvent sans abri, sans ressources et sans espoir. Les étudiants se voient refuser l'accès à leur université et les malades ne peuvent pas se rendre dans les hôpitaux pour se faire soigner.

C'est ce que la mascarade d'Oslo a engendré. L'occupation illégale a été légitimée, l'Autorité palestinienne est devenue un sous-traitant chargé de faire le sale boulot d'Israël dans les quelques « bantoustans » dispersés qui sont nominalement sous le contrôle d'Arafat, mais assiégés par les troupes israéliennes. En substance, l'accord d'Oslo est une nouvelle Nakba (catastrophe) que les négociateurs palestiniens ont infligée à leur peuple et qui a repoussé la lutte des Palestiniens pour l'autodétermination d'une autre génération, au moins.

Depuis l'annexion de Jérusalem-Est en 1967, le gouvernement israélien a adopté une politique de discrimination systématique et délibérée à l'encontre de la population palestinienne de la ville pour tout ce qui concerne l'expropriation des terres, la planification et la construction.

Telle est la principale conclusion d'un rapport qui vient d'être publié en Israël par B'Tselem, l'organisation israélienne de défense des droits humains. Il conclut que « cette politique constitue une violation flagrante du droit international et des principes fondamentaux de la démocratie et a de graves conséquences en matière de droits de l'homme ».

Il est vrai que le peuple palestinien a enduré tant de torts et d'injustices, mais je vous assure que sa ténacité est inébranlable. Notre peuple est prêt à lutter et à se sacrifier; on ne peut vaincre un peuple qui fait preuve d'une telle ténacité qu'un enfant transforme sa petite main en poing, avec une pierre, qui défie l'oppresseur. Le peuple opprimé d'Afrique du Sud a pu donner à F.W. De Klerk une leçon qui lui a fait dire que le livre sur l'apartheid était fermé. Je crains que le livre sur l'idéologie sioniste ne soit pas encore fermé, mais je peux vous assurer que le sionisme, comme l'apartheid, va à l'encontre du cours naturel de l'histoire et je suis optimiste quant au fait que le bien l'emportera sur le mal. Je suis également optimiste parce qu'il y a des voix juives qui s'élèvent. Le grand journaliste juif I.F. Stone, aujourd'hui décédé, a écrit il y a quelques années :

« Comment pouvons-nous parler des droits de l'homme et les ignorer pour les Palestiniens ? Comment Israël peut-il parler des droits des Juifs à une patrie et en refuser une aux Palestiniens ? »

De même, le professeur Israël Shahak, survivant de l'holocauste et président de la Ligue israélienne pour les droits civils et humains, a déclaré : « La majorité du public israélien ferme les yeux sur le simple cri humain du Palestinien. » Il a averti son peuple « de ne pas permettre que l'expérience du peuple allemand entre les deux guerres mondiales lui arrive » et a ajouté qu'il disait cela « pour que personne ne puisse dire, comme le peuple allemand, « Je ne savais pas. » Et comme Albert Speer, « j'essaie d'agir avant qu'il ne soit trop tard ».

Le rédacteur en chef du journal religieux juif Ner écrivait en janvier 1961 :

« Seule une révolution internationale peut avoir le pouvoir de guérir notre peuple de sa maladie meurtrière et de sa haine sans cause. Combien grande était notre responsabilité envers ces misérables réfugiés arabes lésés, dans les villes où nous avons installé des juifs amenés de loin, qui maintenant sèment et récoltent, et dans les villes que nous avons volées, nous avons installé des maisons d'éducation, de charité et de prière, tandis que nous bavardons et délirons sur le fait que nous sommes le 'peuple du livre, la lumière des nations'. »

C'est le genre de voix juive authentique qui, je suis heureux de le dire, me donne l'espoir qu'avec le temps, il y aura davantage de personnes comme I.F. Stone, Israël Shahak, Felicia Langer et d'autres grands hommes et femmes juifs de conscience. En effet, si l'autre voix, celle qui a fini par dominer Israël et la pensée sioniste, arrogante de puissance, qui ne pense qu'à l'expansion territoriale et pratique la discrimination et la terreur, la voix d'Ariel Sharon, d'Yitzhak Shamir, d'Yitzhak Rabin et de Benjamin Netanyahou, si cette voix continue à parler au nom d'Israël, alors Israël provoquera, je le crains, une tragédie pour lui-même et pour les Palestiniens, et très probablement pour le reste du monde.

La tragédie du peuple juif dans les crimes qu'il a commis et continue de commettre contre le peuple palestinien est mise en évidence dans cette déclaration précise du célèbre historien britannique, le professeur Arnold Toynbee, qui écrit dans son grand ouvrage sur l'histoire de l'humanité :

« En 1948, les Juifs savaient par expérience ce qu'ils faisaient; et ce fut leur suprême tragédie que la leçon tirée de leur affrontement avec les nazis les ait conduits non à éviter, mais à imiter certains des crimes commis par les nazis contre les juifs. »

Les prophètes de l'Ancien Testament ont été incroyablement prophétiques en prédisant ce qui arriverait si les juifs se détournaient de ce qu'ils savaient être la vérité de la justice. Permettez-moi de terminer en vous citant quelques versets du prophète Michée, qui écrivait peut-être pour aujourd'hui lorsqu'il a donné cet avertissement :

« Écoutez ceci, princes de la maison de Jacob, et juges de la maison d'Israël, vous qui avez la justice en abomination, et qui renversez tout ce qui est droit, qui bâtissez Sion dans le sang, et Jérusalem dans l'iniquité. C'est pourquoi, à cause de vous, Sion sera labourée comme un champ, et Jérusalem sera commun un monceau de pierres, et la montagne du temple deviendra un somme boisé. »

Il est encore temps d'empêcher cette prophétie de se réaliser. Mais le temps risque d'être compté.

Le peuple palestinien réclame un minimum de justice, faute de quoi, je le crains, il n'y aura de paix ni pour les Arabes ni pour les Juifs au Moyen-Orient.


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Volume 54 Numéro 30 - 15 mai 2024

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