Des sujets de préoccupation pour le mouvement à la défense de la Palestine et contre le génocide israélien

Le gouvernement canadien dénoncé pour son mépris de la vie des Palestiniens

– Diane Johnston –

Lors d'une conférence de presse tenue le 2 avril à l'occasion du sixième sit-in de Samar Alkhdour devant le bureau du ministre de l'Immigration Marc Miller, une membre du Mouvement de la jeunesse palestinienne a expliqué que « la famille Alkhdour est l'un des nombreux cas où des familles palestiniennes ont perdu leurs proches à cause des mesures discriminatoires de notre gouvernement ». Elle a ajouté que de nombreuses personnes au Canada « tentent désespérément de rejoindre leurs familles et de les mettre en sécurité. Nous sommes ici pour demander justice au gouvernement canadien qui n'a pas agi assez vite et pour exiger qu'il agisse avant que d'autres familles ne se retrouvent dans la même situation. »

En 2017, il était prévu que Samar, son mari, sa fille Jana, gravement handicapée, et leurs deux autres enfants quittent Gaza pour les États-Unis, afin qu'elle puisse poursuivre ses études de maîtrise. Mais cela n'a pas fonctionné, car les autorités israéliennes ont rejeté la demande de départ de son mari. Samar a néanmoins décidé de quitter Gaza avec deux de ses enfants et de laisser Jana à la garde de son père.

En 2018, le mari de Samar a été autorisé à partir, mais comme le transport en ambulance n'a pas pu être assuré entre Gaza et l'Égypte, Jana a été contrainte de rester sur place avec un membre de sa famille.

En 2019, Samar, son mari et leurs deux autres enfants ont déménagé au Québec et ont entamé les démarches pour retrouver Jana. Cependant, deux mois avant que Samar n'obtienne le feu vert d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) pour que sa fille les rejoigne, celle-ci est décédée. Samar affirme qu'IRCC a fait la sourde oreille à ses demandes répétées de faire venir Jana au Canada avant qu'il ne soit trop tard, des années, et pas seulement des mois, avant le début du génocide. Elle affirme que « toute cette négligence et cette inaction ont été couvertes sous le titre de 'délais de traitement normaux au Canada' ».

Elle a demandé au gouvernement fédéral « d'élargir et d'accélérer le programme de Gaza ». Depuis le 2 avril, aucune personne n'a pu quitter Gaza grâce à ce programme. « Si vous l'avez fait pour l'Ukraine, vous pouvez le faire pour Gaza, a-t-elle déclaré, et ne me dites pas que c'est compliqué. Il ne s'agit pas d'une relation, mais d'un génocide. » Elle a conclu en demandant au gouvernement fédéral « d'agir rapidement pour qu'il y ait un cessez-le-feu, parce que c'est le père et la mère de tous les crimes dont nous sommes témoins ».

Nazar Saaty, avocat spécialisé en droit pénal et en droit de l'immigration, a expliqué comment le Canada avait géré les crises dans le passé. Il a rappelé comment le gouvernement canadien avait traité les immigrants chinois il y a plus de cent ans et comment le pays avait refusé d'accueillir les juifs fuyant les persécutions nazies. « C'est sur cette base que le Canada s'est construit, explique-t-il. Après les horreurs de l'Holocauste, le Canada a signé la Convention de 1951 sur les réfugiés et est censé l'appliquer. Et pourtant, nous avons assisté à des conflits successifs. Le Canada a échoué. Mais le contraste est saisissant avec la façon dont la guerre en Ukraine a été gérée. » Les Ukrainiens, a-t-il dit, « ont bénéficié d'une procédure accélérée, certains [...] ont vu leurs billets payés, [...] leurs frais de scolarité annulés. Certains ont bénéficié de frais de scolarité au même niveau que les citoyens canadiens [...], les employeurs ont reçu des subventions pour les embaucher. Ils ont été traités d'une manière tout à fait digne de la façon dont un réfugié devrait être traité et pourtant vous n'avez pas vu cette expérience se refléter chez d'autres réfugiés et vous devez vous demander pourquoi. Je ne peux honnêtement que penser à un racisme implicite, partial et structurel au sein du système d'immigration canadien. »

« Tout ce que nous demandons, a poursuivi l'avocat spécialisé, c'est que la même courtoisie soit accordée au peuple palestinien et aux autres réfugiés fuyant les zones de conflit. [...] Le Canada ne fait absolument rien. Ce n'est même pas une demi-mesure. Il y a une limite de 1 000 personnes en provenance de Gaza. C'est tout ! »

Maître Saaty a demandé que le plafond soit supprimé, que la procédure soit accélérée et que les politiques discriminatoires dans le cadre de la procédure de demande soient supprimées. Il a fait remarquer que pour les Ukrainiens, il n'y avait pas de plafond et que plus de 900 000 demandes ont été acceptées. En ce qui concerne la demande d'accélération du processus, il a expliqué qu'« il est inacceptable que des gens languissent et meurent de malnutrition et de manque de soins médicaux, sous les bombardements ». Quant à la demande de suppression des politiques discriminatoires contenues dans le formulaire de demande, il fait remarquer que « pour l'essentiel, ces formulaires demandent aux gens de divulguer une pléthore d'informations personnelles » comme jamais vues dans d'autres cas, telles que « des photos de cicatrices, [...] ce que les gens faisaient depuis qu'ils avaient seize ans. Ils veulent toutes leurs informations sur les médias sociaux, toutes leurs informations sur What's App, toutes les applications qu'ils ont jamais utilisées. Et pour ajouter l'insulte à l'injure, ils disent que ces informations peuvent être et seront probablement partagées avec les services de renseignement israéliens et égyptiens. Et dans les formulaires, il est dit qu'en signant [...] vous libérez le Canada de toute responsabilité [...], ce qui est tout à fait inacceptable. [...] Le gouvernement canadien communique volontairement des informations personnelles très délicates à des agences de renseignement étrangères. »

L'avocat fait également remarquer que Jana, la fille de Samar, souffrait de paralysie cérébrale. « Il n'y avait aucune raison pour que le gouvernement canadien reporte et retarde la demande pendant si longtemps, et pourtant son cas n'est pas le seul. Il y en a beaucoup d'autres, pas seulement des Gazaouis, pas seulement des Palestiniens, de tous les pays que vous pouvez imaginer. Les gens attendent [...] et on leur répond toujours la même chose : 'Nous traitons votre demande. Voici les délais d'attente. Ce n'est pas une raison valable.' Ces personnes, lorsqu'elles fuient la guerre et laissent leur famille derrière elles, peuvent être persécutées par les mêmes autorités que celles qu'elles fuient. [...] Il faut une prise de conscience quant à la manière dont ces demandes sont traitées. Le statu quo ne peut plus durer. [...] Nous demandons que les mesures spéciales pour Gaza soient complètement révisées, mises à jour et facilitées. »

La réponse du gouvernement, a-t-il ajouté, « est la même depuis des décennies. C'est notre système. Nous devons le changer. Il faut une révision majeure de l'ensemble du système d'immigration au Canada. »

Un membre de la section montréalaise de Voix juives indépendantes a déclaré que « Jana, comme d'autres, est morte à cause de la politique frontalière raciste, capacitiste et inhumaine du gouvernement canadien, ainsi que de la couverture diplomatique, des armes et de la technologie qui ont été fournies à Israël depuis le début du génocide ».

« Ceux d'entre nous qui travaillons depuis des années dans le domaine de la justice pour les migrants, ajoute-t-il, savons que les personnes que le Canada refuse à la frontière sont également des personnes qui ont été déplacées par les politiques canadiennes, à savoir les compagnies minières au fil des ans, et ici nous voyons également le soutien à l'apartheid israélien. » Il fait également remarquer qu'« entre 1933 et 1945, le Canada a accepté moins de 5 000 réfugiés juifs, soit le nombre le plus faible de tous les pays industrialisés occidentaux ». Il a ajouté que « dans le style canadien classique, cependant, le gouvernement n'avait pas de loi interdisant exclusivement les réfugiés juifs, mais a créé des barrières bureaucratiques insurmontables et des considérations politiques, y compris la 'peur rouge' que les migrants juifs apportent avec eux le socialisme, le communisme, etc. C'est donc ici que nous constatons beaucoup de similitudes aujourd'hui, avec un gouvernement qui a traîné les pieds pour mettre en oeuvre les soi-disant mesures spéciales visant à faciliter la sécurité des Palestiniens. »

Au sujet du programme temporaire du gouvernement fédéral pour certains habitants de Gaza, il a commenté : « Nous devons être clairs : il s'agit de racisme anti-palestinien dissimulé dans un double langage bureaucratique » et a terminé son intervention par « Vive la Palestine ! »

(Sources : You Tube, CBC News)


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Volume 54 Numéro 26 - 15 avril 2024

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