La nomination du président de Brookfield Asset Management en tant que conseiller économique du premier ministre
Pas de limite à la corruption gouvernementale
Le gouvernement de partis cartellisés dirigé par le premier ministre Justin Trudeau a assigné à l'ancien gouverneur de la Banque du Canada Mark Carney le poste officiel de conseiller économique. Mark Carney n'est pas un nouveau venu en politique : il a occupé des postes importants au sein de l'oligarchie financière, dont celui de gouverneur de la Banque de l'Angleterre. Il est actuellement président de Brookfield Asset Management où il est responsable des investissements en transition climatique. Il détient aussi des postes clés et de direction dans de nombreux autres monopoles, y compris la compagnie de paiements en ligne Stripe, la firme d'investissements PIMCO, Bloomberg et le Forum économique mondial.
Brookfield Asset Management a depuis longtemps profité de ses connections politiques et des lois telles que la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) pour s'enrichir, devenant un des cartels majeurs de l'immobilier et de l'investissement au monde. La loi sur les faillites impliquant de grandes entreprises est depuis longtemps un instrument servant à arracher aux travailleurs ce qui leur appartient de droit, tels que leurs régimes de retraite, et à causer d'immenses torts aux fournisseurs locaux.
Actuellement, Brookfield cherche de l'aide pour régler la crise dans le secteur de l'immobilier commercial, qui s'est exacerbée depuis que les employés de bureau travaillent à la maison. La crise a occasionné une chute de la valeur de marché de plusieurs édifices au centre des grandes villes telles qu'Ottawa et Toronto. Pour tenter d'atténuer la crise dans ce secteur, de puissants intérêts privés, par le biais de leurs représentants au gouvernement, dictent des politiques obligeant les travailleurs de bureau à retourner travailler contre leur volonté, puisqu'ils font au bureau exactement ce qu'ils font à la maison, soit participer à des réunions virtuelles ou faire du travail à l'ordinateur. Le Conseil du trésor fédéral, sans qu'il n'y ait eu discussion ou une quelconque explication rationnelle, exige que les travailleurs de bureau au fédéral passent au moins trois jours par semaine au bureau. Le gouvernement Ford en Ontario a aussi imposé de telles contraintes anti-ouvrières. (Des histoires d'horreur circulent au sujet de l'état de certains édifices infestés de rats et de moisissures.)
Brookfield finance aussi un fonds d'investissement de 50 milliards de dollars, qu'il dirige et gère, et doit en retirer d'énormes profits. Il veut que 10 milliards de dollars en fonds d'amorçage viennent du gouvernement fédéral, 36 milliards des régimes de retraite canadiens, tandis que lui-même n'avancera que 4 milliards de dollars.
Un autre domaine d'intérêt pour Brookfield est l'assurance hypothécaire. Il est le plus important bailleur de fonds privé au Canada dans ce domaine. Pour aider les compagnies de prêts hypothécaires, la ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, a annoncé le 16 septembre, seulement une semaine après la nomination de Mark Carney, des changements aux règlements régissant les hypothèques à l'achat d'une première propriété. Elle a augmenté à 1,5 million de dollars le prix plafond et prolongé l'admissibilité à l'amortissement hypothécaire sur 30 ans, faisant en sorte que les exigences sont moins strictes en termes du revenu nécessaire pour obtenir une hypothèque. Tout acheteur dont la mise de fonds est inférieure à 20 % – ce qui comprend la presque totalité de tous les achats d'une première propriété – doit se procurer une assurance prêt hypothécaire, ce qui va siphonner de l'argent dans les poches de Brookfield. Ce sont précisément de tels stratagèmes qui ont engendré des centaines et des milliers de saisies hypothécaires aux États-Unis.
Dans sa mire, Mark Carney aura aussi Telesat et son projet des constellations de satellites Lightspeed devant fournir une connexion internet par satellite dans le nord du Canada. On dit qu'il est « en très bons termes » avec le PDG de Telesat, Dan Goldberg. La compagnie veut un « partenariat public-privé » pour Lightspeed avec le gouvernement fédéral et celui du Québec dans le nord du Canada, y compris un prêt de 2,14 milliards de dollars du gouvernement du Canada et de 400 millions de dollars du gouvernement du Québec. Certains députés conservateurs dénoncent ce plan, lui favorisant Starlink, une compagnie de satellites rivale appartenant entièrement au cartel mondial de l'aérospatial SpaceX d'Elon Musk.
Michelle Rempel Garner, députée conservatrice pour Calgary, a publié une dénonciation de la nomination de Mark Carney. Le conseil qu'elle lui donne est que, pour sauver les apparences, il aurait dû s'enregistrer comme lobbyiste plutôt que de devenir conseiller au gouvernement.
Elle écrit : « S'il se peut que les libéraux n'aient pas une vision claire de quels intérêts ils sont censés défendre, Brookfield, lui, en a une. En tant que société cotée en bourse, ses PDG visent à faire de l'argent pour les actionnaires de Brookfield. C'est un problème, puisqu'en tant qu'un de ses principaux PDG, M. Carney aura forcément les mêmes visées.
« Il ne devrait donc pas être en position d'influencer officiellement le premier ministre sur la politique économique sans d'importantes mesures de surveillance. En fait, il devrait probablement tout simplement s'inscrire en vertu de la Loi sur le lobbying du Canada. »
C'est une plainte tout à fait ridicule. La question se pose : quelles « mesures de surveillance » feraient en sorte que l'objectif des intérêts privés ne seraient pas les mêmes que ceux des gouvernements qui représentent et promeuvent ces intérêts privés ?
La politique est la forme concentrée de la politique économique dominante qui « influence » les gouvernements actuels au Canada. Ces objectifs politiques, en tant que l'expression concentrée de l'économie impérialiste et l'objectif de ceux qui exercent le contrôle, ne peuvent être contrecarrés que par une importante résistance organisée de la classe sociale exploitée. Le but des intérêts privés dominants, qui est de contrôler l'économie socialisée pour l'obtention d'un profit maximum, est reflété dans la politique officielle de leurs représentants au gouvernement. Par conséquent, on se retrouve, entre autres, avec des politiques pour payer les riches, pour aider des entreprises dans leur rivalité avec leurs compétiteurs, qui favorisent des règlementations qui n'« interfèrent » pas avec leur objectif, et des infrastructures et des chaînes d'approvisionnement à bon marché payées par les fonds publics, et des lois qui attaquent les travailleurs organisés à la défense de leurs droits et des réclamations qu'ils sont en droit de faire.
Brookfield est puissant dans son secteur économique. Il fait face à des problèmes de l'économie qui sont engendrés par la contradiction inhérente entre son objectif, le profit privé et l'économie socialisé moderne qui requiert un objectif moderne qui sert le peuple et humanise l'environnement social et naturel. Pour maintenir son pouvoir et son contrôle, Brookfield, comme tous les monopoles, sollicite l'aide de l'État et de sa trésorerie par le biais de ses représentants politiques. Cependant, ces stratagèmes pour payer les riches ne sauveront ni ce secteur ni l'économie de la crise.
L'économie socialisée moderne exige que ceux et celles qui font le travail affirment leurs droits et leurs réclamations et assument le contrôle, avec un objectif socialisé moderne et une méthode de travail de coopération qui sert le tout et ses composantes pour le bien de toutes et tous. C'est ce qui est requis pour que l'économie socialisée fonctionne sans crises récurrentes et pour qu'elle puisse développer son plein potentiel et la productivité des forces modernes de production. La situation est telle qu'elle force la classe ouvrière à être politique, avec sa propre pensée et sa conception du monde moderne, à s'organiser dans une défense résolue de ses droits et de ses réclamations et à se préparer à vaincre et à assumer le contrôle de l'économie et du gouvernement socialisés et à bâtir le Nouveau.
Le groupe du parti cartellisé conservateur de Garner a déjà représenté Brookfield lorsque Harper était premier ministre et il est rapidement devenu une entreprise mondiale. Les objectifs politiques de Mark Carney, la croissance économique pour servir des intérêts privés, ce qui veut dire favoriser le développement de certains cartels au détriment des autres, sont semblables aux politiques de tous les partis au gouvernement. On ne peut s'attendre à autre chose à défaut de l'organisation de la classe ouvrière pour diriger le peuple dans la rupture avec les politiques impérialistes des partis cartellisés, pour se constituer en la nation avec une conception du monde et un point de référence modernes, pour investir le peuple de la souveraineté et pour s'engager dans une nouvelle direction économique, avec des rapports en harmonie avec son caractère socialisé.
La nomination de Mark Carney ne sauvera pas le gouvernement
libéral, pas plus qu'elle ne sauvera le Parti conservateur.
Cet article est paru dans
Volume 54 Numéro 8 - Septembre 2024
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