Un épisode ignoble d'ingérence étrangère américaine dans les affaires du Canada à un moment crucial de l'après-Deuxième Guerre mondiale
Le pays qu'on appelle le Canada est né en tant que partie intégrante de l'empire britannique. Il a participé à la guerre des Boers pour le compte de l'empire britannique, dans le cadre de son projet d'empire, ainsi qu'à la Première Guerre mondiale. Il a envahi la Russie soviétique en 1918, comme l'un des 14 pays soutenant l'Armée blanche antibolchevique dans une tentative infructueuse de renverser la révolution russe. Après la Deuxième Guerre mondiale, il s'est joint aux impérialistes anglo-américains pour lancer la guerre froide et a permis aux États-Unis d'établir le NORAD, puis l'OTAN, et de s'approprier la souveraineté canadienne à la place des Britanniques. En outre, à ce jour, le Canada a un monarque britannique comme chef d'État et continue de faire partie du Commonwealth britannique dirigé par le même monarque britannique.
Tout cela a informé et imprégné la conception de la souveraineté du Canada qui se résume à prêter allégeance, en paroles et dans les faits, au seigneur et maître. Il a rejoint le contingent américain qui est intervenu dans la guerre de Corée sous le drapeau des Nations unies de 1950 à 1953, commettant les crimes les plus odieux contre le peuple coréen et sa nation. Il s'est rallié à toutes les mesures impérialistes anglo-américaines qui ont transformé le front uni des peuples du monde entier contre le fascisme nazi et le militarisme japonais, pour la paix, la liberté et la démocratie, en une croisade anticommuniste virulente sous les auspices de laquelle des crimes incalculables contre l'humanité ont été commis au cours des 75 dernières années. Toute cette histoire montre comment les États-Unis ont pris possession du Canada de la cave au grenier, ce qui représente un grave danger pour le Canada et pour la paix mondiale à l'heure actuelle.
L'épisode sordide qui s'est déroulé au début des années soixante, lorsque le président américain John F. Kennedy est intervenu directement dans un coup d'État électoral pour favoriser l'élection du premier ministre qu'il préférait, constitue un excellent exemple de l'ingérence des États-Unis dans les affaires politiques du Canada. Cette affaire a fait couler beaucoup d'encre, sans pour autant qu'on en tire les conclusions qui s'imposent. Au contraire, l'affaire est réduite à un conflit de personnalité entre John F. Kennedy et John Diefenbaker, tandis que les besoins de paix, de liberté et de démocratie d'après-guerre ont été abandonnés au profit des objectifs anticommunistes de la guerre froide.
L'adhésion du Canada à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) au moment de la création de celle-ci il y a 75 ans, en avril 1949, était un sujet très controversé, bien qu'on ait prétendu qu'il s'agissait d'un acte souverain. Pour citer le ministre des Affaires extérieures de l'époque, Lester B. Pearson, s'adressant à la Chambre des communes une semaine avant la signature officielle du traité, ceux qui ont « le privilège de signer ce traité [...] le signerons, sur le plan concret autant que théorique, en tant que représentants – et, à vrai dire, en tant que serviteurs – du parlement du Canada et de tout le peuple du Canada, à l'exception de ceux qui partagent des croyances communistes et qui s'agitent en marge de notre vie nationale ».
Malgré cette interprétation inspirée de la guerre froide du fait que les Canadiens n'ont jamais fait partie d'aucune discussion au sujet de l'OTAN, il y avait même au sein de la classe dirigeante beaucoup de préoccupations, intérêts et opinions différents sur l'adhésion du Canada à l'OTAN. La controverse tournait entre autres sur la question de savoir si le Canada pouvait conserver sa souveraineté et son indépendance au sein d'une alliance militaire dominée par les États-Unis et ses visées hégémoniques, en tant que « dirigeants du monde libre ». On se posait ainsi des questions sur le rôle de l'OTAN en tant qu'instigatrice d'une militarisation renouvelée et en tant que menace aux Nations unies et à l'espoir qu'elle serait un instrument de médiation et de résolution de conflit, et non de la puissance militaire américaine.
Les projets des États-Unis pour le Canada furent exprimés le 9 février 1950 dans une note interne du département d'État au président de l'époque, Harry Truman. On y soulignait que « nos engagements et nos risques sont si vastes et importants que le Canada, d'un point de vue militaire, doit être considéré comme faisant partie intégrante des États-Unis ». On y affirmait que le Canada était « l'avenue la plus logique dans l'éventualité d'une attaque en règle contre les États-Unis ». « Nonobstant les engagements [au sein de l'OTAN] et l'extension de la doctrine de Monroe au Canada, il serait nécessaire de protéger le Canada immédiatement contre toute menace. »
Pendant presque toute la décennie, c'est le 17e ministère parlementaire du premier ministre Louis St-Laurent qui était au pouvoir (de novembre 1948 à juin 1957). Lester B. Pearson était ministre d'État aux Affaires extérieures sous St-Laurent. Lui et le gouvernement libéral avait acquis une réputation d'être à l'entière disposition des États-Unis, en particulier en raison des ambitions de Pearson d'intégrer le Canada dans l'OTAN. En octobre 1950, en réponse aux critiques envers « ses politiques ouvertement pro-américaines », tel qu'exprimé par l'historien Arthur Lowe, Pearson a rétorqué que « [le Canada] est aux prises avec le problème de tenter d'influencer la politique des États-Unis qui protégera à la fois nos intérêts et notre conception de ce qui est bon pour le monde ».
Dans ce contexte, John Diefenbaker est devenu le chef du Parti progressiste conservateur en 1956 et de son gouvernement minoritaire en 1957. Il a ensuite remporté un gouvernement majoritaire lors des élections générales de 1958.
Diefenbaker a subi les critiques des États-Unis au sujet du commerce du Canada avec la Chine et Cuba. Pendant la crise des missiles à Cuba, Diefenbaker s'est attiré le mépris de Kennedy lorsqu'il a appelé à une enquête indépendante sur ce qui se passait à Cuba lorsque les États-Unis ont divulgué des images satellite sur la présence militaire soviétique à Cuba. Diefenbaker voulait consolider le commerce avec les pays du Commonwealth, tandis que les efforts des États-Unis étaient consacrés au développement de l'Union européenne, y compris encourager la Grande-Bretagne à devenir membre de l'Union européenne, ce à quoi Diefenbaker s'opposait ouvertement, croyant que ce serait néfaste pour le Commonwealth. Les États-Unis voulaient que le Canada se joigne à l'Organisation des États américains (OÉA) – et Diefenbaker s'y opposait. La principale pomme de discorde était les hésitations de Diefenbaker en ce qui concerne l'installation d'armes nucléaires au Canada.
En avril 1962, le parlement a été dissous et une élection a été fixée pour le 18 juin 1962. Kennedy a décidé d'intervenir directement dans l'élection avec un coup d'État électoral flagrant pour se débarrasser de Diefenbaker, un des exemples les plus sordides d'ingérence étrangère dans les affaires politiques du Canada. Malgré tout cela, aujourd'hui encore, le processus électoral est vanté comme étant l'occasion pour les Canadiens de choisir leurs propres représentants, et lorsqu'il s'agit de parler d'ingérence étrangère dans les affaires du Canada, l'ingérence des États-Unis n'est même pas mentionnée. Lors des élections de 1963, de connivence avec l'équipe de campagne libérale, Kennedy a manoeuvré ouvertement et secrètement pour installer Lester B. Pearson au poste de premier ministre, lui qui avait à maintes reprises été d'une grande utilité pour les États-Unis.
La campagne pour subvertir Diefenbaker était en cours même avant l'annonce des élections. C'était une campagne ouverte contre Diefenbaker. Au début de 1962, un sénateur républicain de New York est venu au Canada et lors d'un interview avec la CBC il a dit : « J'ai toujours considéré que le Canada était un de nos alliés les plus fiables [...] et pour cette raison je n'arrive pas à comprendre le manque de collaboration de la part des autorités canadiennes à imposer des sanctions économiques contre Cuba – et contre la Chine rouge, d'ailleurs [...] chaque vente qui consolide l'économie cubaine renforce l'emprise de Castro sur le peuple cubain et appuie la dictature. »
Diefenbaker ne cachait pas le fait que son hésitation à se plier aux exigences des États-Unis, en particulier sur la question du déploiement d'armes nucléaires au Canada, était due à l'opinion publique au pays. Lorsque l'ambassadeur des États-Unis au Canada et sous-secrétaire des Affaires politiques, Livingston Merchant, l'a rencontré pour lui proposer une entente militaire, y compris le déploiement d'armes nucléaires, Diefenbaker lui a dit qu'il était sensible à l'opinion publique canadienne et que les opinions aux sein des Affaires extérieures étaient partagées. Au sujet des divisions au sein du public, il a dit à Merchant que les opposants n'étaient « ni des communistes ni des fainéants ».
En vue de la visite de Diefenbaker en février 1961, le secrétaire d'État américain Dean Rusk avait préparé une note d'information sur le Canada pour Kennedy. Typiquement, les questions cruciales comme la guerre et la paix étaient présentées comme des conflits de personnalité et la prise de position de Diefenbaker sur ces questions était présentée comme étant du tâtonnage et de l'indécision qui laissaient planer de graves dangers d'infiltration communiste en Amérique du Nord. Dans sa note à Kennedy, Rusk a dit que les États-Unis devaient prendre en compte « une attitude canadienne d'introspection et de nationalisme, [...] un complexe d'infériorité qui se manifeste par une certaine sensibilité face à toute menace envers la souveraineté canadienne, réelle ou fictive. Ainsi, l'élément essentiel à prendre en compte pour ce qui est du Canada est plutôt d'ordre psychologique. » Rusk a laissé entendre que le Canada serait fiable en matière de politique internationale et que les Canadiens étaient « bien intentionnés face aux États-Unis et croient que chacun des pays a inexorablement besoin de l'autre. » Prédisant ce que Diefenbaker dirait sans doute lors de sa rencontre avec Kennedy, Rusk a écrit que Diefenbaker « sera fortement intéressé par tout ce qui peut remonter son prestige. Il pourrait même vous laisser entendre que l'antiaméricanisme est si présent au Canada qu'il se verra obligé d'avoir recours à des politiques nationalistes. »
Toujours selon l'analyse de Rusk, le cabinet de Diefenbaker était désuni, son budget de la défense était « stagnant » et il était possible qu'il y ait « une tendance vers une sorte de neutralité inconsciente qui pourrait se développer advenant un relâchement des liens de défense avec les États-Unis ». Les États-Unis devraient alors « promouvoir parmi les Canadiens une meilleure compréhension et une acceptation du concept d'une interdépendance militaire intégrale », a conseillé Rusk.
Il ne faut pas oublier que Diefenbaker était également un ardent défenseur de la justice sociale et d'une vision du Canada fondée sur sa compréhension de l'égalité et des droits. Mais tout cela a été balayé derrière des plaintes concernant son nationalisme et son populisme. Tout cela trahit la tentative délibérée de s'assurer que le peuple soit tenu à l'écart de toute discussion sur la manière de réaliser ses aspirations à la paix, à la liberté et à la démocratie.
Suite à sa rencontre avec Kennedy en mai 1961, le premier ministre a découvert un document oublié par un conseiller américain. Le notoire « mémorandum Rostow » contenait une liste d'objectifs fixés par les États-Unis, espérant « inciter » le Canada dans cette direction. Dans les reportages portant sur les relations entre le Canada et les États-Unis durant la crise des missiles cubains, l'importante question des relations entre le Canada et les États-Unis a été réduite à une affaire que Diefenbaker était « en colère », cet incident ayant « réaffirmé ce qu'il soupçonnait, que les États-Unis cherchaient à dominer le Canada. Le camp de Kennedy était aussi en colère : Diefenbaker refusait de retourner le mémorandum, à l'encontre du protocole diplomatique qui veut que de telles notes soient retournées. Leur relation ne s'améliorerait jamais tout à fait après cet incident. »
« Diefenbaker a finalement accepté de mettre les troupes canadiennes en état d'alerte, tandis que tous les autres membres de l'OTAN appuyaient un blocus et acceptaient de venir en aide aux États-Unis dans l'éventualité d'une attaque. Cependant, en raison de son hésitation à agir face à la situation, Diefenbaker a réagi seulement après que la crise ait atteint son paroxysme. En outre, sous les conseils du ministère de la Défense, l'armée canadienne avait déjà adopté des mesures de mise en état d'alerte. Ultimement, Diefenbaker finirait par croire que l''arrogance' de Kennedy avait menacé l'Amérique du Nord et aurait pu mener à une guerre nucléaire[1]. »
Dans un rapport de novembre 1961 de l'ambassadeur des Étast-Unis Livingston T. Merchant, Kennedy fut informé que « les Conservateurs étaient en perte d'appui public et devenaient de plus en plus antiaméricains ». Son message au président était que « seule l'amitié de Pearson et des libéraux étaient dignes de la confiance des États-Unis ».
Selon la version racontée par divers historiens, lorsque les élections ont été déclenchées, Kennedy a invité Pearson à un souper à Washington en compagnie d'autres récipiendaires du prix Nobel. Pearson a dit à Kennedy qu'il serait heureux d'y participer, mais que cela ne passerait pas, car Diefenbaker contesterait sans doute une visite à la Maison-Blanche par un chef de l'Opposition.
Kennedy a alors proposé que Pearson se rende aux États-Unis pour y recevoir un diplôme à titre honorifique. Il a proposé Harvard et le Massachusetts Institute of Technology, mais après que Pearson l'eut informé qu'il avait déjà reçu des diplômes honorifiques de ces institutions, Kennedy a dit qu'il s'arrangerait pour qu'il en reçoive un du Collège de Boston le même jour que le gala des récipiendaires du prix Nobel le 29 avril 1962. (Notez que le Canada s'est arrangé pour que le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg reçoive le prix d'excellence Louis St-Laurent de l'Association du Barreau canadien à la veille du sommet du 75e anniversaire de l'organisation à Washington, lors d'une réunion de l'Association canadienne pour l'OTAN, au moment-même où le Canada subissait la pression d'augmenter à 2 % du PIB son financement militaire conformément à la demande de l'OTAN.)
Des 175 invités au gala donné en 1961, Kennedy a choisi d'entrer dans la pièce accompagné de Pearson. L'événement a été largement médiatisé au Canada. À un moment donné, Kennedy a mentionné que le prétexte du prix Nobel ne devait pas être « trop évident ».
Cet appui à Pearson, qui ressemble à toutes fins pratiques à celui d'Obama à Justin Trudeau en tant que premier ministre, n'est pas le genre d'ingérence étrangère que les agences de renseignement canadiennes ont en tête lorsqu'elles parlent de « l'ingérence étrangère dans les affaires politiques du Canada ». Néanmoins, l'ingérence en question a pris beaucoup d'autres formes qu'un simple appui.
L'élection de Kennedy en 1960 avait été dirigée par le gérant de campagne et enquêteur Lou Harris. L'innovation de Harris était d'avoir régulièrement recours à des sondages à l'intention des membres du parti pour montrer aux stratégistes électoraux comment mener une campagne. De concert avec les directeurs de campagne au Canada, Kennedy a déployé Harris pour faire élire Pearson. À la surface, Harris a été appelé à aider Pearson par le directeur de la campagne libérale, Walter Gordon, et Keith Davey, qui est plus tard devenu sénateur. Kennedy s'est arrangé pour que Harris puisse entrer clandestinement au Canada et oeuvrer à la campagne de Pearson sans attirer l'attention[2]. L'auteur John Boyko, dans son livre Cold Fear, raconte : « Pour la première fois en politique électorale, l'échantillonnage aléatoire a été utilisé pour mettre en corrélation et analyser les quantités massives de données pour ensuite s'en servir pour former le candidat et le message en se fiant à des faits mathématiquement prouvables plutôt qu'a des intuitions en vase clos. »
Lors d'un interview de Alexander Panetta de la Presse canadienne avec Lou Harris en 2013, alors que Harris avait 92 ans, celui-ci parle de son « implication clandestine » dans l'élection de 1962 et de son « moment de gloire ».
Dans cet interview, Harris remémore comment il « avait fait de nombreux voyages au Canada pendant les campagnes de 1962 et de 1963, ayant embauché 500 femmes pour faire des appels téléphoniques dans le cadre du projet de recherche sur l'opinion publique le plus élaboré de l'histoire politique du Canada. Il faisait en sorte que le rôle qu'il jouait soit le plus discret possible. Harris affirme qu'il avait un faux passeport, gracieuseté d'amis au sein du gouvernement américain. Il portait le nom de Lou 'Smith' – le nom de fille de sa mère. »
John English, le biographe de Pearson, a dit à Alexander Panetta de la Presse canadienne : « Un président américain ne devrait pas s'ingérer dans les élections canadiennes. Et sans aucun doute, c'est ce qu'a fait Kennedy, et il n'a pas agi correctement avec un premier ministre canadien. »
Harris est décédé en 2016. Il a dit à Panetta au cours de l'interview de 2013 qu'il voulait écrire un livre, mais qu'il ne divulguerait pas les « détails des techniques de sondage qu'il avait introduites au Canada ». Ce qui est connu, c'est que ses techniques faisaient partie d'une prise de contrôle des partis politiques par des professionnels du marketing et des stratégistes au point que c'est eux qui décideraient des politiques qui seraient adoptées et promues. » En 1962, un gouvernement conservateur minoritaire fut élu; en 1963, il y a eu une autre élection avec l'aide de Lou Harris et les libéraux ont remporté la majorité. Asa McKercher, ancienne assistante archiviste à Bibliothèque et Archives Canada, a écrit un article publié dans International Journal en 2011, dans lequel elle écrit :
« Analysant les résultats des élections fédérales canadiennes de 1963, qui ont donné la victoire au Parti libéral après six ans de règne des progressistes conservateurs, l'ambassadeur américain Walton Butterworth a prédit que le Canada serait désormais 'plus stable, plus responsable, plus sophistiqué et généralement plus coopératif qu'à aucun moment depuis 1958'. Le fait que Butterworth ait choisi cette année-là comme étant d'une telle importance est intéressant, mais pas surprenant. Bien que le conservateur John Diefenbaker soit devenu premier ministre du Canada à la tête d'un gouvernement minoritaire en 1957, ce n'est qu'à l'occasion d'une élection éclair en mars 1958 qu'il a remporté une majorité écrasante de sièges à la Chambre des communes, la plus importante de l'histoire du Canada à ce moment-là. Ancien avocat et député de longue date, Diefenbaker est un populiste ardent qui accède au pouvoir à la faveur d'une vague croissante de nationalisme – certains parleraient d'anti-américanisme – qui prend de l'ampleur au Canada en raison du malaise des Canadiens face aux liens économiques entre leur pays et le mastodonte du sud. Le caractère populiste et nationaliste de Diefenbaker n'est un secret pour personne. Ses affrontements avec John Kennedy, le président américain de 1961 à 1963, sont bien connus et ont fait l'objet d'une grande partie de l'histoire académique et populaire. Ce qui est moins connu, et moins étudié, c'est la façon dont les relations entre le Canada et les États-Unis se sont déroulées entre 1957 et 1961, lorsque Dwight Eisenhower était le président américain[3]. »
Aujourd'hui, l'opposition à l'OTAN est devenue un « tabou » et les partis cartellisés de toutes les couleurs ne sourcillent même pas lorsque les États-Unis et l'OTAN dictent ce que le Canada devrait faire. Au contraire, ils perçoivent l'ingérence étrangère qui est favorable à l'OTAN comme étant une influence positive alors qu'ils criminalisent et attaquent toute contestation de l'adhésion du Canada à l'OTAN ou de ses campagnes bellicistes, accusant les opposants d'être des « ennemis de l'État » ou des « agents ennemis ». Pendant ce temps, les dépenses militaires au Canada augmentent en flèche, non seulement pour financer l'OTAN mais pour établir les institutions de l'OTAN en sol canadien, construire des bases militaires dans l'Arctique et plus encore.
Ce sont là les agissements d'un gouvernement de guerre et ils doivent être pris très au sérieux par les Canadiens soucieux de paix qui trouvent toujours moyen de faire en sorte que ce sont eux qui fixent la direction de l'économie et du pays, et non ceux qui ont usurpé le gouvernement du Canada au service de l'OTAN et de la guerre. Le pas le plus important et le plus décisif, si nous voulons apprendre de l'histoire, est de s'opposer à la conception du monde de la guerre froide de la classe dirigeante, qui transforme tout en une question de politique de la personnalité, d'excentricités et de conflits personnels, tandis que la conversation substantielle sur les questions de guerre et de paix est réduite au silence. La tâche la plus importante est de briser le silence en veillant à ce que les Canadiens eux-mêmes établissent leur propre point de vue avantageux dans la discussion au sujet des événements actuels. Il est grand temps que le Canada déclare son indépendance et adopte toutes les politiques nécessaires pour qu'il soit une zone de paix. Il en revient aux peuples du Canada, y compris le Québec, les peuples autochtones et métis de le faire.
Notes
2. « Dealing with Diefenbaker : Canada-US relations in 1958 », Asa McKercher, International Journal, Autumn 2011
Cet article est paru dans
Volume 54 Numéro 7 - Juillet 2024
Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/Lml2024/Articles/LM54072.HTM
Site web : www.pccml.ca Courriel : redaction@pccml.ca