Les modifications doivent donner un sens au droit du peuple d'élire et d'être élu

– Rapport des discussions tenues par le Parti marxiste-léniniste du Québec –

L'actuelle Loi électorale du Québec célèbre cette année son 35e anniversaire. Beaucoup de choses se sont passées depuis 1989, année de son adoption. Le processus électoral qu'elle a mis en place il y a 35 ans présentait déjà de sérieux problèmes et a déjà fait l'objet de plusieurs réformes. L'examen de la Loi et de ses réformes montre que le défaut fondamental de la loi demeure. Dans son état actuel, le seul rôle qu'elle confère aux citoyens du Québec est de voter tous les quatre ans pour les candidats choisis par les partis qui détiennent le pouvoir et les privilèges à l'Assemblée nationale. Voilà qui résume assez bien la situation. Bien qu'on dise que les élections sont la pierre angulaire de la démocratie, loin de donner au peuple les moyens de s'affirmer dans le processus, les réformes du financement ont eu pour effet d'accroître le contrôle de l'État sur les partis politiques et de marginaliser la participation du peuple. Ce sont là des signes alarmants d'autocratie, et non de démocratie.

Le Parti marxiste-léniniste du Québec (PMLQ) intervient dans cette consultation du DGEQ en partant de la considération qu'il est essentiel que le peuple québécois soit investi d'un pouvoir décisionnel souverain. Tant que la Loi électorale est conçue pour élire des gouvernements de parti, c'est-à-dire des gouvernements formés par le parti politique qui obtient la majorité des sièges à l'Assemblée nationale, le peuple est exclu.

Depuis 1989, 10 élections générales et 57 élections partielles ont eu lieu au Québec sur la base de cette loi électorale. Les premières modifications importantes ont fait suite aux révélations de la Commission Gomery sur le scandale des commandites qui impliquait le Parti libéral dans l'acceptation de sacs d'argent sous la table pour contourner le régime de financement électoral. C'était en 2004. Les modifications apportées à la loi ont servi à serrer la vis aux partis politiques qui respectent les règles, tandis que les intérêts puissants inventent toutes sortes de moyens pour renforcer leurs positions privilégiées.

Entre 2009 et 2010, sous prétexte de restaurer la confiance des électeurs dans le processus électoral et les institutions démocratiques, considérées à juste titre comme corrompues en raison de scandales successifs, trois projets de loi ont été présentés à l'Assemblée nationale sur la Loi électorale. Faute d'accord entre les partis, aucun d'entre eux n'a été adopté.

La Commission Charbonneau, une commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, créée en 2011, a révélé non seulement l'existence de systèmes de corruption et de collusion parmi ceux qui contrôlent ce secteur, mais aussi comment les principaux partis ont falsifié des contributions politiques en passant par des employés pour verser des contributions apparemment dans les limites permises par la loi. Personne n'a été poursuivi, mais le gouvernement a déclaré que « la confiance des électeurs a été ébranlée ».

Puis, en 2012, le projet de loi 2, Loi modifiant la Loi électorale afin de réduire la limite des contributions par électeur, de diminuer le plafond des dépenses électorales et de rehausser le financement public des partis politiques du Québec, a abaissé le plafond des contributions que les citoyens peuvent verser à un parti politique, abaissé le plafond des dépenses lors d'une élection et augmenté le financement public de l'État aux partis politiques. Avec ces changements, les partis émergents, qui avaient pu récolter plus de fonds de leurs sympathisants lorsque le plafond était de 1 000 $, se sont retrouvés perdants lorsque le plafond a été abaissé à 100 $, malgré la contribution financière de l'État, sous forme des revenus d'appariement, de 2,50 $ pour chaque 1 $ versé. Pour leur part, les partis siégeant à l'Assemblée nationale ont vu 80 % de leurs dépenses désormais couvertes par le financement de l'État.

Le PMLQ s'est toujours opposé à ce type de financement public des partis, qui s'accompagne ensuite de la nécessité de rendre des comptes à l'État, et non aux membres du parti. Une fois que l'État réglemente un parti politique, celui-ci devient un appendice de l'État, et non un instrument de ses membres. Les partis politiques devraient être soutenus financièrement par leurs membres, qui devraient également être ceux qui décident de ses politiques et de l'orientation qu'il propose pour la société. Au lieu de cela, les partis ayant des sièges à l'Assemblée nationale se retrouvent dans une situation où ils ont besoin de plus en plus de fonds publics pour payer les agences de marketing qui conçoivent leur campagne et décident ensuite des enjeux en disant que ce sont les enjeux que les électeurs préfèrent.

Les appels à la démocratisation de la Loi électorale en donnant au peuple les moyens de son affirmation, et non aux partis politiques dont moins d'un pour cent des citoyens québécois sont membres, sont restés lettre morte. Il en va de même pour les demandes de mettre fin à la violation, par l'État, de la vie privée des membres et sympathisants des partis politiques qui versent des contributions. Les contestations du projet de loi 101, Loi donnant suite aux recommandations de la commission Charbonneau en matière de financement politique, de 2016, ont forcé l'Assemblée nationale à abandonner l'exigence de publication de l'adresse du donateur de même que celle de fournir le nom de l'employeur du donateur pour faire une contribution.

Il n'en demeure pas moins que toutes les informations relatives à l'appartenance partisane d'un citoyen sont révélées publiquement et que le DGEQ peut légalement s'immiscer dans des affaires qui appartiennent légitimement à un parti et qui ne sont pas publiques, comme l'acceptation de contributions et d'adhésions à un parti sans que ce dernier n'ait aucun rôle dans le choix des individus qu'il accepte dans ses rangs.

Le mécontentement de la population à l'égard des partis au pouvoir et des institutions ne cesse de croître. Cela se traduit, entre autres, par une faible participation aux élections, quelque 35 % des électeurs décidant de ne pas voter. En 2023, seuls 29 590 électeurs sur 6 000 000 avaient apporté une contribution financière à un parti politique, soit 0,49 %, à une époque où très peu de citoyens sont membres d'un parti politique. Avec les changements intervenus au cours de toutes ces années, le financement public de l'État représente aujourd'hui plus de 85 % des revenus des partis politiques. Parallèlement, les partis qui forment le gouvernement obtiennent souvent la majorité des sièges même s'ils n'obtiennent pas la pluralité des suffrages exprimés.

Les personnes qui forment les gouvernements ne sont pas considérées comme représentant les aspirations du peuple ou comme des personnes qui se consacrent à la résolution des problèmes auxquels il est confronté. Au contraire, la Loi électorale permet l'accession au pouvoir de personnes qui ne se préoccupent que des intérêts d'affaires des plus puissants, au détriment du bien-être de la population et de l'environnement naturel. Rien que ces derniers mois, des centaines de milliers de travailleurs des secteurs de la santé et de l'éducation ont dû se battre contre le gouvernement actuel qui dégrade leurs conditions de travail. Des milliers de personnes se battent pour obtenir un logement social décent. Des millions de personnes réclament la protection de l'environnement. Nous sommes dans une situation où l'Autorité agit en toute impunité alors que les conditions de vie de la population continuent de se dégrader.

Tout cela discrédite la démocratie et les institutions démocratiques, considérées comme autocratiques et non démocratiques. Les propositions de réforme de la Loi électorale présentées par le DGEQ (annexe 1) ne tiennent pas compte de cette réalité et de comment on en est arrivé là. Au lieu de garantir que les citoyens puissent participer à la prise de décision sur les questions qui affectent leur vie et à la gestion des affaires publiques, et que les élections contribuent à faire en sorte qu'il en soit ainsi, les propositions semblent être motivées par la nécessité de gérer habilement les demandes des groupes d'intérêt les plus puissants, dont le besoin de mettre la main sur toujours plus de fonds publics pour financer leurs campagnes de marketing est insatiable.

Nous voyons également des propositions qui semblent être motivées par les besoins de la police politique qui veut des mesures qui lui donnent un accès direct à ce que les partis politiques peuvent et ne peuvent pas faire, au point de contrôler leurs membres au nom de la protection des Québécoises et des Québécois contre l'ingérence étrangère. Si de telles mesures sont mises en oeuvre, les droits des Québécoises et des Québécois de s'associer librement, de prendre leurs propres décisions sans ingérence extérieure, notamment de l'État, et d'exprimer librement leurs opinions et leur conscience seront encore plus compromis.

D'autres mesures visent à pénaliser davantage les citoyens et leurs collectifs qui cherchent à exprimer leurs propres opinions lors d'une élection ou à dire aux politiciens qui se disputent les postes de pouvoir ce qu'ils veulent et ce qu'ils pensent. Ironiquement, ces citoyens et leurs collectifs sont appelés « tiers », comme s'ils étaient de simples auxiliaires qui doivent payer de l'argent et obéir à des règles pour s'exprimer et s'organiser, alors même que ces règles et ces paiements légalisent leur marginalisation.

Encore une fois, tant que les propositions de révision et de modernisation de la Loi électorale ne seront pas l'oeuvre du peuple et seront la chasse gardée des partis déjà présents à l'Assemblée nationale, qui jouissent de positions de pouvoir et de privilèges, les problèmes persisteront. Ces partis ne sont pas enclins à renoncer de leur propre chef à leurs positions de pouvoir et à leurs privilèges. Les mesures qui ne visent pas à renforcer le pouvoir du peuple ne font qu'exacerber la crise de crédibilité dans laquelle sont embourbés les partis et les hommes politiques, ainsi que la crise de légitimité dans laquelle sont embourbés les institutions démocratiques et le processus électoral lui-même.

Selon le PMLQ, tant que le directeur général des élections n'abordera pas ce problème dans ses propositions, il ne servira à rien de faire des modifications qui ne sont que de nature administrative. Dans le cas actuel, de nombreuses propositions semblent dangereuses parce qu'elles transforment les citoyens en criminels potentiels qui doivent être pénalisés pour avoir enfreint la loi. Bien que nous comprenions qu'il n'est pas facile pour le DGEQ de faire respecter la loi, le PMLQ croit que les propositions qui éliminent encore plus la participation des Québécoises et des Québécois au processus démocratique, et qui semblent être délibérément dirigées contre les partis émergents qui n'ont pas de siège à l'Assemblée nationale, ne sont pas la bonne façon de procéder.

Le processus établi par Élections Québec pour recevoir les mémoires et entendre les interventions dans un délai qui n'est pas adéquat pose également problème. Que ce soit du point de vue des moyens utilisés pour solliciter des opinions qui, pour la plupart, ne sont pas rendues publiques, ou du point de vue des délais accordés pour recevoir les commentaires du public, le processus de consultation ne permet pas de partager l'information avec la population, et encore moins de favoriser un examen approfondi de la Loi électorale et une discussion à ce sujet.

Ce sont là des questions que le PMLQ a entendu par les participants à la vingtaine de tables rondes qu'il a organisées pour informer les gens et entendre leurs opinions sur les propositions faites par le DGEQ en vue de la révision de la Loi électorale. Les tables rondes ont eu lieu dans l'Outaouais, à Montréal, à Québec, au Centre-du-Québec, sur la Rive-Sud, dans les cégeps et universités et parmi les travailleurs. Le PMLQ a également organisé trois rencontres virtuelles nationales et deux tables rondes avec des partis politiques qui n'ont pas de siège à l'Assemblée nationale. Certaines de ces tables rondes se sont tenues en personne, d'autres en virtuel ou un mélange des deux. Elles ont donné lieu à d'autres rencontres et échanges organisés par les participants à ces tables rondes.

Dans tous les cas, les participants ont été choqués par les propositions du DGEQ. Certains ont envoyé des mémoires pour donner leur avis ou ont rempli des questionnaires diffusés sur le site du DGEQ. Certains ont essayé de suivre les contributions sur le site et ont constaté que très peu d'entre elles étaient publiées. Selon les « étapes de la démarche » présentées sur le site du DGEQ, en plus de la consultation publique qui s'étend du 20 novembre 2023 au 30 mars 2024, il y aurait eu une consultation des acteurs politiques et une consultation des universitaires et des spécialistes. La consultation des « acteurs politiques » semble n'avoir concerné que six des 21 partis enregistrés, mais ni leurs avis, ni ceux des universitaires et des spécialistes ne sont soumis à la discussion publique, et encore moins les avis des Québécoises et des Québécois au sens large. Certaines personnes nous ont dit avoir demandé au bureau du DGEQ pourquoi ces avis n'étaient pas soumis à la consultation publique. On leur a répondu que seul le DGEQ les recevait et qu'il en ferait une synthèse dans son rapport. Des étudiants du secteur collégial ont de plus souligné que la participation des jeunes, qui est une des préoccupations soulevées dans le document du DGEQ, ne sera pas atteinte s'il n'y a pas de mesures prises pour les mobiliser dans la discussion sur la Loi électorale et sur comment fonctionne le processus électoral et politique comme tel. Ils se questionnent à savoir pourquoi le DGEQ ne mène pas une véritable consultation, par exemple en faisant des tournées dans les cégeps, dans les communautés et au niveau municipal. Il doit veiller à ce que l'information se rende aux endroits où se trouvent les jeunes, ont-ils dit.

Des personnes de langue maternelle différente du français ont aussi souligné qu'ils avaient eu de la difficulté à bien saisir les propositions et argumentaires de la consultation. Pour favoriser la plus grande participation des citoyens, des explications devraient être disponibles en d'autres langues.

En résumé, si l'objectif est d'établir la confiance dans le processus électoral, il ne sera pas atteint en accroissant l'intervention de l'État dans les affaires des partis politiques ou en augmentant le financement public des partis. En effet, les citoyens ne sont pas favorables à ce que l'État prenne sur lui de payer les honoraires des sociétés de marketing qui décident des « enjeux » d'une élection et mènent des campagnes de dénigrement destinées à gagner des voix pour un parti contre un autre. Si rien n'est fait pour permettre au peuple de participer directement et de s'exprimer en son nom propre pour définir l'orientation de l'économie et des politiques dans tous les domaines de la vie, il existe un grave danger de despotisme. Nous voyons déjà les ministres usurper de plus en plus de pouvoirs pour prendre des décisions qui affectent profondément la vie des gens, recourant à des méthodes qui oscillent entre l'autocratie et la persuasion par la menace et la peur, et de l'organisation de fausses consultations.

Nos propositions

1) Mettre fin au financement des partis politiques par l'État. L'État doit financer le processus, pas les partis. Pour renforcer la démocratie, des fonds publics peuvent être utilisés pour financer le processus à 100 % afin de faciliter la participation de tous les Québécoises et Québécois aux affaires de la société. Entre autres, chaque foyer pourrait recevoir le programme des candidats en lice, fourni par le DGEQ. Le DGEQ pourrait organiser des réunions publiques dans les quartiers, sur les lieux de travail, dans les établissements d'enseignement et dans les résidences pour personnes âgées afin que les citoyens et les résidents soient informés et qu'ils puissent faire des propositions sur les questions qui les concernent.

L'État verse actuellement plus de 10 millions de dollars aux partis politiques chaque année sous forme d'allocations sans compter les allocations supplémentaires qui, en année électorale, comme en 2022, s'élèvent à plus de 6 millions de dollars. Cet argent pourrait être utilisé pour affirmer le droit des citoyens de voter en connaissance de cause. Cela donnerait un caractère tout à fait nouveau aux campagnes électorales qui sont aujourd'hui de plus en plus menées par des sociétés de relations publiques qui utilisent le microciblage et d'autres pratiques qui ont pour effet d'atomiser l'opinion publique et le corps politique plutôt que d'engager l'électorat politiquement.

2) Garantir le droit d'élire et d'être élu, ce qui signifie que ce sont les Québécoises et les Québécois qui doivent disposer d'un processus de sélection des candidats qui ne soit pas dominé par les partis cartellisés alors que le peuple est relégué au statut de « tiers ».

La question de la sélection des candidats est d'une telle importance que, sans elle, les élections n'ont pas de sens.

Nous disons : pas d'élection sans sélection pour résoudre le problème de la présélection des candidats par les partis cartellisés et de la sélection des « enjeux » qui préoccupent la société sur la base d'études de marché conçues pour éliminer complètement le rôle du peuple. L'idée de participer à la sélection des candidats repose sur le principe que lorsque les citoyens définissent le programme et établissent ce que leurs représentants devront faire et dire, ils doivent pouvoir choisir la personne la mieux à même de représenter ce programme et décider également des moyens disponibles pour lui demander des comptes. Il doit être redevable. Sans cela, l'idée que la démocratie est représentative consacre des concepts de représentation et de représentativité qui ne sont pas ceux des Québécoises et des Québécois. Tels qu'ils sont utilisés actuellement, ce sont des mots qui n'ont aucun sens pour eux. En effet, non seulement ils sont contre-intuitifs, mais ils ont des significations cachées destinées à dissimuler qui ils servent.

3) Établir un mécanisme de reddition de comptes des élus en consacrant le droit de révocation. Le droit de révocation entre les élections fait référence au droit des citoyens de révoquer les députés élus qui à leurs yeux ont trahi le mandat qui leur a été confié par ceux qui les ont élus.

4) Garantir le droit des Québécoises et des Québécois de s'exprimer sur les décisions prises par les gouvernements en les soumettant à des référendums où le peuple dit oui ou non aux lois proposées et même aux règlements imposés par les ministères à leur discrétion.

Ces changements feront une différence dans la vie politique du Québec, rétabliront l'intégrité du vote et augmenteront sans aucun doute la participation de tous les citoyens au processus électoral, y compris celle des jeunes, y compris le jour du vote.

Aujourd'hui, alors que l'offensive antisociale s'intensifie et que le peuple est incapable de tenir les gouvernements responsables des décisions qu'ils prennent, le besoin d'un renouveau démocratique est plus pressant que jamais. Apporter à ce problème une solution qui investit le peuple du pouvoir de décider devient de plus en plus urgent au fur et à mesure que le temps passe et que les dangers auxquels la société est confrontée augmentent. Il faut rompre avec l'idée, inscrite dans la loi, que le rôle des citoyens se réduit à celui d'« électeurs » qui votent tous les quatre ans pour des candidats qu'ils ne choisissent pas, dont ils ne connaissent rien et auxquels ils n'ont pas les moyens de demander des comptes.

Lorsque les Québécoises et les Québécois participeront à l'élaboration du programme du gouvernement, ils ne seront plus à la merci des priorités décidées par les intérêts privés des partis politiques et des médias. Le principe de responsabilité sera activé d'une manière qui incitera les membres de la société à participer au discours politique lorsqu'ils verront que cela profite à la population et à la société elle-même. La question de savoir qui détient le pouvoir politique et où réside le pouvoir de décision commencera à produire une réponse qui sera perçue comme démocratique.

Qui plus est, à une époque où tant de dangers menacent la sécurité de la société et du pays – de la crise climatique à une économie qui paie les riches et privatise les programmes sociaux et les services publics, aux préparatifs de guerre dans lesquels le Canada et le Québec sont engagés et aux niveaux croissants d'anxiété généralisée aux résultats imprévisibles -, il est crucial de comprendre que notre sécurité est dans la défense des droits de toutes et tous, et non dans le fait de priver les membres de la société d'un droit de regard sur toutes les décisions prises en leur nom.

Le programme du PMLQ est d'encourager les travailleurs, les femmes et les jeunes à parler en leur nom, à défendre leur présent et leur avenir, et à adopter un processus électoral et une Loi électorale qui feront un pas en avant dans cette direction.

Différentes raisons sont souvent invoquées pour ne pas faire l'effort additionnel nécessaire pour engager l'électorat dans le débat, pour élargir la discussion au-delà du minimum requis pour appeler cela une consultation officielle. Le PMLQ croit que c'est en le faisant qu'on verra comment aller plus loin. Déjà les discussions que nous avons eues dans les tables rondes, même si c'est encore sur une base relativement limitée, ont donné des signes définitifs que les gens ne sont pas du tout indifférents une fois qu'on établit que l'initiative leur appartient. Nous disons : « Pour nous, la responsabilité commence chez soi » parce que c'est précisément quand les électeurs s'approprient le processus qu'ils peuvent s'engager à fond et pleinement mettre en valeur leur vécu et leurs idées.

Pour le peuple, l'idée qu'une élection (ou une consultation publique) est le moment où « c'est le peuple qui parle » n'a pas de sens si dans les faits ceux qui parlent sont ceux qui sont déjà au pouvoir. Si l'élection est l'occasion où le peuple est appelé à juger des orientations du gouvernement, c'est au peuple qu'il faut donner la parole, pas aux élites politiques – celles qui sont déjà au gouvernement ou dans l'opposition. Or, la consultation actuelle fait exactement cela : elle ne donne aucune place pour l'expression de la volonté populaire autre que de remplir des questionnaires qui rejettent toute considération que les élections doivent avoir un but autre que remplir un bulletin de vote à tous les quatre ans.

Le document de consultation note : « D'après des données sur la campagne électorale de 2018, l'espace médiatique accordé aux partis politiques serait proportionnel aux résultats qu'ils obtiennent. » Un des intervenants aux tables rondes a fait le commentaire que cela ressemble à une prophétie autoréalisatrice : « Les partis qui ont le plus de sièges ou de votes acquis par une campagne médiatisée 'la plus intelligente' parce qu'elle jouit d'une couverture médiatique démesurée, aura le privilège de se voir accorder le titre du plus populaire et donc du plus légitime. C'est une logique absurde si le but est d'établir la crédibilité démocratique d'un régime. »

Ce sont là nos opinions et nos observations sur cette question et souhaitons que la discussion sur cet enjeux crucial pour l'avenir du Québec se poursuive de manière permanente, vivante et ouverte à toutes et à tous.

Christine Dandenault
Présidente
Parti marxiste-léniniste du Québec

Élaborations

La nécessité d'une révision approfondie de la Loi électorale

Dans la lettre d'introduction au document de consultation, le directeur général des élections (DGE) écrit : « Aucune réflexion en profondeur, portée par une vision cohérente, structurée et concertée, n'a été menée à propos de la Loi électorale dans son ensemble depuis bientôt 35 ans. Considérant l'importance des enjeux auxquels la démocratie électorale fait face, de même que l'ampleur des modifications qui ont été apportées à la Loi depuis son adoption, une telle réflexion nous semble essentielle pour permettre à la Loi d'évoluer tout en respectant les droits individuels et les principes démocratiques qui en sont le fondement. »

Les propositions contenues dans le document déçoivent pour ce qui est de la promesse d'une « réflexion en profondeur, portée par une vision cohérente, structurée et concertée ».

Le DGEQ dit avoir entrepris de multiples consultations, auprès de spécialistes, d'universitaires, et auprès d'« acteurs politiques ». Rien que sur cette base, la consultation pose un sérieux problème de crédibilité. Six questionnaires en ligne ont été préparés pour consulter les citoyens. En examinant les questionnaires, on est tenté de conclure que tout est déjà décidé. Les six questionnaires ressemblent davantage à des sondages avec des choix de réponses préétablies. Il n'est pas étonnant que les gens nous disent que les conclusions sont déjà tirées. Ce n'est pas une consultation qui permet aux Québécois de s'exprimer en leur nom, de partager leurs points de vue et leurs préoccupations, d'autant plus que le temps alloué pour y répondre est très limité.

Le DGEQ énumère les modifications apportées à la Loi électorale au cours des 35 dernières années. Il écrit : « Depuis une trentaine d'années, la Loi électorale n'est pas demeurée inchangée. Au contraire, de nombreuses modifications, dont plusieurs d'envergure, y ont été apportées au fil du temps. La liste électorale permanente a été créée en 1997; les modalités de vote ont été élargies au début des années 2000; de grandes réformes du financement politique ont eu lieu dans les années 2010; et les élections à date fixe ont été adoptées en 2013. Tous ces changements ont eu des effets importants, non seulement sur les comportements des électrices et des électeurs, qui sont de plus en plus nombreux à voter par anticipation, mais aussi sur les pratiques des partis politiques et des personnes candidates, qui se manifestent plus tôt dans la campagne et qui ont modifié leurs rapports avec l'électorat. Ces changements ont aussi influencé la façon dont s'organisent les élections. »

Mais quelle évaluation faisons-nous de ces changements ? Par exemple, le projet de loi 101 adopté en 2016 à la suite des recommandations de la Commission Charbonneau sur la corruption a-t-il réglé ce problème ? Non, parce que la définition de la corruption n'est pas abordée. L'abaissement des contributions financières à 100 $ des sympathisants des partis avec l'augmentation du financement de l'État qui prétend compenser la baisse du financement des partis par leurs membres a-t-elle réduit la corruption ? Pas du tout.

La demande d'augmentation des fonds publics est incessante alors que la participation des citoyens continue d'être éliminée

Plus on impose des exigences administratives au nom de la transparence et de la lutte à la corruption et plus l'État s'immisce dans les affaires des partis politiques, plus le pouvoir de décision, même au sein des partis politiques, est transféré hors des mains des membres. Ce n'est pas parce que nous avons toutes sortes de lois censées cibler la corruption qu'il n'y aura pas de corruption politique. Ceux qui sont politiquement corrompus feront tout pour arriver au pouvoir. En rendant les partis politiques responsables devant l'État, le fait qu'ils n'aient plus besoin de membres n'est pas discuté. Mais leur contrôle sur l'Assemblée nationale reste total.

Lorsque les ministres du parti au pouvoir, la Coalition Avenir Québec (CAQ), ont été récemment pris en flagrant délit d'obtenir des contributions de 100 dollars à leurs cocktails en échange d'un accès direct au ministre, le chef de la CAQ a déclaré que la solution était d'avoir des partis sans donateurs, et sans doute sans membre, et d'éliminer le financement « populaire » qu'Élections Québec appelle « financement autonome ». Il a appelé les autres partis cartellisés à se joindre à lui dans cette revendication. Il n'y a rien de plus absurde et de plus intéressé que cela ! Et ce, après que les partis politiques à l'Assemblée nationale ont donné leur accord à l'automne pour une augmentation du plafond de la contribution de 100 $ à 200 $. Pour ces partis, c'est logique, mais le public est tenu dans l'ignorance de leur raisonnement.

Sur l'ingérence, le PMLQ a aussi reçu des commentaires tranchant sur les propositions qui accroissent l'ingérence du DGEQ dans les affaires internes des partis politiques et qui visent surtout les partis qui n'ont pas de siège à l'Assemblée nationale avec des mesures précises. Le DGEQ propose :

- les partis devraient se fixer des objectifs de parité et de diversité de candidatures et un rapport des résultats atteints, et une sanction pourrait être prévue pour les partis politiques qui omettent de produire un rapport sur les résultats;

- les dépenses raisonnables additionnelles liées aux soins d'une personne à charge ou à une situation de handicap, encourues par les personnes candidates pour faire campagne, pourraient leur être remboursées (totalement ou partiellement). Un seuil déterminé de votes valides obtenus pourrait donner droit à ce remboursement;

- le nombre requis de membres qu'un parti doit soumettre annuellement chaque année pour conserver son autorisation passerait de 100 à 250 membres;

- des critères visant à s'assurer de la vocation politique et électorale d'une entité politique pour l'obtention et le maintien d'une autorisation pourraient être ajoutés et les partis devraient émettre une déclaration confirmant que l'un des objectifs essentiels du parti est de participer aux affaires publiques en soutenant des personnes candidates et en appuyant leur élection et plusieurs autres.

Les protestations contre ces mesures sont nombreuses : c'est une ingérence dans la vie interne des partis politiques de vouloir fixer des critères de parité ou autre dans le choix de candidats pour une élection, et en plus, sans égard de la situation de chaque parti. Le DGE veut rendre plus difficile pour les partis non représentés à l'Assemblée nationale de se présenter. Il y a déjà trop de paperasse administrative pour des entités politiques qui ont peu de ressources, cela vient canaliser l'énergie à faire de l'administratif à la place du politique. Le DGE cherche à intervenir encore plus dans la vie interne des partis politiques, ce qui est contraire à l'objectif de la Loi électorale qui serait censé permettre une plus grande participation.

Plusieurs personnes nous ont dit que les propositions du DGEQ semblent ne viser qu'à lui permettre d'accomplir ses tâches administratives de la façon la plus efficace possible, et n'ont rien à voir avec doter la Loi électorale d'une « vision cohérente, structurée et concertée ». Il ne s'agit certainement pas de propositions politiques visant à garantir que le processus électoral soit démocratiquement fondé sur la participation des citoyens.

La désinformation sur l'ingérence étrangère et les fausses informations véhiculées par les réseaux sociaux et les préoccupations concernant l'utilisation des algorithmes et de l'intelligence artificielle

Le document indique entre autres que « la désinformation peut être pratiquée par des acteurs nationaux ou être liée à des tentatives d'ingérence étrangère ». Il est question également des réseaux sociaux qui véhiculent de fausses informations visant à interférer dans les élections.

Alors que l'utilisation et l'influence des réseaux sociaux et de l'intelligence artificielle sont devenues un mode de vie au Québec et au Canada et que nous vivons dans un monde où les informations trompeuses, les rumeurs et les doutes sont devenus monnaie courante, les contrôles mis en place sur ce que les gens peuvent et ne peuvent pas dire, et sur qui peut parler, en particulier lors d'une élection, ne sont pas appropriés. On pourrait affirmer que les campagnes électorales des soi-disant grands partis sont, dans leur ensemble, trompeuses, qu'elles consistent à attiser les passions, à diviser l'électorat et à semer le doute. Elles sont menées sous forme de microciblage et par le biais des réseaux sociaux pour dénigrer les candidats rivaux et transmettre aux électeurs des informations fausses et détournées afin d'influencer le résultat des élections.

Les participants aux tables rondes ont déclaré au PMLQ que s'il est vrai que le processus électoral démocratique doit établir des normes pour s'assurer que le discours politique n'incite pas à s'attaquer les uns les autres, il ne devrait pas permettre que des activités qui nuisent à la solidarité sociale soient financées par des fonds publics. En ce qui concerne la désinformation, la première chose qu'une loi électorale moderne devrait faire est de cesser de protéger et de financer les principaux responsables de la diffusion de la désinformation, qui décontextualisent les faits pour les priver de sens, tout en présentant de faux récits pour offrir de fausses alternatives.

Les participants aux tables rondes ont dit au PMLQ que le processus électoral prétend que les gens ont le choix entre les soi-disant grands partis et les programmes qu'ils proposent, ce qui laisse entendre que l'un de ces programmes les représente, ce qui n'est pas le cas. Ils représentent des intérêts privés ainsi que des absurdités concoctées par des sociétés de marketing qui traitent les électeurs comme des consommateurs à la caisse d'un magasin d'alimentation, incités à acheter tel produit plutôt que tel autre.

C'est l'une des nombreuses façons dont la voix et l'opinion du peuple sont réduites au silence lors d'élections qui, comme le souligne à juste titre le DGEQ, commencent de plus en plus tôt, en dehors des périodes définies par la Loi électorale. Remplacer le discours politique par des campagnes électorales est odieux et maintient les problèmes de la société dans le cadre établi par les milieux officiels qui s'opposent à tout débat qu'ils ne peuvent contrôler. Les méthodes qui permettent au peuple de parler en son nom propre, de dire et de proposer ses solutions aux problèmes de la société sont totalement absentes des propositions de révision de la Loi électorale.

La désinformation est également présentée comme étant liée au problème de l'ingérence d'acteurs nationaux ou étrangers. En ce sens, le DGEQ parle de « surveillance étroite » et de « collaboration de plusieurs entités intéressées à préserver l'intégrité des élections ». Le système de gouvernement de parti dit démocratique ne survivra pas à une « surveillance étroite » par l'État, car plus ça va, plus les citoyens peuvent voir que ces partis ne sont que des appendices de l'État qui dicte tout, des valeurs que les gens doivent épouser à la façon dont ils doivent penser et agir dans ce qu'on appelle une société démocratique.

De nombreuses personnes ont dit au PMLQ qu'elles trouvaient cela très problématique.

L'utilisation de la « haine » comme nouvel instrument de contrôle de l'espace politique

Le document du DGEQ reprend les propositions du gouvernement libéral du Canada, des gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et d'autres pays européens, concernant la chasse aux « entités qui incitent à la haine ou à la violence ». Le DGEQ s'inspire de la police politique qui propose d'aborder ces problèmes sous l'angle de « veiller à ce que la Loi électorale reflète les valeurs de notre société ».

Le document note que si « la désinformation, l'intimidation, le harcèlement et les menaces ont pris de l'ampleur » au Canada et au Québec, « les signalements de discours et de crimes haineux ont augmenté de façons importantes depuis 2017 ». Il avertit que « plus ce genre de propos et d'actes prennent forme dans l'espace public, plus ils sont susceptibles de se refléter dans le milieu politique ». « La haine, lit-on dans le document de consultation, marginalise, exclut, déshumanise. »

Pour y remédier, le DGEQ précise que les privilèges liés à l'autorisation d'un parti politique « ne devraient pas servir à amplifier les discours haineux ». Outre le fait d'affirmer clairement que tout est un privilège qui peut être donné et retiré par des forces extérieures, le DGEQ propose l'ajout de critères liés à la dénomination, aux objectifs, au discours et aux activités qui pourraient mener au retrait de l'autorisation d'un parti. Il cite des exemples de lois en Europe qui permettent l'interdiction et la dissolution d'un parti politique sur cette base.

Interdire un parti politique pour incitation à la haine ou à la violence, ou parce qu'il est considéré comme extrémiste, n'est pas une petite affaire dans une société qui se dit démocratique. Bien que l'entendu soit que les incitateurs à la haine et les extrémistes violents visés appartiennent à une frange de l'extrême droite, une fois cette porte ouverte, tous les partis dont les opinions sont jugées par les pouvoirs en place comme n'étant pas conformes aux leurs peuvent être visés. On le voit déjà dans le cas des activistes et des organisations qui s'opposent au sionisme et aux actes de génocide perpétrés par l'État d'Israël contre le peuple palestinien. Mais au pays aussi, nous voyons ceux qui soutiennent les droits ancestraux des peuples autochtones ou qui s'opposent à la dégradation de l'environnement par des intérêts privés étroits être pris pour cible.

Comment défendre la liberté d'expression, le droit d'association et le droit de conscience dans le contexte en évolution des réseaux de médias sociaux et de l'influence de l'intelligence artificielle est une question qui appartient à toutes les Québécoises et tous les Québécois. Ces droits ne doivent pas être remis en cause. Il est nécessaire d'avoir de vastes consultations publiques au cours desquelles le public est informé et engagé dans ces discussions, y compris en ce qui concerne les partis politiques, et peut proposer des solutions. C'est d'autant plus grave quand on reconnaît l'importance de l'exercice de ces droits dans la formulation d'une volonté populaire et d'une opinion publique au service du corps politique, surtout quand ceux qui ont actuellement accès aux positions de pouvoir et de privilège sont si centrés sur eux-mêmes.

Le problème avec l'inclusion dans la loi d'interdictions de toutes sortes qui sont appliquées aux individus et aux organisations par les pouvoirs de police est précisément que le peuple n'est pas appelé à participer à l'analyse de la source de ces problèmes ou à discuter de comment contrôler la haine et l'extrémisme violent, qu'est-ce qui est haineux, violent et extrémiste et, en fin de compte, sur la base de quelles définitions les lois sont promulguées ou les règlements sont appliqués. Nos jeunes au Québec ont trop souvent été injustement accusés de radicalisation ou de violence au nom des « valeurs de la société québécoise » qui sont simplement proclamées d'en haut. Une fois les citoyens étiquetés et classés dans telle ou telle catégorie, ils sont marginalisés et deviennent la cible d'actions policières.

Aujourd'hui, quand on voit avec quelle détermination tous les partis à l'Assemblée nationale et à la Chambre des communes et les médias monopolisés cherchent à créer une équation entre l'appui au peuple palestinien et l'antisémitisme, la propagande haineuse et les prédictions de ce qui aboutira à des actes d'extrémisme violent, il n'est pas difficile de comprendre les dangers des mesures prises sur le plan électoral pour « lutter contre la haine ».

Ce que nous voulons dire, c'est que tant que la Loi électorale n'entérine pas un processus qui place le citoyen au centre de la résolution des problèmes qui le concernent et qui concernent la société, sur la base de l'expérience collective et des principes qui unissent le peuple, les actions de l'État qui atomisent le corps politique ne profiteront pas du tout aux Québécoises et Québécois. Introduire de nouvelles règles et normes dont le peuple n'est même pas informé, sans parler de participer à leur élaboration, est destructeur. Cela sape l'opinion publique et la cohésion du corps politique. Les mesures qui divisent la société entre les soi-disant violents et les non-violents, entre ceux qui encouragent la haine et ceux qui ne le font pas, augmentent également les appréhensions et les comportements chaotiques. L'anarchie et la violence deviennent la nouvelle norme et la répression est utilisée dans une vaine tentative de maîtriser tout le monde.

C'est très inquiétant et dangereux, ont déclaré au PMLQ des participants aux tables rondes. Ils souhaitent que les citoyens et les résidents du Québec, quelle que soit leur origine nationale, soient unis sur la base d'un projet moderne d'édification nationale où le peuple est habilité à décider de la direction de la société et de la façon dont se mènent les affaires dans tous les domaines d'activité.

Le concept de tiers doit être banni de la Loi électorale

Les participants aux tables rondes ont également exprimé de vives inquiétudes quant au rôle de « tiers » attribué aux citoyens lors d'une élection. Les propositions du document de consultation du DGEQ continuent de bloquer la participation des citoyens lors d'une élection et dans la période dite préélectorale au nom de l'égalité des chances et de la transparence. L'objectif déclaré du DGEQ est d'assurer la prépondérance des partis politiques et des candidats lors d'une élection. Il écrit : « Au Québec, l'intervention des tiers pendant la période électorale est limitée par la Loi afin que les partis politiques et les personnes candidates aient tout l'espace nécessaire pour débattre de leurs idées et de leurs intérêts. » C'est tout simplement faux. En période électorale, ce que l'on appelle les « tiers » peuvent exprimer leurs opinions dans la mesure où leurs interventions ne coûtent rien, depuis la conception et la production de l'intervention jusqu'à sa publication et sa diffusion. À moins d'agir au nom d'un parti politique ou d'un candidat, un individu ne peut faire une intervention partisane si cette intervention a un coût.

Le PMLQ n'est pas d'accord avec ce concept de prépondérance, selon lequel les partis cartellisés sont autorisés à usurper la possibilité pour tout électeur, qu'il soit individuel ou organisé, de s'exprimer en son nom propre. Les participants aux tables rondes ont dit au PMLQ que les gens normaux grandissent en croyant que les élections sont censées être un moment de débat sociétal collectif sur le Québec que nous voulons. Ils n'apprécient pas les définitions d'« équité » qui sont en fait discriminatoires à l'égard de ceux qui ont peu de moyens financiers. Ils voient qu'il n'y a pas d'équité entre les partis politiques au Québec. Ils voient que, systématiquement, les partis qui n'ont pas de représentants à l'Assemblée nationale, comme le nôtre, sont ignorés ou que leur point de vue est banalisé pour le plaisir de déclarer qu'ils ont reçu le traitement démocratique qu'ils méritent.

L'introduction du concept de précampagne électorale aura pour effet de consolider davantage l'usurpation de l'espace politique par les partis cartellisés au pouvoir. La réduction des citoyens à des « tiers » soumis à des régimes de financement n'est pas acceptable. Elle constitue un obstacle majeur à la participation des citoyens au discours politique.

Un exemple donné lors d'une des tables rondes est celui de l'organisme d'intérêt public comme Équiterre qui s'est vu blâmé par le DGEQ parce que des notes ont été données aux partis politiques sur leurs engagements environnementaux en 2018. Même chose pour la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) en 2012 qui a même tenté d'aller en Cour suprême pour défendre son droit d'intervenir pendant une campagne, mais dont la demande a été refusée parce qu'elle n'était pas conforme à la Loi électorale.

Préoccupations concernant les atteintes aux droits d'association et d'expression

Les partis politiques sont des organisations privées. Ce sont donc les partis qui doivent décider par qui ils sont financés et qui sont leurs membres. Mais les partis politiques sont placés sous surveillance. La Loi électorale prévoit que toute contribution financière ne peut être versée qu'au directeur général des élections et que le nom de l'électeur, la ville et le code postal de sa résidence sont publiés sur le site Internet du DGEQ ainsi que le montant versé et le nom du parti auquel il a été versé. Cela revient à mettre le parti politique sous la tutelle de l'État. Ce n'est pas le parti qui décide qui contribue à son travail ou qui en devient membre. Aucune loi n'oblige les associations culturelles, sportives ou éducatives d'autres domaines à publier leur liste de membres, mais les partis politiques doivent le faire. Compte tenu de la propension à la persécution politique dans le monde, de nombreuses personnes expriment de sérieuses inquiétudes à ce sujet, tant pour ce qui est de leur emploi que pour leur droit de conscience.

Comment les questions de conscience et d'association peuvent-elles relever de l'État, au nom du contrôle des finances et de la lutte contre la corruption ? C'est quelque chose qui est imposé et qui n'est pas discuté par le corps politique malgré l'atteinte au droit d'association, à la liberté d'expression et au droit de conscience. De nombreuses personnes ont dit au PMLQ qu'elles ne voulaient pas que leurs contributions ou leurs adhésions passent par le DGEQ. Ils veulent que leur parti décide et contrôle qui est membre et ce qu'il fait de leur argent. Cela semble élémentaire et les gens sont choqués de découvrir que ce n'est pas le cas. Beaucoup ne veulent pas cotiser parce qu'ils refusent que leur droit d'association et leur droit de conscience soient bafoués par la Loi électorale, d'autant plus que leur nom et leur code postal sont rendus publics sur le site du DGEQ.

Annexe 1

Les propositions présentées dans le document de consultation Pour une nouvelle vision de la Loi électorale, par chapitre

CHAPITRE 1 – Le droit de vote

L'inscription sur la liste électorale

Proposition 1 : Convertir l'inscription et la modification de l'inscription sur la liste électorale en service numérique

Proposition 2 : Permettre l'inscription et la modification de l'inscription sur la liste électorale lors du vote par anticipation et le jour du scrutin

Proposition 3 : Exiger que les électrices et les électeurs soient inscrits sur la liste électorale de la section de vote de leur domicile au moment du vote

Le vote

Proposition 4 : Adopter la file unique dans les lieux de vote

Proposition 5 : Ouvrir des centres de vote par anticipation dans des lieux fréquentés .

Proposition 6 : Permettre l'essai de modalités de vote à distance

L'organisation des scrutins

Proposition 7 : Prévoir des élections partielles à date fixe

Proposition 8 : Élargir le bassin de recrutement du personnel électoral

Pour mener la réflexion plus loin

Revaloriser le jour du scrutin comme moment civique fort . .

CHAPITRE 2 – Le droit de se présenter à une élection

Les candidates et candidats aux élections

Proposition 1 : Encourager les partis politiques à rendre compte de leurs objectifs et des résultats atteints en matière de parité et de diversité des candidatures

Proposition 2 : Évaluer la possibilité de prévoir un régime distinct pour le remboursement de certaines dépenses liées aux soins d'une personne à charge ou à une situation de handicap

L'autorisation des entités politiques

Proposition 3 : Ajouter des critères visant à s'assurer de la vocation politique et électorale d'une entité politique pour l'obtention et le maintien d'une autorisation

Proposition 4 : Veiller à ce que la Loi électorale reflète les valeurs de notre société pour éviter qu'une entité qui incite à la haine ou à la violence puisse bénéficier de l'autorisation et de ses privilèges

Proposition 5 : Ajouter des motifs de refus et de retrait d'autorisation liés aux obligations financières et administratives des partis politiques

Pour mener la réflexion plus loin

Pour un climat sain et respectueux au sein de nos institutions et de nos processus démocratiques

CHAPITRE 3 – Le financement politique et les dépenses électorales

Le contrôle des dépenses

Proposition 1 : Créer un mécanisme visant à renforcer la transparence des activités préélectorales des tiers

Proposition 2 : Clarifier, réviser et diffuser les règles et les normes liées à l'utilisation des ressources parlementaires et gouvernementales

Pour mener la réflexion plus loin

Le financement politique à l'heure des bilans

L'encadrement des dépenses électorales en contexte d'élections à date fixe

CHAPITRE 4 – L'information électorale et politique

L'information aux électrices et aux électeurs

Proposition 1 : Mettre à la disposition des électrices et des électeurs une vitrine d'information sur les personnes candidates ou les partis politiques

La transparence des communications politiques et la lutte à la désinformation

Proposition 2 : Envisager la création d'obligations destinées aux plateformes numériques en matière de transparence et de respect de la Loi électorale

Proposition 3 : Accroître la transparence des communications à caractère politique et encadrer l'utilisation de certaines pratiques en ligne

Proposition 4 : Réfléchir à des mesures de transparence et d'encadrement visant la publication des résultats de sondages électoraux

Pour mener la réflexion plus loin

La démocratie à l'ère du numérique

CHAPITRE 5 – La gouvernance électorale

Le processus de modification de la Loi électorale et le rôle du directeur général des élections

Proposition 1 : Prévoir un processus de révision périodique de la Loi électorale

Proposition 2 : Réviser les obligations du directeur général des élections en matière de reddition de comptes

Le rôle du comité consultatif

Proposition 3 : Revoir la portée du mandat et la composition du comité consultatif

Pour mener la réflexion plus loin

La participation des autres acteurs au processus de modification de la Loi électorale

CHAPITRE 6 – La carte électorale

La proposition de délimitation préliminaire des circonscriptions

Proposition 1 : Consulter les députées et députés dans le cadre des auditions publiques plutôt que par l'intermédiaire de la Commission de l'Assemblée nationale

La proposition révisée et l'établissement de la délimitation des circonscriptions

Proposition 2 : Ajouter une période de consultation à la suite du dépôt du second rapport de la Commission de la représentation électorale

Pour mener la réflexion plus loin

La consultation, un fondement d'une représentation juste et équitable


Cet article est paru dans
Logo
Volume 54 Numéro 5 - Mai 2024

Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/Lml2024/Articles/LM540511.HTM


    

Site web :  www.pccml.ca   Courriel :  redaction@pccml.ca