Les changements proposés à la Loi électorale visent à renforcer l'emprise de l'État sur le discours politique

Les propositions de modification de la Loi électorale du Canada renforcent l'emprise de l'État sur les partis politiques et limitent la capacité des citoyens et des résidents à participer de manière significative aux affaires qui préoccupent le corps politique. Les élections ne sont plus un forum pour le débat politique et le discours sur l'orientation de l'économie et des affaires sociales, culturelles et politiques; au contraire, elles servent de plus en plus à priver les citoyens de pouvoir politique et ne parviennent pas à résoudre les problèmes auxquels l'État est confronté, même à court terme.

Le projet de loi C-65 est, en partie, le produit de l'entente de soutien et de confiance entre les libéraux et le NPD, dont une section s'intitule « Faire fonctionner la démocratie pour les gens » et déclare un engagement commun à « maintenir la santé de notre démocratie et (répondre) à la nécessité d'éliminer les obstacles au vote et à la participation ». Il n'est pas surprenant qu'il s'agisse d'une manoeuvre et d'une fraude.

Le projet de loi C-65 est informé par l'idée que les citoyens sont de simples électeurs, et ce n'est donc pas sans ironie que le nom abrégé qui lui a été donné est Loi sur la participation électorale. Il n'y a certainement rien dans le projet de loi qui permette une plus grande participation.

En ce qui concerne le vote, le projet de loi portera à trois le nombre de jours de scrutin et permettra aux électeurs de voter n'importe où dans leur circonscription au lieu de se rendre uniquement dans un bureau de vote assigné. Ces changements, s'ils sont adoptés, n'entreront pas en vigueur avant l'élection à date fixe de 2029. La loi charge Élections Canada d'en déterminer la faisabilité. D'autres amendements relatifs au vote officialisent les lieux de vote dans les établissements d'enseignement et les résidences institutionnelles.

En ce qui concerne l'élimination d'autres aspects que le NPD et les libéraux semblent considérer comme des obstacles, le nombre de signatures nécessaires pour devenir candidat sera réduit de 100 à 75. Cela peut s'expliquer par le fait que les membres des partis cartellisés ne sont pas enclins à faire du travail de masse et qu'ils sont fatigués de se voir claquer autant de portes au nez. Aussi, le seuil des dépenses électorales qui déclenche l'obligation pour les individus et les groupes de s'inscrire en tant que tiers passera de 500 à 1500 dollars.

Certaines modifications introduites dans le projet de loi C-65 concernent les « fausses déclarations ». Elles ne contribueront pas non plus à accroître la participation des citoyens et résidents au processus décisionnel.

Nouvelles dispositions relatives aux « fausses déclarations »

Plusieurs dispositions de l'actuelle Loi électorale du Canada permettent de contrer les fausses informations utilisées pour subvertir les élections, comme cela s'est produit lors du scandale des appels téléphoniques automatisés en 2011, où des électeurs ont reçu de fausses informations sur l'endroit où ils devaient se rendre pour voter grâce à des appels téléphoniques automatisés prétendant provenir d'Élections Canada. En outre, des dispositions interdisent de faire de fausses déclarations sur « un candidat, une personne qui désire se porter candidat, le chef d'un parti politique ou une personnalité publique associée à un parti politique ». Il est interdit de déclarer faussement que l'une de ces entités a été accusée d'avoir enfreint une loi fédérale ou provinciale ou fait l'objet d'une enquête à ce sujet. Sont également interdites les fausses déclarations concernant « la citoyenneté, le lieu de naissance, les études, les qualifications professionnelles ou l'appartenance à un groupe ou à une association ».

Le projet de loi C-65 modifie ces dispositions en ajoutant que l'infraction s'applique « quelque que soit le lieu de l'élection ou celui où la déclaration a été faite ou publiée », ce qui devrait permettre de saisir des photos et des vidéos modifiées par l'intelligence artificielle et d'autres éléments similaires. Le projet de loi C-65 prévoit également des infractions plus spécifiques concernant les fausses informations.

Enregistrement des candidats et fausses déclarations

Comme nous l'avons mentionné, le nombre de signatures requises pour être désigné candidat sera réduit de 100 à 75, mais l'aspect le plus important est que deux nouvelles infractions ont été introduites. La communication d'informations fausses ou trompeuses sur le formulaire de candidature sera désormais considérée comme un délit. Le signataire, le témoin de la signature et la personne qui dépose le document sont potentiellement coupables. Cela signifie, par exemple, que si un électeur inadmissible, tel qu'un résident permanent, signe un formulaire de candidature, cela peut être considéré comme une infraction pénale. Cela permettra également à l'« oppo-recherche » (recherche sur l'opposition) de discréditer et de disqualifier les candidats en inspectant les formulaires de candidature accessibles au public.

Fausses déclarations sur le processus de vote

Dans ses recommandations au Parlement, Élections Canada a proposé d'ériger en infraction le fait de « sciemment faire de fausses déclarations sur le processus électoral, y compris sur les procédures de vote et de dépouillement, dans le but de nuire au déroulement d'une élection ou de mettre en doute sa légitimité ou celle des résultats », mais cette disposition n'est pas incluse dans le projet de loi C-65. La raison n'en est pas claire, mais plusieurs partis non représentés à la Chambre des communes ont fait part à Élections Canada de leurs inquiétudes quant au caractère général de l'interdiction proposée. Lors d'une réunion du Comité consultatif des partis politiques enregistrés, il a été souligné que la définition était vague et qu'elle pouvait donner lieu à des abus et à des violations du droit à la liberté d'expression. Serait-ce une « fausse déclaration », par exemple, que de dire qu'un gouvernement nouvellement élu avec un nombre d'électeurs particulièrement faible et un taux de participation particulièrement bas n'est pas représentatif et a donné naissance à un gouvernement dépourvu de légitimité ?

Le projet de loi C-65 ajoute plutôt des sujets spécifiques pour lesquels les fausses déclarations sont criminalisées. Il s'agit notamment de fausses déclarations concernant les personnes habilitées à voter, les modalités d'inscription sur les listes électorales, l'emplacement des bureaux de vote, la manière dont une personne devient candidate et la manière dont les votes sont comptés et validés. Il est également interdit de faire une fausse déclaration sur « la personne pour laquelle un individu peut voter lors d'une élection ».

Aucune fausse déclaration ne sera toutefois nécessaire pour la réforme de la Loi électorale qui avance la date des élections de 2025 d'une semaine afin qu'elles ne coïncident pas avec la fête des lumières sikhe appelée Diwali. Le fait d'avancer les élections d'une semaine signifie que quelque 80 députés pourront bénéficier de leur pension, qu'ils gagnent ou qu'ils perdent leur siège. Alors que la date initiale des élections est fixée au 20 octobre 2025, les députés pourraient prétendre à leur pension le 21 octobre 2025, après six ans de mandat. Sur les 80 députés qui auront droit à leur pension quelle que soit l'issue des élections, 32 sont conservateurs, 22 sont libéraux, 6 sont néodémocrates et 19 sont bloquistes. Selon la Fédération canadienne des contribuables, la décision d'avancer les élections d'une semaine pourrait coûter aux Canadiens jusqu'à 120 millions de dollars, soit le montant total de la pension des 80 députés.

Par ailleurs, le 1er avril, le salaire de base d'un député débutant passera de 194 600 $ à 203 100 $. À titre de comparaison, le salaire annuel moyen d'un employé à temps plein au Canada est de 54 630 $.


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Volume 54 Numéro 4 - Mai 2024

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