Exploiter la «haine» et l'«extrémisme» pour contrôler l'espace public

Le Parlement dépose des amendements à la loi électorale pour servir ses fins

Le projet de loi C-65, Loi modifiant la Loi électorale du Canada, déposé par le Parti libéral à la Chambre des communes le 20 mars, soulève de graves inquiétudes pour les Canadiens et les Québécois quant à la manière dont les dirigeants utilisent une définition fallacieuse et intéressée de la « haine » pour contrôler l'espace politique. Les changements proposés concernent, entre autres, les critères d'enregistrement et de radiation des partis politiques.

Promotion de la « haine » et enregistrement des partis

Le projet de loi C-65 prévoit la création d'une sorte de mécanisme d'enregistrement et de désenregistrement des partis si un parti est considéré comme ayant la promotion de la haine comme l'un de ses « objectifs principaux ».

Il n'introduit pas d'amendement précisant comment cela se fera, mais confie à Élections Canada la responsabilité de déposer un rapport à la Chambre des communes. Ce rapport « énonce une proposition de processus permettant de décider si un parti enregistré ou un parti admissible compte parmi ses objectifs essentiels la promotion de la haine envers un groupe identifiable de personnes. Le rapport fait également état des conséquences proposées d'une telle détermination ».

Le directeur général des élections doit déposer son rapport au plus tard 120 jours avant la prochaine date d'élection fixée, c'est-à-dire au plus tard à la fin du mois de juin 2025. Il doit consulter à la fois le commissaire aux élections fédérales et le Comité consultatif des partis politiques.

Cela semble être une approche qui semble vouloir faire porter la responsabilité d'une décision politique à l'organe qui est censé être impartial et libre de toute ingérence politique.

Cet aspect a été soulevé lorsque le Parti nationaliste a été enregistré pour l'élection générale de 2019. Il a été radié non pas à cause de ses convictions ou de son programme, mais parce qu'il n'était pas en mesure de satisfaire aux exigences d'enregistrement durant la confirmation triennale des adhésions.

À l'époque, les médias et d'autres personnes ont demandé à Élections Canada comment un parti qui épouse ouvertement le nazisme pouvait être enregistré. Élections Canada a indiqué que sa responsabilité était de voir à l'application de la loi, donc que les conditions d'enregistrement des partis étaient pour ainsi dire indifférentes au contenu.

Lorsque les libéraux ont présenté leur projet de loi sur les préjudices en ligne et qu'il y avait beaucoup de controverse sur la définition de la « haine », le PMLC a dit que c'était une initiative dangereuse. Le directeur général des élections Stéphane Perrault a déclaré que « la barre devrait être placée très haut ».

Le projet de loi sur les préjudices en ligne tente d'inscrire dans la loi une définition de la haine qui est essentiellement une violation du droit de conscience et soulève la question de qui décide de ce qui est un préjudice et dans quel but. Rien ne l'illustre mieux que l'utilisation officielle par l'État des définitions de la haine et de l'antisémitisme lorsque des personnes critiquent et condamnent les politiques de l'État d'Israël à l'égard des Palestiniens. L'inscription de ces définitions dans la loi vise à établir un point de référence juridique de ce qui constitue la haine et à criminaliser les gens sur cette base afin de supprimer l'opposition. Les Canadiens ne l'accepteront jamais. Cela ressemble aux tentatives d'institutionnaliser le racisme comme quelque chose provenant du peuple et comme une question d'insensibilité, voire de comportement criminel, pour dissimuler que c'est l'État qui est raciste et c'est lui qui incite à la division du corps politique pour le maintenir dans une position de soumission. Les tentatives de blâmer le peuple, et non l'État, pour le racisme, la haine, l'extrémisme et autres ne passeront pas, mais les gouvernements des partis cartellisés veulent se donner les moyens d'agir en toute impunité et en toute « légalité ».

Le racisme et la haine ne sont pas innés aux individus comme tels, ce sont des outils aux mains de la minorité privilégiée qui détient le pouvoir et ils font partie de l'État depuis l'époque des colonialistes britanniques. Sans l'État qui incite à la haine et les groupes qui s'en font les véhicules, y compris les partis politiques cartellisés, il n'y aurait pas de promotion de la haine. Les groupes qui prônent la haine n'existeraient pas sans le soutien de l'État. C'est ce que montre l'histoire du mouvement de résistance des peuples du monde entier.

L'État a été fondé sur la base de la division du corps politique par le génocide culturel des peuples autochtones, ce qui veut dire le génocide à proprement parler. Les Britanniques ont également imposé une catégorie d'« indésirables » qu'ils ont appelés Orientaux, et ont fait de même contre les Canadiens noirs et les peuples d'Amérique latine, des Caraïbes et d'Afrique. Les valeurs eurocentriques sont à ce jour présentées comme la norme acceptable et reconnue de moralité et de comportement de l'État anglo-canadien, à laquelle tout le monde doit adhérer sous peine d'être puni, banni, expulsé, etc.

Nous pourrions certainement faire valoir que les partis cartellisés se sont universellement lancés dans une campagne belliqueuse visant à susciter la haine et l'animosité envers la Russie, la Chine, l'Iran, etc. Nous pourrions faire valoir qu'ils incitent à la haine d'une manière à menacer le bien-être et la sécurité de la population et qu'ils devraient être soumis à un contrôle législatif. Les conclusions de l'après-Deuxième Guerre mondiale considéraient l'incitation à la haine pour la guerre comme un crime.

Mais ce ne sont pas ces expériences qui guident les partis cartellisés. La question est de savoir qui décide et, dans le cas d'amendements à la Loi électorale, comment les électeurs peuvent exercer un contrôle sur des questions telles qui doit sélectionner les candidats qui se présentent à une élection. Comment faire pour que ce soient les électeurs qui décident des priorités des gouvernements et s'assurer que celles-ci ne soient pas fixées par les élites dirigeantes qui identifient leurs intérêts privés étroits à l'intérêt général du corps politique.

En ce qui concerne la promotion de la haine et qui décidera de sa définition, ainsi que toutes les mesures visant à contrôler le corps politique, les définitions imposées à la population font partie du réseau d'espionnage international du Groupe des Cinq (États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) dirigé par les États-Unis, qui comprend également les géants des médias sociaux, etc. Tout en s'insurgeant contre l'ingérence étrangère, les cercles dirigeants soutiennent volontiers un conglomérat international antinational qui dicte tout. En ce qui concerne le registre des agents étrangers, par exemple, l'Australie a été érigée en modèle à suivre. Pour ce qui est de combattre les préjudices en ligne et d'appliquer le concept de responsabilité des médias sociaux en matière de suppression des contenus préjudiciables, le Royaume-Uni est considéré comme le meilleur. Il s'agit clairement d'un effort concerté et coordonné.

Une définition inacceptable de l'extrémisme en Grande-Bretagne

Par exemple, le 14 mars le gouvernement britannique a introduit une nouvelle définition de l'« extrémisme » :

« La promotion ou l'avancement d'une idéologie fondée sur la violence, la haine ou l'intolérance, qui vise à : 1) nier ou détruire les droits et libertés fondamentaux d'autrui; 2) ou miner, renverser ou remplacer le système britannique de démocratie parlementaire libérale et de droits démocratiques; 3) ou créer intentionnellement un environnement permettant à d'autres d'atteindre les résultats susmentionnés. »

Cette définition est considérée comme un « outil d'application plus précis » par rapport à la définition précédente de 2011 qui était décrite comme « l'opposition vocale ou active aux valeurs britanniques fondamentales, y compris la démocratie, l'État de droit, la liberté individuelle et le respect mutuel et la tolérance des différentes croyances et convictions ».

Comme c'est désormais la norme, l'annonce de cette nouvelle définition de l'extrémisme a été suivie d'une promesse de mettre la « barre haute » afin que les droits civils ne soient pas visés et qu'il n'y ait pas de risque de cibler les personnes ayant des « croyances privées et pacifiques ».

Un nouveau « centre d'excellence contre l'extrémisme » est en train d'être mis en place pour recueillir des renseignements et identifier les groupes qui entreront dans cette nouvelle catégorie fondée sur une définition. Les fonds publics seront supprimés pour ceux qui sont classés dans cette catégorie et il leur sera « interdit d'entrer en contact avec le gouvernement », quel que soit le sens de cette expression.

Faut voir tout cela dans le contexte de l'opposition mondiale au génocide des Palestiniens, en particulier en Grande-Bretagne. Nombreux sont ceux qui appellent à renouveler ou à remplacer le système de démocratie parlementaire libérale du Royaume-Uni et du Canada, y compris l'obligation de prêter serment de loyauté au monarque. D'autres appellent à l'abolition pure et simple de la monarchie et de son système qui consacre la souveraineté du chef de l'État, considéré comme l'incarnation du pouvoir suprême.

Le projet de loi C-65 fait son chemin au Parlement en même temps que le projet de loi C-63 sur les préjudices en ligne, qui est actuellement en deuxième lecture. La définition de la haine adoptée dans ce projet de loi devrait être prise en compte dans les amendements à la Loi électorale prévus dans le projet de loi C-65.


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Volume 54 Numéro 4 - Mai 2024

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