Le projet de loi concernant l'assurance médicaments au Parlement

Des cartels d'assurance privés attaquent le système de santé public

– K.C. Adams –

Le projet de loi C-64, Loi concernant l'assurance médicaments, a été présenté à la Chambre des communes le 29 février. Selon le sommaire sur le site Web de la Chambre :

« Le texte énonce les principes que le ministre de la Santé prend en compte dans la poursuite du travail vers la mise en oeuvre d'un régime d'assurance médicaments national et universel. Il prévoit aussi le pouvoir du ministre d'effectuer des paiements, en certaines circonstances, relativement à la couverture de médicaments sur ordonnance et de produits connexes. Il énonce également certains pouvoirs et certaines obligations de ce ministre, y compris relativement à l'élaboration d'une liste – qui servira de point de départ à l'élaboration d'une liste nationale de médicaments – et à l'élaboration d'une stratégie nationale d'achat en gros, et prévoit l'obligation pour ce ministre de publier une stratégie pancanadienne relative à l'utilisation appropriée des médicaments sur ordonnance et des produits connexes. Enfin, il prévoit la constitution d'un comité d'experts chargé de formuler des recommandations. »

En outre, la loi comprend la couverture de médicaments de contraception et pour le traitement du diabète et des appareils tels des pompes d'insuline, mais tout peut aller de l'avant seulement si le gouvernement fédéral réussit à négocier des ententes avec les provinces et les territoires, ceux-ci devant prévoir ces dispositions dans leurs systèmes médicaux. Les libéraux et le NPD n'avaient que des louanges pour la loi et considèrent qu'elle répond à un des critères de l'entente de soutien et de confiance qui engage le NPD à soutenir le gouvernement libéral. Les gouvernements de l'Alberta et du Québec ont déjà annoncé qu'ils ne participeraient pas au programme national, parce que le Québec a déjà son propre régime d'assurance médicaments et que l'Alberta veut sa pleine part du financement par habitant.

Le projet de loi ne prévoit pas une obligation de fournir un programme universel à payeur unique et prévoit plutôt la création d'un comité d'experts pour faire des recommandations. Il n'y a aucun échéancier pour l'adoption du projet de loi, encore moins pour sa mise en oeuvre.

De manière tout à fait intéressée, les assureurs de médicaments privés ont dénoncé les mesures provisoires du gouvernement fédéral pour un système d'assurance médicaments, disant qu'il faisait « fausse route ». Par le biais des médias monopolisés, ils tentent de fomenter une hystérie sur le soi-disant coût d'une assurance médicaments publique assumée par le peuple.

Caractériser ainsi le système de santé public, y compris l'assurance médicaments, comme étant négatif et représentant un coût pour le peuple et l'économie n'est qu'une tentative intéressée des riches d'empêcher les Canadiens d'avoir un système de santé gratuit et universel. Les produits pharmaceutiques font partie intégrante du système de santé. Un pays moderne a le devoir de garantir la santé de ses citoyens au moyen d'un système de santé gratuit et universel qui englobe tous les secteurs, y compris la recherche, la production, la distribution, l'éducation et la réalisation de sa valeur produite. Un peuple en santé est l'épine dorsale d'une économie socialisée moderne et de la société et du facteur humain essentiel à la production de tous les biens et services.

Parler du besoin de médicaments comme s'il s'agissait d'un « accident » nécessitant une assurance est un subterfuge délibéré visant à voler l'argent des Canadiens et de leur économie sans rien donner en retour. L'assurance privée ou publique pour la santé est une fraude qui mérite seulement d'être dénoncée et jetée à la poubelle de l'histoire.

L'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes (ACCAP), un cartel des oligopoles d'assurances privés les plus puissants, dit au sujet de l'assurance médicaments : « Un programme à payeur unique fera inutilement dépenser des milliards de dollars qui ne feront que perturber les régimes d'assurance santé dans les endroits de travail qui font déjà en sorte qu'un grand nombre de médicaments sur ordonnance sont plus abordables pour des millions de personnes[1]. »

Par sa déclaration, l'ACCAP fausse la réalité des cartels d'assurances qui siphonnent des milliards de dollars du peuple et de l'économie sans rien offrir en retour. Ils siphonnent toute valeur sociale, qui est soumise au contrôle privé d'un groupe toujours plus restreint d'individus. Les oligopoles privés de l'assurance appartiennent à une élite dirigeante qui domine et contrôle tous les aspects de la vie, y compris les médias de masse et les soi-disant institutions démocratiques. Une partie seulement de l'argent qu'ils arrachent aux travailleurs et aux compagnies par le biais d'ententes contractuelles pour des assurances médicaments est consacrée à l'achat de médicaments. La balance n'est pas retournée à l'industrie de la santé mais sert plutôt à payer les riches en profits d'assurances et les bureaucrates dont les compagnies d'assurances ont besoin pour fonctionner.

Dans un récent rapport, le Bureau du directeur parlementaire du budget dit que les dépenses en médicaments en ordonnance était de 36,6 milliards de dollars en 2021-2022, une augmentation de 28 % comparativement à 2015-2026. De ces dépenses, 40 %, ou 14,64 milliards de dollars, ont été payés par le biais des oligopoles d'assurances privés. Quarante-six pour cent, ou 16,836 milliards de dollars, ont été couverts par le biais de divers stratagèmes, dont les hospitalisations, et 14 %, ou 5,124 milliards de dollars, ont été payées à titre individuel. Soulignons que les Canadiens ont dépensé un autre 6,7 milliards en médicaments sans ordonnance, généralement sans couverture.

Le montant total que reçoivent les compagnies d'assurances en paiement brut pour des assurances médicaments sur ordonnance provenant des collectifs de travailleurs et de leurs employeurs, ou d'individus, doit être supérieur au montant qu'ils paient pour les médicaments. L'objectif des cartels d'assurances est le profit privé maximum aux dépens du peuple et de l'économie. Ce qui veut dire que la somme totale que les cartels reçoivent en primes d'assurances médicaments pour étancher leur soif de profit et payer leur bureaucratie doit être supérieure aux 14,64 milliards qu'ils ont payé en médicaments, sans quoi ils n'aient aucune raison d'être en affaires. Le montant additionnel qu'on leur verse au-delà des 14,64 milliards en primes d'assurances couvre le coût de production des services d'assurances, qui comprend le profit et un montant pour leur bureaucratie. Ce montant supplémentaire au-delà des 14,64 milliards versés en médicaments est gaspillé dans un service qui n'a tout simplement pas besoin d'exister et est contraire aux besoins du peuple et de l'histoire en soins de santé gratuits et universels.

Les paiements privés pour la santé ne sont pas limités aux produits pharmaceutiques. Les Canadiens paient pour un large éventail de services de santé, soit directement de leurs poches ou par le biais de régimes d'assurances privés parasitaires. L'Institut canadien d'information sur la santé rapporte que 29 % des dépenses totales en santé est payé par le biais de régimes ou directement des poches des usagers, tandis que le reste est payé publiquement par le biais d'agences gouvernementales. Le montant que les Canadiens paient pour diverses formes d'assurances privées dépasse nécessairement la portion des dépenses en santé payées par le biais de leurs régimes d'assurances collectifs ou individuels[2].

Les arguments de la riche élite contre les soins de santé gratuits et universels, y compris toutes les parties du corps et les produits pharmaceutiques de la naissance au trépas, sont des arguments intéressés et sont imprégnés de la corruption, du parasitisme et du déclin du système impérialiste. Un système de santé gratuit et universel répondant au niveau le plus élevé atteint par les forces productives est une revendication juste et nécessaire du peuple et de l'époque.

Notes

1. Compagnies membres de l'ACCAP : Les cinq compagnies d'assurances les plus importantes contrôlent 68 % de tous les régimes d'assurances privés collectifs et individuels. Les cinq compagnies d'assurances les plus importantes sont Manulife, Sun Life, RBC Insurance, Great-West Lifeco et Desjardins.

2. Un total de 55,9 milliards a été recueilli en primes par des assureurs en santé privés en 2022.

Les 12 milliards supplémentaires du montant remboursé en dépenses en santé ont été versés aux assureurs privés en profits et pour payer leur bureaucratie.

Quarante-quatre pour cent des remboursements versés par les compagnies d'assurances privées est pour les médicaments.

En 2022, 27 millions de Canadiens avaient une assurance santé supplémentaire privée, i.e. 67,8 % de la population, pour qui une partie des dépenses en santé ont été payés, en fonction de leur couverture. Les régimes collectifs représentent 90 % du total des régimes individuels de l'autre 10 %.


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Volume 54 Numéro 2 - 23 mars 2024

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