Des mesures qui renforcent les pouvoirs de police sur le corps politique
L'« approche pangouvernementale » à la menace posée par les « États ennemis et hostiles »
Les forces de l'OTAN dirigées par les États-Unis et les services de renseignement du Groupe des cinq (États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande) affirment que la sécurité nationale et la démocratie canadiennes sont menacées par ce qu'ils appellent des « États ennemis et hostiles », aujourd'hui identifiés principalement comme étant la Chine, la Russie et l'Iran. Cette menace, selon eux, nécessite le développement de ce que l'on appelle une approche « pangouvernementale » pour lutter contre l'ingérence étrangère dans le processus électoral et politique du Canada. Elle a donné lieu, au fil du temps, à un ordre du jour belliciste et, au nom des valeurs canadiennes, à une attaque contre le droit de conscience, la liberté d'expression, d'organisation et de réunion et d'autres libertés civiles qui sont rapidement en train de devenir chose du passé.
En plus d'affecter toute la vie et de détruire le tissu de la société, sa cohésion basée sur l'état de droit, cela affecte le processus électoral lui-même, considéré comme la pierre angulaire de la démocratie parce qu'il est conçu pour donner aux institutions démocratiques une légitimité et former l'opinion publique à accepter leur autorité sur le processus de prise de décision. L'« approche pangouvernementale » envers ce que l'on appelle « l'ingérence étrangère d'États ennemis et hostiles » touche à la fois la surveillance des élections et les modifications proposées à la loi électorale.
Gardons à l'esprit que la surveillance des élections, des candidats et des mouvements politiques du peuple et les interventions par la police politique (les différentes agences de renseignement et de sécurité, y compris celles provenant des États-Unis) ne sont pas nouvelles. En 1972, par exemple, les médias ont publié un reportage sensationnaliste citant un « informateur de la GRC » qui laissait entendre que les candidats du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) se présentaient aux élections « incognito ». L'informateur voulait « dévoiler » l'affiliation politique des candidats du PCC(M-L). C'était peu de temps après l'entrée en vigueur du régime d'enregistrement des partis et le PCC(M-L) n'était pas encore enregistré. Lors des élections de mai 1979, le surintendant de la GRC a annoncé que les noms des candidats seraient vérifiés dans les dossiers de la GRC pour déceler des antécédents d'« activités subversives » et que si des « subversifs » étaient découverts, leur candidature serait ajoutée à leur dossier. La GRC a déclaré qu'elle voulait s'assurer qu'il n'y avait pas d'« espions ou d'ennemis de l'État » parmi les candidats.
La boucle est désormais bouclée en ce qui concerne les méthodes utilisées par l'élite dirigeante dans sa tentative désespérée de contrôler le corps politique.
Comme l'a souligné le PCC(M-L), lorsque nous parlons de gouvernements de pouvoirs de police, nous ne nous référons pas seulement aux aspects qui constituent l'usurpation de pouvoirs par des intérêts privés étroits par l'intermédiaire de l'intervention ministérielle dans les affaires liées aux luttes et aux grève des travailleurs et du peuple lorsque les objectifs de l'État s'y opposent. Notre principale préoccupation est la façon dont les pouvoirs de police détruisent l'opinion publique, c'est-à-dire les institutions politiques et la légitimité des lois adoptées par des assemblées législatives dûment élues, ainsi que l'application régulière de la loi et des initiatives organisées des collectifs sur toutes les questions qui les préoccupent.
Les pouvoirs de police sont par définition des prérogatives arbitraires. C'est en partie pourquoi la société civile a été créée: pour les encadrer avec des lois afin que les chefs d'État et ceux qui exercent les pouvoirs exécutifs ne puissent pas agir en toute impunité. L'état de droit renvoie à la prise de décision dans les assemblées législatives composées de personnes élues pour représenter les électeurs des circonscriptions électorales qui répartissent également la population qui est censée être représentée par son représentant élu. Si le système électoral n'est pas perçu comme impliquant de manière crédible les citoyens dans le choix et l'élection de leurs représentants dans le cadre d'un processus considéré comme libre et équitable, que reste-t-il si ce n'est un système qui sert des intérêts privés étroits. Les partis cartellisés ont usurpé le processus de sélection et d'élection pour obtenir des résultats exigés et décidés par les intérêts privés étroits. Aujourd'hui, au lieu de s'attaquer à ce grave problème, la police politique intervient directement dans le processus électoral sur une base antidémocratique des plus scandaleuses. Elle accuse des « acteurs étrangers » et exige que l'État puisse contrôler les membres des partis, les décisions et les dossiers des partis et intervenir dans les campagnes électorales au nom du contrôle de la propagande haineuse et des « intérêts étrangers ».
Une fois que les gouvernements des pouvoirs de police et de l'impunité ont pris le pouvoir, le peuple devient dispensable non seulement dans l'économie mais aussi dans la politique elle-même. D'où l'importance de l'action du PCC(M-L) pour le renouvellement du processus politique en impliquant le corps politique dans la discussion. C'est lorsque des personnes de tous horizons sont organisées pour s'exprimer parmi leurs pairs, en leur propre nom, sans crainte de récriminations, que la liberté d'expression s'exprime sous la forme d'actions qui ouvrent la voie au progrès. La liberté d'expression n'est pas seulement un droit civil, c'est un droit humain. C'est l'antidote à la prise de contrôle du Canada par les pouvoirs de police et aux destructions qu'ils causent chez nous et à l'étranger.
L'ingérence de la police politique dans le
processus
démocratique au nom de sa défense
L'élite dirigeante travaille sans relâche pour accuser l'ingérence étrangère dans le processus démocratique afin de détourner l'attention du mécontentement, de la méfiance et de l'opposition de plus en plus profonds de la population envers le système dominé par les partis appelé démocratie. C'est un phénomène que le gouvernement actuel alimente de plus en plus, à mesure que le fossé entre les préoccupations et les problèmes du peuple et ceux de l'élite dirigeante se creuse. Les gouvernements précédents, tant libéraux que conservateurs, ont fait de même. L'absence de pouvoir du peuple pour faire face aux problèmes qui frappent la société est plus évidente que jamais.
L'impunité et l'arbitraire prolifèrent de nos jours. À titre d'exemple, le budget libéral de mars 2023, soutenu par les partis cartellisés, inclut un amendement à la Loi électorale du Canada pour établir « une approche fédérale uniforme en ce qui a trait à la collecte, à l'utilisation et à la communication de renseignements personnels par les partis politiques fédéraux, et ce, d'une manière qui remplace les lois provinciales qui se chevauchent ». Ce n'est pas seulement arbitraire parce que le budget est utilisé pour modifier la Loi électorale, mais également parce que les libéraux, les conservateurs et les néo-démocrates sont en fait au coeur d'un conflit juridique avec le commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique qui soutient que lorsque les partis fédéraux exercent leurs activités en Colombie-Britannique, ils sont soumis aux lois provinciales sur la protection de la vie privée, qui sont plus strictes lorsqu'il s'agit de l'utilisation des données des électeurs par les partis politiques.
Il s'agit donc d'un problème fondamental de relations entre le pouvoir et les lois fédérales et ceux des provinces, car les dispositions constitutionnelles ne sont plus adaptées aux préoccupations actuelles. Au lieu de laisser la bataille juridique se dérouler, les partis cartellisés jugent nécessaire de changer tout simplement la loi fédérale au moyen d'une modification à la Loi électorale du Canada cachée dans les plus de 700 pages du budget 2023.
À l'heure actuelle, selon la loi fédérale, les partis politiques ne sont même pas soumis aux lois sur la protection de la vie privée du pays. Ils sont libres d'utiliser les données des électeurs de la manière la plus intéressée sans consentement.
Ce qui est nouveau à propos de la police politique et des élections, c'est leur intégration ouverte et affichée dans le fonctionnement des institutions politiques. Cela rend obsolètes bon nombre des principes de la démocratie libérale et des débats sur le rôle de la police dans une société démocratique. Les préoccupations antérieures concernant le rôle de la police dans le gouvernement, la manière dont la police devrait être contrôlée, etc., sont remplacées par l'acceptation ouverte de la police politique dans nos vies au nom de la protection de la sécurité nationale. Le débat sur l'orientation politique fournie par la police politique et la séparation des pouvoirs de l'État devient une absurdité lorsque 1) le peuple ne joue aucun rôle dans la définition de l'orientation de l'économie, de la politique et de tout le reste, et 2) la distinction entre les policiers de rue et la police politique est confondue et la police politique est intégrée dans les organes de gouvernement, y compris l'organe qui est censé être l'administrateur impartial de ce que l'on appelle des élections libres et équitables. La norme antérieure selon laquelle les organes législatifs adoptent les lois que la police et les ministres sont ensuite censés appliquer en toute neutralité, sans ingérence politique, est ainsi balayée d'un revers de main.
Désormais, au nom d'une « approche pangouvernementale », la police politique est ouvertement impliquée dans la surveillance des élections. L'expression « approche pangouvernementale » a été introduite pendant la pandémie lorsque les gouvernements se sont arrogé des pouvoirs de décision au-dessus de l'état de droit en déclarant que les circonstances étaient exceptionnelles. Ces états d'exception sont maintenant devenus permanents malgré les décisions de tribunaux qui les ont déclarés inconstitutionnels et les montants des pénalités que le gouvernement est sommé de payer pour avoir transgressé les droits fondamentaux des personnes.
Les élections fédérales de 2019 ont été les premières où cette « approche pangouvernementale » s'est manifestée. Au début de 2019, Élections Canada a informé de ses préparatifs pour l'élection et que « renforcer l'intégrité du processus électoral » était l'un des domaines d'intérêt. Il a parlé d'un « environnement en évolution » auquel il devait répondre et dans lequel « Les experts [lire la police politique] continuent de cibler les menaces pour la démocratie canadienne, qu'il s'agisse d'ingérence étrangère, de cyberattaques ou de tentatives de désinformation. Élections Canada porte une attention particulière à ces menaces. »
Mais Élections Canada n'est pas habilité par la loi à traiter de telles questions. Il a souligné que son seul rôle est de veiller à ce que les Canadiens puissent exercer leur droit de s'inscrire sur les listes électorales, de voter ou de se porter candidat. Il a déclaré qu'il n'avait pas la responsabilité de « réglementer l'Internet ou les médias sociaux; de policer la vérité dans la publicité politique; de corriger les informations inexactes ou trompeuses liées aux plates-formes ou aux politiques des partis politiques ». Il a dressé la liste des corps policiers qui surveilleraient les élections sur des questions qui ne relèvent pas de son autorité : il s'agit notamment du conseiller à la sécurité nationale du Canada (conseiller du Cabinet/Conseil privé), du Centre de la sécurité des télécommunications (CST) et de son sous-groupe appelé Centre canadien de cybersécurité (CCCS), du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), de la Gendarmerie royale du Canada et de Sécurité publique Canada.
Le diktat de la police politique selon lequel le programme d'ingérence étrangère des États-Unis doit être repris est évident chaque fois que l'expression est utilisée. Pour la deuxième fois depuis que toutes les discussions sur l'ingérence étrangère ont commencé en 2015-16, lors du Comité consultatif des partis politiques (CCPP) de cette année, qui s'est tenu en septembre, des représentants du SCRS et du CST ont assisté à l'AGA pour informer les participants. Le SCRS était représenté par le « coordinateur de la lutte contre l'ingérence étrangère ». Le CST était représenté par une personne du Bureau du Conseil privé, qui abrite le ministère des Institutions démocratiques, dont le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, est responsable, qui a présenté au nom du CST la subdivision du CCCS.
Les informations présentées aux partis enregistrés n'ont rien ajouté aux informations précédemment publiées dans les rapports désormais annuels sur l'ingérence étrangère remis au Parlement qui ont répété la même chose : « Par leurs activités, des acteurs malveillants étrangers, qu'il s'agisse d'États étrangers ou d'organisations non étatiques, s'attaquent au processus démocratique au Canada. » L'objectif de ces acteurs étrangers serait de semer la méfiance à l'égard de nos institutions, d'amplifier les divisions dans la société, etc. Rien n'est dit sur les actions des gouvernements et des partis cartellisés eux-mêmes qui discréditent les institutions démocratiques libérales.
Le seul ajout à ces informations présentées actuellement concerne l'intelligence artificielle (IA). À titre d'information, le Conseil privé a informé que : « La désinformation en ligne est désormais omniprésente dans toutes les élections nationales au niveau mondial et l'IA générative est de plus en plus utilisée pour influencer les élections. »
Il est totalement ridicule d'attribuer l'utilisation de l'IA à une ingérence étrangère qui met en danger la démocratie canadienne, étant donné qu'elle est utilisée par des agences de marketing dans le monde entier, y compris celles embauchées par les partis cartellisés pour organiser des élections.
Malgré le caractère obscur de l'information que le SCRS fournit, il prétend que seuls les détenteurs d'une cote de sécurité élevée peuvent avoir accès aux informations qui « ne sont pas publiques », qui « ne sont pas déclassifiées », etc. En plus de donner l'impression que seules les personnes bénéficiant de privilèges peuvent avoir accès aux secrets d'État, il faut remarquer qu'il s'agit des mêmes « informations » qui sont constamment « divulguées » par les médias traditionnels et par des journalistes désireux de faire éclater des scandales et non d'informer le public sur les sujets de préoccupation, sur la manière dont ils se posent, sur ce qui est pertinent et sur ce qui ne l'est pas, etc. La nouvelle normalité consiste désormais à répéter les « fuites médiatiques » de la police selon lesquelles des candidats ont reçu subrepticement de l'argent de la Chine, à créer une confusion totale sur les enjeux et à cibler les citoyens et les résidents des soi-disant États ennemis. Le Parti marxiste-léniniste a fait remarquer que si tel est le cas, pourquoi le SCRS n'a-t-il pas transmis ces informations à la GRC, ou ne les a-t-il pas signalées au commissaire aux élections, l'organisme auquel de telles choses devraient être signalées. On sait déjà que le commissaire aux élections n'a pas reçu de tels renseignements.
Pas la moindre preuve ou information factuelle n'a été présentée sur l'ingérence étrangère, que ce soit lors des présentations faites par la police politique devant les commissions parlementaires ou dans les nombreux reportages des médias basés sur les « fuites policières ». Dans le cas du député Michael Chong, qui aurait été la cible d'une ingérence étrangère, Michael Chong lui-même s'est plaint de ne pas avoir été informé plus tôt du fait qu'il était visé. Mais aucune preuve de l'existence d'un tel financement n'a été apportée.
Un exemple de cette situation grotesque est la déclaration du représentant du Centre canadien pour la cybersécurité, qui a déclaré qu'il existait plusieurs documents du gouvernement du Canada décrivant les faits, en particulier le rapport Analyse des élections en Alberta en 2019. Ces personnes ne doivent même pas avoir lu leurs propres rapports, car l'analyse des élections en Alberta de 2019, qui était censée être préparée à l'appui du Mécanisme de réponse rapide du G7 (MRR) afin de surveiller les élections fédérales de 2019, a révélé qu'il n'y avait pas eu d'ingérence étrangère dans l'élection de l'Alberta, même s'il avait été prédit qu'il y en aurait eu en raison du facteur pétrolier dans cette province. Le rapport fait état de ce qui suit : « Les élections en Alberta sont un exemple de situation où il pourrait y avoir des éléments de preuve d'un comportement non authentique coordonné de la part d'acteurs canadiens, ce qui rend plus difficile la détection de l'ingérence étrangère. »
L'une des questions posées par les libéraux est de savoir s'il existe un moyen de supprimer les fausses informations ou les publicités malveillantes des réseaux sociaux. Il leur a été répondu que c'était pratiquement impossible, mais que les partis devraient faire appel à la police pour sécuriser leurs ordinateurs.
La réponse habituelle de la police politique à toute question importante est de dire : « Nous ne commentons pas les enquêtes en cours et les méthodes opérationnelles. Toutes nos enquêtes sont menées dans le cadre de la loi. »
À la question de savoir comment les gens peuvent distinguer le vrai du faux et ce que fait le SCRS pour y parvenir, le SCRS a répondu qu'il cherchait à détecter la désinformation dans le cadre de ses enquêtes et en prenant des mesures de réduction de la menace, et a répété que : « Nous ne commentons pas les enquêtes en cours et les méthodes opérationnelles. Toutes nos enquêtes sont menées dans le cadre de la loi. »
Élections Canada souligne de façon convaincante que le plus important est que les partis politiques eux-mêmes offrent un endroit où les gens peuvent obtenir les vraies informations. C'est le meilleur moyen de contrer les fausses nouvelles. Le rapport officiel d'Élections Canada au Parlement recommande : « Pour assurer un niveau accru de transparence et contrer le financement étranger des tiers, ajouter à la Loi une disposition selon laquelle les tiers (particuliers exclus) qui souhaitent utiliser leurs propres fonds pour financer des activités électorales réglementées doivent présenter à Élections Canada des états financiers audités attestant qu'un maximum de 10 % de leurs recettes des années précédentes provient de contributions. »
Bien sûr, aucune de ces recommandations ne traite du problème auquel le peuple est confronté, à savoir les partis cartellisés qui se targuent de gagner les élections sur la base de la désinformation des agences de marketing engagées précisément dans ce but. Plus important encore, la prise de contrôle du pouvoir politique par une police politique au service d'intérêts étrangers se poursuit à un rythme soutenu.
C'est un sujet de grave préoccupation.
Cet article est paru dans
Volume 54 Numéro 1-2 - Janvier-Février 2024
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