Numéro 3

Mars 2023

Budget fédéral 2023

Seul le peuple peut apporter des solutions aux problèmes
auxquels il est confronté

Une intégration accélérée aux plans de guerre des États-Unis

Le budget augmente le financement de la police pour s'ingérer dans les affaires du corps politique du Canada et les affaires intérieures d'autres pays

– Anna Di Carlo –

La crise prend de l'ampleur

– K.C. Adams –

Le président de guerre des États-Unis n'est pas le bienvenu au Canada

Proclamer de grands idéaux pour cacher que
les États-Unis exigent que le Canada se soumette à leur ordre du jour de domination mondiale

- Barbara Biley -

Les participants aux actions militantes déclarent « Non à l'agression et à la guerre menées par les États-Unis – Biden, go home ! »

Le Canada donne suite aux engagements pris envers les États-Unis lors du Sommet des leaders nord-américains

Les opérations des États-Unis dans l'Arctique canadien consolidées lors de la visite de Biden

L'urgente nécessité de défendre les droits des migrants et des réfugiés

Manifestation à Montréal contre la décision du Canada et des États-Unis de bloquer davantage la « migration irrégulière »

Le Syndicat canadien de la fonction publique condamne la fermeture du poste frontalier du chemin Roxham

Faits concernant la « migration irrégulière » mis en contexte

- Diane Johnston -

Gendarmerie royale du Canada, hors des terres des Wet'suwet'en!

Opposons-nous à la violence de l'État au service d'intérêts privés contre les Wet'suwet'en

Déclaration de l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique

Visite du Rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones



Budget fédéral 2023

Seul le peuple peut apporter des solutions aux problèmes auxquels il est confronté

Le budget fédéral 2023 du gouvernement Trudeau, déposé le 28 mars par la ministre des Finances Chrystia Freeland, montre le refus des gouvernements de s'attaquer aux problèmes tels qu'ils existent. Le gouvernement canadien choisit plutôt de distribuer de l'argent à de puissants intérêts privés et de jetter de la poudre aux yeux des gens avec divers des paiements en argent.

Les gouvernements du Canada ont pris l'habitude de verser des allocations à des individus en guise de paiement pour les difficultés qui leur sont faites, plutôt que de s'attaquer aux problèmes en augmentant les investissements dans les programmes sociaux. Le gouvernement de l'Ontario a versé une petite somme aux familles ayant des étudiants pendant la pandémie, sous prétexte d'aider à surmonter les problèmes liés à l'éducation sur Internet. Le gouvernement du Québec accorde une baisse d'impôt sur le revenu d'environ 300 $ aux personnes ayant un revenu imposable moyen. Avec le budget 2023, le gouvernement fédéral met en place un « rabais d'épicerie » qui vient s'ajouter au remboursement de la TPS de cette année, soit 467 dollars pour les familles, 234 dollars pour les personnes seules et jusqu'à 255 dollars pour les personnes âgées.

Ce remboursement supplémentaire de la TPS ne règle en rien le problème de l'inflation des prix des produits alimentaires ou de tout autre bien de première nécessité. Comme l'a dit une femme à CBC : « Mon mari et moi sommes des travailleurs à faible revenu avec deux enfants. Les prix de la nourriture et de presque tout ce dont nous avons besoin pour vivre augmentent, ce qui rend la vie très difficile. Le remboursement pour l'épicerie représente moins de deux semaines d'épicerie pour notre famille. Qu'allons-nous faire le reste de l'année ? »

Les allocations individuelles sont l'aveu des gouvernements qu'ils n'ont pas de solutions aux problèmes auxquels sont confrontés les Canadiens, l'économie et la société. Les gouvernements ne sont pas disposés à s'engager dans une nouvelle direction qui remette en cause les intérêts privés mondiaux parce que ces intérêts privés ont pris le contrôle des gouvernements.

La preuve de la mainmise des intérêts privés sur les gouvernements est illustrée concrètement par l'élément le plus important du budget fédéral : 80 milliards de dollars de subventions aux grandes entreprises et à leurs sociétés privées pour qu'elles investissent comme elles l'entendent dans « l'électricité à faible teneur en carbone, la fabrication et d'autres éléments d'une économie propre ». Les entreprises privées pourront utiliser comme elles l'entendent les fonds publics fédéraux, qui représentent jusqu'à 40 % des dépenses du gouvernement fédéral. Pour reprendre les termes du budget, « l'approche n'a pas pour objectif de substituer le gouvernement au secteur privé ni de supplanter la prise de décision fondée sur le marché ». Bref, c'est nous qui payons mais c'est « le marché » qui décide. Il ne se passe pas une semaine sans que des représentants du gouvernement n'annoncent, sous une forme ou une autre, des subventions aux entreprises privées.

Le budget fédéral prouve une fois de plus que nous ne pouvons pas compter sur les dieux de la peste pour des solutions aux problèmes auxquels les Canadiens, l'économie et la société sont confrontés. Les gens se rendent compte qu'aucun progrès ne peut être réalisé sans s'opposer courageusement et fermement aux intérêts privés mondiaux qui sont maintenant aux commandes et qui font la loi. L'élite dirigeante refuse de s'attaquer aux problèmes sociaux, économiques et politiques ou même d'envisager une nouvelle voie parce que cela porterait atteinte à son droit de monopole de servir ses intérêts privés étroits avant tout. Elle est prisonnière de ces intérêts privés et ne peut se libérer de l'étroitesse de leur but, de leur pensée et de leur conception.

Des solutions peuvent être trouvées en nous organisant pour défendre les droits de toutes et de tous, pour une direction prosociale de l'économie et pour le renouveau démocratique des affaires politiques.

Les travailleurs trouvent la voie vers l'avant en s'engageant dans des actions organisées avec analyse pour réclamer ce qui leur appartient de droit. Ils sont les producteurs de tout ce dont eux et la société ont besoin.

La clé est de se débarrasser de la dépendance envers l'élite dirigeante et ses institutions et la croyance dépassée qu'elles feront les choses en faveur du peuple. Elles ne le feront jamais ! Le peuple doit assumer la responsabilité sur toutes les questions qui affectent sa vie. Tous ensemble pour une nouvelle direction ! Cela peut être fait ! Cela doit être fait !

À qui l'économie ? Qui décide ? C'est notre économie et c'est nous qui décidons !
Sous le contrôle de qui ? Sous notre contrôle !

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Une intégration accélérée aux plans
de guerre des États-Unis

L'utilisation de l'expression « Pour le Canada » pour décrire le budget fédéral de 2023 aura fait sourciller beaucoup d'observateurs, car en effet, pourquoi le budget ne serait-il pas « Pour le Canada » ? L'expression est clairement utilisée pour cacher quelque chose, et ce quelque chose, c'est la nature véritable des plans de l'élite dirigeante du Canada qui suivent une stratégie de destruction nationale et d'intégration accélérée à l'économie de guerre des États-Unis.

La fraude apparaît dans l'analogie donnée au chapitre du budget traitant du « Plan pour le Canada », où l'intégration du Canada à la sécurité énergétique et minérale des États-Unis est comparée au chemin de fer transcontinental sur lequel le Canada a été construit. « La course à la construction d'une économie mondiale propre est déjà en cours, lit-on dans le budget, et un nouveau projet national nous attend : construire la version de notre génération du chemin de fer transcontinental, qui protégera notre environnement, fera croître notre économie et fera en sorte que chaque Canadienne et chaque Canadien puisse profiter de la prospérité que nous créerons ensemble. »

Le « nouveau projet national » est basé sur les plans stratégiques des États-Unis annoncés en août 2022 avec l'adoption de la Inflation Reduction Act. Il est une réponse à la demande américaine. Le plan américain demande en fait au Canada de consolider son statut d'arrière-cour sûre des États-Unis dans leur tentative de s'affranchir de leur dépendance à l'égard de la Chine pour les mineraux essentiels. Avec ce budget, le Canada annonce qu'il fournira aux entreprises privées 80 milliards de dollars en allégements fiscaux et autres mesures pour répondre à l'obligation du Canada envers le plan américain.

Le rôle du Canada est « de devenir une superpuissance en électricité propre, dotée d'un réseau électrique pancanadien plus abordable, plus durable et plus sécuritaire ». Il doit également fournir les minéraux essentiels : « Qu'il s'agisse de la main-d'oeuvre du secteur des ressources qui extrait des minéraux critiques ou fournit de l'énergie propre au monde entier, des ingénieures et ingénieurs qui conçoivent des batteries de nouvelle génération ou des travailleuses et des travailleurs de l'automobile qui assemblent les véhicules électriques que les gens veulent acheter, nous pouvons nous assurer que les Canadiens produisent les biens et les ressources dont le Canada et ses alliés auront besoin pour les générations à venir. »

Cette orientation du budget est d'ailleurs mise en évidence par une référence spécifique à la demande américaine d'orienter les stratégies nationales en fonction de l'« amilocalisation », qui fait partie de la réponse des États-Unis à la crise à laquelle est confronté l'« ordre international fondé sur des règles ». La solution consiste à diviser le monde entre « amis et ennemis » et à cibler par l'agression et les sanctions les pays qui ne se soumettent pas à l'hégémonie américaine, faisant du Canada le complice d'une escalade très dangereuse de l'hystérie guerrière. Le budget considère que cela « représente une importante occasion économique pour le Canada et pour la main-d'oeuvre canadienne » car « le Canada peut profiter de nombreux avantages en devenant un fournisseur fiable de biens essentiels pour ses alliés démocratiques ».

C'est tout sauf un projet d'édification nationale canadien. Le budget met au défi les mouvements de la classe ouvrière au Canada et aux États-Unis de s'opposer à la machine de guerre américaine et, au Canada, de s'opposer à l'intégration dans cette machine de guerre au nom de grands idéaux. Dans une entrevue avec Empower Yourself Now sur les défis auxquels font face les travailleurs canadiens en ce moment, Pierre Chénier, secrétaire du Centre ouvrier du PCC(M-L), a souligné : « Au nom de bons emplois syndiqués et d'une économie verte, on dit aux travailleurs canadiens d'appuyer les plans de l'administration Biden aux États-Unis. Le gouvernement Trudeau a approuvé les plans du Pentagone de cibler la Chine et il agit de concert avec les agences de renseignement qui font la promotion de ces plans. Selon eux, la Chine et la Russie sont les ennemis et le Canada est en sécurité dans l'équation États-Unis/OTAN/NORAD.

« Les Canadiens veulent que le Canada soit une zone de paix. Ils veulent que le Canada respecte l'état de droit international, et non l'ordre américain fondé sur des règles, qui permet de commettre des crimes contre l'humanité au nom d'idéaux élevés. »

Pierre a donné l'exemple des positions chauvines imposées aux travailleurs industriels canadiens, aux mineurs, aux travailleurs des chemins de fer et des transports, entre autres. Il a dit :

« Le 28 mars, en prévision du budget fédéral et de ses subventions aux riches au nom des emplois verts et de la transition écologique, le dirigeant national du Syndicat des Métallos a tenu des propos scandaleux que tous les travailleurs devraient rejeter parce qu'ils ne constituent pas une voie d'avenir pour les travailleurs américains ou canadiens. »

Dans un communiqué de presse du syndicat, le président des Métallos a dit :

« Avec sa Loi sur la réduction de l'inflation, le président Biden s'est engagé à consacrer des centaines de milliards de dollars à la lutte contre le changement climatique, à l'investissement dans les infrastructures et à la création explicite de bons emplois syndiqués. Il sait bien que les travailleurs canadiens, l'extraction et la transformation de nos ressources et les produits que nous fabriquons sont essentiels pour atteindre ses objectifs climatiques et économiques. Le premier ministre et les membres de son cabinet ont affirmé aux travailleurs qu'ils comprenaient cela aussi. Ce budget est l'occasion pour eux de tenir leurs promesses. »

Le communiqué de presse ajoute : « Tout comme l'aluminium, l'acier, le ciment et le bois canadiens, des minéraux critiques, notamment le nickel, le charbon sidérurgique, le cobalt, le cuivre, le lithium, l'indium et le tellure, sont extraits et produits au Canada avec des impacts carbone nettement moins importants et par des travailleurs souvent soutenus par de bons emplois syndiqués.

« En plus de demander une amélioration de l'accès à l'assurance-emploi et des investissements pour développer les soins de santé, y compris les soins dentaires et l'assurance-médicaments, [le président du syndicat] a souligné que les investissements pour un plan d'emplois durables et l'engagement à mettre en valeur les produits à plus faible teneur en carbone du Canada sont essentiels si le gouvernement veut vraiment soutenir les travailleurs canadiens et obtenir davantage d'exemptions aux règles américaines ‘Buy America'. »

Le président des Métallos a poursuivi : « De la promesse d'une loi anti-scabs à l'investissement dans ce qui a été appelé la ‘transition juste', ce gouvernement a beaucoup parlé de soutenir les travailleurs canadiens, mais le président Biden nous a montré à quoi ressemble une action réelle.

« Pour s'assurer que les emplois syndiqués de haute qualité qui soutiennent les familles restent au Canada et que nos deux pays atteignent les objectifs d'une économie à faible émission de carbone, les travailleurs ont besoin que le gouvernement du Canada saisisse cette occasion pour mériter notre place en tant que partenaire dans les plans du président Biden. » [Notre souligné]

Pierre a également souligné ce que la présidente d'Unifor a dit lorsqu'elle est intervenue au congrès des Travailleurs unis de l'automobile aux États-Unis le 27 mars :

« La semaine dernière, j'ai assisté à un dîner officiel pour accueillir votre président, Joe Biden, au Canada. Moi et quelques centaines d'autres Canadiens.

« Le président Biden n'a pas seulement apporté un message d'opportunités partagées et d'unité, il a aussi apporté un message de solidarité. Je ne pense pas que le mot ‘syndicat' ait été mentionné autant de fois, d'une manière aussi positive, dans l'histoire de notre Chambre des communes. Cela m'a remplie de fierté....

« Je dirai que, de notre point de vue, ce que font les États-Unis – et l'administration Biden en particulier – en matière de politique économique et industrielle est tout à fait impressionnant. Je n'ai jamais vu un gouvernement, quel qu'il soit, faire preuve d'autant d'ambition pour rapatrier des produits manufacturés essentiels, investir dans les chaînes de valeur nationales et promouvoir les technologies propres.

« Si c'est la course pour l'économie que les États-Unis ont entamée, c'est une très bonne course. Et c'est une course que le Canada et les États-Unis, comme la plupart des choses, gagneront en tant que colistiers. Une course qui sera gagnée en garantissant de bons emplois, avec des conventions collectives, pour tous. [Notre souligné]

« Une course qui sera définie par ses politiques centrées sur les travailleurs en ce qui concerne les rabais accordés aux consommateurs de véhicules électriques.

« Nos membres ont été incroyablement soulagés de voir que la loi sur la réduction de l'inflation prévoyait une exception pour le Canada », a-t-elle déclaré. [Notre souligné]

Pierre a condamné cet éloge du Canada en tant que « partenaire des plans du président Biden », le Canada cherchant à « être intégré » dans la Loi sur la réduction de l'inflation, « le Canada en tant que compagnon » des États-Unis dans leur « très, très bonne » « course pour l'économie ».

« Voici un défi lancé aux travailleurs », a dit Pierre Chénier. « Le défi consiste à réfuter l'esprit de politique d'apaisement des États-Unis, qui ne résout pas la crise généralisée dans laquelle ils sont embourbés et qui s'aggrave à grands pas, et à intensifier leur lutte pour une économie qui réponde aux besoins du peuple, qui soit contrôlée par le peuple et qui contribue à la coopération entre les peuples. »

« La menace est évidente dans ces discours, car on dit aux travailleurs que si le Canada n'est pas un partenaire dans les plans de Joe Biden, leurs emplois et leurs syndicats sont finis. Pourquoi ne pas discuter de ce qui arrive aux syndicats, aux emplois et aux travailleurs dans le cadre de ces plans et de la manière de résoudre efficacement les problèmes auxquels nous sommes confrontés au Canada et auxquels sont confrontés les travailleurs aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en France, en Grèce et dans d'autres pays en raison de l'offensive antisociale néolibérale, de l'anarchie et de la violence qui règnent en conséquence du conflit entre l'Autorité et les Conditions ?

« Seuls les travailleurs eux-mêmes devraient être autorisés à parler en leur nom », a conclu le secrétaire du Centre ouvrier.

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Le budget augmente le financement de la police pour s'ingérer dans les affaires du corps politique du Canada et les affaires intérieures d'autres pays

– Anna Di Carlo –

Le budget 2023 du gouvernement libéral indique notamment que le gouvernement prend « des mesures décisives pour défendre le Canada et ses institutions publiques contre les menaces et les ingérences étrangères ». Il annonce des plans pour dépenser 65 millions de dollars supplémentaires pour soi-disant « protéger la population canadienne et les diasporas contre l'ingérence étrangère, les menaces et les activités secrètes ».

La GRC recevra 48,9 millions de dollars sur trois ans « pour protéger les Canadiens contre le harcèlement et l'intimidation, augmenter sa capacité d'enquête et s'engager de manière plus proactive avec les communautés qui sont plus à risque d'être ciblées ». Il s'agit là d'une mesure étrange puisque, à l'heure actuelle, les reportages des médias indiquent que ce sont les préjugés de la police qui sont à l'origine du harcèlement des « diasporas ».

Un bureau national de lutte contre l'ingérence étrangère doit également être créé avec un financement de 3,1 millions de dollars par année et un fonds de démarrage sur cinq ans de 13,5 millions de dollars.

Selon le message véhiculé par le budget : « Les atouts du Canada, à titre d'économie de pointe et de démocratie ouverte et diversifiée, en font une cible pour les États hostiles qui cherchent à acquérir de l'information et de la technologie, du renseignement et de l'influence pour défendre leurs propres intérêts. Il peut s'agir d'acteurs étrangers qui cherchent à voler de l'information auprès d'entreprises canadiennes au bénéfice de leurs industries nationales, de mandataires hostiles qui intimident les diasporas au Canada en raison de leurs croyances et de leurs valeurs, ou d'agents du renseignement qui cherchent à infiltrer les institutions publiques et de recherche du Canada.

« Les dictatures, comme la Russie, la Chine et l'Iran, pensent qu'elles peuvent agir en toute impunité et s'ingérer dans les affaires des démocraties – et les démocraties doivent prendre les mesures nécessaires pour se défendre. Personne au Canada ne devrait jamais être menacé par des acteurs étrangers, et les entreprises et institutions publiques canadiennes doivent être exemptes d'ingérence étrangère. »

Il faut garder à l'esprit que, jusqu'à présent, toutes les allégations ont été faites par la police directement par les médias. Cela montre que les institutions démocratiques qui sont tant vantées ne fonctionnent pas parce que les forces de police existent en dehors d'elles. À qui rendent-elles des comptes ? Qui les autorise ?

Décrire le processus électoral et politique du Canada comme une « démocratie diversifiée » introduit un nouveau qualificatif qui reflète la conception coloniale britannique raciste ancrée dans la conscience de l'élite dirigeante canadienne. Ce n'est pas un hasard si elle coïncide avec la personnalité que le nouveau roi du Canada tente de se donner en affirmant qu'il épousera les valeurs de toutes les religions et de tous les peuples qui composent ses îles britanniques ainsi que son prétendu empire.

Parler des membres du corps politique du Canada, qu'ils soient nés citoyens ou naturalisés, comme des membres des diasporas et en faire un descripteur de la « démocratie », c'est mélanger et confondre les questions liées à l'héritage national d'un individu avec les questions relatives aux droits de citoyenneté et à la participation aux affaires électorales et politiques. Tous les citoyens, quelle que soit leur origine nationale, sont égaux au sein d'un corps politique digne de s'appeler démocratie. Ce n'est pas le cas au Canada où la Constitution a établi une structure qui consacre l'inégalité, basée sur l'existence d'une classe de gouvernants et d'une classe de gouvernés, où les gouvernants se voient accorder des pouvoirs et des privilèges et le peuple est privé de tout pouvoir de décision.

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La crise prend de l'ampleur

– K.C. Adams –



Dans son allocution sur le budget le 28 mars, la vice-première ministre et ministre des Finances Chrystia Freeland a déclaré : «L'année dernière, le Canada a enregistré la plus forte croissance économique parmi les pays du G7.» Elle a blâmé «Poutine et la pandémie» qui «ont fait grimper l'inflation dans le monde entier». «Les banques centrales ont réagi en lançant l'un des cycles de resserrement monétaire les plus rapides et les plus synchronisés depuis les années 1980.»

Son éloge de la solidité de l'économie canadienne frôle la folie quand on sait quelle grave crise économique s'est installée et ce que même les milieux d'affaires au Canada disent de l'économie. Comparez, par exemple, les remarques de la ministre des Finances à celles du Business Council of British Columbia, qui dit: «L'économie du Canada a commencé l'année 2023 avec de graves faiblesses structurelles : la quatrième économie avancée la plus endettée au monde ; le service de la dette du secteur privé le plus lourd des pays du G7 ; les pires perspectives de croissance du PIB par habitant et de la productivité du travail de l'OCDE des 40 prochaines années ; des investissements des entreprises qui suivent à peine la dépréciation, ce qui se traduit par une stagnation ou une diminution du stock de capital par travailleur ; et un recul de deux décennies du commerce international, avec des exportations qui diminuent en proportion du PIB. Les jeunes Canadiens qui entrent aujourd'hui sur le marché du travail sont confrontés à la triste perspective d'une croissance des revenus réels moyens la plus faible parmi les 38 pays de l'OCDE sur la période 2020-2060.»

La ministre des Finances ne mentionne pas la crise économique qui s'intensifie. Dans l'immédiat, elle risque d'entraîner des licenciements massifs dans les secteurs de la technologie, de la santé et du vin, ainsi que l'effondrement de milliers de petites entreprises de ces secteurs ou leur rachat à peu de frais par les grands cartels (fonds spéculatifs, géants de la technologie, de la santé et de l'agroalimentaire).

La crise actuelle ressemble à plusieurs égards à celle de 2008, dans la mesure où ce sont les mêmes instruments financiers qui occupent le rôle central : prêts massifs (dans ce cas-ci pas à des acheteurs de maisons ou de voitures, mais à des entreprises en démarrage qui n'ont que peu ou pas de revenus pendant des années et qui doivent avoir constamment recours à l'emprunt pour couvrir leurs coûts) et stockage d'importants montants de dépôts par les prêteurs (Silicon Valley Bank (SVB) et autres) dans des obligations, sauf que dans le cas présent il s'agit principalement d'obligations d'État et non des titres adossés à des prêts hypothécaires à risque (junk securities) comme en 2008. Cependant, les obligations d'État sont sensibles aux taux d'intérêt. Leur valeur est inférieure au prix d'achat initial à chaque augmentation du taux d'intérêt.

Selon un article de presse, la SVB a imposé aux emprunteurs, comme condition de prêt, de conserver la totalité ou la majeure partie de leurs liquidités chez elle. Une grande partie de ces liquidités serait l'argent emprunté qui serait utilisé pour payer les employés, etc. des entreprises en démarrage, ainsi que tout montant provenant des opérations (s'il en est).

Presque tous les dépôts de la SVB sont supérieurs à la limite garantie de 250 000 dollars de la Federal Deposit Insurance Corp., ce qui rend les liquidités déposées indisponibles, à moins qu'elles ne soient retirées avant l'effondrement. Le gouvernement Biden a ensuite annoncé un sauvetage public de tous les déposants de la SVB et de la banque Signature en faillite, quel que soit le montant du dépôt.

Des rapports circulent qui laissent entendre qu'il y a eu corruption à la SVB, car certains initiés, y compris des fonctionnaires fédéraux, ont retiré des fonds déposés et vendu des actions de la SVB juste avant l'effondrement. Certaines personnes (qui ont été nommées dans les médias sociaux) ont vendu des actions de la SVB pour des millions de dollars juste avant l'effondrement. Tous ceux qui ont acheté ces actions sans être au courant de la situation de la banque ou qui détenaient d'autres actions de la SVB lorsque la banque s'est effondrée perdront des millions.

Le problème immédiat de la SVB est dû au fait que, comme d'autres institutions financières, elle a placé une grande partie de ses liquidités (dépôts) dans des obligations d'État à long terme à des taux d'intérêt peu élevés. Avec l'inflation des prix et la hausse des taux d'intérêt (déterminés par la Réserve fédérale), ces obligations ont perdu beaucoup de leur valeur. Cela signifie que si les banques veulent vendre ces obligations pour se procurer des liquidités, elles perdront une grande partie du montant de leur achat initial. (La valeur des obligations est inversement proportionnelle aux taux d'intérêt, sauf si elles sont conservées jusqu'à leur échéance.)

La SVB a été contrainte de vendre des milliards de dollars d'obligations à perte parce qu'elle n'avait plus assez d'argent dans ses coffres pour couvrir les retraits de ses clients commerciaux pour les salaires, etc. Cette situation a été aggravée par la diminution du nombre de nouveaux prêts en raison de la hausse des taux d'intérêt et du ralentissement du secteur de la technologie.

La SVB et les banques comparables dépendent d'une nouvelle demande constante d'emprunts et de dépôts de cet argent emprunté pour couvrir les retraits sur les comptes existants, mais elles ont surtout besoin que leurs comptes apparaissent positifs et que le cours de leurs actions augmente. Elles doivent également se prémunir contre toute course au retrait des dépôts par des déposants inquiets, ce qui ressemble à une chaîne de Ponzi. (Une chaîne de Ponzi nécessite un flux constant d'argent frais entrant pour servir l'argent sortant sans production réelle de valeur nouvelle, sinon très peu.)

Une banque similaire à New York (Signature) s'est également effondrée et le gouverneur de l'État a déclaré que tous les dépôts, quel que soit le montant de leurs dépôts, seraient garantis. Selon certains rapports, plusieurs autres banques de cette taille sont également sur le point de s'effondrer.

Certains rapports laissent entendre que le problème pourrait aller au-delà des petites entreprises en démarrage et impliquer les plus grandes entreprises du secteur des technologies telles qu'Uber, Shopify, Doordash et Airbnb, car la plupart d'entre elles dépendent de l'entrée constante de nouveaux prêts pour couvrir leurs activités en expansion, qui pour la plupart n'ont pas de flux de trésorerie positifs.

Le PDG de Shopify a déclaré sur son compte Twitter qu'il s'attend à un « impact mineur » pour l'entreprise. Tobi Lutke a écrit qu'une petite partie de ses flux de fonds opérationnels américains étaient liés à la SVB, mais que tout allait se passer normalement, sans rien dire au sujet de l'impact sur les vendeurs.

Cependant, les clients de Shopify sonnent déjà l'alarme en disant que leurs comptes ont été perturbés.

« Dimanche soir, M. Lutke a tweeté une copie d'un courriel que Shopify a envoyé aux commerçants, offrant notamment une assistance à ceux qui ont des comptes SVB et qui pourraient avoir des difficultés à payer les salaires. »

La plupart des commentateurs s'empressent de dire que cette crise est différente de celle de 2008 parce que les obligations sont garanties par le gouvernement et ne sont pas des obligations de pacotille, et que la seule raison pour laquelle les obligations ont perdu de la valeur est la hausse des taux d'intérêt (bien que le résultat soit le même). Le seul problème, selon eux, vient du fait que de nombreuses entreprises en démarrage (emprunteurs) sont risquées et n'ont pas de revenus positifs, mais la plupart ne sont pas « de mauvaise qualité ». Dans le même ordre d'idées, on pourrait dire que les emprunteurs de prêts hypothécaires et automobiles à risque en 2008 étaient risqués, mais cela n'a pas empêché les banques de regrouper les prêts sous forme d'énormes obligations et de les vendre aux entreprises.

Le fait est que la déréglementation permet à une banque comme SVB et Signature de prêter un montant pratiquement illimité sans se soucier du montant de ses dépôts ni même de sa capacité à fournir des liquidités à ses déposants existants lorsqu'ils en ont besoin. Les nouveaux prêts n'arrivant pas à la vitesse requise, la SVB a été contrainte de vendre un grand nombre de ses obligations à perte. Les déposants, informés des difficultés, ont commencé à retirer leurs dépôts en masse, ce qui a contraint la SVB à fermer ses portes.

La SVB était le partenaire bancaire de près de la moitié des entreprises technologiques et de santé cotées aux États-Unis en 2022.

En raison de la hausse des taux d'intérêt, les banques (et d'autres acteurs) se sont retrouvées avec des obligations à faible rendement qui ne peuvent être vendues rapidement sans perte. (Il s'agit d'obligations d'État et d'obligations adossées à des créances hypothécaires acquises lorsque les taux d'intérêt étaient proches de zéro.) Si un trop grand nombre de clients retirent leurs dépôts simultanément, il y a un risque de déclenchement d'un cycle car la nouvelle se répand rapidement. Ce risque est d'autant plus grand aujourd'hui que la plupart des déposants peuvent transférer leur argent rapidement à l'aide de leur téléphone intelligent.

Avant son effondrement, la SVB a vendu à perte 21 milliards de dollars de son portefeuille d'obligations afin d'obtenir des liquidités pour servir les déposants qui avaient besoin de retirer de l'argent. La SVB a également annoncé son intention de vendre des actions supplémentaires sur le marché boursier, ce qui a renforcé le soupçon que quelque chose n'allait pas. Pourtant, deux semaines seulement avant l'effondrement, les régulateurs bancaires américains ont donné à la SVB un certificat de bonne santé et les agences de notation ont continué de lui attribuer la très solide note AA. On apprend aujourd'hui que le PDG de la SVB a commencé à vendre ses actions quelques semaines avant l'effondrement.

Les emprunteurs de la SVB étaient également ses principaux déposants. Les emprunteurs, pour la plupart des entreprises en démarrage des secteurs de la technologie et de la santé, doivent maintenant faire face à des taux d'intérêt plus élevés et à un ralentissement du secteur technologique. (Meta/Facebook vient d'annoncer le licenciement de 10 000 employés additionnels.) Les entreprises en démarrage ont besoin d'un flux constant de nouveaux emprunts pour soutenir leurs projets, car les revenus sont lents au départ et, pour beaucoup, n'atteignent jamais un niveau suffisant pour soutenir les opérations. Avec des taux d'intérêt proches de zéro, cette situation a été viable pendant un certain temps, mais dès que les taux d'intérêt augmentent, de nombreuses entreprises en démarrage ne peuvent plus assurer le service de leurs prêts en cours et ne peuvent plus demander de nouveaux prêts.

Dans ce scénario, de nombreux emprunteurs ont commencé à retirer leurs dépôts de la SVB afin de poursuivre leurs activités. La SVB n'avait pas les liquidités nécessaires pour leur rendre leur argent, ce qui l'a obligée à puiser à perte dans son portefeuille d'obligations. (Les nouvelles obligations sur le marché ont des taux d'intérêt plus élevés, ce qui fait baisser la valeur des anciennes obligations en circulation qui ont des taux d'intérêt plus bas si elles ne sont pas conservées jusqu'à l'échéance.)

Comme toutes les entreprises financières qui détiennent l'argent des déposants, la SVB est loin de disposer de liquidités suffisantes (liquidités et autres avoirs tels que les obligations encaissables) pour restituer tous ses dépôts aux déposants, voire même une fraction des dépôts. En outre, la plupart des déposants de la SVB étaient des entreprises technologiques étroitement liées aux médias sociaux. L'inquiétude s'est rapidement répandue et, en quelques jours (le 9 mars), les déposants ont retiré 42 milliards de dollars, épuisant ainsi toutes les réserves disponibles de la SVB, y compris les obligations encaissées.

Dans l'ensemble, les banques américaines disposeraient d'environ 3 000 milliards de dollars de liquidités, contre 17 600 milliards de dollars de dépôts. Mais la plupart de ces liquidités ne sont qu'une page web sur laquelle est inscrit un montant. En fait, seuls 100 milliards de dollars (0,1 billion) sont détenus par les banques sous la forme de billets physiques dans des chambres fortes et des distributeurs automatiques de billets. Ainsi, les 17,6 billions de dollars de dépôts ne sont soutenus que par 3 billions de dollars de liquidités, dont 0,1 billion de dollars de liquidités physiques. Le reste est soutenu par des titres et des prêts moins liquides, comme dans le cas de la SVB.

Le président Biden a décidé de garantir les dépôts actuels de la SVB par l'intermédiaire de la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) au-delà de la limite supérieure de 250 000 dollars. Cela signifie que les déposants pourront à terme retirer leur argent. Les investisseurs dans les actions boursières de la SVB risquent de perdre beaucoup. Il s'agit notamment des fonds de pension.

Selon un article paru le 13 mars, le groupe de pension suédois Alecta risque de perdre jusqu'à 12 milliards de couronnes suédoises (1,13 milliard de dollars) à la suite de l'effondrement de la Silicon Valley Bank. Alecta, qui gère environ 1,12 trillion de couronnes suédoises d'actifs, était le quatrième actionnaire de SVB Financial Group à la fin de 2022, avec une participation de 4,45 %. Le South Korea Pension Service, le California Public Employees Retirement Fund et des fonds de pension basés à Rhode Island, en Arizona, au Colorado, en Ohio, en Suède, aux Pays-Bas et dans d'autres pays perdront également de l'argent.

Le commerce de produits dérivés

Le commerce des produits dérivés a pris une ampleur considérable dans le monde entier. Les produits dérivés sont des titres papier désignant un paiement pour quelque chose suivant un taux dérivé d'une caractéristique du produit en question, comme les matières premières (par exemple, le pétrole, l'or), les actions, les obligations, les conditions météorologiques, les taux d'intérêt, les devises, etc. – en fait, tout ce sur quoi un acheteur et un vendeur peuvent se mettre d'accord peut être échangé.

Les produits dérivés jouent également un rôle dans la couverture des fluctuations de prix. Un acheteur doit acheter du pétrole dans six mois; il achète donc un dérivé pétrolier à un prix convenu et reçoit le pétrole dans six mois à ce prix, quelles que soient les variations du prix sur le marché.

Le commerce des produits dérivés est similaire à bien des égards aux plateformes de paris désormais courantes sur Internet, où l'on peut parier sur à peu près n'importe quoi.

Le commerce des produits dérivés est le marché mondial impérialiste sous stéroïdes, dominé par les grands cartels financiers (banques, fonds spéculatifs, etc.). La valeur des produits dérivés détenus est immense, comme le montrent les montants détenus par les banques américaines dans le graphique ci-dessous. Comme les produits dérivés concernent tout et n'importe quoi, leur volume est plus important que celui de n'importe quelle partie du marché, comme les marchés boursiers. Les produits dérivés peuvent être échangés par l'intermédiaire d'une bourse (par exemple, Chicago Mercantile) ou d'un marché de gré à gré entre une partie et une contrepartie.


(Statistica)

« Le marché des produits dérivés est, en un mot, gigantesque – souvent estimé à plus d'un quadrillion de dollars dans le haut de la fourchette. Comment cela est-il possible ? En grande partie parce qu'il existe de nombreux produits dérivés, disponibles sur pratiquement tous les types d'actifs d'investissement possibles, y compris les actions, les matières premières, les obligations et les devises. Certains analystes du marché estiment même que la taille du marché représente plus de 10 fois le produit intérieur brut (PIB) mondial », rapporte Investopedia.

Avant d'être racheté par UBS le 19 mars, le Credit Suisse détenait des billions de dollars de produits dérivés et est connu pour avoir subi des pertes lors de transactions au cours des dernières années. On soupçonnait depuis un certain temps qu'elle pourrait s'effondrer.

Le 15 mars, un site web d'échange a rapporté : « Le coût des dérivés de crédit liés à Credit Suisse Group AG atteint des niveaux qui rappellent la panique financière de 2008, après que le principal actionnaire du prêteur [Saudi National Bank] ait déclaré qu'il ne souhaitait pas augmenter sa participation. Ces mouvements sont exacerbés par le fait que les banques se précipitent pour acheter une protection contre un éventuel défaut de la société basée à Zurich afin de réduire leur risque de contrepartie sur les transactions, selon des personnes ayant connaissance du dossier. Au cours d'une journée de négociation chaotique, les cotations des swaps de défaut de crédit à un an étaient considérablement plus chères que les offres pour des durées plus longues, les prêteurs essayant de se doter d'une protection à court terme contre leur exposition au prêteur, ont déclaré ces personnes. »

Une faillite comme celle de la SVB perturbe le marché des produits dérivés parce que tous ses contrats dérivés s'effondrent. Le Credit Suisse était un cartel beaucoup plus important et d'envergure mondiale, l'une des trente institutions financières mondiales considérées comme des « institutions financières d'importance systémique (IFIS) » trop importantes pour faire faillite. Le Credit Suisse gérait les comptes de négociation de plusieurs cartels de fonds spéculatifs. Son actionnariat et son contrôle étaient mondiaux, les plus grandes participations du groupe se trouvant aux États-Unis, en France et en Arabie saoudite. Les propriétaires saoudiens ont fait savoir qu'ils ne mettraient plus d'argent dans le Credit Suisse. (Des retombées ont également eu lieu en raison de la saisie et du gel en Suisse de biens appartenant à des Russes, ce qui a entraîné une baisse récente des volumes d'investissement dans les institutions financières ayant leur siège en Suisse.)

La SVB détenait 27,7 milliards de dollars de produits dérivés, ce qui n'est pas une petite somme, mais ne représente que 0,05 % des 55 387 milliards de dollars détenus par JPMorgan, la plus grande banque américaine de produits dérivés, ou du montant détenu par le Crédit suisse.

Le marché des produits dérivés en Europe est estimé à 660 000 milliards d'euros.

Les renflouements des gouvernements

On trouvera ci-dessous quelques exemples des milliers d'entreprises déposantes de la Silicon Valley Bank que le gouvernement a renflouées à la suite de l'effondrement de la banque. Comme indiqué, le gouvernement renfloue également les déposants de la banque Signature en faillite. Six autres banques seraient au bord de la faillite.

Les dépôts sont assurés jusqu'à 250 000 dollars par une assurance payée conjointement par toutes les banques et gérée par la FDIC. Au-delà de ce montant, les dépôts ne sont pas assurés, à moins que le déposant ne souscrive à une assurance privée, ce que la plupart d'entre eux ne font pas. La FDIC agit en tant qu'administrateur judiciaire, ce qui signifie généralement qu'elle liquidera les actifs de la banque pour récupérer une partie des montants assurés qu'elle doit verser jusqu'à concurrence de 250 000 dollars. La FDIC n'a pas suffisamment de fonds en réserve pour payer plus que ce montant.

Un gros déposant (et emprunteur) typique de la SVB est Roku Inc. Fabricant d'un lecteur multimédia en continu, Roku a déclaré dans un document déposé auprès de la Securities and Exchange Commission des États-Unis qu'environ 487 millions de dollars, soit 26 % de ses 1,9 milliard de dollars de liquidités, sont déposés auprès de la SVB. Roku a ajouté qu'elle pensait disposer de suffisamment de liquidités pour assurer son fonctionnement normal au cours des douze prochains mois, le solde restant de 1,4 milliard de dollars étant réparti entre d'autres grandes institutions financières.

L'année écoulée a été difficile pour Roku, comme pour beaucoup d'autres entreprises du secteur technologique. Bien que le nombre de téléspectateurs (clients) ait augmenté, les recettes stagnent car les annonceurs ont réduit leurs dépenses. Roku a également connu une baisse des ventes d'appareils. La stagnation des recettes est à mettre en regard de l'augmentation des dépenses due à l'inflation des prix et à la hausse des taux d'intérêt. Selon Yahoo Finance, « les dépenses d'exploitation de [Roku] au quatrième trimestre ont grimpé de 71 % d'une année sur l'autre, tandis que les recettes sont restées stables. Au lieu du modeste bénéfice enregistré en 2021, les opérations ont perdu la somme effrayante de 250 millions de dollars au quatrième trimestre. Au cours de l'année écoulée, alors que les recettes stagnaient, l'entreprise a enregistré une perte nette de 498 millions de dollars. En novembre 2022, l'entreprise a licencié environ 5 % de son personnel, mais cela pourrait ne pas suffire. L'entreprise prévoit une nouvelle perte nette de 205 millions de dollars au premier trimestre 2023. »

Un petit échantillon d'autres entreprises ayant d'importants dépôts à la SVB comprend la plateforme de jeux Roblox; Circle, une société de paiements basée sur la blockchain dont 3,3 milliards de dollars de sa crypto-monnaie Dollar Coin sont toujours détenus par la SVB; et, iRhythm Technologies, qui vend un dispositif portable qui surveille les rythmes cardiaques.

Selon certaines informations, la Réserve fédérale américaine a créé un fonds de prêt d'urgence pour soutenir le sauvetage des banques. Dans un premier temps, le fonds sera suffisamment important pour renflouer 175 milliards de dollars de dépôts. Ce fonds est similaire (mais beaucoup plus petit à ce stade) aux renflouements de 2008-2009. De nombreux observateurs estiment que les sauvetages de banques et d'autres entreprises par le gouvernement sont un facteur important de l'augmentation de la dette publique et de l'inondation du monde avec des dollars américains, ce qui contribue à l'inflation actuelle des prix.

La FDIC a déclaré qu'elle vendrait aux enchères tous les actifs de SVB et de Signature Bank et qu'elle imposerait éventuellement des cotisations spéciales ou des taxes aux banques pour récupérer ses pertes, si possible.

Parasitisme et putréfaction à l'oeuvre

Pendant le ralentissement économique dû à la pandémie, les banques américaines ont investi leurs liquidités excédentaires dans des obligations, ce qui a entraîné une augmentation de 44 % de leurs avoirs obligataires, qui atteignent aujourd'hui 5 500 milliards de dollars. La plupart de ces obligations sont assorties d'un faible taux d'intérêt jusqu'à leur échéance, dans de nombreuses années. En 2022, la Fed a commencé à relever les taux d'intérêt. Les nouvelles obligations sont désormais assorties de taux d'intérêt plus élevés. La plupart des obligations sont liquides en ce sens qu'elles peuvent être vendues, mais les obligations déjà achetées à des taux d'intérêt plus bas se vendront à un prix bien inférieur au prix d'origine (à payer à l'échéance), car le nouvel acheteur tient compte de la perte de valeur due à l'inflation, qui n'est pas couverte par le taux d'intérêt plus bas de l'obligation.

À la fin de l'année 2022, la FDIC américaine a indiqué que les pertes non réalisées sur les titres s'élevaient à 689,9 milliards de dollars au troisième trimestre, contre 469,7 milliards de dollars au deuxième trimestre. Il s'agit de pertes sur papier qui ne se sont pas encore transformées en pertes réelles.

Les pertes non réalisées sur les titres détenus jusqu'à l'échéance (obligations HTM) se sont élevées à 368,5 milliards de dollars au troisième trimestre, contre 241,8 milliards de dollars au deuxième trimestre. Les pertes non réalisées sur les titres disponibles à la vente se sont élevées à 321,5 milliards de dollars au troisième trimestre, contre 227,9 milliards de dollars au deuxième trimestre. (Les pertes non réalisées reflètent les pertes sur papier des titres détenus par les institutions financières, qui se réalisent lorsqu'ils sont vendus).

Les pertes non réalisées sont importantes pour les établissements de crédit car elles jouent un rôle dans la détermination du montant qu'ils peuvent prêter en fonction de la valeur monétaire qu'ils détiennent (exigences de fonds propres).

Pour atténuer l'impact des pertes sur leur bilan, les banques peuvent classer leurs titres dans les catégories HTM ou AFS. Ceux qui sont étiquetés HTM ne peuvent pas être vendus. Mais cela signifie que toute variation de la valeur de marché ne sera pas prise en compte dans les formules utilisées par les régulateurs pour calculer les exigences de fonds propres. En revanche, toute perte dans le panier AFS doit être évaluée à la valeur du marché et déduite des fonds propres de la banque (valeur monétaire).

Les bilans des banques américaines affichent d'énormes pertes sur papier. Si elles ont besoin d'argent et vendent leurs titres à perte, cela érode leur capital (valeur monétaire) et limite leur capacité à prêter.

Le Financial Times a lancé un avertissement il y a seulement trois mois, le 27 décembre 2022 : « Pour l'instant, les banques américaines restent inondées de liquidités et ne souffrent d'aucune tension financière évidente. Mais l'augmentation des sorties de dépôts et l'accroissement des pertes non réalisées pourraient devenir problématiques si elles devaient vendre des investissements pour répondre à des besoins de liquidités inattendus. Les avoirs obligataires pourraient devenir un point de pression important pour les banques en cas de marchés volatils. Les investisseurs devraient s'en préoccuper en 2023. »

Deux mois plus tard, en 2023, le président de la FDIC a déclaré : « La combinaison d'un niveau élevé d'échéances d'actifs à long terme et d'une baisse modérée du total des dépôts souligne le risque que ces pertes latentes se transforment en pertes réelles si les banques doivent vendre des titres pour répondre à des besoins de liquidités. »

Les tensions et les sorties de capitaux ont véritablement commencé au début de l'année 2023 dans le secteur technologique, mais elles s'intensifiaient depuis un certain temps. L'activité d'investissement dans le secteur technologique a chuté de manière significative au cours du dernier trimestre de 2021 et a continué à décliner tout au long de 2022 et encore cette année.

Les tensions et les pertes sont devenues évidentes dans le bilan de la SVB. La panique a commencé lorsque la SVB a tenté de lever des fonds pour couvrir ses pertes, ce qui est devenu de notoriété publique. L'inquiétude des détenteurs de dépôts s'est aggravée au début du mois de mars lorsque la SVB a annoncé qu'elle avait perdu 1,8 milliard de dollars sur la vente d'actifs dans le cadre de sa tentative de se procurer de l'argent en vendant des titres.

Le Financial Times pose la question rhétorique suivante : « Comment la SVB a-t-elle pu se retrouver dans cette position exposée ? Pourquoi n'a-t-elle pas été soumise à des tests de résistance ? Parce qu'en 2018, les réglementations ont été modifiées et que la SVB était une des premières à exercer des pressions pour que les réglementations onéreuses soient levées.

« Le cadre de la banque qui fait pression dans ce cas est le même Greg Becker qui a vendu pour 3,6 millions de dollars d'actions de la société dans le cadre d'un plan de négociation moins de deux semaines avant que l'entreprise ne révèle les pertes considérables qui ont conduit à sa faillite. La vente de 12 451 actions le 27 février était la première fois depuis plus d'un an que Becker vendait des actions de la société mère SVB Financial Group, selon les documents réglementaires. Il a déposé le plan qui lui a permis de vendre les actions le 26 janvier. »

Le Financial Times critique la Réserve fédérale : « On n'augmente pas les taux d'intérêt de manière record sur une économie qui utilise un effet de levier record pour une spéculation maximale sans s'attendre à des conséquences. Cela [l'effondrement de la SVB, Signature et probablement First Republic] devait clairement se produire, et maintenant nous voyons les maillons faibles de la chaîne se briser. Les domaines où la spéculation était la plus courante et la plus flagrante sont clairement en train de s'effondrer. Des années de prise de risque excessive se retournent contre eux. La situation va se dégrader très rapidement. »

La crise économique se profile à l'horizon

Les crises économiques surviennent régulièrement dans le cadre du système impérialiste. Les propriétaires individuels qui contrôlent l'économie socialisée et la politique de l'État ont pour objectif d'exproprier le plus possible de richesses sociales de ce que produisent les travailleurs. Cet objectif les pousse à parcourir la planète à la recherche de richesses sociales exploitables par des moyens de plus en plus risqués et dangereux pour les peuples et la Terre Mère elle-même. Le parasitisme, la guerre et la décadence sont omniprésents dans leur système de contrôle et leur objectif intéressé étroit. Étant donné l'interdépendance mondiale des oligopoles qui opèrent sous forme de cartels et de coalitions, et la concurrence extrême et souvent violente entre eux, les crises sont devenues de plus en plus dangereuses et destructrices.

Les peuples doivent prendre les choses en main et se donner les moyens de contrôler le système économique et politique et toutes les affaires qui affectent leur vie et la Terre Mère. Ils doivent créer de nouvelles formes de gouvernance avec une nouvelle orientation et un nouvel objectif pour l'économie afin d'humaniser l'environnement social et naturel dans des relations de paix et de coopération pour le bien de tous.

Les intérêts privés étroits qui ont créé des oligopoles agissant comme des cartels et des coalitions mènent la société et la Terre Mère à la ruine. Les peuples du monde mènent des batailles courageuses pour les arrêter, comme dans le cas de la classe ouvrière en France qui poursuit une grève militante contre les pouvoirs de police de la présidence française. Cela peut se faire ! Cela doit se faire !


Toulouse, France, 23 mars 2023

Ellen Brown : « Le tsunami imminent des produits dérivés »

Voici de larges extraits de l'article d'Ellen Brown publié le 12 mars sous le titre précité, suite à l'effondrement de la Silicon Valley Bank le 10 mars. Les commentaires du Marxiste-léniniste sont entre doubles parenthèses.

Toutefois, le fonds FDIC ne couvre qu'environ 2 % des 9 600 milliards de dollars de dépôts assurés aux États-Unis. ((Les dépôts inférieurs à 250 000 dollars sont protégés par l'assurance FDIC.)) Une crise nationale déclenchant des ruées sur les banques dans tout le pays, comme cela s'est produit au début des années 1930, anéantirait le fonds. Aujourd'hui, certains experts financiers prédisent une crise de cette ampleur sur le marché des produits dérivés d'un quadrillion de dollars et plus, en raison de la hausse rapide des taux d'intérêt.

[...]

En 2002, le méga-investisseur Warren Buffett a écrit que les produits dérivés étaient des « armes financières de destruction massive ». À l'époque, leur valeur « notionnelle » totale (la valeur des actifs sous-jacents dont les « dérivés » sont « dérivés ») était estimée à 56 000 milliards de dollars. Investopedia a rapporté en mai 2022 que la bulle des produits dérivés avait atteint une valeur estimée à 600 000 milliards de dollars selon la Banque des règlements internationaux (BRI), et que le total est souvent estimé à plus d'un quadrillion de dollars. Personne ne le sait avec certitude, car la plupart des transactions se font en privé.

Au troisième trimestre 2022, selon le Quarterly Report on Bank Trading and Derivatives Activities de l'Office of the Comptroller of the Currency (l'autorité fédérale de régulation des banques), un total de 1 211 banques commerciales et associations d'épargne américaines assurées, nationales et d'État, détenaient des produits dérivés, mais 88,6 % de ces produits dérivés étaient concentrés dans quatre grandes banques seulement : J.P. Morgan Chase (54 300 milliards de dollars), Goldman Sachs (51 000 milliards de dollars), Citibank (46 000 milliards de dollars), Bank of America (21 600 milliards de dollars), suivie de Wells Fargo (12 200 milliards de dollars). La liste complète est disponible ici. Contrairement à ce qui s'est passé en 2008-2009, lorsque les principaux problèmes liés aux produits dérivés étaient les titres adossés à des créances hypothécaires et les swaps sur défaillance, aujourd'hui, la catégorie la plus importante et la plus risquée est celle des produits de taux d'intérêt.

[...]

Mais ces derniers temps, [les produits dérivés] ont explosé pour devenir de puissants véhicules de spéculation à effet de levier (emprunter pour jouer). À la base, les produits dérivés ne sont que des paris – un casino géant dans lequel les joueurs se couvrent contre divers changements dans les conditions du marché (taux d'intérêt, taux de change, défaillances, etc.). Ils sont vendus comme une assurance contre le risque, qui est transféré à la contrepartie du pari. Mais le risque est toujours présent et si la contrepartie ne peut pas payer, les deux parties sont perdantes. Dans les situations « d'importance systémique », le gouvernement finit par payer la facture.

Comme sur un hippodrome, les joueurs peuvent parier sans avoir d'intérêt dans l'actif sous-jacent (le cheval). Cela a permis aux paris sur les produits dérivés d'atteindre plusieurs fois le PIB mondial et a ajouté un autre élément de risque : si vous ne possédez pas l'étable sur laquelle vous pariez, la tentation est grande de brûler l'étable pour obtenir l'assurance. Les entités financières qui prennent ces paris se couvrent généralement en pariant dans les deux sens, et elles sont fortement interconnectées. Si les contreparties ne sont pas payées, elles ne peuvent pas payer leurs propres contreparties, et l'ensemble du système peut s'effondrer très rapidement, un risque systémique appelé « effet domino »

C'est la raison pour laquelle les SIFI insolvables ont dû être renfloués lors de la crise financière mondiale de 2007-2009, d'abord avec 700 milliards de dollars d'argent public, puis par la Réserve fédérale grâce à l'« assouplissement quantitatif ». ((L'assouplissement quantitatif est une forme de politique monétaire utilisée par les banques centrales pour augmenter la masse monétaire nationale. Une banque centrale, comme la Réserve fédérale américaine, achète des titres sur le marché libre afin de réduire les taux d'intérêt et d'augmenter la masse monétaire. L'assouplissement quantitatif crée de nouvelles réserves bancaires, fournissant aux banques plus de liquidités et encourageant les prêts et les investissements. – Investopedia))

Les produits dérivés étaient au coeur de cette crise. Lehman Brothers était l'une des entités dérivées ayant pris des paris sur l'ensemble du système. Il en était de même pour la compagnie d'assurance AIG, qui a réussi à survivre grâce à un sauvetage colossal de 182 milliards de dollars de la part du Trésor américain; mais Lehman a été considérée comme trop faiblement collatéralisée pour être sauvée. Elle s'est effondrée et la Grande Récession a suivi.

Les produits dérivés sont en grande partie une création du système bancaire parallèle, un groupe d'intermédiaires financiers qui facilite la création de crédit au niveau mondial, mais dont les membres ne sont pas soumis à une surveillance réglementaire. Le système bancaire parallèle comprend également des activités non réglementées menées par des institutions réglementées. Il comprend le marché des pensions, qui s'est développé comme une sorte de prêteur sur gages pour les grands investisseurs institutionnels disposant de plus de 250 000 dollars à déposer. Le marché des pensions est un endroit sûr pour ces prêteurs, y compris les fonds de pension et le Trésor américain, où ils peuvent placer leur argent et gagner un peu d'intérêt. Mais sa sécurité n'est pas assurée par la FDIC, mais par des garanties solides fournies par les emprunteurs, de préférence sous la forme de titres fédéraux.

Comme l'explique le professeur Gary Gorton :

« Ce système bancaire (le système bancaire 'parallèle' ou 'fantôme') – l'accord de rachat (repo) basé sur la titrisation – est un véritable système bancaire, aussi important que le système bancaire traditionnel réglementé. Il est d'une importance capitale pour l'économie car il constitue la base de financement du système bancaire traditionnel. Sans elle, les banques traditionnelles ne prêteront pas et le crédit, qui est essentiel à la création d'emplois, ne sera pas créé. »

S'il est vrai que les banques créent l'argent qu'elles prêtent simplement en inscrivant les prêts sur les comptes de leurs emprunteurs, elles ont toujours besoin de liquidités pour compenser les retraits; et pour cela, elles s'appuient largement sur le marché des pensions, dont le chiffre d'affaires quotidien dépasse les 1 000 milliards de dollars rien qu'aux États-Unis. Le commentateur financier britannique Alasdair MacLeod fait remarquer que le marché des produits dérivés s'est construit sur le crédit repo bon marché. Mais les taux d'intérêt ont grimpé en flèche et le crédit n'est plus bon marché, même pour les institutions financières.

Selon un rapport de la Banque de règlements internationaux (BRI) datant de décembre 2022, 80 000 milliards de dollars de produits dérivés de change hors bilan (documentés uniquement dans les notes de bas de page des rapports bancaires) sont sur le point d'être réinitialisés (reconduits à des taux d'intérêt plus élevés). [...] Une autre bombe à retardement fait parler d'elle : le Crédit Suisse, une banque suisse géante spécialisée dans les produits dérivés, a été victime d'une ruée de 88 milliards de dollars sur ses dépôts de la part de grands investisseurs institutionnels à la fin de l'année 2022. La banque a été renflouée par la Banque nationale suisse grâce à des lignes de swap avec la Réserve fédérale américaine à un taux d'intérêt de 3,33 %.

[...]

[L]'amendement de 2005 à la Loi sur les faillites, qui stipule que les garanties déposées par les emprunteurs insolvables pour les prêts repo et les produits dérivés bénéficient d'un statut de "sphère de sécurité" qui les exempte de toute récupération par le tribunal des faillites. Lorsque Lehman a semblé en difficulté, les négociants en pensions et en produits dérivés se sont tous empressés de réclamer les garanties avant qu'elles ne soient épuisées, et le tribunal n'a pas eu le pouvoir de les en empêcher.

[...]

[L]'exemption de la sphère de sécurité est une caractéristique essentielle du système bancaire parallèle, dont il a besoin pour fonctionner. Comme les banques traditionnelles, les banques parallèles créent des crédits sous la forme de prêts garantis par une « dette exigible », c'est-à-dire des prêts à court terme ou des dépôts qui peuvent être rappelés à la demande. Dans le système bancaire traditionnel, la promesse que le déposant peut récupérer son argent à la demande est rendue crédible par l'assurance des dépôts soutenue par le gouvernement et l'accès au financement de la banque centrale. Les banques parallèles avaient besoin de leur propre variante de « dette exigible », et elles l'ont obtenue grâce au privilège de la « super-priorité » en cas de faillite.

Le statut de sphère de sécurité accorde le privilège d'être exclu du sursis obligatoire et, fondamentalement, de toutes les autres restrictions. Les prêteurs de la sphère de sécurité, qui comprennent actuellement les pensions et les marges sur les produits dérivés, peuvent immédiatement reprendre possession et revendre les biens mis en gage. Cela confère aux pensions de titres et aux produits dérivés une priorité extraordinaire sur toutes les autres créances, y compris les créances fiscales et salariales, les dépôts, les crédits garantis réels et les créances d'assurance

Le dilemme de notre système bancaire actuel est que les prêteurs n'avanceront pas les liquidités à court terme nécessaires pour financer les prêts repo sans une garantie à toute épreuve; mais la garantie qui rend l'argent du prêteur sûr rend le système lui-même très risqué. Lorsqu'un débiteur semble être sur un pied d'égalité, on peut s'attendre à une ruée des créanciers privilégiés pour s'emparer de la garantie, dans une ruée vers la sortie qui peut propulser un débiteur autrement viable vers la faillite; c'est ce qui est arrivé à Lehman Brothers [crise de 2008].

Les produits dérivés ont bénéficié d'une « sphère de sécurité » parce que leur défaillance était également considérée comme un risque systémique. Cela pouvait déclencher un « effet domino », entraînant l'effondrement de l'ensemble du système.

[...]

Les dérivés de taux d'intérêt sont particulièrement vulnérables dans le contexte actuel de taux d'intérêt élevés. De mars 2022 à février 2023, le taux préférentiel (le taux que les banques appliquent à leurs meilleurs clients) est passé de 3,5 % à 7,75 %, ce qui représente une hausse radicale. L'analyste de marché Stephanie Pomboy parle de « choc des taux d'intérêt ». Le marché ne sera vraiment touché que lorsque les contrats à taux variable seront réinitialisés, mais 1 000 milliards de dollars de contrats d'entreprises américaines doivent être réinitialisés cette année, un autre billion l'année prochaine, et encore un autre l'année suivante.

Quelques faillites bancaires sont gérables, mais un choc de taux d'intérêt sur l'énorme marché des produits dérivés pourrait entraîner l'effondrement de toute l'économie. Comme l'a écrit Michael Snyder dans un article de 2013 intitulé « A Chilling Warning About Interest Rate Derivatives » (« Un avertissement glaçant sur les produits dérivés de taux d'intérêt »)

Une hausse rapide des taux d'intérêt va-t-elle déchirer le système financier américain comme une lame de tondeuse à gazon géante ? Oui, l'économie américaine a survécu à des taux d'intérêt beaucoup plus élevés dans le passé, mais à l'époque, il n'y avait pas des centaines de milliers de milliards de dollars de produits dérivés de taux d'intérêt suspendus au-dessus de notre système financier comme une épée de Damoclès.

Une hausse des taux d'intérêt pourrait faire éclater la bulle des produits dérivés et provoquer des « faillites massives dans le monde entier » [citant le milliardaire mexicain Hugo Salinas Price]. Bien sûr, beaucoup de gens seraient ravis de voir les banques « trop grandes pour faire faillite » faire faillite, mais la vérité est que si elles s'effondrent, c'est toute notre économie qui s'effondrera avec elles. [...] Tout notre système économique repose sur le crédit et, comme nous l'avons vu en 2008, si les grandes banques commencent à faire faillite, le crédit se bloque et, soudain, plus personne ne peut obtenir d'argent pour quoi que ce soit. [...]

((La moitié restante de l'article d'Ellen Brown contient ses propositions pour réformer le système bancaire d'une manière qui, selon elle, bénéficierait aux citoyens. Ce faisant, elle présente les actions que les peuples pourraient entreprendre dans le présent pour défendre ce qui leur appartient de droit mais, curieusement, elle utilise ensuite ces énoncés de politiques pour nier la nécessité de créer de nouvelles formes qui résoudraient la crise en leur faveur. La crise découle d'un système impérialiste dysfonctionnel et n'est pas une question de mauvaises politiques et de mauvais comportements comme tels. Aussi corrompues et moralement répréhensibles soient-elles, elles sont dans l'ordre des choses et les « bonnes politiques » ne sont pas favorisées lorsque l'économie est réduite à un casino mondial dans lequel les choses vont de mal en pis.

((L'économie socialisée s'est répandue dans le monde entier avec des forces productives dirigées par une classe ouvrière moderne mais capturées dans des rapports de production sous le contrôle d'intérêts privés étroits supranationaux, une classe sociale qui n'est plus pertinente mais qui s'accroche par l'oppression, la destruction et la guerre. Pour établir leur propre point de vue, les travailleurs doivent régler leurs comptes avec la vieille conscience de la société et se battre pour ce qui leur revient de droit dans cette perspective.))

(Traduction des citations d'Ellen Brown par Robert Kissous)

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Le président de guerre des États-Unis n'est pas le bienvenu au Canada

Proclamer de grands idéaux pour cacher que les États-Unis exigent que le Canada se soumette à leur ordre du jour de domination mondiale

- Barbara Biley -


Manifestation le premier jour de la visite de Biden à Ottawa le 23 mars 2023

La dignité des peuples du Canada et du Québec a été défendue par des actions à Ottawa et ailleurs au Canada contre la première visite officielle du président des États-Unis, Joe Biden, tenues au Canada les 23 et 24 mars.

Au cours de sa visite, Joe Biden et son entourage ont assisté à un dîner de gala et ont rencontré en privé la gouverneure générale du Canada, Mary Simon, ainsi que le premier ministre Justin Trudeau et les principaux ministres libéraux, et séparément le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre. Le 24 mars, Joe Biden a prononcé un discours à la Chambre des communes.

Le but de la visite et la question de savoir qui mène la danse sont devenus évidents dans le discours de Joe Biden au parlement et dans la déclaration conjointe publiée par Justin Trudeau et Joe Biden le 24 mars. Sous le mince voile de prétention qu'ils sont motivés par des idéaux élevés de protection des personnes et de l'environnement, il est clair que l'objectif est de poursuivre l'intégration du Canada dans l'économie de guerre américaine et la soumission du gouvernement canadien aux objectifs hégémoniques des États-Unis.

Citant John F. Kennedy lors de sa visite en 1961 au Canada, Joe Biden a déclaré : « nous avons en partage l'unité propre à des nations égales et indépendantes, colocataires du même continent, héritières d'un même patrimoine, et associées pleinement souveraines dans la poursuite du même but historique : celui de préserver notre liberté et celle de tous ceux qui la désirent.  » Il s'agit d'une fraude de l'histoire destinée à couvrir tous les crimes commis par les États-Unis, leurs alliés de l'OTAN et d'autres « coalitions » contre la lutte des peuples et des nations pour leur indépendance.

La « liberté » de « tous ceux qui la désirent » est assimilée à la soumission au diktat des États-Unis, faute de quoi ceux qui résistent en subiront les conséquences – coups d'État et actes de guerre des États-Unis, y compris les sanctions et les interventions militaires. La déclaration conjointe Trudeau-Biden émise à l'occasion confirme que Joe Biden est un président de guerre et que Justin Trudeau est un partisan du bellicisme américain qui ne représente pas les Canadiens et les Québécois et leur conscience antiguerre.

Par exemple, ils affirment que « Le Canada et les États-Unis restent également préoccupés par la détérioration de la situation en Haïti et sont déterminés à accroître le soutien de la communauté internationale au peuple d'Haïti, notamment en leur offrant une aide en matière de sécurité et une aide humanitaire et un meilleur soutien à la Police nationale d'Haïti et en veillant à ce que ceux qui compromettent la stabilité d'Haïti rendent compte de leurs actes. » L'histoire sordide de l'ingérence des États-Unis, du Canada, de la France et d'autres pays en Haïti est aussi bien connue que le refus du peuple haïtien de se plier à la domination étrangère. Une telle déclaration ne peut être considérée que comme un retour des criminels sur les lieux du crime pour « finir le travail ».

Derrière tous les discours de Joe Biden et Justin Trudeau sur le « partenariat » et le « partage », il y a la réalité brutale que la relation entre les deux pays n'est pas une relation d'égal à égal. Lorsque les États-Unis, avec la Loi sur la production de défense (Defense Production Act), fournissent des fonds aux entreprises canadiennes pour l'extraction et le traitement de minéraux critiques et pour l'emballage de semi-conducteurs et de cartes de circuits imprimés fabriqués aux États-Unis, c'est pour mettre l'économie canadienne au service de l'économie de guerre des États-Unis.

Le Groupe de travail sur la transformation de l'énergie doté d'un mandat d'un an, annoncé dans la déclaration conjointe, doit permettre aux États-Unis d'accéder aux minéraux critiques du Canada et d'intégrer les systèmes énergétiques au nom de la sécurité énergétique collective. La poursuite de la militarisation de l'Arctique par l'expansion du NORAD vise, comme l'indique la déclaration conjointe, à garantir que « le NORAD puisse dissuader les menaces émergentes contre notre espace aérien et maritime, s'en défendre et concurrencer la Chine et la Russie dans les prochaines années ».

La déclaration conjointe reflète à la fois les exigences des États-Unis envers le Canada et l'acquiescement et la complaisance du gouvernement Trudeau envers les objectifs hégémoniques des États-Unis, ainsi que sa volonté de se conformer et de piétiner les droits des Canadiens et des peuples autochtones d'avoir leur mot à dire sur la direction de l'économie et de la politique étrangère du Canada. Les décisions énoncées dans la déclaration conjointe du premier ministre Trudeau et du président Biden ont été prises bien avant la visite, dans le dos des Canadiens et sans discussion au parlement. En fait, il a été révélé que la décision d'étendre l'Entente sur les tiers pays sûrs pour permettre aux autorités des deux pays d'appréhender et de renvoyer les demandeurs d'asile aux postes frontières officiels et non officiels avait été prise il y a près d'un an.

La déclaration conjointe énumère sept domaines dans lesquels les États-Unis et le Canada collaboreront :

- catalyser l'énergie propre et créer de bons emplois;
- améliorer la résilience de la chaîne d'approvisionnement en minéraux critiques;
- protéger nos eaux communes et l'Arctique;
- favoriser la diversité et l'inclusion;
- renforcer les alliances mondiales;
- investir dans notre défense et notre sécurité collectives et
- gérer la migration en collaboration.

La visite de Joe Biden a été utilisée pour intensifier les propos bellicistes contre la Russie et « les difficultés que représente depuis longtemps la République populaire de Chine pour l'ordre international », alors même que les navires de guerre canadiens s'apprêtaient à se déployer dans l'Indo-Pacifique pour appliquer les sanctions illégales contre la République populaire démocratique de Corée et intervenir dans la région.

La demande des États-Unis d'intégrer le Canada dans l'économie des États-Unis et de créer une économie nord-américaine intégrée fait suite au sommet des « trois amis », le président des États-Unis, Joe Biden, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau et le président du Mexique, Andrés Manuel Lopez Obrador, qui s'est tenu au Mexique en janvier. Le ministre des Relations extérieures du Mexique, Marcelo Ebrard, a déclaré que la commission commerciale mixte composée de 12 personnes « aura toute notre confiance pour motiver, persuader et convaincre les hommes d'affaires, les travailleurs et les fonctionnaires des trois gouvernements de l'importance [...] d'unir leurs forces en Amérique du Nord et, en allant de l'avant, de rechercher l'union de l'ensemble du continent américain ».

La complaisance des politiciens des partis cartellisés et de certains dirigeants syndicaux pour le soutien autoproclamé du président de guerre Joe Biden aux travailleurs et aux bons emplois syndicaux est honteuse. Il s'agit d'une fraude qui se manifeste par la criminalisation par son gouvernement de la lutte des travailleurs du rail pour des conditions de travail sécuritaires et des luttes militantes des travailleurs américains pour leurs droits. Les travailleurs canadiens n'ont rien à gagner à suivre la voie tracée par Joe Biden vers une « économie verte » fondée sur l'exploitation des ressources et de la main-d'oeuvre canadiennes pour servir les buts impérialistes des États-Unis.

Ce que les États-Unis exigent du Canada n'est rien de moins qu'une intégration totale à l'économie des États-Unis, en tant que fournisseur de ce qui est nécessaire à leur machine de guerre et un participant volontaire à l'objectif américain d'hégémonie mondiale, ciblant la Russie et la Chine et tout pays qui refuse de se soumettre. La déclaration conjointe est une déclaration qui va à l'encontre des intérêts des peuples des deux pays et du monde.

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Les participants aux actions militantes déclarent «Non à l'agression et à la guerre menées par les États-Unis – Biden go home!»


Manifestation devant l'ambassade des États-Unis à Ottawa le 23 mars 2023

Les visites comme la visite d'État officielle du président des États-Unis Joe Biden et la première dame Jill Biden au Canada les 23 et 24 mars sont invariablement présentées par l'État canadien et les médias monopolisés comme une façon de renforcer l'amitié entre les deux pays. Cependant, les faits montrent que ces visites ont toujours pour but d'imposer une intégration plus poussée du Canada à l'économie et la machine de guerre des États-Unis. À l'heure où les États-Unis s'enfoncent dans une crise intérieure, ils intensifient leur politique de la corde raide et leurs préparatifs de guerre à l'étranger, et s'attendent à ce que le Canada s'aligne sur eux. Cependant, les Canadiens et les Québécois ont une fière histoire de prises de position contre l'agression et la guerre impérialistes. C'est pourquoi ils ont organisé des manifestations dans plusieurs villes pour dire sans équivoque à Joe Biden de rentrer chez lui.

Jeunes pour le renouveau démocratique, des membres de la communauté haïtienne, des militants du mouvement de solidarité avec Cuba d'Ottawa, de Gatineau et de Montréal ainsi que des militants du PCC(M-L) ont convergé devant l'ambassade des États-Unis à Ottawa le 23 mars pour envoyer le message clair à Joe Biden qu'il n'est pas le bienvenu au Canada. La diaspora haïtienne était présente en force et s'est exprimée fièrement pour défendre sa patrie et contre les plans insidieux des deux pays. Les amis et les sympathisants de Cuba ont également demandé à Joe Biden de mettre immédiatement fin au blocus illégal de Cuba par les États-Unis.




Ottawa, 23 mars 2023

À Montréal, le 24 mars, à l'appel de l'organisation Solidarité Québec-Haïti, un vigoureux rassemblement s'est tenu pendant près de deux heures devant le consulat des États-Unis. De nombreux manifestants brandissaient des drapeaux haïtiens et des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Arrêtez d'armer les tueurs », « Biden/Trudeau Arrêtez le génocide », « Arrêtez d'appuyer les gangs en Haïti », « États-Unis, Core Group : Hors d'Haïti ! », « Haïti ne mourra pas », « Vive la lutte du peuple Haïtien pour son droit d'être ! » et bien d'autres slogans que les gens ont scandés à l'unisson. Les automobilistes qui passaient ont klaxonné en signe de soutien.



Montréal, 24 mars 2023

En Alberta, les Calgariens et les résidents d'Edmonton se sont joints à tous ceux qui, partout au Canada, ont dit « Non au bellicisme » et « Canada, hors de l'OTAN », en organisant des piquets audacieux et animés à l'heure de pointe de l'après-midi du 23 mars. De nombreux piétons et automobilistes ont levé le pouce ou klaxonné en passant devant le piquet. D'autres se sont arrêtés pour discuter, notamment du rôle de l'OTAN. Les habitants de Calgary sont particulièrement préoccupés par le fait que le jour de l'arrivée de Joe Biden au Canada, le ministre de l'Emploi et de l'Économie de l'Alberta, Brian Jean, alors qu'il prenait la parole lors d'un déjeuner de la Chambre de commerce de Calgary, a proposé que la ville accueille les nouveaux bureaux de l'Accélérateur d'innovation de défense pour l'Atlantique Nord (DIANA) de l'OTAN en Amérique du Nord.

Calgary


Edmonton

Le 19 mars, des actions ont été organisées à Montréal, Toronto et Windsor pour dénoncer la visite prochaine de Joe Biden et pour marquer le 24e anniversaire de la guerre de l'OTAN contre la Yougoslavie (24 mars 1999), le 20e anniversaire de la guerre menée par les États-Unis contre l'Irak et le 12e anniversaire de la guerre de l'OTAN contre la Libye, et pour demander aux États-Unis de rendre des comptes pour ces crimes.



Montréal, 19 mars 2023
Toronto, 19 mars 2023


Windsor, 19 mars 2023

(Photos: LML, JRD)

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Le Canada donne suite aux engagements pris envers les États-Unis lors du Sommet des leaders nord-américains


Rassemblement à Montréal le 29 mars 2023 contre la fermeture du poste frontalier du chemin Roxham en raison de l'élargissement de l'Entente sur les tiers pays sûrs.

La visite au Canada du président Joe Biden peut être considérée comme le suivi par les États-Unis des engagements pris par le Canada lors du 10e Sommet des leaders nord-américains qui s'est tenu à Mexico le 10 janvier, avec la participation de Joe Biden, du premier ministre Justin Trudeau et du président mexicain Andres Manual Lopez Obrador. Également connues sous le nom de Sommets des Trois Amigos, ces réunions ont débuté sous les gouvernements du président américain George W. Bush, du président mexicain Vicente Fox et du premier ministre canadien Paul Martin en 2005, peu de temps après le déclenchement de la guerre en Irak par les États-Unis. À l'époque, une forte impulsion existait pour intégrer l'appareil militaire et policier des trois pays dans le cadre de la sécurité intérieure des États-Unis, au nom de la sécurité contre le terrorisme.

Le sommet de cette année s'est concentré sur quatre domaines dans lesquels les États-Unis attendent du Canada qu'il renforce son soutien aux objectifs américains et qu'il intensifie son intégration dans l'économie et la machine de guerre américaines : 1) les chaînes d'approvisionnement en semi-conducteurs pour les puces électroniques, 2) les minéraux et ressources critiques qui sont stratégiques à des fins militaires et économiques, 3) la migration des peuples, 4) les discours sur l'équité et l'antiracisme pour faire croire qu'il existe un équilibre entre ce que veulent les riches et ce que veulent les peuples.

Les annonces faites par Trudeau et Biden lors de la visite de ce dernier au Canada ont porté sur les trois premiers points. Une déclaration publiée par le cabinet du premier ministre le 24 mars indiquait ce qui suit :

« En collaboration avec les États-Unis, nous mettrons en place un corridor transfrontalier de fabrication de semi-conducteurs, en commençant par la signature d'une entente entre le Canada et IBM en vue d'accroître les activités intérieures de recherche et développement sur les semi-conducteurs et le conditionnement avancé connexe. Les semi-conducteurs permettent de réaliser des progrès dans divers domaines, notamment l'énergie propre, les communications et l'informatique, et le Canada joue un rôle essentiel dans l'écosystème nord-américain des semi-conducteurs. L'investissement du Canada dans ce secteur, qui pourrait atteindre 250 millions de dollars, contribuera également à améliorer la compétitivité de l'Amérique du Nord et la résilience de la chaîne d'approvisionnement, à réduire la pollution, à favoriser la sécurité économique et nationale et à créer de bons emplois pour la classe moyenne. »

La question des minéraux critiques vise principalement à établir pour ces matériaux des chaînes d'approvisionnement qui ne sont pas liées à la Chine, et elle est généralement soulevée au nom de «l'écologisation de l'économie» et d'autres grands idéaux. Ainsi, « les dirigeants ont aussi convenu de travailler ensemble à promouvoir le commerce de marchandises propres, dont l'acier et l'aluminium verts, et de poursuivre leur collaboration à l'égard de l'énergie renouvelable et des chaînes d'approvisionnement des véhicules électriques, de la chaîne de valeur des minéraux critiques et de l'énergie nucléaire. Ils souhaitent aussi harmoniser l'infrastructure de véhicules zéro émission afin de créer de nouveaux débouchés pour que les gens réussissent et aient de belles carrières. »

La migration à travers la frontière américaine vers le Canada, en particulier par ceux qui ne peuvent se prévaloir des voies officielles pour traverser les frontières ou demander le statut de réfugié, ce que les États-Unis et le Canada considèrent comme une « migration irrégulière », a été davantage restreinte dans les accords conclus le 24 mars. Les deux dirigeants ont déclaré : « Pour lutter contre la migration irrégulière, nous élargissons l'Entente sur les tiers pays sûrs afin qu'elle s'applique non seulement aux postes frontaliers désignés, mais également à l'ensemble de la frontière terrestre, y compris aux cours d'eau intérieurs. Ainsi, le processus sera plus équitable et la migration sera plus ordonnée entre les deux pays. Ce changement entrera en vigueur à 00 h 01 (HAE) le samedi 25 mars 2023. ». La situation dans laquelle se trouvent les personnes qui franchissent la frontière de manière « irrégulière » est déjà potentiellement mortelle, et cette annonce ne fera qu'aggraver les choses.

Indépendamment du surnom des « Trois Amigos », la servilité du gouvernement canadien face aux visées américaines lors de la discussion au Mexique en janvier, et les annonces faites lors de la visite de Joe Biden au Canada n'ont rien à voir avec les relations fraternelles d'avantage réciproque, d'amitié et de paix que les peuples du Canada et du Québec cherchent à établir avec les États-Unis ou tout autre pays.

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Les opérations des États-Unis dans l'Arctique canadien consolidées lors de la visite de Biden

Un des éléments de l'ordre du jour du gouvernement Trudeau depuis son élection est de permettre lentement aux États-Unis d'étendre leurs opérations dans l'Arctique canadien, au nom de la protection du Canada contre les menaces imaginaires de la Russie et de la Chine. Cela comprend surtout l'élargissement du rôle de NORAD dans l'Arctique, qui est sous commandement américain, comme s'il s'agissait d'une opération conjointe. Cet ordre du jour a encore progressé lors de la visite du président américain Joe Biden au Canada.

La déclaration conjointe de Biden et Trudeau, datée du 24 mars, indique que « notre plus grande priorité est de protéger nos citoyens et notre territoire souverain. Nous investirons dans la modernisation du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord (NORAD), et plus précisément :

« Dans le cadre d'un investissement de 6,96 milliards de dollars dans la modernisation du système de surveillance, acquérir et mettre en service deux systèmes de radar transhorizon (OTHR) de prochaine génération couvrant les voies d'approche arctiques et polaires. Le premier système sera déployé d'ici 2028 afin d'améliorer la capacité d'alerte rapide et la connaissance des voies d'approche nord-américaines.

« Des investissements de 7,3 milliards de dollars dans les zones d'opérations nordiques avancées afin de financer des aéronefs de 5e génération et des ressources de mobilité et de ravitaillement. Ces capacités devraient être en place avant l'arrivée des avions F-35, notamment l'amélioration des aérodromes pour accueillir le personnel des aéronefs, le carburant et les munitions, afin que le NORAD puisse dissuader les menaces émergentes contre notre espace aérien et maritime, s'en défendre et concurrencer la Chine et la Russie dans les prochaines années.

« Le premier ministre a confirmé que les fonds nécessaires à ces investissements proviendraient des investissements prévus du Canada dans l'infrastructure de la défense. Ces efforts déployés par le Canada et les États-Unis permettront de renforcer la capacité du NORAD à détecter les menaces plus tôt et avec une plus grande précision ainsi qu'à intervenir de manière efficace. Face aux menaces mondiales, les dirigeants ont convenu de l'importance d'investir dans des forces modernes, opérationnelles et aptes, conformément aux engagements pris envers l'OTAN en matière de défense lors du Sommet du Pays de Galles en 2014 et à leurs promesses d'investissement dans ce domaine. Ces investissements permettent de fournir de véritables contributions à l'OTAN, aux Nations unies et à d'autres missions internationales. »

Depuis la mi-2022, l'engagement du Canada dans la modernisation du NORAD a fait couler beaucoup d'encre. En juin 2022, la ministre de la Défense nationale, Anita Anand, a annoncé que ce projet impliquerait des dépenses de 4,9 milliards de dollars pour les six premières années, avec un nouveau financement entrant en jeu la septième année, s'élevant à 38,6 milliards de dollars sur vingt ans, pour des dépenses totales de près de 49 milliards de dollars pour le projet.

Le projet de modernisation vise principalement à renforcer les capacités de surveillance du NORAD, c'est-à-dire les capacités de surveillance des États-Unis dans l'ensemble de l'Arctique et dans l'Arctique canadien en particulier. Une grande partie de ce projet implique l'utilisation de nouvelles technologies télécommandées, dont certaines doivent encore être développées, impliquant des réseaux de capteurs, de drones et d'autres types de véhicules sans pilote, à la fois sur et sous l'eau dans l'Arctique canadien.

Un récent reportage de la chaîne CBC s'est penché sur la modernisation du NORAD dans le Nord canadien et sur les obstacles auxquels elle s'est heurtée. Le reportage citait le vice-amiral Bob Auchterlonie, responsable du Commandement des opérations interarmées du Canada, qui parlait du travail du Canada « en collaboration avec » la Cinquième flotte de la marine américaine pour le développement de systèmes de surveillance sous-marine, y compris des navires et des véhicules sous-marins sans pilote.

« Je dirais que la technologie a vraiment progressé au cours des dernières années. Nous travaillons avec nos alliés, ainsi qu'avec leurs propres scientifiques de la défense, pour mettre au point ces capacités de détection des adversaires dans nos eaux [...], à la fois en surface et sous la surface », a déclaré Bob Auchterlonie. La marine américaine prévoit de revitaliser sa cinquième flotte d'ici à 2045, avec une flotte de 373 navires avec équipage et 150 navires de patrouille sans équipage, soit un total de 523 navires. La marine a demandé au Congrès américain plus de 250 millions de dollars américains pour mettre au point des navires de surface et sous-marins sans pilote.

Cela montre que l'un des moyens par lesquels l'Arctique canadien passera sous le contrôle des États-Unis sera l'utilisation de navires et de drones télécommandés et sans pilote, ainsi que de réseaux de capteurs qui communiquent entre eux et avec le NORAD.

En d'autres termes, les nouvelles technologies en cours de développement visent à faciliter la prise de contrôle de l'Arctique canadien par les États-Unis et à le militariser sans qu'il soit nécessaire d'envoyer des « troupes sur le terrain ». C'est l'une des raisons pour lesquelles le premier ministre Trudeau continue de dire qu'il défend la souveraineté du Canada dans l'Arctique et le passage du Nord-Ouest. Il peut dire qu'il ne veut pas des États-Unis dans l'Arctique canadien tout en ouvrant la voie à un contrôle à distance par les États-Unis.

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L'urgente nécessité de défendre les droits des migrants et des réfugiés

Manifestation à Montréal contre la décision du Canada et des États-Unis de bloquer davantage la « migration irrégulière »


Le 29 mars, une manifestation a eu lieu à Montréal devant le bureau de circonscription du premier ministre Justin Trudeau, contre la fermeture du poste frontalier du chemin Roxham entre le Québec et l'État de New York. Outre Solidarité sans frontières, qui a organisé l'action, des représentants d'organisations communautaires et autres représentant des étudiants préoccupés par l'environnement naturel et social, des femmes, des personnes travaillant dans le secteur de la santé et d'autres encore ont pris la parole.

La fermeture du chemin Roxham est une conséquence directe de la visite du président américain Joe Biden au Canada. Le 24 mars, le Canada et les États-Unis ont « annoncé un Protocole additionnel qui élargit l'Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS) et s'applique à toute la frontière terrestre, y compris aux cours d'eau intérieurs ». En vertu de cette entente, le Canada et les États-Unis se sont mutuellement déclarés sûrs pour les réfugiés et empêchent ceux qui demandent l'asile à la frontière canado-américaine de le faire.

Bien que l'accord ait été préparé il y a un an, les demandeurs d'asile eux-mêmes n'ont été prévenus que quelques heures à l'avance par le gouvernement fédéral avant qu'il ne ferme la frontière lorsque l'élargissement de l'ETPS est entré en vigueur le 25 mars à minuit.

Par le biais de l'ETPS, en vigueur depuis 2004, le Canada renvoie les réfugiés aux États-Unis où ils risquent une détention arbitraire, un renvoi accéléré pour que leur cas soit entendu, et des poursuites au criminel pour avoir traversé la frontière américaine. Il s'agit d'une violation des engagements internationaux du Canada à l'égard des demandeurs d'asile.

Les participants au rassemblement du 29 mars ont appelé à la fin de l'ETPS. Ils ont souligné la cruauté et l'hypocrisie du gouvernement libéral de Trudeau qui, tout en parlant de préparer un programme massif de régularisation pour les personnes sans statut, travaille en secret avec les États-Unis depuis un an pour fermer le passage frontalier irrégulier, ajoutant qu'il ne fallait plus se faire d'illusions quant à l'aide que le gouvernement fédéral pourrait apporter à ceux qui voyagent à travers les Amériques en quête de sécurité.

Ils ont également condamné le gouvernement de la Coalition Avenir Québec (CAQ) qui, au début de la pandémie, parlait de ceux qui étaient passés par le chemin Roxham comme des travailleurs essentiels et des anges gardiens et qui, aujourd'hui, avec toute sa rhétorique, traite ceux qui entrent de façon irrégulière comme une menace pour la soi-disant cohésion nationale du Québec, etc.

Les demandeurs d'asile eux-mêmes, ont-ils dit, y compris des familles entières avec de jeunes enfants, qui ont souvent voyagé à travers de nombreux pays, affrontant toutes sortes de périls et de traumatismes jusqu'à ce qu'ils arrivent au chemin Roxham, où des installations fédérales avaient été mises en place pour assurer leur sécurité lors de la traversée, n'ont reçu qu'un préavis de quelques heures avant que la frontière ne soit fermée hermétiquement sous leur nez au petit matin du 25 mars.

S'ils sont pris, les demandeurs d'asile doivent désormais prouver qu'ils se trouvent au Canada depuis 14 jours, sauf pour quelques exceptions telles que les enfants non accompagnés et les personnes dont des membres de la famille vivent au Canada, sous peine d'être renvoyés aux États-Unis.

Les intervenants ont également évoqué la mort de Fritznel Richard, un ressortissant haïtien qui, faute de permis de travail, avait tenté de rentrer aux États-Unis, et celle de Jose Leos Cervantes, un ressortissant mexicain qui luttait pour faire vivre sa famille à Toronto et qui est décédé près de la frontière américaine.

Dans leur annonce d'élargissement de l'ETPS, les gouvernements des deux pays affirment notamment qu'ils veulent « favoriser un processus sécuritaire, juste et ordonné en matière de migration, d'asile et de sécurité à la frontière. Cette démarche s'assortit d'un engagement à s'attaquer aux causes profondes des migrations irrégulières et des déplacements forcés tout en respectant les droits de ceux qui fuient la persécution ». Les États-Unis et le Canada prennent-ils des mesures pour mettre fin à leurs interventions étrangères, y compris les guerres et les agressions, qui sont la cause première du déplacement de millions de personnes dans le monde ? En fait, la visite de Joe Biden au Canada a été l'occasion pour les deux pays de planifier de nouvelles infamies contre Haïti et son peuple, ce qui ne fera qu'exacerber les crises auxquelles ils sont confrontés.

L'unité d'action de tous les groupes qui travaillent à la défense des droits de tous, ont déclaré les orateurs, doit être renforcée et l'ensemble de la classe ouvrière doit être appelée à s'approprier la lutte pour la défense des droits de tous, en tant qu'êtres humains à part entière, avec tous les droits que cela implique.

La nécessité urgente de s'opposer à la criminalisation des migrations et de disposer de moyens sécuritaires pour migrer d'un pays à l'autre est soulignée par la mort d'au moins huit personnes de deux familles le 30 mars, alors qu'elles tentaient d'effectuer une « traversée irrégulière » du Canada vers les États-Unis, en passant par le fleuve Saint-Laurent et le territoire mohawk d'Akwesasne.

Une campagne de pétition est en cours pour mettre fin à l'ETPS. Pour lire ou signer la pérition, voir Migrant Rights Network. Le Marxiste-Léniniste appelle tout le monde à utiliser la pétition et d'autres moyens pour mettre fin à l'ETPS et à toutes les violations des droits des immigrants et des réfugiés commises par le Canada, qui causent tant d'injustices et de tragédies.

(Photos: LML, Solidarité sans frontière)

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Le Syndicat canadien de la fonction publique condamne la fermeture du poste frontalier du chemin Roxham

Dans un communiqué de presse du 29 mars, le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) a condamné la fermeture du poste frontalier irrégulier du chemin Roxham, le principal point d'entrée au Canada utilisé par les demandeurs d'asile qui voyagent à pied depuis les États-Unis.

La fermeture du chemin Roxham déclare le syndicat, « compliquera la vie de milliers de personnes réfugiées vulnérables et pourrait coûter des vies ». Il explique qu'en vertu de l'Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS) élargie, « toute personne demandeuse d'asile doit présenter sa demande dans le premier pays sûr où elle arrive » et il note que dans cette entente le Canada désigne les États-Unis comme un pays sûr. Cependant, il fait remarquer que « les militants soulignent que les États-Unis ne garantissent pas la sécurité des personnes réfugiées ». Il poursuit en expliquant que « le Conseil canadien pour les réfugiés précise que les personnes réfugiées dans le système américain s'exposent à la détention arbitraire, à un renvoi accéléré avant qu'elles n'aient la chance de comparaître devant un(e) juge et à des poursuites pénales pour être entrées aux États-Unis ».

Le SCFP ajoute que les défenseurs des droits humains « soutiennent depuis longtemps que la solution aux passages frontaliers non officiels est de suspendre l'ETPS et de laisser les gens traverser aux points d'entrée officiels en toute sécurité. Deux tribunaux ont jugé, en 2007 et en 2020, que l'ETPS était inconstitutionnelle. La Cour suprême du Canada a entendu une cause concernant cette entente à la fin de 2022, mais elle n'a pas encore rendu sa décision ».

Le syndicat poursuit en citant le Réseau des droits des migrants qui affirme que « des personnes réfugiées et migrantes mouraient déjà en traversant le chemin Roxham parce que l'entente sur les tiers pays sûrs (ETPS) et d'autres lois sur l'immigration les empêchent de voyager en toute sécurité ».

« La décision antidémocratique du Canada de fermer le chemin Roxham poussera les personnes demandeuses d'asile, dont beaucoup veulent désespérément être en sécurité, à traverser par des moyens plus dangereux », ajoute le SCFP.

« Des gens ont perdu des membres et sont morts en traversant dans des conditions dangereuses à divers endroits le long de la frontière canado-américaine. La récente décision du gouvernement canadien va rendre ce type de tragédie plus courant. Il s'agit également d'un plan coûteux et irréalisable qui va causer une surveillance accrue des frontières et encourager l'industrie de la traite de personnes.

« Le Canada est à contre-courant de l'histoire, écrit le syndicat. En vertu du droit international, les gens ont le droit de demander le statut de réfugié et le droit à un processus équitable pour déterminer si ce statut leur sera conféré. »

Le SCFP appelle ses 715 000 membres à « agir en appuyant la campagne du Réseau des droits des migrants pour soutenir les personnes demandeuses d'asile en quête de sécurité au Canada ».

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Faits concernant la « migration irrégulière »
mis en contexte

- Diane Johnston -

Le Canada considère que les personnes qui franchissent la frontière canado-américaine sans passer par les postes frontaliers officiels sont des migrants irréguliers. Certains utilisent cyniquement la situation des immigrants et des réfugiés à des fins intéressées. En recourant à la pratique bien connue du diviser pour régner, on prétend que le nombre insoutenable d'immigrants et de réfugiés crée des crises sociales. Il n'y a rien de vrai là-dedans. Il s'agit d'une désinformation visant à dissimuler l'offensive antisociale menée contre le peuple depuis des décennies par les cercles dirigeants, afin de miner les luttes menées par le peuple pour unir ses efforts en vue de créer de nouveaux arrangements prosociaux. En outre, cela ne s'attaque pas aux raisons pour lesquelles les gens sont déplacés de leur pays d'origine et migrent vers d'autres pays, car cela impliquerait directement le Canada en tant que partie responsable.

C'est dans ce contexte que le premier ministre du Québec et d'autres ont demandé le renforcement de l'Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS), ce que le Canada et les États-Unis ont maintenant accepté de faire. Les chiffres réels de l'immigration dite irrégulière ne résistent pas à un examen approfondi.

En 2022, 39 171 personnes sont entrées au Canada par le chemin Roxham. Le point de passage du chemin Roxham entre le Québec et l'État de New York est bien connu, mais ce n'est pas le seul endroit où de tels passages aux frontières sont effectués. Les chiffres totaux de la migration par des passages non officiels au Canada depuis les États-Unis ne sont pas facilement disponibles.

Toutes les personnes qui traversent la frontière de manière irrégulière ne demandent pas l'asile en tant que réfugiés. Seules 20 891 personnes ayant traversé le Canada à pied ont demandé l'asile en 2022, sur un total de 60 158 demandes. L'ETPS et son récent élargissement à l'ensemble de la frontière terrestre et des cours d'eau intérieurs entre le Canada et les États-Unis auraient pour effet de renvoyer ces personnes aux États-Unis.

Les coups d'État, les sanctions, les agressions et les guerres menés par les États-Unis sont l'une des principales raisons pour lesquelles des personnes sont déplacées et forcées d'émigrer. Le Canada, en tant qu'adepte de l'apaisement envers l'impérialisme américain et membre de l'alliance agressive qu'est l'OTAN, est totalement impliqué dans ces activités. Une majorité de Québécois et de Canadiens s'opposent à ce soutien à l'impérialisme américain et considèrent que le Canada ne devrait pas créer de réfugiés en premier lieu et qu'il devrait accueillir ceux qu'il a victimisés et déplacés, non pas par charité, mais pour assumer la responsabilité de ses méfaits.

Le nombre de personnes demandant le statut de réfugié doit être examiné dans le contexte des chiffres globaux de l'immigration au Canada. Le Réseau des droits des migrants note que 616 429 Ukrainiens ont été autorisés à se rendre au Canada depuis 2022 et que près de 1,2 million de nouveaux permis de travail et d'études ont été approuvés au Canada en 2022. Le réseau souligne en outre que « lorsque les demandeurs d'asile arrivent à pied des États-Unis, ils passent par les contrôles de sécurité normaux et le processus de demande d'asile comme n'importe quel autre demandeur. Le taux d'acceptation des demandeurs d'asile qui traversent à pied est de 60 %, soit le même que celui de tous les autres demandeurs ».

Autrement dit, les passages irréguliers au chemin Roxham ou ailleurs n'ont rien d'exceptionnel, et ces passages et les demandeurs d'asile ne comptent pas pour beaucoup dans le nombre total de personnes qui migrent vers le Canada. Les faits et les chiffres montrent clairement que l'ETPS n'est pas nécessaire et que les demandes de l'abroger sont justifiées.

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Gendarmerie royale du Canada, hors des terres des Wet'suwet'en!

Opposons-nous à la violence de l'État au service d'intérêts privés contre les Wet'suwet'en

Le poste de contrôle de Gidim'ten nous informe que le 29 mars au matin, « une force importante du Groupe d'intervention pour la sécurité de la collectivité et de l'industrie (GISCI) de la Gendarmerie royale du Canada a fait un raid sur le site d'un village Gidimt'en et a arrêté cinq défenseurs de la terre et de l'eau, pour la plupart des femmes autochtones, dont la fille du chef gidimt'en Woos ». Le raid s'accompagnait d'un mandat de perquisition pour vol de moins de 5 000 dollars, sans lien évident avec le village de Gidimt'en.

« Cette action de grande envergure menée du GISCI de la GRC a mobilisé plus d'une dizaine de véhicules de police et d'agents de toute la Colombie-Britannique. Ces arrestations interviennent quelques semaines seulement après que la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC (CCETP) a annoncé qu'elle avait ‘lancé une enquête systémique du Groupe d'intervention pour la sécurité de la collectivité et l'industrie (GISCI) de la Division « E » de la GRC'. » La vidéo du raid peut être visionnée ici.

LML dénonce ce nouveau raid contre les Wet'suwet'en et le rôle infâme de l'État canadien qui utilise la violence policière pour intimider et criminaliser les Wet'suwet'en pour avoir exercé leur droit de dire Non ! au gazoduc que Coastal GasLink leur impose. Le Canada a le devoir de respecter la juridiction des Wet'suwet'en sur leurs propres territoires traditionnels qui n'ont jamais été cédés. La façon dont le Canada traite les Wet'suwet'en et la situation révoltante à laquelle sont confrontés les peuples autochtones montre que ses prétentions à défendre les droits humains et à réprimander d'autres pays pour justifier son ingérence dans leurs affaires sont une véritable imposture.

Les Wet'suwet'en expliquent : « Dans les jours qui ont précédé cette action policière, le GISCI de la GRC a patrouillé sur les zones de piégeage et d'utilisation culturelle des Wet'suwet'en, harcelant et intimidant les membres des Wet'suwet'en et perturbant les activités culturelles des Wet'suwet'en qui sont protégées par la Constitution. Les agents d'une société de sécurité privée engagée par le gazoduc Coastal GasLink, Forsythe, ont également intensifié leur harcèlement et leur surveillance de Wet'suwet'en au cours des derniers jours.

« L'unité du GISCI de la GRC et l'agence Forsythe sont toutes deux citées comme défenderesses dans une action en justice intentée par des Wet'suwet'en, qui allègue que la police et la sécurité privée ont lancé une campagne coordonnée de harcèlement et d'intimidation dans le but de forcer les Wet'suwet'en à abandonner leurs territoires non cédés. »

Sleydo', porte-parole du poste de contrôle de Gidimt'en, a déclaré : « Ce harcèlement et cette intimidation sont exactement le type de violence qui vise à nous chasser de nos terres. La menace constante de violence et de criminalisation pour le simple fait d'exister sur nos propres terres a dû être ce que nos ancêtres ont ressenti lorsque les agents indiens et la GRC nous ont chassés de nos maisons jusque dans les années 1950 dans notre région. Le projet colonial se poursuit aux mains des mercenaires privés de l'industrie, le GISCI. »

Les Wet'suwet'en soulignent que le raid et les arrestations ont lieu quelques jours avant que les délégués autochtones, dont les chefs héréditaires wet'suwet'en, ne se rendent à l'assemblée générale annuelle de la Banque royale du Canada, le 5 avril, pour s'opposer à l'expansion des projets de combustibles fossiles sans consentement sur leurs territoires.

Le chef héréditaire des Wet'suwet'en, Na'Moks, a déclaré : « C'est du harcèlement et c'est exactement ce que la Banque royale du Canada finance. À l'approche de son assemblée des actionnaires qui se tient la semaine prochaine, la RBC continue de financer le colonialisme d'entreprise et de chasser les peuples autochtones de leurs terres sous la menace des armes, tout cela pour un gazoduc de gaz de fracturation que nous n'avons pas les moyens d'acheter aujourd'hui ou dans l'avenir. Dans le contexte du vol de nos terres ancestrales, il est scandaleux de prétendre que des scies et des vêtements ont été volés. »

Mise à jour sur l'arrestation de défenseurs de
la terre de novembre 2021

Les défenseurs de la terre arrêtés en novembre 2021 continuent de se défendre devant les tribunaux. Le 28 février, le poste de contrôle de Gidim'ten a informé qu'« une dizaine de défenseurs des terres des Wet'suwet'en et de sympathisants ont demandé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique de suspendre les accusations d'outrage criminel à la lumière des violations généralisées de la Charte découlant de l'inconduite de la police » .

« Alléguant un ‘abus de procédure', les requêtes soulignent le ‘recours disproportionné et excessif à la force' de la GRC contre des défenseurs pacifiques des terres lors d'une série de raid de police militarisée en novembre 2021. Les requêtes allèguent que les personnes arrêtées ont été privées de leur droit à la sécurité de leur personne, soumises à de fouilles et de saisies déraisonnables, ont été détenues et emprisonnées arbitrairement et qu'on leur a refusé une caution raisonnable sans motif valable, tout cela en violation de la Charte canadienne des droits et libertés.

« Les tactiques d'application de la loi du GISCI de la GRC ont porté atteinte aux droits individuels du requérant en vertu de la Charte, mais la mauvaise conduite de la police témoigne également d'un mépris systémique des droits et de la souveraineté des autochtones et de la Charte en général », peut-on lire dans les documents déposés auprès du tribunal.

« Les requêtes sont fondées sur le droit et la souveraineté des Wet'suwet'en et placent les arrestations dans un contexte plus large de relations entre les Wet'suwet'en et le Canada. Chaque arrestation a eu lieu sur les terres non cédées de la nation wet'suwet'en. Les défendeurs ont agi sous l'autorité légale des chefs héréditaires wet'suwet'en pour faire respecter les décisions prises collectivement par la nation dans sa salle de gouvernance (bahlats) pour protéger les terres et les eaux non cédées des Wet'suwet'en.

« Les Wet'suwet'en revendiquent le droit de vivre sur leurs territoires et de les protéger depuis des milliers d'années, principalement avec leur système de gouvernance de la salle des festivités mis en oeuvre collectivement par les clans et les groupes de maisons. L'impact de la manière dont la loi a été appliquée ne se limite pas aux personnes arrêtées, mais s'étend aux efforts de réconciliation entre les Wet'suwet'en et les gouvernements fédéral et provinciaux », poursuit le texte.

« Dans un protocole d'accord en 2020, les gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique ont reconnu le système héréditaire des Wet'suwet'en comme ‘un gouvernement légitime détenant un titre' sur 22 000 km2 de terres non cédées. Malgré cela, la GRC a entrepris à plusieurs reprises des invasions violentes et à grande échelle des territoires traditionnels des Wet'suwet'en et a mis en place une campagne soutenue de surveillance, d'intimidation et de harcèlement, qui fait actuellement l'objet d'une action en justice distincte de la part de Wet'suwet'en. »

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Déclaration de l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique

L'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique (UBCIC) est outrée d'apprendre qu'un nouveau raid de la GRC a eu lieu au poste de contrôle de Gidimt'en et que cinq personnes ont été arrêtées par le Groupe d'intervention pour la sécurité de la collectivité et l'industrie (GISCI), sous couvert d'un mandat de perquisition pour vol de moins de 5 000 dollars. Le lien éventuel entre le point de contrôle de Gidimt'en et le mandat de perquisition délivré par le GISCI avant les arrestations n'est pas clair à l'heure actuelle. Ces arrestations s'inscrivent dans un schéma inquiétant d'intimidation policière des peuples autochtones qui revendiquent leurs droits d'accès à leurs propres territoires et rejettent l'extraction de combustibles fossiles. L'UBCIC soutient sans équivoque ceux qui défendent le titre et les droits des dirigeants héréditaires des Wet'suwet'en.

Le grand chef Stewart Phillip, président de l'UBCIC, a déclaré : « Le point de contrôle de Gidimt'en est un camp stratégiquement situé à 44,5 kilomètres sur la route forestière de la rivière Morice. Sous la direction de leurs chefs héréditaires, les Wet'suwet'en s'opposent au plus grand projet de fracturation hydraulique de l'histoire du Canada. Le raid d'aujourd'hui constitue une réponse fédérale à la défense autochtone de leurs terres contre ce projet de fracturation.

« Le gazoduc Coastal GasLink (CGL), propriété de TC Énergie (anciennement TransCanada), vise à relier les opérations de fracturation du nord-est de la Colombie-Britannique à une installation de gaz naturel liquéfié (GNL) dans la ville côtière de Kitimat. Le droit des peuples autochtones de vivre sans violence ni intimidation sur leurs propres terres ne doit jamais être subordonné aux intérêts des entreprises de combustibles fossiles. Les vidéos partagées en ligne montrent plus d'une douzaine d'agents armés du GISCI faisant la queue pour effectuer le raid – pourquoi diable une telle force serait-elle nécessaire ? »

« Le GISCI est connu pour ses arrestations violentes d'autochtones sur leurs territoires, et il semble que ce soit un nouvel exemple. Ironiquement, nous attendons actuellement les résultats d'un examen systémique des activités du GISCI qui a été lancé par la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes de la GRC au début du mois. Nous demandons que le GISCI soit suspendu indéfiniment et certainement pour la durée de cet examen », a déclaré le chef Don Tom, vice-président de l'UBCIC.

« José Francisco Cali Tzay, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, s'est rendu au Canada le mois dernier et a rencontré les chefs héréditaires wet'suwet'en, a déclaré K'áwázit Marilyn Slett, secrétaire-trésorière de l'UCICB. Le rapport préliminaire qu'il a rédigé à l'issue de cette visite fait état des mêmes préoccupations que celles que nous avons exprimées à maintes reprises, à savoir que la criminalisation des défenseurs des droits humains autochtones est endémique et qu'il faut y mettre un terme. Le raid d'aujourd'hui contrevient à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, pour la mise en oeuvre de laquelle le Canada et la Colombie-Britannique ont tous deux adopté des lois, et constitue une démonstration flagrante de la suprématie actuelle du complexe militaro-industriel colonial. »

(29 mars 2023. Traduction par LML)

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Visite du Rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones


Le rapporteur spécial des Nations unies José Francisco Cali-Tzay (deuxième à partir de la gauche) visite le Centre national pour la vérité et la réconciliation à Winnipeg, le 7 mars 2023.

José Francisco Cali-Tzay, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, a visité le Canada du 1er au 10 mars. Il s'est rendu à Ottawa, Montréal, Winnipeg, Edmonton et Vancouver, où il a rencontré des représentants de gouvernement et des organisations autochtones, notamment l'Assemblée des Premières Nations, l'Inuit Tapiriit Kanatami et le Ralliement national des Métis. Il s'est également rendu dans des communautés autochtones et a également rencontré des organisations non gouvernementales. Au cours de sa visite, le rapporteur spécial a examiné un large éventail de questions touchant les Premières nations, les Inuits et les Métis, notamment la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et le droit à l'autodétermination, à la terre et aux ressources, ainsi que les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, les sépultures anonymes associées aux pensionnats, la langue et la culture, ainsi que le consentement préalable, libre et éclairé.

La page d'information du Haut-Commissariat de l'ONU pour les droits de l'homme dit que José Francisco Cali-Tzay « est Maya Kaqchikel du Guatemala, avec une expérience dans la défense des droits des Peuples autochtones, tant au Guatemala qu'au niveau des Nations unies et de l'Organisation des Etats Américains ». La dernière visite du rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones au Canada remonte à octobre 2013, lorsque le poste était occupé par l'avocat américain James Anaya, qui avait déclaré : « D'après tout ce que j'ai appris, je ne peux que conclure que le Canada est confronté à une crise en ce qui concerne la situation des peuples autochtones du pays. »

Le 10 mars, José Francisco Cali-Tzay a publié une déclaration de fin de mission, dont voici des extraits. Il présentera son rapport final au Conseil des droits de l'homme en septembre. Il ressort clairement de cette déclaration que le traitement réservé par le Canada aux populations autochtones demeure une situation critique.

« En ma qualité de Rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, je suis heureux de vous faire part de mes observations et recommandations préliminaires à la fin de ma visite officielle au Canada qui a eu lieu du 1er au 10 mars 2023. L'objectif de ma visite était de comprendre, dans un esprit de coopération mutuelle et de dialogue constructif, comment le Canada met en oeuvre les droits des peuples autochtones, afin d'identifier à la fois les bonnes pratiques et les obstacles potentiels et de proposer des recommandations concrètes pour surmonter les défis que j'ai observés. Mon évaluation finale et mes recommandations au gouvernement Canadien seront ultérieurement présentées dans un rapport écrit au Conseil des droits de l'homme à sa 54e session cette année. Malheureusement, en raison du peu de temps dont nous disposons, mes observations préliminaires ne refléteront pas l'ensemble des questions portées à mon attention, ni toutes les initiatives des gouvernements fédéral et provinciaux liées aux droits des peuples autochtones.

[...]

« La surreprésentation des personnes autochtones dans le système judiciaire pénal doit être contextualisé autour du colonialisme et du traumatisme intergénérationnel lié aux pensionnats. Les taux disproportionnellement élevés de personnes autochtones en milieu carcéral ont été liés à la discrimination raciale structurelle à tous les niveaux, y compris les actions policières, le système judiciaire et les services correctionnels. Les femmes autochtones et les personnes de diverses identités de genre sont les plus touchées, représentant environ 50 % de l'incarcération des femmes au Canada, même si elles représentent moins de 4 % de la population du pays. Dans les provinces centrales, y compris la Saskatchewan et le Manitoba, les chiffres atteignent 85 %. Les peuples autochtones sont détenus de manière disproportionnée dans des établissements à sécurité élevée et ont un accès limité aux programmes de réadaptation culturellement adaptés et sont soumis de manière disproportionnée au recours à la force et à l'isolement. Je n'ai pas observé de mesures d'adaptation spécifiques pour les détenus de diverses identités de genre.

[...]

« La relation des peuples autochtones avec leurs terres et territoires joue un rôle central dans la définition de leur identité en tant que peuples distincts. Au cours de ma visite, j'ai entendu à maintes reprises qu'une véritable réconciliation ne peut être réalisée qu'en respectant les traités existants et en prévoyant une restitution et une indemnisation pour la perte de terres, de territoires et de ressources. Je salue la décision rendue en 2017 par la Cour suprême du Canada, Nation Tsilhqot in c. Colombie-Britannique, la première déclaration de titre autochtone de l'histoire du Canada. Cependant, on m'a informé qu'en raison des coûts élevés et de la complexité des processus judiciaires et de négociation des traités, certains peuples autochtones doivent abandonner leurs revendications territoriales. De plus, j'ai entendu parler de la perte de confiance lorsque les gouvernements fédéral et provinciaux continuent d'exploiter les terres et les ressources alors que des traités modernes sont en cours de négociation.

« Au cours de ma visite, j'ai été informé qu'un grand nombre de mégaprojets dans les territoires autochtones se déroulent sans consultation de bonne foi et en l'absence du consentement libre, préalable et éclairé des peuples autochtones concernés, comme dans le cas du pipeline Trans Mountain. Je suis également préoccupé par la militarisation continue des terres autochtones et la criminalisation des défenseurs des droits humains autochtones qui résistent aux pipelines Trans Mountain et Coastal GasLink en Colombie-Britannique. J'exhorte le gouvernement du Canada à mettre fin à ces violations et à adopter des mesures adéquates pour garantir le droit des peuples autochtones à la consultation, au consentement préalable libre et éclairé et aux droits fonciers et leurs droits sur les terres, les territoires et les ressources.

[...]

« Les peuples autochtones sont de plus en plus confrontés à des catastrophes naturelles et à d'autres situations d'urgence telles que les incendies de forêt, les inondations, la déforestation et les phénomènes météorologiques extrêmes, souvent dus aux activités des industries extractives ou exacerbés par celles-ci. Le changement climatique, y compris la menace de déplacement dû à l'érosion côtière, a créé de nouveaux défis pour la sécurité du logement. Je demande au gouvernement du Canada de consulter les peuples autochtones pour relever ces défis, notamment en soutenant les initiatives dirigées par les peuples autochtones pour conserver la biodiversité et prévenir les catastrophes et la dégradation environnementales. Je réitère les conclusions de mon rapport thématique de 2022 au Conseil des droits de l'homme selon lesquelles les femmes autochtones sont des agents de changement actifs dans la société et des championnes de la durabilité, leurs connaissances scientifiques ont un rôle clé à jouer dans la sauvegarde des écosystèmes et pour la garantie de la justice et de l'équité environnementales.

[...]

« Je voudrais terminer ma déclaration en réaffirmant que les peuples et les individus autochtones doivent être exempts de toute forme de discrimination raciale, dans l'exercice de leurs droits. Les droits humains sont universels, indivisibles et interdépendants, et tous les peuples autochtones devraient avoir des droits et des chances équitables. J'invite le gouvernement du Canada, les provinces et les territoires à profiter de cette occasion pour promouvoir une réconciliation fondée sur une relation de nation à nation avec les peuples autochtones. Je tiens à souligner que le Canada a assuré qu'il travaillait à un avenir transformateur qui respecte et protège les droits des peuples autochtones à l'autodétermination, aux terres, aux territoires et aux ressources. »

Pour le texte complet de la déclaration de fin de mission, cliquer ici.

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