Des Palestiniens poursuivent Joe Biden dans une cour fédérale américaine

Le 13 novembre, des Palestiniens ont demandé à un tribunal fédéral des États-Unis d'interdire au président Joe Biden, au secrétaire d'État Antony Blinken et au secrétaire à la Défense Lloyd Austin de fournir de nouvelles armes, de l'argent et un soutien diplomatique à Israël, au motif que l'État d'Israël est en train de perpétrer un génocide contre la population civile de Gaza et que les responsables aux États-Unis ont le devoir légal d'empêcher ce crime le plus grave qui soit et de ne pas l'aggraver.

Selon certaines informations, d'éminents spécialistes du génocide et de l'Holocauste soumettent des déclarations à l'appui de cette poursuite en justice.

Le Centre pour les droits constitutionnels (CCR) et le cabinet d'avocats Van Der Hout LLP ont déposé l'action en justice au nom des plaignants. Biden, Blinken et Austin sont poursuivis en leur qualité officielle pour ne pas avoir empêché un génocide en cours, alors qu'ils ont l'influence suffisante sur l'État d'Israël pour l'y contraindre, et pour avoir directement favorisé le génocide en fournissant des armes, des fonds et une couverture diplomatique, en violation des obligations consacrées par la Convention sur le génocide et par le droit international coutumier. La Convention sur le génocide est également inscrite dans le droit américain.

La plainte est accompagnée d'une déclaration de William Schabas, le plus grand expert juridique mondial en matière de génocide, qui identifie les caractéristiques des déclarations du gouvernement israélien, l'assaut militaire meurtrier et le siège total comme des signes de génocide et affirme que les États-Unis ont manqué à leur obligation légale de prévenir le génocide. John Cox, Victoria Sanford et Barry Trachtenberg, spécialistes des génocides et de l'Holocauste, expliquent comment les intentions et les actions génocidaires des dirigeants israéliens ressemblent à celles d'autres génocides de l'histoire récente.

La plainte, qui vise à obtenir des mesures déclaratoires et injonctives, cite le soutien inconditionnel du gouvernement américain à Israël, qui bombarde la population de Gaza et la prive de nourriture, d'eau et d'autres produits de première nécessité. La plainte indique que même les crimes commis par l'aile militaire du Hamas le 7 octobre, qui a tué environ 1 200 Israéliens, dont de nombreux civils, et enlevé 240 personnes, ne peuvent légalement justifier les formes de ciblage d'une population entière et de punition collective infligées par le gouvernement israélien, sans parler de génocide. Depuis le 8 octobre, Israël a tué plus de 11 000 Palestiniens dans la bande de Gaza – pour la plupart des civils, dont plus de 4 600 enfants – et en a déplacé 1,5 million. Des milliers de Palestiniens sont toujours portés disparus et la destruction par Israël des hôpitaux, des écoles et de la plupart des infrastructures de Gaza – ainsi que la privation intentionnelle d'accès à la nourriture, à l'eau, à l'électricité et aux médicaments – a rendu la vie impossible dans la bande de Gaza.

Le document juridique cite le Dr Omar Al-Najjar, interne en médecine de 24 ans au complexe médical Nasser de Khan Younès et plaignant dans l'affaire, qui dit : « Pour être honnête, il est difficile de revoir toutes les scènes de ces dernières semaines. Elles ouvrent une porte sur l'enfer lorsque je me les remémore. » Il a ajouté : « J'ai perdu cinq membres de ma famille, j'ai soigné trop d'enfants qui sont les seuls survivants de leur famille, j'ai reçu le corps de collègues étudiants en médecine et de membres de leur famille et j'ai vu l'hôpital se transformer en refuge pour des dizaines de milliers de personnes alors que nous manquons tous de carburant, d'électricité, de nourriture et d'eau. Les États-Unis doivent mettre fin à ce génocide. Tout le monde dans le monde doit y mettre un terme. »

Outre le Dr Al-Najjar, les autres plaignants dans cette affaire sont les organisations palestiniennes de défense des droits humains Defense for Children International-Palestine et Al-Haq; les personnes Ahmed Abou Artema et Mohammed Ahmed Abou Rokbeh, qui se trouvent à Gaza; et Mohammad Monadel Herzallah, Laila Elhaddad, Waeil Elbhassi, Basim Elkarra et « A.N. », qui sont des citoyens américains dont la famille se trouve à Gaza. Tous ont vu plusieurs membres de leur famille tués, soumis au blocus de Gaza et déplacés.

La plainte fournit de nombreuses preuves que les actes du gouvernement israélien représentent un génocide en cours, que la Convention sur le génocide définit comme des actes commis « dans l'intention de détruire, ou tout, ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux », et qui peuvent être accomplis en tuant, en infligeant de graves lésions corporelles ou mentales à un groupe ciblé, ou en « soumettant intentionnellement un groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ». L'armée israélienne a pris pour cible des zones et des infrastructures civiles, en utilisant notamment des armes chimiques, et a privé les Palestiniens des produits de première nécessité, selon la plainte, tout en déshumanisant les Palestiniens en les qualifiant d'« animaux humains » qui ne méritent pas d'être protégés par les droits humains et en promettant de « tout éliminer », en précisant que « l'accent est mis sur les dommages et non sur la précision ». Gaza a déjà fait l'objet de cinq campagnes de bombardement, d'un blocus militaire de près de 17 ans et d'une occupation permanente qui a fait de Gaza une prison à ciel ouvert.

« Au cours des cinq dernières semaines, le président Biden et les secrétaires Blinken et Austin se sont tenus aux côtés d'un gouvernement israélien qui a clairement exprimé son intention de détruire la population palestinienne de Gaza. Alors que les quartiers, les hôpitaux et les abris pour Palestiniens déplacés étaient bombardés les uns après les autres, alors qu'ils étaient soumis à un siège total et à un blocus qui privait 2,2 millions de personnes des besoins vitaux, ils ont continué à apporter un soutien militaire et politique à la campagne génocidaire israélienne en cours, sans imposer de lignes rouges », a déclaré Katherine Gallagher, avocate principale au Centre pour les droits constitutionnels et l'une des avocates qui a porté l'affaire devant la Cour suprême. « Les États-Unis ont l'obligation claire et contraignante de prévenir, et non de poursuivre, le génocide. Jusqu'à présent, ils ont manqué à leur devoir juridique et moral et à leur pouvoir considérable de mettre fin à cette horreur. Ils doivent le faire. »

Les États-Unis ont le devoir, en vertu de l'article 1 de la Convention international sur le génocide, de prévenir et de punir les actes de génocide, une obligation que le Congrès des États-Unis a inscrite dans la loi en 1988 lorsqu'il a ratifié la convention et adopté la loi de mise en oeuvre de la convention sur le génocide (18 U.S.C. § 1091). Le devoir de prévention est d'autant plus important que les États-Unis exercent une influence considérable sur Israël. Selon les plaignants, l'administration Biden ne se contente pas de ne pas empêcher le génocide des Palestiniens par Israël, elle l'encourage activement. Depuis le début des bombardements, M. Biden a réaffirmé à plusieurs reprises, en paroles et en actes, le soutien « inébranlable » des États-Unis.

Les tribunaux ont considéré que la fourniture d'armes et d'autres matériels aux auteurs d'un génocide constituait une forme de complicité. Pour être coupable, le fournisseur ne doit pas nécessairement partager l'intention génocidaire des destinataires.

L'expert en génocide William Schabas écrit dans sa déclaration : « Je conclus qu'il existe un risque sérieux de génocide contre la population palestinienne de Gaza et que les États-Unis d'Amérique manquent à leur obligation, en vertu de la Convention de 1948 sur le génocide à laquelle ils sont parties ainsi que du droit international coutumier, d'user de leur position d'influence auprès du gouvernement d'Israël et de prendre les meilleures mesures en leur pouvoir pour empêcher que ce crime ne soit commis. »

« Les enfants palestiniens de Gaza sont indubitablement des cibles alors que les offensives militaires israéliennes répétées détruisent leurs maisons, leurs écoles et leurs quartiers, et que les forces israéliennes utilisent des armes fabriquées et financées par les États-Unis pour les tuer, eux et leurs familles, en toute impunité, écrit Khaled Quzmar, directeur général de Defense for Children International-Palestine (DFI-Palestine). Alors que les gens protestent dans les rues, les dirigeants du monde montrent, jour après jour, qu'ils n'ont pas la témérité de mettre fin à la destruction catastrophique et sans précédent de la vie des Palestiniens à Gaza. Nous avons besoin que le peuple américain se joigne à nous pour imposer la fin de ce génocide. »

L'avocat américain Marc Van Der Hout, du cabinet juridique Van Der Hout, LLP, écrit : « Les États-Unis doivent remplir leurs obligations au titre de la Convention sur le génocide et du droit international pour empêcher l'escalade des atrocités à Gaza. Les meurtres et les enlèvements perpétrés par le Hamas le 7 octobre, aussi horribles soient-ils, ne justifient en aucun cas les massacres perpétrés actuellement par l'État d'Israël avec le soutien inconditionnel et l'assentiment des États-Unis. Les tribunaux doivent maintenant forcer les États-Unis à respecter leurs obligations en vertu de la loi.

« Nous avons perdu tant de personnes, mais il y en a encore beaucoup d'autres qui vivent, et nous leur devons de faire tout ce qui est possible pour mettre fin à ce génocide, a déclaré Mohammad Herzallah, l'un des plaignants dans cette affaire, qui a de la famille à Gaza. J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir : j'ai participé à des manifestations, à des sit-in, j'ai écrit des lettres à mes représentants, j'ai pratiqué la désobéissance civile. Aujourd'hui, je demande aux tribunaux de mettre fin à ce génocide en cours. »

Pour plus d'informations et pour lire la plainte, visitez la page de l'affaire du Centre pour les droits constitutionnels ici.

Le Centre pour les droits constitutionnels indique sur son site Web qu'il « travaille avec des communautés menacées pour lutter pour la justice et la libération par le biais de litiges, d'actions de plaidoyer et de communications stratégiques. Depuis 1966, le Centre pour les droits constitutionnels s'est attaqué à des systèmes de pouvoir oppressifs, notamment le racisme structurel, l'oppression fondée sur le sexe, l'inégalité économique et les abus gouvernementaux. »

(Avec des informations de ccrjustice.org)


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Volume 53 Numéro 22 - Novembre 2023

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