Les organisations humanitaires exigent le respect des droits des Palestiniens
Nations unies
Francesca Albanese, rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en Palestine, a averti le 14 octobre que « les Palestiniens courent un grave danger de nettoyage ethnique de masse » et a appelé la communauté internationale à « négocier d'urgence un cessez-le-feu ». « Il existe un grave danger que ce à quoi nous assistons soit une répétition de la Nakba de 1948 et de la Naksa de 1967, mais à plus grande échelle. La communauté internationale doit tout faire pour empêcher que cela ne se reproduise », a Francesca Albanese, notant que les responsables israéliens ont ouvertement plaidé en faveur d'une nouvelle Nakba. « La situation dans les territoires palestiniens occupés et en Israël a atteint un point critique », a-t-il ajouté. « Les Nations unies et leurs États membres doivent intensifier leurs efforts de médiation pour obtenir un cessez-le-feu immédiat entre les parties, avant que nous n'atteignions un point de non-retour. » « Au nom de la légitime défense, Israël cherche à justifier ce qui équivaudrait à un nettoyage ethnique », écrit en conclusion le rapport spécial qui appelle la communauté internationale à « mettre fin à ces violations flagrantes du droit international maintenant, avant que l'histoire tragique ne se répète ».
En date du 14 octobre, l'ONU rapporte que 2 200 Palestiniens ont été tués par les frappes aériennes israéliennes, citant les chiffres des autorités palestiniennes. Le 13 octobre, l'ONU avait signalé qu'au moins 423 000 personnes avaient été déplacées à Gaza, un chiffre publié avant que les occupants israéliens n'exigent l'évacuation des 1,1 million d'habitants du nord de la bande de Gaza. Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a publié le 14 octobre un communiqué de presse d'Euro-Med Monitor dans lequel l'organisation déclare avoir « documenté le déplacement de plus de 820 000 personnes vers des écoles affiliées à l'ONU, des écoles gouvernementales et les maisons de parents et de voisins ». Plus de 450 000 personnes ont été déplacées après que leurs maisons ont été détruites ou endommagées par des raids aériens israéliens.
Un ordre israélien voulant que les Palestiniens évacuent le nord de Gaza a été envoyé aux représentants à New York le 12 octobre. Israël a dit que les Palestiniens qui quitteraient ne seraient pas autorités à revenir « avant que nous le confirmions ». « Les Nations unies considèrent qu'il est impossible qu'un tel mouvement ait lieu sans conséquences humanitaires dévastatrices », a dit le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric.
Des rapports indiquent que les personnes tentant de respecter l'ordre n'ont pas eu droit à un passage sécuritaire et sont ciblés par les soldats israéliens.
L'Organisation mondiale de la santé s'est prononcée sur l'impossibilité d'une telle évacuation dans un communiqué du 13 octobre, qui dit en partie : « L'OMS se joint aux Nations unies pour exhorter Israël d'immédiatement annuler l'ordre d'évacuer plus d'un million de personnes vivant au nord de Wadi, à Gaza. Une évacuation de masse s'avérerait désastreuse – pour les patients, pour les travailleurs de la santé et pour les autres civils laissés pour compte ou pris dans un mouvement de masse.
« En raison des frappes aériennes et des frontières fermées, les civils n'ont nulle part à aller. Près de la moitié de la population de Gaza a moins de 18 ans. Alors que les approvisionnements en nourriture saine, en eau potable, en services de santé se détériorent, et sans refuge adéquat, les enfants et les adultes, y compris les aînés, seront grandement à risque de contracter des maladies.
« Le ministère de la Santé de Palestine a informé l'OMS qu'il
était impossible d'évacuer les patients vulnérables de l'hôpital
sans mettre leur vie en danger. Les patients vulnérables sont
ceux qui sont gravement blessés ou qui dépendent d'une
assistance respiratoire. Les déplacer au milieu des hostilités
met leur vie en danger immédiat. »
Israël largue des tracts demandant aux habitants de Gaza de fuir
du nord de la bande de Gaza vers le sud, le 12 octobre 2023.
Le porte-parole de l'OMS, Tarik Jasarevic, a déclaré le 13 octobre que le système de santé à Gaza est 'au point de rupture'. Les deux principaux hôpitaux au nord de la bande de Gaza, l'hôpital Indonésien et l'hôpital Shifa, ont déjà dépassé leur nombre maximum de 760 lits et les hôpitaux au sud de Gaza débordent aussi. » Six des sept principaux hôpitaux à Gaza ne fonctionnent que partiellement, a-t-il ajouté.
Le porte-parole de l'OMS a souligné que le déplacement de patients vulnérables comme ceux qui ont été gravement blessés et les adultes, les enfants et les nouveau-nés qui dépendent des respirateurs artificiels aux soins intensifs, serait un « arrêt de mort » et demander aux travailleurs de la santé de le faire serait « le comble de la cruauté ».
Tarik Jasarevic a dit que les travailleurs de la santé sur le terrain rapportent que les cadavres « s'accumulent » par manque de place dans les morgues, et les ambulanciers et les médecins doivent faire des choix « déchirants » sur quelle personne sauver et quelle délaisser.
Il a ajouté qu'au 12 octobre, 32 attaques contre les centres de
soin de santé dans la bande de Gaza ont été confirmés depuis le
début de l'offensive actuelle d'Israël, qui ont tué 11
travailleurs de la santé en devoir. Le Centre des opérations
d'urgence de Gaza, appuyé par l'OMS, a subi de graves dommages,
a-t-il dit.
Dans un communiqué de presse du 14 octobre, l'OMS demande à Israël d'« annuler immédiatement les ordres d'évacuation des hôpitaux du nord de Gaza » et appelle à la protection des établissements de santé, du personnel soignant, des patients et des civils. L'OMS réitère également ses appels à l'acheminement immédiat et de façon sécuritaire de fournitures médicales, de carburant, d'eau potable, de nourriture et d'autres aides humanitaires à Gaza par le point de passage de Rafah, où l'assistance vitale, y compris les fournitures sanitaires de l'OMS qui sont arrivées plus tôt dans la journée, attend actuellement d'être introduite ».
Les attaques israéliennes contre le personnel médical à Gaza
comprennent une frappe aérienne sur une ambulance le 11 octobre
2023, trois ambulanciers sont tués. Dommages causés à l'hôpital
Al-Awda par une frappe aérienne, le 11 octobre 2023.
Le coordonnateur des secours d'urgence de l'ONU, Martin Griffiths, a gazouillé que « le noeud coulant autour de la population civile de Gaza se resserre », demandant comment un nombre aussi important de personnes pouvait se déplacer dans une « zone de combat ayant une population aussi dense » en seulement 24 heures.
Le 14 octobre, le directeur de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a rappelé à Israël, dans un communiqué de presse, que « les guerres ont des règles ». « Les civils, les hôpitaux, les écoles, les cliniques et les locaux des Nations unies ne peuvent être pris pour cible. L'UNRWA ne ménage pas ses efforts pour inciter les parties au conflit à respecter leurs obligations en vertu du droit international afin de protéger les civils, y compris ceux qui cherchent refuge dans les abris de l'UNRWA.
Les abris de l'UNRWA à Gaza et dans le nord de Gaza ne sont plus sûrs. C'est une situation sans précédent.
« Cette guerre ne devrait pas être une exception, la protection des civils et des infrastructures civiles, y compris les bâtiments des Nations unies, s'applique également à ce conflit. »
Philippe Lazzarini, directeur de l'UNRWA, a prévenu le 13 octobre que l'ordre de relocalisation « ne fera qu'entraîner des niveaux de misère sans précédent et pousser encore plus les habitants de Gaza dans l'abîme ».
L'UNRWA a ensuite gazouillé le 13 octobre que Gaza devenait «
rapidement un enfer et est sur le point de l'effondrement ». «
Il n'y a pas d'exceptions, toutes les parties doivent respecter
les lois de la guerre. » Le 12 octobre, l'UNRWA a gazouillé que
12 membres de son personnel avaient été tués par l'offensive
israélienne.
Le 11 octobre, un communiqué de presse laisse percevoir l'ampleur de la destruction et de la campagne sans discernement de frappes et du nombre toujours grandissant de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays : « Près de 218 600 personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays (IDP) ont pris refuge dans 92 écoles de l'UNWRA dans les régions de la bande de Gaza. Le nombre d'IDP dans les refuges d'urgence de l'UNWRA continue d'augmenter de jour en jour alors que les frappes aériennes et les tirs d'artillerie des Forces israéliennes continuent dans toute la bande de Gaza.
« En outre, plusieurs autres personnes sont déplacées dans des écoles gouvernementaux et d'autres édifices. Au total, 340 000 Palestiniens ont été déplacés dans toute la bande de Gaza. » Au 12 octobre, ce chiffre a augmenté de 90 000 personnes, totalisant près de 430 000.
Pour bien comprendre l'ampleur du déplacement actuel de 430 000 personnes, la guerre de 1948 a pris fin alors que les forces israéliennes contrôlaient près de 78 % de la Palestine historique. Le 22 % qui restait a été confié à l'administration de l'Égypte et du Jourdain. L'appellation de cette dépossession du peuple palestinien sur laquelle est fondée l'État d'Israël est la Nakba (« La catastrophe »). En 1967, Israël a absorbé l'ensemble de la Palestine historique, en plus de territoire additionnel appartenant à l'Égypte et à la Syrie. Cela a mené à l'occupation par Israël de la Cisjordanie et de la bande de Gaza en 1967, alors que 350 000 Palestiniens ont été déplacés. Ce déplacement porte le nom de Naksa.
Une campagne massive de frappes aériennes
israéliennes aveugles se poursuit le 14 octobre 2023.
Dans son communiqué de presse du 11 octobre, l'UNRWA dit en outre : « Plus de 5 300 membres du personnel de l'UNRWA répondent à l'urgence dans des conditions extrêmement pénibles. Plusieurs routes ont été détruites ou sont maintenant inaccessibles en raison des débris et des frappes aériennes qui limitent les mouvements.
« Les refuges sont surpeuplés et il y a une quantité limitée de nourriture, de produits non alimentaires et d'eau potable. La crise de l'eau n'est qu'une question de temps dans les refuges d'urgence de l'UNRWA et dans toute la bande de Gaza en raison des infrastructures endommagées, du manque d'électricité nécessaire au fonctionnement des pompes et des usines de dessalement, et des approvisionnements limités d'eau dans les marchés locaux. Les approvisionnements en eau ne peuvent pas être renouvelés en raison du blocus total imposé à la bande de Gaza par les autorités israéliennes. On ne peut plus faire venir de l'essence et les fournisseurs d'eau israéliens ne peuvent plus livrer de l'eau à Gaza. Un Groupe de travail d'urgence a été mis sur pied pour trouver des approvisionnements d'eau pour les refuges et autres en coordination avec l'UNICEF et OCHA [Bureau de la coordination des affaires humanitaires].
« Il n'y a pas d'accès humanitaire à la nourriture ou aux autres produits essentiels.
« En coordination avec le Programme alimentaire mondial (PAM), du pain a été distribué aux personnes déplacées dans les refuges. L'UNRWA distribue aussi de la nourriture à des familles déplacées.
« Aujourd'hui, un centre de santé UNRWA dans une région de Gaza a été détruit par des frappes aériennes, faisant en sorte que le nombre d'installations touchées par le conflit est de 21 depuis le 7 octobre. »
Le porte-parole du Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), James Elder, a informé les journalistes à Genève le 13 octobre que la situation humanitaire a maintenant atteint des « niveaux fatals ». Il a souligné que la bande de Gaza est l'un des endroits les plus densément peuplés sur la planète, et il s'y trouve des centaines de milliers d'enfants, qui n'ont aucun endroit sécuritaire où ils peuvent aller.
Un porte-parole de l'OCHA, Jens Laerke, a aussi souligné l'impossibilité de relocalisation, et a posé la question : « Au milieu d'une zone de combats où les gens sont déjà au bout de leurs forces, comment une relocalisation serait-elle possible ? »
Il a aussi souligné l'urgence que Gaza ait accès à de l'aide humanitaire alors que tous les approvisionnements disparaissent rapidement. « À toutes fins pratiques, nous sommes enclavés », a-t-il dit.
Le 12 octobre, l'ONU a lancé un appel éclair à 77 partenaires
humanitaires pour la somme de 294 millions de dollars afin de
répondre aux besoins les plus urgents de 1,26 millions de
personnes dans Gaza et la Cisjordanie occupée. « Il s'agit de
répondre à une escalade qui a placé des civils dans une
situation dans laquelle ils n'auraient jamais dû se retrouver »,
a dit Laerke au sujet de l'appel. « La priorité la plus urgente
maintenant est de désescalader », a-t-il ajouté.
Comité international de la Croix-Rouge
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a également dénoncé l'ordre d'évacuation d'Israël. En fait, l'ordre d'évacuation a contraint le CICR à faire une rare déclaration publique le 13 octobre, appelant à une pause dans les combats et remettant en question la légalité d'un tel ordre. « Les instructions données par les autorités israéliennes à la population de la ville de Gaza de quitter immédiatement leurs maisons, associées au siège complet qui les prive explicitement de nourriture, d'eau et d'électricité, ne sont pas compatibles avec le droit international humanitaire. Le siège israélien a coupé l'électricité, l'eau, le carburant, la nourriture et l'approvisionnement de la bande de Gaza. La privation intentionnelle de nourriture d'une population civile en tant que tactique de guerre est une violation des conventions de Genève. »
Médecins Sans Frontières
Le 13 octobre, Médecins Sans Frontières (MSF) a publié une déclaration condamnant l'ordre d'évacuation d'Israël, précisant que « cela représente une attaque contre les soins médicaux et l'humanité ». « Nous parlons de plus d'un million d'êtres humains. Le terme 'sans précédent' ne couvre même pas l'impact médical et humanitaire de cette situation. Gaza est rasée, des milliers de personnes meurent, cela doit cesser maintenant. » « Nous condamnons la demande d'Israël dans les termes les plus forts possibles », a déclaré Meinie Nicolai, directrice générale de MSF, dans le communiqué.
Matthias Kennes, chef de mission de Médecins sans frontières (MSF) à Gaza, a dit le 12 octobre : « Les avions de chasse démolissent des rues entières, bloc par bloc », ajoutant : « Il n'y a pas d'endroit pour se cacher, ni de temps pour se reposer. Certains endroits reçoivent des frappes plusieurs nuits de suite. »
« Nous y avons goûté en 2014 et en 2021, alors que des milliers de personnes sont mortes. À chaque fois, nos collègues médicaux sont à l'oeuvre, ne sachant pas s'ils vont revoir leurs maisons ou leurs familles », poursuit Kennes. « Mais ils disent qu'aujourd'hui, c'est différent. Cette fois, en cinq jours, ils ont déjà vu 1 200 personnes mourir. Que peuvent faire les gens ? Où peuvent-ils aller ? »
MSF rapporte dans un communiqué : « Des millions d'hommes, de femmes et d'enfants subissent une punition collective sous forme de siège total, de frappes sans discernement et la menace toujours présente de combats terrestres. Il faut trouver des espaces sécuritaires, et des approvisionnements humanitaires doivent pouvoir entrer à Gaza. Les blessés et les malades doivent recevoir des soins médicaux. Les établissements et le personnel médicaux doivent être protégés et respectés. Les hôpitaux et les ambulances ne sont pas des cibles. »
MSF ajoute :
« Le siège imposé par le gouvernement israélien, y compris la
pénurie de nourriture, d'eau, de combustible et d'électricité
est inacceptable. Suite à 16 années de blocus militaire contre
la bande de Gaza, les établissements médicaux sont déjà
vulnérables. Ce siège ne laisse aucun répit aux patients pris
dans les combats, ni au personnel médical. Ce que nous voyons
est un blocus intentionnel sur les denrées essentielles.
L'entrée de ces fournitures et de personnel médical
indispensable doit être facilité au plus vite. »
Cet article est paru dans
Volume 53 Numéro 11 - Octobre 2023
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