Le remaniement ministériel de Justin Trudeau

Le 26 juillet, le premier ministre a annoncé une réorganisation majeure de son cabinet. Le cabinet compte actuellement 39 postes, dont celui de premier ministre. Parmi eux, seuls les portefeuilles de huit ministres restent inchangés, en plus de celui du premier ministre, tandis que 30 sont touchés par le remaniement. Sept ministres ont été écartés du cabinet. Quatre d'entre eux avaient déjà annoncé qu'ils ne se représenteraient pas, ce qui signifie que trois autres subissent une humiliation d'une sorte ou d'une autre – un poste moins prestigieux ici, une baisse de salaire considérable là, selon qu'ils sont affectés à un autre poste ou qu'ils retournent sur les bancs de l'assemblée. Sept députés élus pour la première fois en 2021 se sont vu attribuer des postes ministériels non pas en fonction de leur mérite, mais pour garantir leur siège lors des prochaines élections. D'après les conjectures médiatiques, ils semblent tous provenir de circonscriptions où les résultats des dernières élections étaient très serrés.

Avant et après le remaniement, les pronostics des politiciens et politicologues ont porté sur quel ministre placer à quel endroit, qui rétrograder et qui promouvoir. Ils parlent de décisions prises par « l'équipe Trudeau », qui semble être un groupe de consultants en coulisses, payés au fort prix pour accroître les chances électorales du parti. Le fait que le Parti libéral décide de son programme et de son personnel en fonction des prochaines élections montre en soi que rien de bon ne sortira de ces décisions. Les dernières élections ont eu lieu en 2021 sous le couvert d'un « mandat COVID ». Le gouvernement a interprété ce « mandat » comme une approbation de la politique de donner de l'argent aux grandes pharmaceutiques et d'augmenter les déficits et la dette pour payer les riches. Pendant ce temps, les Canadiens étaient persécutés pour les « trop-perçus », des divisions ont été créées parmi la population par la promotion de théories conspirationnistes de toutes sortes, au bénéfice de personne, et le pays s'est enfoncé dans la spirale de la soumission à toutes les demandes de l'administration Biden.

La parité homme-femme dans le cabinet remanié donne à Trudeau l'occasion de vanter une fois de plus son féminisme, malgré le refus de rendre justice aux femmes et aux enfants qui souffrent de violence, de sans-abrisme, de pauvreté et de toxicomanie. Un certain nombre de ministres sont présentés comme des « Canadiens à trait d'union » (qualifiés par le Hill Times de Canadiens-hindous, Canadiens-sikhs, Canadiens-philippins et Canadiens-juifs). Cela montre à quel point la religion, la nationalité et la citoyenneté sont confondues. Cela revient à priver les Canadiens d'une identité moderne fondée sur la création d'un État-nation moderne à l'image de la classe ouvrière, qui est une seule et même humanité, et non une personnalité qui prive l'État de sa cohérence et d'une communauté d'objectif. C'est pour courtiser le « vote ethnique » qu'on parle ainsi de « Canadiens à trait d'union », censés représenter les communautés nationales minoritaires. Bien que de nombreux Noirs viennent de familles qui vivaient au Canada bien avant la Confédération et que d'autres soient issus de nations et de nationalités distinctes, ils sont considérés sous l'angle raciste comme des personnes sans citoyenneté, sans nationalité ou sans appartenance ethnique. De même, l'identité des peuples autochtones au sein de leurs nations n'est pas reconnue en raison de leur caractérisation raciale.

À propos de la nomination de Rechie Valdez au poste de ministre des Petites Entreprises, une députée novice élue pour la première fois en 2021, Radio-Canada fait remarquer que, jusqu'à sa nomination, les 960 000 membres de la communauté philippine au Canada n'avaient pas eu de représentant au Parlement depuis 2004. Le dilemme auquel est confrontée cette démocratie dite représentative saute aux yeux quand même les médias d'État admettent que les Canadiens ne sont pas représentés ! Radio-Canada note que « par comparaison, les 770 000 sikhs du Canada étaient représentés par quatre des 40 ministres du premier cabinet du premier ministre Trudeau ». De tels calculs de la part des partis du cartel et des médias reflètent leur propre vision raciste et visent à semer des divisions raciales afin de saper l'unité dont a besoin le peuple canadien pour renouveler la démocratie par la démocratie de masse. Par la démocratie de masse, le peuple s'investit du pouvoir décisionnel souverain et la conception des droits héritée de l'époque de la conquête, perfectionnée dans la réforme parlementaire et la moralité victoriennes du XIXe siècle, puis réduite au « droit du consommateur au XXe siècle », est écartée une fois pour toutes.

Le Hill Times rapporte également que « le premier ministre Justin Trudeau a mis les bouchées doubles pour recruter une majorité écrasante de son premier banc dans le 'mur rouge', c'est-à-dire les libéraux de l'Ontario, du Québec et des provinces atlantiques qui l'ont porté au pouvoir en 2015 et lui ont donné ses deux mandats suivants, selon les députés, les initiés politiques et les sondeurs ». Un député libéral qui s'est exprimé sous le couvert de l'anonymat a dit au Hill Times : « Je décrirais le nouveau cabinet comme un cabinet de combat, où les nouveaux venus viennent de circonscriptions qui sont des circonscriptions de combat, ou qui renforcent les communautés qui font partie de régions de combat. »

Pas un mot n'est dit sur le fait que ce qui est présenté comme un événement politique important n'a rien à voir avec la résolution des problèmes auxquels les citoyens sont confrontés. Il n'est pas fait mention de ce que le nouveau cabinet envisage de faire pour gérer la crise dans la santé, la crise du logement et l'inflation, qui plongent les travailleurs dans la pauvreté et rendent la vie littéralement impossible aux familles et aux individus qui vivent de revenus fixes, de rentes d'invalidité et d'aides sociales. Aucune mention n'est faite des préparatifs de guerre et des dépenses militaires, ni de la destruction de l'environnement social et naturel.

Au lieu de cela, les grands médias répètent le message vide de sens du Bureau du premier ministre à savoir que les libéraux ont « fait du bon travail » et « feront encore plus ». Le Bureau du premier ministre annonce :

« S'appuyant sur le travail accompli depuis 2015 pour investir dans la population canadienne tout en renforçant la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour en faire partie, cette équipe ministérielle va continuer à faire des progrès en matière de logement et à remettre plus d'argent dans les poches des familles. Afin d'offrir un meilleur avenir à tous, elle continuera également à lutter contre les changements climatiques et à nous faire avancer sur la voie commune de la réconciliation. »

Aucune discussion n'est permise sur l'orientation de l'économie ou sur la nécessité d'une politique étrangère qui serve les intérêts des Canadiens et non les exigences des États-Unis et de l'OTAN. Ces manoeuvres cyniques et intéressées du parti au pouvoir pour rester au pouvoir, en utilisant le peuple et même ses propres députés comme des pions, sont méprisables.

Bien que tout cela soit vrai, la question demeure : que doit faire le peuple dans ces conditions ? Tout laisser tomber n'est pas une option, car les dommages causés au pays, aux êtres humains et à la nature sont déjà trop élevés.

Pour la liste des membres du nouveau conseil des ministres, cliquer ici.


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Volume 53 Numéro 8 - Août 2023

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