Numéro 17

23 août 2022

23 août 1939
Le pacte de non-agression soviéto-allemand

Les falsifications sur les origines de
la Deuxième Guerre mondiale

– Dougal MacDonald –


Piquetage d'information à l'appel des Jeunes pour les renouveau démocratique contre le monument anticommuniste à Ottawa le 21 août 2020

Le gouvernement canadien a déclaré le 23 août Journée du Ruban noir en 2009 pour répandre des mensonges qui accusent l'ancienne Union soviétique d'avoir déclenché la Deuxième Guerre mondiale. L'Union soviétique a signé un pacte de non-agression avec l'Allemagne d'Hitler le 23 août 1939. Le gouvernement canadien affirme qu'il s'agissait d'une « alliance militaire » pour mener une action militaire commune contre un pays tiers. Le pacte ne contenait pas une telle entente. L'entente était seulement que les deux pays ne s'attaqueraient pas.

Accuser l'Union soviétique d'avoir déclenché la Deuxième Guerre mondiale sert également à détourner l'attention des faits concernant les accords de Munich que les Britanniques et les Français ont signés avec l'Allemagne hitlérienne le 30 septembre 1938, lesquels ont cédé la région des Sudètes en Tchécoslovaquie à l'Allemagne et ont donné le feu vert à l'Allemagne et aux hitlériens pour s'emparer de la Tchécoslovaquie, envahir la Pologne et perpétrer les crimes de guerre et les atrocités qu'ils ont commis contre les peuples d'Europe pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Aujourd'hui encore, les réactionnaires utilisent l'anniversaire du pacte de non-agression non pas pour acclamer la grande victoire des peuples du monde sur l'Allemagne nazie, mais pour calomnier les grands exploits de l'Union soviétique en répétant des affirmations qui falsifient l'histoire. Le premier ministre Justin Trudeau s'est déshonoré lorsque, le 23 août 2019, il a qualifié la signature du pacte Molotov-Ribbentrop de « sombre anniversaire ». Il a dit, sans aucune honte : « Signé entre l'Union soviétique et l'Allemagne nazie en 1939 pour diviser l'Europe centrale et orientale, ce pacte tristement célèbre a ouvert la voie aux atrocités effroyables perpétrées par ces régimes. »

Quel est l'objectif de cette assimilation du combat implacable de l'Union soviétique pour vaincre l'agression nazie aux crimes de guerre nazis ? Dans les faits, les deux principaux facteurs qui ont conduit à la Deuxième Guerre mondiale déclenchée par l'Allemagne nazie sont les énormes investissements américains pour reconstruire l'économie allemande, à commencer par le plan Dawes de 1924, dirigé par J.P. Morgan, avec lequel a été financée la reconstruction industrielle de l'Allemagne, en particulier la reconstruction de son industrie de guerre, et la politique perfide d'apaisement envers l'Allemagne, une politique de renoncement à la sécurité collective qui a été suivie par le Royaume-Uni et la France, avec l'accord tacite du Canada, tandis que les États-Unis s'affairaient à financer la production de guerre de l'Allemagne.

Le mensonge que l'Union soviétique était devenue un ennemi du Canada en raison du pacte de non-agression a commencé au moment de sa signature, afin de dissimuler l'accord conclu à Munich le 30 septembre 1938 par l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et l'Italie. Cet accord stipulait que la Tchécoslovaquie devait céder ses régions frontalières et ses défenses (la région dite des Sudètes) à l'Allemagne nazie. Les troupes allemandes ont alors occupé ces régions entre le 1er et le 10 octobre 1938.

En janvier 1948, le mensonges a pris la forme d'une véritable propagande nazie sur une prétendue « alliance » germano-soviétique avec la publication par le Département d'État des États-Unis, en collaboration avec les ministères des affaires étrangères britannique et français, de documents extraits des notes du journal de fonctionnaires hitlériens, ce qui a déclenché une nouvelle vague de calomnies et de mensonges en rapport avec le pacte de non-agression Molotov-Ribbentrop. Nous sommes censés ignorer que les documents allemands étaient tous écrits à partir du point de vue du gouvernement de Hitler et n'ont pas fait l'objet d'une vérification indépendante. Il s'agissait d'une campagne délibérée de guerre froide contre l'Union soviétique menée par les États-Unis et ses alliés pour masquer leurs propres actions infâmes de l'après-guerre.

L'Union soviétique n'a pas traité ces mensonges à la légère, le Bureau d'information soviétique a publié presque immédiatement un document très important pour les réfuter : la note « Falsificateurs de l'histoire »[1]. Aujourd'hui, ces mêmes mensonges sur le pacte Molotov-Ribbentrop ne doivent pas non plus être traités avec indifférence. Ils visent à présenter les valeurs de ceux qui sont animés par des croyances idéologiques étroites comme étant des valeurs canadiennes. En fait, les promoteurs de la Journée du Ruban noir sont les descendants des mêmes forces nazies qui ont semé la mort et la destruction dans toute l'Europe. Ils présentent leurs ancêtres, qui étaient des collaborateurs nazis qui ont envoyé les Juifs, les Polonais, les Roms et plusieurs autres à la mort dans des camps de concentration, comme étant des combattants de la liberté parce qu'ils ont combattu le communisme. Leurs valeurs ne sont pas des valeurs canadiennes.

Un monument qui épouse ces valeurs basées sur des croyances idéologiques anticommunistes étroites n'a pas sa place dans un espace appelé Jardin des provinces et des territoires à Ottawa ou ailleurs. Ces valeurs sont précisément ce contre quoi les Canadiens ont combattu pendant la Deuxième Guerre mondiale pour vaincre les nazis. Ils ont sacrifié leurs vies pour remporter la liberté, la démocratie et la paix. Leurs fils et filles n'avaient que de l'admiration pour les sacrifices consentis par les communistes dirigés par l'Union soviétique. Déclarer que nous avons besoin d'un monument aux « victimes du communisme » et non aux victimes du fascisme et du nazisme et des guerres d'agression impérialiste des États-Unis, de leurs coups d'État, de leurs sanctions et de leurs crimes contre l'humanité depuis les temps coloniaux, est indigne de ce que les Canadiens chérissent.

Si signer un pacte de non-agression en 1939 était « aider Hitler », alors les Anglais et les Français avaient aidé déjà Hitler pendant au moins un an en signant de tels pactes l'année précédente et la Pologne « aidait Hitler » depuis 1934. Il est également significatif que ces mêmes réactionnaires ne mentionnent jamais le rôle pronazi répugnant de sociétés américaines comme Ford, General Motors, Standard Oil, Texaco, Dupont et IT&T qui ont fourni à la machine de guerre nazie des équipements et du matériel essentiels qui ont rendu possible leur invasion de l'Europe[2].

La Grande-Bretagne et la France ont signé une déclaration commune de non-agression avec l'Allemagne en 1938, sans oublier la signature du « Pacte d'entente et de collaboration » de 1933 peu de temps après l'accession d'Hitler au pouvoir. La Pologne a signé un pacte de non-agression avec les nazis en 1934, cinq ans avant l'Union soviétique, mais ce pacte n'est jamais mentionné comme cause de guerre. De toutes les grandes puissances non agressives de l'Europe, l'Union soviétique a été la dernière à accepter un pacte avec les Allemands, une décision à laquelle elle a été contrainte par le rejet de la sécurité collective par la Grande-Bretagne et la France.

Les événements de 1938, avant et après l'occupation de l'Autriche par Hitler, en mars, montrent que, comme elle l'avait fait quelques années plus tôt, l'Union soviétique a fait de nombreux efforts pour persuader l'Angleterre et la France de maintenir une assistance mutuelle collective, et en particulier de prendre des mesures pour défendre la Tchécoslovaquie contre une agression. L'Union soviétique était non seulement disposée à se joindre à la France pour défendre la Tchécoslovaquie, si la France tenait sa parole, mais aussi, dans le cas d'un refus de la France, elle était prête à défendre seule la Tchécoslovaquie[3].

Tous les efforts de l'Union soviétique pour construire la sécurité collective ont été rejetés par les Britanniques, les Français et les Américains. La Grande-Bretagne et la France ont refusé de signer tout pacte d'assistance mutuelle collective avec l'Union soviétique parce que leurs dirigeants espéraient toujours que l'Allemagne attaquerait et détruirait l'Union soviétique. Un dernier effort de l'Union soviétique en avril 1939 a de nouveau été rejeté, même si les sondages dans les deux pays montraient un soutien populaire massif à un pacte d'assistance mutuelle. Au lieu de cela, la Grande-Bretagne et la France ont signé les accords de trahison de Munich du 30 septembre 1938 avec l'Allemagne et l'Italie, qui ont permis à l'Allemagne de démembrer la Tchécoslovaquie et d'incorporer les Sudètes, ordonnaient aux Tchèques de ne pas résister à l'agression nazie et donnaient aux nazis le feu vert pour lancer leurs attaques dans toute l'Europe.

Les réactionnaires ne veulent jamais discuter des accords de Munich, car ils étaient une trahison si honteuse des peuples du monde que même Winston Churchill, au parlement britannique, a déclaré au premier ministre Chamberlain : « Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre. » Il est indéniable que face à la trahison britannique et française, l'Union soviétique n'avait d'autre choix que de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour se défendre et défendre la cause de la paix.


De gauche à droite : Chamberlain, Daladier, Hitler, Mussolini et Ciano lors de la signature des accords de Munich en 1938

Tous ces faits sont vérifiables. Ils se trouvent dans les rapports, discours, comptes rendus et documents de l'époque. Pour ne donner qu'un exemple de la politique d'apaisement envers Hitler, on peut lire dans le Mémo #8604, envoyé à Moscou de Prague par les services de renseignement russes quelques jours avant la signature des accords de Munich : « Le 19 septembre, l'ambassadeur britannique, Newton, et l'ambassadeur français, De Lacroix ont transmis à Milan Hodza [premier ministre tchécoslovaque], au nom de Chamberlain et de Daladier, les dispositions suivantes, respectueusement : 'Guidés par les nobles principes de préservation de la paix en Europe, ils estiment nécessaire de rattacher les Sudètes à l'Allemagne. Un système de pactes d'assistance mutuelle entre la Tchécoslovaquie et d'autres pays devraient être annulés.' »[4]. Cette trahison du peuple tchèque, qui a conduit à l'occupation allemande, aurait été « guidée par les nobles principes de la préservation de la paix ». Pourtant, moins d'un an après avoir envahi la Tchécoslovaquie, l'Allemagne envahissait la Pologne, le Danemark, la Norvège, la Belgique, les Pays-Bas et la France et bombardait la Grande-Bretagne.

Un autre mensonge souvent répété est que l'Union soviétique et l'Allemagne nazie avaient convenu dans le pacte Molotov-Ribbentrop de « se partager la Pologne », affirmant faussement à nouveau que le pacte comprenait un engagement à mener une action militaire commune contre un pays tiers. Alors que les nazis ont envahi la Pologne le 1er septembre 1939, commettant l'un des pires crimes de guerre que le monde n'ait jamais connu, massacrant près de six millions de personnes, le rôle de l'Union soviétique était totalement différent. L'armée soviétique est entrée en territoire polonais le 17 septembre, seulement après l'effondrement de l'État polonais, après la désintégration de l'armée polonaise, après que le gouvernement a cessé de fonctionner et que ses dirigeants ont fui le pays. De plus, l'Union soviétique est entrée dans les territoires de l'Ukraine et de la Biélorussie qui faisaient partie de la Russie soviétique jusqu'à ce que la Pologne les annexe par la force pendant la guerre russo-polonaise de 1919-1921. La Pologne à cette époque faisait partie de l'alliance des 14 pays impérialistes, dont le Canada, qui ont envahi la République soviétique socialiste naissante pour tenter de l'étrangler, mais n'y sont pas parvenus. Environ 8 % seulement des habitants de l'Ukraine et de la Biélorussie étaient d'origine polonaise.

Quel a été le résultat de l'entrée de l'armée soviétique en Pologne ? « Grâce à l'intervention opportune de l'Union soviétique dans ces territoires qui avaient appartenu à l'État polonais maintenant effondré, Hitler a dû accepter une ligne de démarcation entre ses troupes et l'Armée rouge bien à l'ouest de la frontière russo-polonaise[5]. » L'Armée rouge a sauvé des millions d'habitants d'Ukraine, de Biélorussie et de Pologne du sort qu'Hitler a fait subir au peuple polonais. Même Winston Churchill, un réactionnaire endurci, a justifié publiquement l'entrée des Soviétiques en Pologne orientale comme étant nécessaire non seulement pour la sécurité des peuples de Pologne et d'Union soviétique, mais pour les peuples des États baltes et de l'Ukraine. Le 1er octobre 1939, Churchill a déclaré à la radio : « Que les armées russes se tiennent sur cette ligne [la ligne Curzon] était clairement nécessaire pour la sécurité de la Russie devant la menace nazie. Un front de l'Est a été créé que l'Allemagne nazie n'ose pas attaquer. Quand Herr von Ribbentrop est allé à Moscou la semaine dernière, c'était pour apprendre et accepter le fait que les desseins nazis sur les pays baltes et sur l'Ukraine doivent s'arrêter. »

Et, bien sûr, c'est l'Armée rouge soviétique qui, en janvier 1945, a été le fer de lance de la libération finale de la Pologne de l'occupation nazie, libérant Varsovie puis perçant les formidables défenses nazies sur la Vistule-Oder qui marquait la frontière de la Pologne et de l'Allemagne. Le succès complet de cette opération a créé les conditions favorables à l'entrée en Allemagne le 20 janvier et à l'avancée au coeur de l'Allemagne, à l'élimination des forces nazies, à la prise de Berlin et à la défaite définitive du IIIe Reich.

L'Armée rouge soviétique libère la Pologne en 1945.

Reconnaissant cette immense contribution, le 6 février 1945, le président et le premier ministre de la Pologne écrivirent à Staline : « Le peuple polonais n'oubliera jamais qu'à l'époque la plus difficile et la plus éprouvante de son histoire, il a reçu une aide fraternelle du peuple soviétique, non seulement sous forme de sang et d'armes de l'Armée rouge, mais aussi de pain, ainsi qu'une aide considérable de nature économique[6]. »

Les agissements infâmes des Anglo-Américains et des Français dans le dos de l'Union soviétique ont provoqué la destruction des éléments de sécurité collective établis contre l'Allemagne nazie. Ce sont les accords de Munich, l'acte de lâcheté ultime, signés par la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne et l'Italie qui ont mené à la Deuxième Guerre mondiale, au massacre de millions de personnes et à l'holocauste européen. Le verdict de l'histoire confirme la vérité au sujet de la trahison anglo-américaine et française des peuples du monde et au sujet du rôle héroïque de l'Union soviétique et de Staline dans la victoire sur les nazis. Aucun falsificateur de l'histoire ne peut changer ces faits.

Environ 50 millions de personnes sont mortes et 35 millions ont été blessées gravement pendant la Guerre antifasciste, pendant laquelle les peuples de l'Union soviétique ont subi la plus grande partie des pertes. Telle est la vérité sur cette question.

Notes

1. Falsificateurs de l'histoire, Bureau soviétique d'information auprès du Conseil des ministres de l'U.R.S.S., Moscou, 1948
2. Voir par exemple Black, Edwin, Nazi Nexus : America's Corporate Connections to Hitler's Holocaust, Dialogue Press, Washington DC, 2009, et Pauwels, Jacques, Big Business and Hitler, James Lorimer, Toronto,2009.
3. Staline « avait prévu déployer un million de soldats contre Hitler si la Grande-Bretagne et la France acceptaient le pacte » : Staline était « prêt à envoyer plus d'un million de soldats soviétiques à la frontière allemande pour dissuader l'agression hitlérienne juste avant la Deuxième Guerre mondiale », Nick Holdsworth, Telegraph, Londres, 18 octobre 2008.
4. « Accords de Munich de 1938 : Moscou ouvre ses archives secrètes », Valeri Iarmolenko, RIA Novosti, 30 septembre 2008
5. « Les Causes et les leçons de la Seconde Guerre mondiale », Hardial Bains, Institut MELS, Toronto, 1990
6. « World War II : Decisive Battles of the Soviet Army », V. Larionov, N. Yeronin, B. Solovyov, V. Timokhovich, Moscou, Progress Publishers, 1984.

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