Le danger que représente pour le Canada l'intégration à la machine de guerre des États-Unis

– Enver Villamizar –

La situation en Ukraine montre l'importance d'expliquer pourquoi le Canada doit sortir de l'OTAN et du NORAD et comment l'adhésion du Canada à l'OTAN et au NORAD est un facteur qui contribuent à la guerre. Le fait de sortir de toutes ces alliances agressives contribuera à la paix internationale ainsi qu'au développement prosocial de l'économie.

Il y a de fortes pressions en ce moment pour faire la question de savoir si la Russie était ou n'était pas justifiée dans son action en Ukraine. Le PCC(M-L) a indiqué que l'action de la Russie a été provoquée par les États-Unis et l'OTAN. Cela touche au coeur de la question : quels sont les facteurs menant à la guerre internationalement et qu'est-ce qui contribue à la paix ? Le gouvernement canadien présente délibérément la situation comme si la Russie agissait de façon irrationnelle et répète sans cesse qu'il s'agit d'une attaque « non provoquée ». Ainsi le problème serait la Russie et ses actions tandis que ce qui reste dans l'ombre est ce que le Canada a fait et fait toujours au service des États-Unis et de leur machine de guerre pour fomenter le conflit et préparer la guerre, ce qui crée les conditions de la guerre elle-même. Lorsqu'éclate le conflit, comme ce fut le cas avec la perspective que l'Ukraine devienne membre de l'OTAN, alors tous les préparatifs de guerre ciblant la Russie comme « menace » sont présentés comme justifiées. C'est le comble du cynisme et de la fraude. Les Canadiens doivent prendre la parole immédiatement pour affirmer que l'escalade des préparatifs de guerre n'est pas la voie vers l'avant et ne fera qu'attiser les flammes de la guerre.

Juste avant l'élection fédérale de septembre, le gouvernement libéral de Trudeau avait annoncé qu'il comptait dépenser plus de 553 milliards de dollars pour les préparatifs de guerre au cours des prochaines 20 années. Une grande partie de ce financement ira dans l'économie de guerre des États-Unis pour l'achat d'avions de combat, de drones armés et d'autres armes de guerre. L'argent proviendra de la valeur produite par les travailleurs canadiens et remis aux monopoles de guerre.

LML avait souligné : « Cette augmentation des dépenses a été confirmée la veille du déclenchement des élections, lorsque le ministre canadien de la Défense, Harjit Sajjan, et le secrétaire à la Défense des États-Unis, Lloyd Austin, ont publié une déclaration commune dans laquelle ils conviennent de 'moderniser 'le NORAD, le Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, et décrivent les ' domaines prioritaires' pour les nouveaux investissements ».

« Le Canada et les États-Unis partagent le désir de coordonner la mise en service de nouvelles capacités pour compléter et à terme remplacer le Système d'alerte du Nord par des solutions technologiques plus avancées le plus tôt possible. Pour assurer une connaissance de la situation efficace, il faut en fin de compte adopter une approche axée sur un système de systèmes comprenant un réseau de capteurs canadiens et américains du fond marin à l'espace. »

Et plus loin : « Le 'système de systèmes' dans le jargon du Pentagone désigne la défense antimissile balistique (BMD). La modernisation du NORAD comprend le positionnement de missiles américains au Canada et la militarisation de l'espace dans le cadre du bouclier antimissile balistique des États-Unis. Lorsque la BMD sera déclarée opérationnelle, les États-Unis et leurs alliés de guerre, y compris le gouvernement canadien, croiront et déclareront alors qu'« une guerre nucléaire américaine est gagnable » et qu'une frappe nucléaire préventive pourrait être utilisée. Depuis 2014, l'économie de guerre des États-Unis a effectué 17 essais de défense antimissile balistique de son 'système de systèmes' pour ' détruire les missiles balistiques entrants '. »

Des efforts constants sont déployés pour tenter de créer les conditions pour que le Canada se joigne au BMD à contre-courant de l'opinion publique qui existe au Canada contre une telle chose. Si le Canada s'y joignait, il devrait céder aux forces armées américaines plus de territoires, d'argent et d'autorité sur les affaires canadiennes.

Par le passé, surtout au lendemain du 11 Septembre, le prétexte mis de l'avant par les États-Unis était la nécessité de se protéger des États voyous ou terroristes. À cette époque, les Canadiens se sont prononcés partout au pays contre toute participation aux systèmes de défense antimissile. Après l'invasion de l'Irak par les États-Unis et face à la forte opposition des Canadiens à cette guerre d'agression et leur refus catégorique d'installer des missiles au Canada, le premier ministre de l'époque, Paul Martin, dont le gouvernement était minoritaire, a annoncé que le Canada n'y participerait pas.

Plus tard, sous Stephen Harper, le prétexte pour installer les missiles était que le Canada devait contrer une soi-disant attaque de l'Iran et de la République populaire démocratique de Corée (RPDC). À la suite des efforts du gouvernement Harper pour tenter, à son tour, de détruire l'opinion publique en matière de défense antimissile, les libéraux de Trudeau nouvellement élus ont pris le relais, bien que très discrètement.

Maintenant que la Russie a réagi aux provocations incessantes de l'OTAN, il est vraisemblable que la classe dirigeante canadienne y voit une « occasion » pour annoncer qu'elle a l'intention d'installer le système antimissile. Maintenant la soi-disant menace à l' « Amérique du Nord » ne sera plus l'Iran ni la RPDC, mais la Russie. Entretemps, l'augmentation année après année de missiles américains sur terre et sur mer autour de la Russie, la Chine et la RPDC n'est pas considérée comme étant une menace pour ces pays, faisant deux poids deux mesures.

Le fait d'installer des systèmes de missiles contrôlés par les États-Unis en Europe de l'Est et aux frontières de la Russie est un grave problème qui montre pourquoi, l'expansion de l'OTAN doit être prise au sérieux. Ce n'est pas seulement une question d'entraîner plus de pays dans la machine de guerre américaine, mais d'augmenter le nombre d'armes offensives de l'OTAN dans les pays membres de l'OTAN actuels.

À titre d'exemple, il a été signalé qu'en novembre 2021 un système terrestre de missiles sol-air Aegis, qu'on appelle faussement un système de défense antimissile balistique, sera fonctionnel à la fin de 2022 en Pologne dans la ville de Redzikowo. Le système existe à cet endroit depuis plusieurs années mais les États-Unis ont décidé de le rendre opérationnel l'année dernière. La ville de Redzikowo, qui se trouve sur la mer baltique, est à une distance d'à peine 200 km. de la frontière de la ville portuaire russe de Kaliningrad.

Le même système, qu'on nomme « Aegis Ashore », existe déjà en Roumanie et est opérationnel depuis 2015. Le système Aegis était d'abord conçu pour les navires. En 2017, les États-Unis avaient 33 navires munis de système Aegis, maraudant les frontières maritimes de ses adversaires dans l'océan Pacifique et Atlantique. Le Japon a aussi quatre navires de guerre dotés de ces systèmes, qui patrouillent les eaux entourant la Chine et la RPDC.

Notamment, ces systèmes ne sont pas purement défensifs et ne visent pas que les missiles entrants. Ce sont des systèmes de première frappe pouvant toucher des cibles à moyenne ou longue portée sur terre, sur mer et dans l'air. C'est devenu évident lorsqu'en juillet 2020 le chef militaire du commandement indo-pacifique des États-Unis a demandé au congrès de financer un de ces systèmes en 2022, et devant être construit en 2026 à Guam, en préparation pour la guerre contre la Chine. Il a clairement dit que le système était offensif et avait une « capacité de frappe de précision de longue portée dans la première chaîne d'îles ». La première chaîne d'îles est définie par les États-Unis comme étant la chaîne d'îles qui part des îles Kouriles, passe par l'Archipel japonais, les îles Ryukyu et l'île de Taïwan, la partie nord-ouest des Philippines (particulièrement Luzon, Mindoro et Palawan) et se termine à proximité de Bornéo. Il a été décidé d'installer ce système à Guam, un territoire non incorporé des États-Unis, lorsque le Japon a annulé les plans d'installer un tel système sur son territoire[2].

L'énorme montant de fonds publics et de corruption qui accompagnent ces systèmes antimissiles dans les intérêts de la machine de guerre américaine est renversant. Chaque installation coûte des milliards de dollars – sans oublier la destruction de l'environnement local et le fait de s'emparer des territoires du pays hôte et de les soumettre au commandement américain.

Les États-Unis et l'OTAN aimeraient sans doute installer de tels systèmes en Ukraine ainsi que dans l'Arctique canadien dans leur course à la guerre contre leurs rivaux. Pour ce qui est du Canada, les États-Unis ont explicitement fait part de leurs intentions, et les cercles dominants canadiens ont déjà laissé entendre que c'est aussi les leurs. Les Canadiens doivent se rappeler que l'Arctique canadien partage une frontière maritime avec la Russie ainsi qu'une frontière terrestre avec elle en Alaska. Ces territoires sont les terres ancestrales des Inuits et des autres peuples autochtones et leur appartiennent.

Face aux dangereuses provocations de l'OTAN et l'escalade des préparatifs de guerre, il est primordial de prendre la parole contre toutes tentatives d'élargir l'OTAN, de moderniser NORAD qui ne sont que des euphémismes pour cacher l'intensification de la militarisation de l'économie et la transformation du Canada en une base pour les guerres et les provocations menées par les États-Unis contre les peuples du monde.

Note


Cet article est paru dans
Logo
Volume 52 Numéro 3 - 1er mars 2022

Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/Lml2022/Articles/LS52035.HTM


    

Site web :  www.pccml.ca   Courriel :  redaction@cpcml.ca