De la presse du Parti
- TML Daily, 21 mars 2014 -

L'Ukraine – un survol historique

– Nathan J. Freeman –

Cet article de Nathan J. Freeman a d'abord été publié dans TML Daily le 21 mars 2014, sous le titre Quel est le problème et qui sont les fauteurs de troubles ?

Le génie de l'histoire a fait de l'Ukraine le plus récent pays où s'affrontent la Russie post-soviétique et l'impérialisme dirigé par les États-Unis. Le camp dirigé par les États-Unis, qui comprend l'ancien colonialisme européen, est en plein délire. Le gouvernement russe a répondu de manière mesurée, en protégeant ses forces navales en Crimée et en allant jusqu'à retirer la Crimée des griffes du coup d'État fasciste qui a pris le pouvoir à Kiev et chassé le président élu, Alexander Ianoukovitch.

Au-delà des contradictions inter-monopolistes (principalement axées sur l'accès aux ressources énergétiques et leur contrôle [1] qui se manifestent en ce moment dans cette région, la question urgente la plus ancienne et la plus brûlante pour les peuples de cette région qui a refait surface qui se pose à nouveau est : comment établir (et, jusqu'à un certain point, rétablir) l'égalité et les droits souverains des nations et des peuples indépendamment de leur composition ethnique, et les garantir de façon significative dans le contexte actuel ? C'est uniquement en 1921, en tant qu'une des républiques fondatrices de l'Union des Républiques soviétiques socialistes, que l'Ukraine est enfin devenue un État-nation englobant toutes les ethnies de langue ukrainienne.

Indépendamment des décennies de propagande impérialiste avant et pendant la guerre froide où l'Ukraine était considérée comme une marionnette de Moscou et son peuple privé de droits, etc., c'est l'URSS elle-même, avec ses dispositions constitutionnelles confirmant le droit à la sécession de l'Union, qui a garanti pour la toute première fois l'indépendance de l'Ukraine. En effet, l'Ukraine a été l'une des rares républiques soviétiques fondatrices à avoir son propre siège aux Nations unies.

Sur le plan économique, durant la période soviétique, la classe ouvrière ukrainienne a transformé son pays d'une colonie agricole à une économie agro-industrielle, approvisionnant l'industrie du charbon qui a propulsé le développement industriel dans toute l'Union soviétique, à une économie industrielle-agricole participant en tant qu'exportatrice de machineries lourdes spécialisées et de produits pharmaceutiques de pointe vers les marchés mondiaux. Aujourd'hui [2014], sous la direction d'Arseni Iatséniouk, un banquier privé jusque-là inconnu, l'Ukraine est en faillite et selon un récent rapport – qui n'a pas encore été contredit – le trésor national aurait été mis dans un avion à destination de New York le lendemain du récent coup d'État du secteur droit-Svoboda à Kiev et serait présentement sous la garde officielle de la Federal Reserve Bank de New York à Manhattan.

Sur le plan ethnographique, il est largement admis jusqu'à aujourd'hui que l'ethnie russe et certaines ethnies ukrainiennes ont une origine commune. Pour la période précédant l'émergence dans la région ukrainienne des Cosaques et de leur système de gouvernance, l'hetmanat, à l'apogée du Moyen-Âge européen, un recensement complet et vérifiable de tous les peuples originaires d'Ukraine reste contesté.

Malgré ce fait académique, il est néanmoins largement admis que, au début du Moyen-Âge, le peuple qui en toute probabilité formait l'ethnie russe trouve ses origines dans ce qui est connu sous le nom de Rus de Kiev. Il s'agissait d'un ensemble de colonies dans la région de l'actuelle Kiev. Autrement dit, l'émergence de ce qui allait devenir une ethnie russe distincte a ses origines dans l'Ukraine il y a environ un millénaire.

En ce qui concerne l'organisation sociale et politique, cependant, il n'existait pas, avant le milieu du XIXe siècle, de conception abstraite d'une nation ukrainienne ni d'un territoire ukrainien peuplé majoritairement d'une seule ethnie ukrainienne[2]. Le principe d'une nation ukrainienne a été élaboré au milieu du XIXe siècle par un mouvement d'intellectuels mené par Taras Chevtchenko. Celui-ci a été la voix fondatrice de la littérature et de la culture nationales ukrainiennes modernes. D'une part, la défense de la nation ukrainienne avait énergisé les peuples, particulièrement ceux de l'Ukraine occidentale, dans leur résistance massive contre les efforts annexionnistes de la monarchie polonaise et de l'empire austro-hongrois. [3] D'autre part, l'évolution de la lutte pour une pleine autonomie nationale ukrainienne s'est heurtée à de sérieuses difficultés en raison des conditions sociales et économiques qui prévalaient et se détérioraient rapidement dans l'est de l'Ukraine (dont certaines régions étaient déjà, en fait, russes ). Là, la question nationale a fait face à une difficulté profondément socio-économique, en raison de la pression exercée par les propriétaires fonciers de la Russie durant cette période – dans l'est de l'Ukraine et dans toute la Russie– pour asservir les paysans et ultimement les priver de tout droit légal de labourer leurs propres terres ou pour le compte de leur propre famille[4]. Dans les années qui ont immédiatement suivi la défaite de la guerre de Crimée, les tentatives chancelantes et indécises du tsarisme de « réforme imposée » n'étaient pas inattendues.

Après l'élimination du servage en 1861, cependant, le refus du tsar Alexandre de permettre aux paysans de posséder et de labourer les terres par eux-mêmes, indépendamment des caprices de la noblesse et des autres propriétaires fonciers, a considérablement propulsé le mouvement national ukrainien, sans oublier toutes les autres forces centrifuges qui s'en prenaient à l'absolutisme de l'autocratie tsariste.

En même temps, la consolidation des divers mouvements pour l'autonomie nationale en opposition à l'autocratie tsariste de la Russie impériale s'est faite pendant la Première Guerre mondiale. Les paysans russes ont été enrôlé et c'est par centaines de milliers qu'ils sont allés mourir sous les tirs de l'artillerie lourde allemande. À la fin de 1916, les armées de la Grande-Bretagne (en plus des soldats du Canada et des autres colonies) et de la France avaient été saignées au point de presque totalement s'effondrer. Au même moment, l'armée tsariste, forte de deux millions d'hommes, qui devait être la carte gagnante dans le jeu des puissances de l'Entente contre l'Allemagne, s'est plus ou moins effondrée et n'a plus joué de rôle stratégique important dans le cours de la guerre.[5]

Le point de vue soviétique officiel et qui a été répété pendant des décennies est que seule l'URSS pouvait garantir l'avenir de l'État-nation ukrainien et son autodétermination. La justesse de ce point de vue a été une de fois plus confirmée, cette fois par son contraire, lorsque la première révolution « orange » a été imposée en 2004 par une coalition de néofascistes et de néolibéraux encouragés et soutenus par l'administration George W. Bush qui a pris a pris le pouvoir à Kiev à la suite à des manifestations de masse à la place Maïdan au coeur de la ville. Dix ans plus tard, sous l'administration Obama, le plus récent coup s'est passé sensiblement de la même manière. Une fois de plus, il relève du peuple ukrainien de régler la question de quel est le problème et qui sont les fauteurs de troubles sur la question de sa souveraineté nationale. C'est uniquement par son mouvement et par sa lutte qu'il peut arracher le pouvoir des impérialistes américains et de l'Union européenne qui brandissent la menace d'une guerre, d'une part, et rétablir les relations fraternelles d'égalité et d'avantage réciproque avec leurs voisins, le peuple russe, de l'autre.

Notes


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Volume 52 Numéro 2 - 25 février 2022

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