Les États-Unis poursuivent leur politique hégémonique après leur défaite humiliante en Afghanistan

La déroute et l'humiliation des États-Unis en Afghanistan ont, entre autres, sérieusement miné la confiance envers les États-Unis en tant que « partenaire fiable ». Alors que les États-Unis se démenaient pour se sauver, ils ont abandonné à leur sort tous leurs « partenaires » de l'OTAN, ainsi que leurs collaborateurs.

Les États-Unis ont commencé à mettre l'accent sur leurs plans pour la région indo-pacifique, notamment en intensifiant leurs efforts pour intégrer les pays qui s'y trouvent à la machine militaire et financière des États-Unis. La vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris, a visité le Singapour et le Vietnam dans la semaine du 23 août 2021. Il s'agissait de son deuxième voyage international, ayant précédemment visité le Guatemala et le Mexique pour tenter de régler des problèmes liés à l'immigration. Son voyage à ce moment-là avait été ponctué de nombreuses attaques contre la Chine, exprimant une stratégie du bord de l'abîme dangereuse pour toutes les parties concernées. Les conditions d'humiliation et de désespoir poussent cette soif de vengeance au bord de la guerre.

S'arrêtant d'abord à Singapour, Kamala Harris a rencontré la présidente de Singapour, Halimah Yacob, et le premier ministre, Lee Hsien Loong. Elle a tenu à visiter le navire de guerre USS Tulsa à la base navale de Changi. Elle n'a pas mâché ses mots lorsqu'elle s'est adressée aux marins. Niant ce qui s'est passé lorsque les États-Unis ont tenté d'imposer le type de démocratie qui, selon eux, devait exister en Afghanistan, elle a dit : « Je crois vraiment qu'une grande partie de l'histoire du XXIe siècle sera écrite dans cette région même où vous servez en ce moment. Et nous voulons être ceux qui aident à façonner et à dicter cette histoire. »

Les États-Unis considèrent le Singapour comme le point d'ancrage de leur présence navale en Asie du Sud-Est et leur base principale dans la région indo-pacifique, avec le Japon et la Corée du sud. Deux groupes d'attaque américains – l'un centré sur le porte-avions USS Ronald Reagan et l'autre sur le navire d'assaut USS America – se sont rendus en juin en mer de Chine méridionale, une zone de conflit. Le groupe aéronaval du porte-avion Carl Vinson et le USS America sont restés dans la région du Pacifique occidental. Le 10 août 2021, les États-Unis ont organisé des exercices de guerre dans la région de Singapour, avec la participation des marines de 21 pays, 10 navires et plus de 400 membres d'équipage.

Les menaces militaires font partie de la stratégie du bord de l'abîme, un moyen de voir comment la Chine et d'autres pays réagiront. Le problème, tel que clairement démontré en Afghanistan, est que les États-Unis sont incapables de prédire ce qui va se passer. Est-ce que « l'ennemi » va se soumettre ou est-ce que les menaces vont intensifier le conflit et même déclencher une guerre ?

Kamala Harris est allée plus loin. Au sujet de la position contestée de la Chine dans la mer de Chine méridionale, elle a dit : « [...] les actions de Pékin continuent de saper l'ordre fondé sur des règles et menacent la souveraineté des nations. »

En même temps, les États-Unis ont fait des efforts pour intégrer davantage Singapour dans leurs structures militaires et de sécurité, une forme moins évidente pour saper la souveraineté.

Sur la question de la cybersécurité, les départements du Trésor et de la Défense ainsi que l'Agence de la sécurité cybernétique et de l'infrastructure ont conclu une entente de principe avec leurs homologues de Singapour pour l'expansion du partage de l'information et de la formation permettant de combattre ce que les États-Unis appellent les menaces cybernétiques. La Maison-Blanche a aussi annoncé d'autres ententes encourageant ce qui selon elle est une collaboration sur l'exploration de l'espace et des questions de défense.

Les peuples japonais, coréen, canadien et plusieurs autres savent très bien ce que veut dire une telle « coopération ». Lorsqu'il s'agit de questions militaires, les États-Unis mettent des forces étrangères en action et entraînent d'autres pays dans leurs efforts et leur machine de guerre.

En outre, les États-Unis se sont organisés pour « créer un partenariat basé sur la stimulation du commerce par le biais d'une poignée d'industries clé », en particulier celles en lien avec la chaîne d'approvisionnement des États-Unis.

Kamala Harris a à nouveau souligné que ces partenariats sont basés sur les intérêts des États-Unis et leur volonté de « façonner » la région et d'y « imposer leur diktat ».

« Notre intention est de consolider nos partenariats et notre vision commune, pour que les États-Unis et leurs partenaires puissent ensemble continuer de façonner cette histoire. Ce faisant, soyez assurés que nous avons des intérêts à long terme dans cette région, et nous avons des engagements à long terme aussi. Ces engagements comprennent, évidemment, la sécurité. Hier, j'ai visité la base navale de Changi. Le navire de la Marine américaine, le USS Tulsa, y est amarré en ce moment, le symbole d'un partenariat pour la sécurité profond et durable entre nos nations. Une déclaration de l'engagement sécuritaire de l'Amérique dans cette région. »

Les difficultés des États-Unis dans leurs efforts pour imposer de tels partenariats transparaissaient aussi dans l'allocution de Kamala Harris. Ayant menacé la Chine, elle a ajouté : « Notre engagement en Asie du Sud-Est et la région indo-pacifique n'est pas envers un seul et unique pays, ni est-il conçu pour obliger de choisir un pays plutôt qu'un autre. Notre engagement consiste plutôt à promouvoir la vision optimiste que nous entretenons sur notre participation et nos partenariats dans cette région. »

Le premier ministre Lee Hsien Loong a publiquement exprimé des doutes sur les États-Unis lors de la conférence de presse conjointe au cours de laquelle il a été question de la défaite des États-Unis en Afghanistan. « Ce qui compte c'est comment les États-Unis vont se repositionner en Asie-Pacifique, comment ils vont s'engager dans la région entière et continuer de lutter contre le terrorisme, car cela déterminera la perception qu'ont les pays des priorités mondiales des États-Unis et de leurs intentions stratégiques », a affirmé Lee Hsien Loong.

En outre, Lee Hsien Loong a mis en garde les États-Unis de ne pas continuer d'adopter une approche agressive envers la Chine. Le ministre des Affaires étrangères de Singapour, Vivian Balakrishnan, a dit lors d'une récente entrevue peu avant la visite de Kamala Harris que Singapour « se rendra utile mais ne permettra pas qu'on se serve de nous » dans ses relations entre les deux pays.

Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la Chine, Wang Wenbin, a aussi riposté, disant que les pays de l'Asie du Sud-Est sont réticents à choisir entre la Chine et les États-Unis. Il a dit que l'approche des États-Unis est basée sur « une façon de penser démodée issue de l'époque de la guerre froide visant à perturber leurs relations avec la Chine, engendrer la division et la confrontation, et tenter d'ériger un mur d'endiguement » autour de la Chine.

Les États-Unis « peuvent calomnier, supprimer, forcer et intimider les autres pays à volonté afin de maintenir leur Amérique d'abord, sans qu'il ne leur en coûte rien », a-t-il dit.

Au sujet du soi-disant ordre américain fondé sur les règles et la défaite des États-Unis en Afghanistan, Wang Wenbin a ajouté : « Voilà l'ordre souhaité par les États-Unis. Ils essaient toujours de brandir les règles et l'ordre pour justifier leur propre comportement intéressé, intimidant et hégémonique, mais qui les croira maintenant ? »

Lors de son voyage au Vietnam, Kamala Harris a poursuivi ses provocations contre la Chine tout en tentant d'impliquer d'autres pays dans les actions des États-Unis. Dans une réunion avec le président vietnamien Nguyen Xuan Phuc, elle a dit : « Nous devons trouver les moyens d'exercer la pression et, pour parler franchement, augmenter la pression sur Pékin pour qu'il respecte la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, et il faut contester ses actes intimidants et ses réclamations maritimes excessives. »

Le Vietnam ne s'y est pas laissé prendre. Le premier ministre du Vietnam, Pham Minh Chinh, venait de rencontrer l'ambassadeur chinois Xiong Bo au moment de la visite de Kamala Harris. Le gouvernement vietnamien a dit dans un communiqué : « Le premier ministre a affirmé que le Vietnam adhère à une politique étrangère indépendante, autonome, multilatérale et diversifiée en tant que membre responsable de la communauté internationale. »

« Le Vietnam ne s'aligne pas avec un pays contre un autre », dit-on dans le communiqué, ajoutant que les conflits territoriaux dans la Mer de Chine méridionale devraient être réglés en vertu du droit international et d'« une bonne dose de gros bon sens ».

Les États-Unis et la Chine disent de cette époque qu'elle est « nouvelle » et les deux s'efforcent à créer un ordre mondial et une structure qui leur conviennent. Kamala Harris l'a exprimé ainsi :

« Je crois que notre monde est entré dans une nouvelle ère, une ère de nouveaux défis comme la cybersécurité, et une ère offrant de nouvelles opportunités, comme l'énergie propre. En fait, notre monde est plus interrelié et interdépendant, et pour s'ouvrir sur cette nouvelle ère, les nations doivent être prêtes à relever les défis ensemble et à créer des opportunités ensemble. C'est pourquoi nos partenariats au Singapour, dans l'Asie du Sud-Est et dans toute la région indo-pacifique sont de la plus haute importance pour les États-Unis. »

Malgré leur défaite en Afghanistan, les États-Unis continuent de proférer des menaces de violence les plus extrêmes et même de leur donner suite dans l'espoir de préserver leur rôle en tant que « nation indispensable ». Les remarques de Kamala Harris n'ont pas réussi à changer la perception que le recours des États-Unis à la violence détermine ce que les États-Unis défendent comme droits et lois.

Avec leur déroute en Afghanistan, une grande incertitude et une imprévisibilité continuent d'exister. L'impunité et l'arbitraire déchaînés avec la « guerre contre le terrorisme » montrent que l'anarchie a remplacé l'autorité et il en est toujours ainsi aujourd'hui.

L'incapacité de prédire ce qui peut arriver est largement promue. Diverses factions dirigeantes au sein de l'establishment politique et des médias prétendent que l'armée a fait preuve d'incompétence, incapable de prédire la vitesse à laquelle les talibans allaient reprendre le pouvoir, etc. La promotion d'un tel niveau d'incertitude et d'imprévisibilité vise en partie à laisser entendre que le monde est insaisissable afin d'entretenir le faux espoir et la croyance que cela poussera les peuples des États-Unis et d'autres pays ainsi que leurs agences militaires et policières à s'aligner avec les blocs militaires et économiques des États-Unis.

Au contraire, la revendication grandissante des peuples du monde est que les peuples ont le droit de délibérer et de décider sur les questions de guerre et de paix, que les gouvernements bellicistes et les économies de guerre doivent être démantelés et qu'il faut mettre sur pied des gouvernements antiguerre. Les peuples de la région, notamment ceux du Vietnam, du Japon, de la Corée et des Philippines, forts de leur longue expérience avec les bases militaires, les occupations et les guerres américaines, ont affirmé que les États-Unis doivent fermer leurs bases, retirer leurs troupes et respecter la position anti-guerre des peuples et leurs revendications pour des relations fondées sur le respect et l'avantage réciproques.


Cet article est paru dans

Volume 52 Numéro 1 - 13 janvier 2022

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