Ce que révèle le financement des partis
politiques
par les fonds publics au Québec
Un processus électoral antidémocratique de A à Z
L'objectif de ce qu'on appelle le processus électoral démocratique est de porter des partis politiques au pouvoir. Le processus favorise les partis que la classe dirigeante estime dignes de confiance pour former un gouvernement de parti qui servira ses intérêts. Elle souhaite idéalement avoir un parti au pouvoir et un parti dans l'opposition qui, ensemble, sont censés représenter l'électorat. Elle espère que ceux qui n'ont pas voté pour le parti au pouvoir vont voter pour le parti de l'opposition. Ainsi, tout le monde est « représenté » au gouvernement.
Bien entendu, ce n'est pas ce qui se passe, car les électeurs ne choisissent pas leurs candidats parmi leurs pairs et ne fixent pas non plus le programme des gouvernements. Le nombre de personnes qui appartiennent à des partis politiques est inférieur à un pour cent des électeurs éligibles et la non-participation d'un grand nombre d'électeurs éligibles aux élections est en augmentation. C'est pourquoi l'État subventionne les partis politiques, en particulier les partis cartellisés qui ne pourraient pas s'en sortir sans cet argent. Ils deviennent ainsi des appendices de l'État, ce qui est antidémocratique, bafouant ainsi toute notion de liberté d'association et d'expression.
La corruption de ce régime qui paie les partis politiques avec des fonds publics est particulièrement évidente lors des campagnes électorales. Au nom du renforcement de la démocratie, le financement public des partis privilégie les partis cartellisés en leur fournissant toutes les ressources et en les plaçant au pouvoir à toutes fins pratiques. Ce système transforme les citoyens en « tiers » qui sont pénalisés s'ils font quelques dépenses pour intervenir dans une élection sur une base partisane. Si ce coût dépasse 300 dollars, ils feront la une des journaux et seront traduits en justice.
Il n'y a donc absolument aucune possibilité de discours politique basé sur les demandes du peuple lors d'une élection. Seules les promesses électorales intéressées des partis cartellisés sont mises de l'avant, certaines plus que d'autres, et il n'y a aucune possibilité de participation significative pour les électeurs. Le rôle des électeurs est de choisir un parti, lequel peut ensuite déclarer avoir un « mandat » de l'électorat.
Le régime de financement des partis par des fonds publics n'inclut pas dans ses calculs l'énorme quantité de promotion gratuite que les partis cartellisés reçoivent par le biais de la couverture médiatique. La valeur de la promotion gratuite fournie tout au long de l'année, et encore plus à la veille des élections et pendant les élections par les radiodiffuseurs et télévisions, les câblo-opérateurs, les journaux, les périodiques, les instituts de sondage et autres médias, qui ne parlent que de ces partis, est pratiquement incalculable.
Il faut savoir que la Loi électorale garantit ce qu'elle appelle la « liberté médiatique ». Élections Québec écrit : « La Loi électorale assure la liberté des médias tant dans le traitement de l'information que dans la couverture accordée aux partis et aux personnes candidates. Ainsi, en tout temps au cours de la période électorale, y compris le jour de l'élection, les médias peuvent traiter des enjeux politiques, des personnes candidates et des partis politiques. »
Le Parti marxiste-léniniste du Québec (PMLQ) s'est opposé dès le départ au régime de financement des partis politiques par l'État, qu'il juge antidémocratique à bien des égards. La Loi électorale est prétendument conçue pour garantir qu'il n'y ait pas de corruption lorsqu'il s'agit de collecter des fonds, comme lorsque le Parti libéral a été pris en train de recevoir des sacs en papier brun remplis d'argent liquide sous la table et autres. Loin d'éliminer la corruption, elle soumet les partis politiques et leurs donateurs au contrôle de l'État, violant ainsi la liberté d'association, le droit à la conscience et le droit à la vie privée.
La liberté d'association, qui est une question de conscience individuelle, est devenue une affaire contrôlée par l'État. Au nom de la transparence, Élections Québec exige le nom des donateurs des partis et toute l'information à leur sujet afin de déterminer si c'est vraiment eux qui ont donné l'argent ou quelqu'un d'autre.
Lorsqu'un électeur veut contribuer à un parti, il envoie sa contribution à Élections Québec et c'est Élections Québec qui décide si le parti en question recevra ou non la contribution en vérifiant l'authenticité du donateur. Si le parti ne veut pas recevoir la contribution de ce donateur pour des raisons qui lui sont propres, tant pis. Tout le pouvoir de décision est usurpé par l'agence de l'État au nom de grands idéaux.
Le facteur intimidation pèse énormément quand Élections Québec vérifie les donateurs par le biais de sources telles que Revenu Québec et même l'employeur de la personne. Leur nom, leur affiliation politique et leur code postal sont rendus publics. À une certaine époque, même les adresses étaient publiées, mais en raison de l'opposition du PMLQ et d'autres, cette divulgation de renseignements privés a été abolie. Si le donateur n'accepte pas ces conditions, il ne peut pas soutenir financièrement le parti de son choix.
Le droit à la vie privée, le droit de conscience et le droit d'association sont complètement bafoués et il n'y a censément aucun mal à cela. En échange, les partis reçoivent désormais beaucoup plus d'argent de l'État qu'ils n'en recevaient sous le régime précédent, lorsque les plafonds de contribution individuelle étaient plus élevés et les subventions de l'État plus faibles. En d'autres termes, les partis ne sont plus financés par leurs membres et ces derniers ne sont plus ceux qui décident de la politique ou de la ligne de conduite du parti. C'est l'État qui décide. Comme on dit, qui paie les musiciens commande la danse.
Le droit de conscience des électeurs de réfléchir, de parler en leur nom, d'avoir l'information même de base pour un vote informé, est tout simplement étouffé par la loi électorale, car l'espace public est inondé par la couverture unilatérale des partis cartels. Les « enjeux » de l'élection sont décidés par les partis cartellisés et les médias et les électeurs sont réduits au statut de consommateurs.
L'État reconnaît le droit d'exister aux « petits partis », mais les affuble d'une étiquette intéressée pour marginaliser leur programme, leurs candidats et leur présence. Le droit à la vie privée est violé par l'utilisation de bases de données contenant noms, âge, revenus, emplois, pour contacter les électeurs sans leur consentement. L'élite dirigeante corrompt tous les organes du pouvoir d'État et les institutions gouvernementales, de sorte qu'il ne reste que l'intimidation, les poursuites, les amendes et les pouvoirs de police.
Le système électoral du Québec est dit « représentatif », mais de quoi est-il représentatif exactement ?
Il est représentatif d'une élite dirigeante qui a atteint un tel niveau de corruption que les partis sont devenus des appendices de l'État, tandis que l'électorat est bâillonné, pour que le pouvoir reste entre ses mains. Ce processus doit être renouvelé totalement.
Le PMLQ réitère que les fonds publics, cette richesse créée par
le travail, doivent servir le corps politique et non des
intérêts privés. C'est pourquoi c'est le processus politique qui
doit être financé, pas les partis.
Christine Dandenault est une des directrices du Parti marxiste-léniniste du Québec (PMLQ).
Cet article est paru dans
Volume 52 Numéro 1 - Octobre 2022
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