Mobilisation policière massive : les forces policières utilisent la conférence sur la biodiversité comme exercice tactique
Une présence policière massive et diverses nouvelles mesures de sécurité ont été déployées à Montréal dans le cadre de l'événement de la COP15 qui a lieu au Palais des congrès du 7 au 19 décembre. Il s'agit de la plus vaste et complexe opération policière ayant lieu à Montréal en vingt ans, a dit une porte-parole de la police de Montréal aux médias le 3 novembre. L'opération comprend un large périmètre de sécurité qui a déjà été érigé autour du Palais des congrès.
Selon les agences de presse, la sécurité au COP15 relèvera du Groupe intégré de sécurité (GIS), qui comprend la Gendarmerie royale du Canada (GRC), la Sûreté du Québec (SQ) et le Service de police de Montréal (SPVM).
Ce qu'on tente d'abord de passer comme message est la possibilité d'une attaque létale contre la conférence. Le GIS dit qu'il est prêt à répondre à toute éventualité, même les scénarios les plus extrêmes comme les menaces de type CBRNE (les menaces chimiques, biologiques, radiologiques, nucléaires ou explosives). Il est fier d'être prêt à faire face à tout scénario qui pourrait être provoqué par un « contexte socio-politique mondial tendu ». Selon Tasha Adams, une caporale de la Gendarmerie royale du Canada : « Lors de tout événement majeur, un protocole de CBRNE fait partie intégrale du plan opérationnel du groupe de sécurité intégrée. Dans ce cas, l'équipe CBRNE sera mobilisée au besoin. »
Dans la vie de tous les jours, aucune de ces forces policières n'a la réputation de veiller à la sécurité dont les gens ont besoin. Au contraire, elles sont devenues notoires par leur négligence ou leur violence contre les plus vulnérables de la société — les minorités nationales, les personnes ayant des problèmes de santé mentale, les jeunes, les femmes, les itinérants et les peuples autochtones. Le but des mesures de sécurité prises en ce moment est de donner à la police l'occasion de mener des exercices réels dans un environnement urbain.
En prenant en compte l'expérience du peuple dans sa mobilisation contre le Sommet de l'Organisation des États américains en 2000 à Windsor, contre la Zone de libre-échange des Amériques et la militarisation de la ville de Québec en 2001, contre le G20 à Toronto en 2010 et la visite de George W. Bush à Ottawa, entre autres, il est raisonnable de conclure que le but de l'État, de sa police et de ses agences de renseignement est d'utiliser la conférence pour mener des exercices tactiques comme ils l'ont fait à chacun de ces évènements.
À Québec, l'objectif fixé était de compter combien de grenades de gaz lacrymogènes par minute ils pouvaient lancer sur les manifestants derrière le périmètre de sécurité. À Ottawa, ils ont eu recours à des chiens pour censément renifler des explosifs – qui s'est avéré un échec et une expérience peu populaire. À Toronto, ils ont dû éventuellement verser des milliers de dollars en dédommagements aux manifestants qu'ils ont pris en souricière et placés dans des installations de détention en violation de leurs droits civils et humains.
Aussi est-il raisonnable de présumer que toute référence aux armes chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires vise à promouvoir la prétention des services de renseignement comme quoi la sécurité du Canada est menacée et que les Canadiens devraient appuyer des lois adoptées sous prétexte qu'il faut enrayer l'ingérence étrangère dans les affaires du Canada.
Les agences de presse indiquent que le SPVM sera responsable de la sécurité à l'extérieur du site où a lieu l'événement, le Vieux-Port de Montréal, en escortant des convois et en contrôlant la circulation et les foules. La SQ, pour sa part, accompagnera les convois de dignitaires et gérera la circulation.
Le SPVM évalue à 25 millions de dollars les coûts de l'opération, qui seront couverts entièrement ou en partie par le gouvernement fédéral. Le nombre total d'agents déployés n'est pas divulgué, mais le SPVM a demandé à ses agents de se porter volontaires pour travailler pendant l'événement. Les agents de police de la ville de Québec, Laval, Longueuil et Gatineau seront aussi déployés pour assister le SPVM.
Des plans d'intervention font aussi partie des mesures de sécurité, y compris des scénarios où les délégués de la COP15, et possiblement des manifestants, sont exposés à des matières dangereuses et qu'il faut trouver comment intervenir auprès d'eux et à quel endroit. Parmi les scénarios prévus, il y a la capacité de réagir à des problèmes tels que trouver un endroit où les gens pourraient aller advenant une évacuation. Selon les agences de presse, le Palais des congrès sera déclaré zone internationale sous la responsabilité du département de la sûreté et de la sécurité des Nations unies.
Le Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM) est aussi prêt « à toute éventualité ».
Irène Marcheterre, la directrice des communications du CHUM, dans une entrevue avec La Presse, a déclaré : « Notre plus grande préoccupation, ce sont surtout les manifestations ou marches qui pourraient arriver de façon impromptue autour de notre périmètre, ce qui ralentirait l'accès aux milieux de soins ». Le CHUM demande aux organisateurs de respecter le corridor d'accès à l'hôpital, afin de pouvoir prendre en charge les patients qui en auront besoin, a-t-elle dit. Pour quelle raison des manifestants empêcheraient l'accès aux hôpitaux, elle ne le dit pas, mais le CHUM par contre affirme qu'il a créé une unité de crise à la fin du mois d'octobre en s'appuyant sur des exemples récents comme les grèves étudiantes de 2012 ou la grande manifestation d'un demi-million de personnes en septembre 2019. Tout cela sert à militariser la vie et entretenir le narratif des agences de renseignement comme quoi les gens sont des délinquants dont les activités représentent un danger pour la population.
« On aajouté une équipe d'agents de sécurité avec des agents et des agents événementiels qui pourront se déplacer d'une entrée à l'autre, selon les événements. On parle d'une dizaine d'agents de plus dans un premier temps, mais on pourrait en ajouter davantage », a dit Josée Rondeau, la coordonnatrice aux mesures d'urgence et à la sécurité au CHUM.
Plusieurs signaleurs routiers s'ajouteront également au personnel du centre hospitalier, en plus de la police de Montréal, afin de l'aider à adapter les parcours des ambulances en cas d'obstacles, ajoute le CHUM.
Cet article est paru dans
Volume 52 Numéro 69 - 6 décembre 2022
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