À titre d'information

La présidente nationale d'Unifor demande au premier ministre du Canada d'utiliser ses pouvoirs de police en vertu de la Constitution pour désavouer l'abus des pouvoirs de police en vertu de la Constitution du gouvernement ontarien

Dans une lettre datée du 5 novembre, la présidente nationale d'Unifor écrit au premier ministre du Canada Justin Trudeau pour lui demander d'utiliser ses pouvoirs de police inscrits dans la Loi constitutionnelle de 1867, comme le pouvoir de désaveu, pour annuler l'utilisation de la clause dérogatoire par l'Assemblée législative de l'Ontario, cette clause étant également un pouvoir de police légalement protégé par la Loi constitutionnelle de 1982.

Le fait que l'utilisation des pouvoirs de police soit autorisée par la Constitution devrait inquiéter les travailleurs canadiens d'un océan à l'autre. L'appel aux gouvernements de pouvoirs de police pour maintenir plutôt que d'abroger une constitution qui contient de tels pouvoirs de police est également un sujet de préoccupation. À titre d'information pour les lecteurs et travailleurs de tout le pays, LML reproduit le texte de la lettre ci-dessous[1].

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Monsieur le premier ministre Justin Trudeau,

Au milieu de la négociation collective entre les travailleuses et travailleurs du secteur de l'éducation du SCFP et le gouvernement de l'Ontario, le gouvernement du premier ministre Doug Ford a présenté le projet de loi 28 entraînant l'adoption de la Loi visant à garder les élèves en classe.

La Loi restreint expressément les droits d'expression, d'association et d'égalité protégés par la Charte des membres du SCFP. Elle empêche toute mesure de grève de la part du SCFP et de ses membres, en plus de permettre l'imposition d'amendes échelonnées au syndicat et à tout membre individuel si ceux-ci exercent leur droit de grève, un droit pourtant protégé en vertu de la constitution. Cette loi impose également une nouvelle convention collective aux membres du SCFP contre leur gré. Elle empêche ainsi le SCFP ainsi que ses membres de poursuivre leur négociation collective. Il est évidemment désormais impossible de savoir s'il aurait été possible d'en venir à un règlement négocié sans cette intervention.

Les mesures mises en place en vertu de la Loi sont sans aucun doute et manifestement inconstitutionnelles. Pour répondre à cette violation évidente, la Loi invoque la disposition de dérogation qui a pour but d'empêcher tout tribunal d'abolir cette loi qui enfreint les articles 2, 7 et 15 de la Charte. La Loi est une tentative directe d'intimider les membres du SCFP ainsi que les autres travailleuses et travailleurs et de les forcer à ne pas exercer leur droit de grève.

Jamais auparavant dans l'histoire canadienne des relations de travail un gouvernement n'a eu recours à la disposition de dérogation afin de limiter le droit de grève ainsi que le droit connexe de liberté d'association, des droits qui sont protégés par la constitution. Ce recours à la disposition de dérogation risque d'entraîner l'effondrement des protections constitutionnelles que nos tribunaux ont jugé applicables à la négociation collective ainsi qu'au droit de grève. L'usage de cette disposition dans ce genre de situations soulève des préoccupations essentielles à l'égard de la normalisation d'une telle pratique.

Il s'agit de circonstances sans précédent. Une intervention forte et décisive est donc de mise pour protéger les droits des travailleuses et travailleurs.

L'article 90 de la Loi constitutionnelle de 1867 autorise votre gouvernement à révoquer une loi provinciale. Une loi révoquée devient invalide et ne peut donc plus être appliquée. Même s'il n'a pas été utilisé récemment, ce pouvoir a été exercé plus de 100 fois par des gouvernements fédéraux précédents afin de révoquer des lois provinciales. En cas de doute quant à la validité de cette disposition, la Cour suprême du Canada a statué que le pouvoir de révocation demeurait en vigueur sans limites ni restrictions.

Afin de protéger les droits régis par la Charte des travailleuses et travailleurs de l'Ontario ainsi que d'autres provinces où les gouvernements décideraient d'emprunter cette approche destructrice, nous vous encourageons fortement à examiner sérieusement le recours au pouvoir de révocation par le gouvernement fédéral prévu en vertu de l'article 90 pour révoquer le projet de loi 28. Vous devez agir de façon décisive et rapide afin de protéger les droits à la libre association et à l'égalité des membres du SCFP ainsi que des autres travailleuses et travailleurs, et de freiner l'érosion progressive des valeurs de la Charte en Ontario.

Les membres d'Unifor ont toujours compris le caractère essentiel de la liberté de syndicalisation, de négociation collective avec les employeurs et de grève pour obtenir des conditions de travail convenables et sécuritaires. Unifor est fier d'appuyer le SCFP ainsi que ses membres et de prendre position afin de protéger les droits constitutionnels des travailleuses et travailleurs de l'Ontario.

Je vous demande d'envoyer un message clair à Doug Ford pour lui faire comprendre que son mépris des travailleuses et travailleurs, ainsi que des droits constitutionnels au Canada ne sera pas toléré. Si vous n'y mettez pas un terme dès maintenant, ces attaques virulentes à l'égard des travailleuses et travailleurs et de leurs droits constitutionnels deviendront encore plus sournoises.

Je vous encourage fortement à faire usage du pouvoir du gouvernement fédéral pour révoquer immédiatement la Loi visant à garder les élèves en classe.

Cordialement,

Lana Payne,
Présidente nationale


Cet article est paru dans
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Volume 52 Numéro 59 - 15 novembre 2022

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