Le vote alternatif
Lors de l'élection menée par le Parti conservateur uni (PCU) pour choisir un nouveau chef, celui-ci a utilisé une méthode appelée « vote à second tour instantané » ou « vote alternatif ». Wikipédia l'explique comme suit :
« Le vote à second tour instantané, aussi appelé vote alternatif, est un système électoral par classement utilisé pour choisir un gagnant. [...] Le vote à second tour instantané s'applique à une circonscription uninominale où un seul candidat ressort vainqueur. [...]
« Chaque électeur classe sous forme de liste les candidats par ordre de préférence. Le plus souvent, les bulletins de vote sont composés des noms des candidats suivis de cases, dans lesquelles l'électeur écrit un chiffre, 1 étant sa première préférence, 2 la suivante, et ainsi de suite. Chaque candidat doit se voir attribuer un chiffre différent.
« Les électeurs votent en une seule fois en déposant leur liste, et l'on simule alors plusieurs tours, si besoin. On compte d'abord les premières préférences de chacun des candidats. Si un candidat obtient la majorité absolue des voix, il est élu. Sinon, on élimine le candidat qui a recueilli le moins de voix, et on attribue les voix de ses électeurs à leur second candidat préféré. Pour cela, on ajoute une voix aux candidats marqués en seconde préférence de chaque bulletin où le candidat éliminé figurait en premier. On compte à nouveau les voix des candidats en additionnant aux premières voix ces voix supplémentaires obtenues lors du deuxième décompte. Si un candidat obtient la majorité absolue des voix, il est élu. Sinon, on répète l'opération jusqu'à l'obtention d'une majorité absolue, ce qui arrive inévitablement, au plus tard lorsqu'il ne reste plus que deux candidats en lice. »
Il s'agit d'un « second tour instantané » (STI) qui permet de comparer les deux premiers candidats en face-à-face. Le STI n'est pas un système de vote proportionnel, mais plutôt une méthode où « le gagnant emporte tout », car il ne permet d'élire qu'un seul gagnant par élection (dans une circonscription).
Le STI est généralement utilisé lorsque le mode de scrutin majoritaire uninominal à un tour a été abandonné, et pour être plus conforme à la règle de la majorité (absolue) dans les élections à un seul vainqueur. Lorsqu'il y a plus de deux candidats et qu'aucun d'entre eux n'obtient la majorité, le STI empêche un candidat ayant obtenu le plus de voix mais pas la majorité de l'emporter par défaut.
Nous sommes censés croire qu'une telle méthode est plus démocratique, mais elle dissimule la nature fondamentale de l'exercice qui demeure antipopulaire et antidémocratique. L'utilisation de telles méthodes ne fait rien pour résoudre la crise de légitimité du système de gouvernement de Westminster et des institutions dites démocratiques.
Mais la question demeure : pourquoi les membres du PCU ont-ils choisi Smith comme vainqueur ? Pourquoi elle et pas l'un des autres ? Le fait qu'elle n'ait pas de siège n'aide certainement pas leur cause. Une analyse de Lisa Young, professeure de sciences politiques à l'Université de Calgary, dit ceci :
« Les membres du parti sont principalement situés en dehors de Calgary et d'Edmonton. Contrairement aux règles de nombreux autres partis pour l'élection d'un chef, il n'y a pas eu de pondération des votes par circonscription électorale pour s'assurer que le nouveau chef a le soutien de toute la province.
« Chaque vote a été compté de manière égale. Le sentiment populiste anti-establishment est fort dans les régions rurales de l'Alberta. »
Est-ce vraiment ainsi que les choses se posent ? Comment les votes sont-ils pondérés de manière égale lorsqu'il n'est pas possible de savoir ce que la personne qui vote veut réellement ? L'insertion de mots comme « sentiment populiste anti-establishment » ne nous dit rien sur ce que signifie être « anti-establishment » ou sur les raisons pour lesquelles les résidents des zones rurales de l'Alberta sont « anti-establishment » ou dits « anti-establishment ». Si les résidents des régions rurales de l'Alberta sont « anti-establishment », cela signifie-t-il que les résidents de Calgary et d'Edmonton sont « pro-établissement » ?
Une chose semble évidente : les Canadiens peuvent maintenant s'attendre à ce que l'élection de Danielle Smith à la tête du PCU et, par conséquent, au poste de première ministre de l'Alberta, serve de prétexte à certaines forces pour calomnier et faire des affirmations fallacieuses sur le caractère soi-disant « réactionnaire » des Albertains. Il semble évident que les travailleurs seront appelés à préserver les institutions démocratiques libérales du danger que représentent pour elles les Albertains populistes anti-establishment qui, dit-on, sont représentés par Danielle Smith, jusqu'à preuve du contraire.
Ce que les développements révèlent néanmoins, c'est l'urgence avec laquelle les travailleurs et les jeunes doivent répondre à l'appel à se réunir pour discuter de la crise dans laquelle les institutions démocratiques sont embourbées, de la façon dont cela affecte leurs vies et de ce qu'ils peuvent faire pour tourner les choses en leur faveur. Ils ne doivent pas accepter que la discussion soit réduite au choix des méthodes de vote de manière à masquer le contenu de la gouvernance qui leur est imposée. L'objectif doit être de renforcer le pouvoir politique des travailleurs et du peuple afin qu'ils puissent participer à la prise des décisions qui affectent leur vie.
Les méthodes utilisées pour diviser les gens répandent la désinformation sur leurs préoccupations, leurs croyances, leurs désirs, leurs aspirations, leurs expériences et leurs perceptions. Elles sont promues par les intérêts privés étroits qui dirigent les partis cartellisés, leurs courtisans et leur suite qui ne veulent pas ou ne peuvent pas renouveler la démocratie d'une manière qui humanise l'environnement naturel et social et apporte une nouvelle cohérence qui est si nécessaire en ce moment. Un point de départ important est d'adopter une position ferme en disant que la crise dans laquelle se trouve l'Alberta n'est pas causée par les Albertains des régions rurales soi-disant anti-establishment qui, selon ce que l'on veut nous faire croire, sont profondément réactionnaires et dangereux.
Cet article est paru dans
Volume 52 Numéro 40 - 12 octobre 2022
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