Des sujets de préoccupation pour les travailleurs canadiens

Les travailleurs exposent le caractère frauduleux des lois du travail

- K.C. Adams -


À la Fête du travail 2022 à Toronto

La fraude des lois du travail au Canada est exposée par la résistance des travailleurs à l'offensive continuelle contre leurs droits et les réclamations qu'ils sont en droit de faire à la valeur qu'ils produisent. On dit aux travailleurs qu'ils n'ont pas le droit de décider de leurs propres affaires organisationnelles et de leurs relations avec leurs employeurs. Partout au Canada, l'État utilise ses lois du travail pour attaquer le droit des travailleurs d'avoir leur propre organisation, pensée et programme indépendant. Cela est particulièrement évident dans le cas des travailleurs irréguliers et contractuels.

Les efforts actuels pour syndiquer les travailleurs dans le secteur des transports montrent que les lois du travail sont un obstacle à l'organisation et à la réussite d'une campagne pour des salaires, des avantages sociaux et des conditions de travail qui conviennent aux travailleurs. Dans la lutte contre des entreprises américaines telles qu'Amazon et Uber, les travailleurs doivent même combattre la notion irrationnelle qu'ils ne sont pas des travailleurs.

Au lieu de partir de leur propre point de référence en tant que travailleurs avec des droits, des réclamations, des revendications et désirant des conditions de travail qui leur conviennent, ils sont obligés de partir d'une position de légalité en tant que travailleurs employés dans le cadre de la définition légale des lois du travail actuelles. L'incohérence de la situation souligne la réalité des lois et codes du travail créés pour servir les employeurs les plus puissants et leurs intérêts privés, en opposition aux droits et aux revendications de la classe ouvrière et à l'intérêt général de la société.

Les lois du travail en Ontario

Les lois du travail en Ontario empêchent les chauffeurs de limousine d'Uber de se battre pour leurs droits. En effet, Uber a conclu un accord informel avec un syndicat pour interdire à ses chauffeurs de limousine de poursuivre leurs efforts de syndicalisation. Uber a ensuite utilisé cet accord pour empêcher une autre organisation appelée Collectif du travail à la demande (Gig Workers United), soutenue par le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), de créer un grand syndicat de chauffeurs Uber et de faire valoir leurs revendications.

En réponse à l'accord informel conclu par Uber avec l'autre syndicat, le STTP a déposé une plainte devant la Commission des relations de travail de l'Ontario posant trois questions principales : (1) Uber est-elle un employeur des chauffeurs d'Uber; (2) l'entente négociée secrètement avec l'autre syndicat constitue-t-elle une ingérence dans la formation et la sélection d'un syndicat par les chauffeurs d'Uber, étant donné que l'autre syndicat et le STTP recrutaient activement des chauffeurs au moment où l'autre syndicat a obtenu un accès spécial aux chauffeurs; et (3) l'entente équivaut-elle à un soutien financier ou autre de la part d'Uber à l'autre syndicat, ce qui est contraire à l'article 70 de la Loi sur les relations de travail de l'Ontario ?

On peut constater dans cette affaire que les questions débattues ne portent pas sur la lutte pour les droits, les revendications et les demandes des travailleurs d'Uber dans leurs relations en tant que travailleurs qui vendent leur capacité de travail à leur employeur. Dans ce cas, les lois du travail obligent d'abord les travailleurs à se défendre contre l'idée absurde qu'ils ne sont pas des employés d'Uber. Cette préoccupation supplante l'important travail de construction d'une opinion publique parmi eux et les autres concernant la nécessité de s'organiser pour défendre leurs justes revendications et demandes en tant qu'employés d'Uber et la manière dont cette lutte devrait se dérouler. Le droit du travail empêche les travailleurs d'Uber de s'organiser en leur propre nom, indépendamment de l'État et de l'entreprise. Le droit du travail divise les travailleurs en fonction du syndicat qu'ils soutiennent et établit également ce qui doit et peut être décidé et par quels moyens.

Les lois du travail agissent de la même manière que les institutions démocratiques libérales dépassées de la gouvernance par les partis, où le parti au pouvoir, l'opposition officielle et les médias fixent l'ordre du jour pendant les élections, et où les différents partis cartellisés divisent les gens en factions opposées au lieu de les unir pour résoudre les problèmes et développer leurs relations entre eux et avec la nature.

Les lois du travail en Alberta

Plus de 40 % des 160 chauffeurs d'Amazon « sous-traités » à Leduc, en Alberta, ont signé des cartes d'adhésion à un syndicat et ont présenté leur demande à la Commission des relations de travail de l'Alberta (ALRB), conformément aux lois du travail. Leur demande n'a même pas atteint le niveau d'une audience formelle puisque, selon les organisateurs syndicaux, l'ALRB l'a rejetée d'emblée « en raison du manque de preuves qu'ils travaillent pour Amazon ».

Stacy Tulp, organisatrice chez les Teamsters, rapporte : « J'ai fait la demande (à l'ALRB) en tant qu'employée d'Amazon Canada. Ils l'ont rejetée en disant que je n'avais aucune preuve qu'ils étaient des employés d'Amazon. »

Elle dit que chaque carte signée provenait d'un chauffeur qui, selon Amazon, n'est pas employé par elle mais plutôt par un sous-traitant tiers d'Amazon appelé Partenaire de services de livraison (PSL).

« Les chauffeurs relèvent tous d'un sous-traitant tiers. Amazon fournit tout. Amazon fournit les fourgons, Amazon fournit même les gilets. Leur seul employeur est Amazon. Leur sous-traitant est donc plutôt un administrateur de paie », explique Stacy Tulp.

Un PSL est similaire à un service comptable au sein d'une entreprise, chargé des recettes et des salaires. Les PSL d'Amazon agissent comme des sous-traitants tiers régionaux et apparaissent sur le papier comme l'employeur d'un chauffeur au nom d'Amazon. Les chauffeurs d'Amazon qui tentent de se regrouper en syndicats en Amérique du Nord ont vu leurs efforts bloqués par cette pratique trompeuse. Selon Amazon, chaque PSL peut employer entre 40 et 100 personnes et être lancé avec seulement 15 000 dollars. Plusieurs équipes de chauffeurs PSL travaillent à partir d'un seul entrepôt Amazon.

Selon Stacy Tulp, c'est une ruse pour cacher les problèmes que les chauffeurs veulent régler, notamment les quotas élevés et les lourdes charges de travail. Elle explique : « Disons que vous devez livrer ces 160 colis dans un délai de 10 heures. Si vous ne livrez pas ces colis dans ce délai, vous êtes sanctionné par votre sous-traitant et le sous-traitant est sanctionné par Amazon. Mais si vous avez pu faire environ 160 colis, la semaine suivante, vous recevez 180 colis. »

Grâce à leurs propres efforts et luttes pour s'organiser et défendre leurs droits, leurs revendications et leurs demandes de conditions de travail qui leur conviennent, les travailleurs exposent la fraude des lois du travail en tant que diktat étatique des employeurs les plus puissants servant leurs intérêts privés étroits.

La classe ouvrière développe sa propre pratique et pensée indépendantes sur la manière de se défendre dans les conditions actuelles et, ce faisant, ouvre la voie à son émancipation du système dépassé dans lequel les travailleurs vendent leur capacité de travail à une classe impérialiste d'exploiteurs/employeurs. Les travailleurs et les jeunes qui défendent les droits de tous doivent répondre à l'appel de l'histoire et entreprendre le travail d'organisation et de défense de la classe ouvrière indépendamment de l'État impérialiste/employeur, de ses plans et de son point de référence.


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Volume 52 Numéro 38 - 5 octobre 2022

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