Révolution

– 4 octobre 1989 –


Le camarade Hardial Bains s'adressant à l'un des deux forums publics tenus à Toronto,
les 25 avril et 30 mai 1992, pour discuter du tournant historique provoqué par la chute du pseudo-socialisme en Union soviétique. 

Selon les agences de presse occidentales, une révolution est en train de se produire en Europe de l'Est. En fait, l'Europe de l'Est a été créée comme résultat d'une révolution, alors de quel genre de révolution parlent-elles ? La plus grande de toutes les révolutions fut la Grande Révolution d'Octobre, qui a conduit à la création du nouvel État des Soviets, le premier État prolétarien, un État de la dictature du prolétariat, une démocratie de type nouveau, une démocratie prolétarienne. Si toutes les révolutions jusqu'alors n'avaient fait que remplacer une classe exploiteuse par une autre, la Grande Révolution d'Octobre, elle, donna naissance à une société sans classes exploiteuses, une société nouvelle dans laquelle l'exploitation de l'homme par l'homme était chose du passé.

On nous dit que dans cette société une nouvelle révolution a éclaté, mais on ne nous explique pas le but de cette révolution. Cette « révolution » aurait commencé avec l'arrivée au pouvoir de Nikita Khrouchtchev. Mais, encore une fois, quel en est le but ? En fait, si vous lisez entre les lignes, ou si vous réfléchissez à quelle exaltation et à quelle euphorie cela provoque chez les gouvernements capitalistes et impérialistes, vous verrez qu'il s'agit en fin de compte d'une rétrogression : un mouvement pour récupérer les acquis de la Grande Révolution d'Octobre et démanteler la société socialiste. Comment le but d'une révolution peut-il être la rétrogression ? Nous avons en effet devant nous une espèce très bizarre de révolution qui échappe à toute définition scientifique ; voire, pour la « définir » on emploie des mots qui normalement ont une autre signification.

Cette « révolution » est étrange sous un autre aspect. Lorsque la Grande Révolution d'Octobre a donné naissance au pouvoir des Soviets, quatorze États impérialistes sont intervenus militairement pour l'écraser. Winston Churchill avait lancé l'appel à tuer l'enfant « dans son berceau ». La « révolution » d'aujourd'hui, par contre, attire les éloges des chefs de ces mêmes États impérialistes. Comment expliquer ce revirement ? Peut-être faut-il l'expliquer en soulignant que la révolution en cours à Moscou aujourd'hui est la continuation de la contre-révolution amorcée par Nikita Khrouchtchev. Normalement c'est la contre-révolution, pas la révolution, qui attire les fleurs et les félicitations des États capitalistes et impérialistes.

Une véritable révolution conduit au progrès de la société, elle résulte en un vigoureux développement et libère l'initiative humaine à un degré jusqu'alors inégalé, comme cela s'est produit en Russie après la Grande Révolution d'Octobre de 1917. Entre autres, l'Union soviétique s'est industrialisée en un temps record. L'histoire n'avait jamais vu un phénomène pareil. En quelques années elle s'est remise de la dévastation causée par la Seconde Guerre mondiale sans recevoir d'aide d'aucun pays et devant constamment faire face au danger qu'une guerre soit déclenchée par les États-Unis. De 1917 à 1953, la Russie a donné l'exemple d'une marche triomphale. Aucun ennemi n'a réussi à lui infliger la défaite. Voilà ce qu'a signifié, pour la classe ouvrière de tous les pays, une véritable révolution.

Or la « révolution » de Khrouchtchev et de Gorbatchev aujourd'hui n'a apporté et ne continue d'apporter que des mauvaises nouvelles : les désastres se succèdent, des manifestants sont fusillés, des divisions se produisent, les ravages de l'approfondissement et de l'élargissement de la crise font continuellement les manchettes. La pénétration de l'influence de la culture décadente américaine fait maintenant l'objet de beaucoup de tapage. Chaque nouvelle perfidie, chaque nouvelle calomnie contre Staline, ou contre la société socialiste, chaque nouvelle menace proférée contre les minorités nationales ou les travailleurs fait la une des journaux. Voilà ce qui nous vient de l'Union soviétique aujourd'hui. C'est un exemple de chaos et de rétrogression, la conséquence d'une contre-révolution et de la restauration capitaliste, pas d'une révolution. Jamais ce genre de « révolution » n'inspirera un travailleur à s'organiser et à lutter.

Autant la presse occidentale aime tromper ses lecteurs, autant elle a l'habitude de se leurrer. Elle qualifie les développements en Union soviétique et dans les anciennes démocraties populaires de « crise » et d'échec du « communisme ». Or, en réalité il s'agit d'une crise du révisionnisme moderne, une forme de l'idéologie bourgeoise, et de la restauration capitaliste. Plus ces pays s'engagent dans la voie de la rétrogression, de la contre-révolution, plus ils s'enfoncent dans la crise et le chaos, et dans ces conditions les travailleurs n'ont pas d'autre recours que la révolution et le communisme. Il n'y a pas d'autre issue à la crise qui secoue des pays comme l'Union soviétique.

La presse occidentale est allée jusqu'à déclarer que tout cela signifie une victoire du capitalisme sur le communisme. Comment en vient-elle à cette conclusion ? Lorsque le socialisme était édifié en Union soviétique, c'était une victoire sur le capitalisme. Or, la rétrogression en Union soviétique signifie un revers pour la révolution et le socialisme. Elle ne prouve pas que le capitalisme est meilleur ou que le socialisme ne marche pas. Quand des pays capitalistes et impérialistes comme la Grande-Bretagne et d'autres s'enfoncent dans le marais de la crise, ce n'est guère le moment de célébrer la victoire du capitalisme !

La logique la plus élémentaire échappe à la presse occidentale. Lorsqu'un étudiant échoue à un examen de physique ou abandonne ses études, cela signifie-t-il que la physique a échoué en tant que science ? On peut seulement conclure que, pour une raison ou une autre, l'étudiant a échoué. Peut-être n'était-il pas un très bon élève, peut-être n'avait-il pas envie de poursuivre des études en physique. De même, si des pays comme l'Union soviétique se sont engagés sur la voie de la rétrogression et de la contre-révolution, cela ne signifie pas que le communisme a échoué, ou que le capitalisme a triomphé. La crise qui bouleverse l'économie et les autres sphères de la vie dans ces pays n'est guère une raison pour le capitalisme mondial de crier victoire.

C'est assez ahurissant de voir la presse occidentale appeler des révisionnistes comme Gorbatchev des « marxistes-léninistes ». Elle montre son côté méprisable et intéressé. À l'époque, on avait dit qu'Adolf Hitler était « socialiste ». La presse occidentale chante victoire en disant que les « marxistes-léninistes » se sont rendu compte de la folie de leur entreprise et ont opté pour le capitalisme. C'est comme si l'on disait que la science s'est rendu compte de sa folie et croit maintenant que la terre est vraiment plate et que tous les corps célestes tournent autour d'elle. Pour embrouiller les travailleurs on affirme d'une part que Gorbatchev est un « marxiste-léniniste », et d'autre part on énumère à grand bruit toutes les choses terribles qu'il fait.

En réalité, tous les développements en Europe de l'Est montrent que ces pays sont aux prises avec tous les maux qui affectent typiquement la société capitaliste. La forme varie, mais le contenu est le même. On y trouve la crise économique, comme dans tout pays capitaliste ; on y trouve les conflits et querelles politiques, comme dans tout pays capitaliste ; on y trouve la décadence culturelle et la dévastation spirituelle, comme dans tout pays capitaliste. En fait, les choses en Pologne n'ont absolument pas changé avec l'arrivée au pouvoir du gouvernement de Solidarité. C'est donc que le pays était déjà capitaliste et qu'en fin de compte l'opposition entre Solidarité et le gouvernement « communiste » n'était qu'une querelle entre deux partis bourgeois et réactionnaires.

La rétrogression et la contre-révolution à l'échelle mondiale sont la politique officielle des États-Unis, de l'Union soviétique et de tous les États réactionnaires. On tente de faire croire qu'il s'agit d'une « révolution » afin d'embrouiller les esprits. N'est-il pas ridicule de voir les Américains financer des mercenaires contre-révolutionnaires en Amérique centrale tout en prétendant vouloir la « révolution » en Europe de l'Est ? Qui croient-ils tromper ? Les travailleurs voient d'eux-mêmes le genre de société dans laquelle ils vivent et quel genre de société les capitalistes souhaitent établir dans d'autres pays. En même temps, les travailleurs doivent redoubler de vigilance, ils doivent faire échec à cette offensive contre la révolution, contre la liberté et le progrès, offensive que mènent les États-Unis, l'Union soviétique et tous les États réactionnaires.

La situation mondiale est très complexe. La réaction est à l'offensive. Les événements d'Europe de l'Est, par exemple, et en particulier ce qui se produit en Union soviétique, en Hongrie et en Pologne, sont un front de l'offensive de la réaction mondiale pour la destruction de la révolution et du socialisme, pour changer le cours de l'histoire. Les révisionnistes du Parti communiste du Canada et les sociaux-démocrates du Nouveau Parti démocratique sont extrêmement heureux de cette offensive, ce qui prouve encore une fois qu'ils sont de misérables compagnons d'armes de la réaction mondiale. Les travailleurs doivent maîtriser le marxisme-léninisme afin de s'armer idéologiquement en vue des batailles encore plus complexes qui pointent à l'horizon.

La révolution et la rétrogression sont deux choses qui ne se mêlent pas. L'une ne peut faire partie de l'autre. On a beau qualifier les événements d'Europe de l'Est de développements « démocratiques » et « révolutionnaires », l'histoire s'en souviendra par leurs vrais noms : contre-révolution et rétrogression.

(Hardial Bains, Communisme 1989-1991, CEI, 1991)


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Volume 52 Numéro 23 - 4 septembre 2022

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