La Loi d'exécution du budget entérine la destruction de la propriété privée

La Loi portant exécution de certaines dispositions du budget inclut des mesures qui, à toutes fins utiles, entérinent la destruction de la propriété privée.

Le projet de loi omnibus C-19 de 464 pages, parrainé par la coalition libérale et néodémocrate au pouvoir, a été adoptée par le Sénat à 56 voix contre 16 sans aucun changement et est devenu une loi, recevant la sanction royale le 23 juin. La loi Trudeau-Freeland donne à l'exécutif au pouvoir des pouvoirs étendus pour confisquer et vendre les biens des particuliers et des entreprises, même s'ils ne se sont livrés à aucune activité illégale.

Le pouvoir exécutif de Justin Trudeau dispose désormais d'un outil juridique pour confisquer les avoirs au Canada des personnes d'origine russe, qui ont déjà été gelés en vertu de la précédente Loi sur les mesures économiques spéciales (MES). La MES comprend une liste de sanctions de 1 400 personnes et entités russes. Le gouvernement refuse de divulguer les avoirs ou le montant qu'il a gelés en vertu des pouvoirs de la MES. Le gouvernement peut maintenant voler légalement ces avoirs gelés.

La MES exige que toute personne au Canada et tous les Canadiens à l'extérieur du pays informent la GRC de tout bien en leur possession ou sous leur contrôle dont on pense qu'il est détenu ou contrôlé par une personne ou une entité figurant sur la liste des sanctions du Canada comprenant les noms et les entités russes. La MES est administrée et appliquée par le ministre des Affaires étrangères du parti cartellisé au pouvoir, et la GRC recueille les informations sur les biens détenus ou contrôlés par les personnes désignées.

Jusqu'à présent, les seules nouvelles sur le montant des sommes gelées proviennent de la GRC, qui indique que les autorités de l'État « ont gelé jusqu'à présent l'équivalent de 124 millions de dollars d'avoirs », mais n'identifie pas les personnes et les entités visées. En outre, 289 millions de dollars de transactions impliquant des « Russes sanctionnés » ont été bloqués. Ironiquement, selon certains, la GRC a déclaré qu'elle ne pouvait pas divulguer les noms et les avoirs gelés « en raison de la Loi sur la protection des renseignements personnels ».

Le gouvernement a publié certains des noms et des entités figurant sur sa liste de la MES, mais pas le montant des sommes en jeu. Une des personnes figurant sur la liste des sanctions est Roman Abramovich, de nationalité russe, qui détient des biens au Canada. Il possède environ 30 % des actions d'Evraz, un fabricant mondial d'acier qui emploie plus de 1 800 personnes dans ses installations de l'Ouest canadien, principalement dans l'ancienne usine IPSCO de Régina. Aucune information n'a été divulguée quant à savoir si les actions qu'il détient dans Evraz North America ont été gelées et sont susceptibles d'être volées par l'exécutif gouvernemental au pouvoir.

La plus grande entité figurant sur la liste des sanctions du Canada est la Banque centrale de Russie. Cette banque possède environ 20 milliards de dollars en obligations canadiennes et autres avoirs, qui ont vraisemblablement été gelés et risquent maintenant d'être volés. La GRC n'a pas inclus les avoirs canadiens de la banque centrale de Russie dans sa liste des avoirs gelés et susceptibles d'être volés. Cependant, les États-Unis affirment qu'eux-mêmes et d'autres pays, dont le Canada, au sein des institutions financières internationales dominées par l'impérialisme américain, ont gelé 330 milliards de dollars d'avoirs appartenant à la banque centrale de Russie.

Certains commentateurs ont souligné que les nouveaux pouvoirs exécutifs du C-19 pour voler les avoirs légaux détenus à l'échelle internationale sont illimités et pourraient être utilisés contre n'importe qui une fois ciblés et sanctionnés. Par exemple, le vol de la valeur sociale détenue par des individus et des entités du Myanmar a déjà été évoqué au Sénat comme cible par la sénatrice Ratna Omidvar de l'Ontario, nommée par Justin Trudeau.

Des voix s'inquiètent du vol organisé par l'État
d'avoirs détenus légalement

La CBC cite des commentateurs qui affirment que le vol d'avoirs « reste un jeu risqué ». D'autres gouvernements hostiles pourraient saisir des biens appartenant à des Canadiens à l'étranger en guise de représailles. Cela peut également violer le droit international coutumier, selon les articles de l'ONU sur la responsabilité des États ».

La loi C-19 place le pouvoir de juge, jury, bourreau et distributeur d'avoirs entre les mains des ministres du parti cartellisé au pouvoir. Même la sénatrice Ratna Omidvar, qui a fait la promotion d'une certaine variation de la loi, a remis en question le manque de contrôle judiciaire, car le Canada pourrait être accusé de « distribution inappropriée de fonds ou, pire encore, d'appropriation de fonds pour son propre usage ».

Sur la question de la légalité, le ministre fédéral libéral de la Justice du cartel de partis, David Lametti, a déclaré :« Vous n'avez pas un droit absolu à la propriété privée au Canada . ». Il a poursuivi en comparant ce vol particulier organisé par l'État à d'autres processus d'expropriation du gouvernement en tant que droit du gouvernement.

La loi C-19 confie au ministre des Affaires étrangères du cartel de partis la responsabilité de la distribution de l'argent et des autres biens saisis par le gouvernement. Comme toutes les procédures sont secrètes, cela ouvre grand la porte à la corruption et à ce qui semble être louche. Selon la CBC, Peter Boehm, ancien haut fonctionnaire des Affaires mondiales, souhaite que des « garanties soient mises en place » pour éviter les questions de favoritisme ou de corruption. À ce sujet, il a déclaré :« Quel est le mécanisme ? À qui doivent aller ces avoirs ? Vont-ils à des individus ? Vont-ils à des acteurs étatiques ? »

Rachel Ziemba du Centre for a New American Security « qui conseille les entreprises et les pays sur la politique de sanctions » a déclaré à la CBC que l'utilisation du Fonds monétaire international contrôlé par les États-Unis « pour contrôler les bénéficiaires et ajouter plus de rapports au processus pourrait ajouter plus de certitude ». La conseillère Rachel Ziemba n'a pas précisé quelle « certitude » cela ajouterait ni ce qui rend le FMI, tant décrié, plus fiable. Elle a suggéré qu'au moment où les gouvernements se lancent dans la saisie d'avoirs légaux, « ils doivent aussi se préoccuper du message qu'ils envoient sur quelles juridictions sont sécuritaires pour les investissements étrangers ».

Le montant saisi selon la GRC fait pâle figure en comparaison des 20 milliards de dollars que la Banque centrale russe a investis au Canada. « Au cours de la dernière décennie, la Banque centrale russe et certains de ses fonds d'investissement se sont vraiment concentrés pour essayer de réduire les risques associés aux dollars américains, explique Rachel Ziemba. Les avoirs de réserve et les obligations d'État canadiens étaient attrayants parce qu'ils étaient à la fois stables et obtenaient un meilleur rendement que des investissements comparables au Japon ou dans l'Union européenne. »

La Banque centrale de Russie figure sur la liste des entités sanctionnées par le Canada. On peut supposer que ses 20 milliards de dollars d'actifs canadiens sont gelés et font maintenant l'objet d'un vol, bien que cela soit secret. À ce sujet, Rachel Ziemba a déclaré : « Cette (saisie) pourrait envoyer un message aux autres pays qui investissent sur les marchés [des devises et des obligations internationales] (comme la Chine, a-t-elle dit plus tard). C'est, je pense, la raison pour laquelle le département du Trésor [américain] et même la [Réserve fédérale américaine] se méfient de ces mouvements. »

Selon la CBC, la secrétaire du département du Trésor américain, Janet Yellen, « serait réticente à l'idée, compte tenu des suggestions selon lesquelles cela violerait la loi américaine et pourrait nuire à la réputation de l'Amérique en tant que lieu d'investissement sûr pour les autres pays ». La CBC n'a pas mentionné si elle remettait en question la légalité de la saisie par le gouvernement américain d'avoirs en Iran, en Afghanistan et ailleurs, y compris le pétrole syrien et irakien, et quel genre de message cela envoie aux autres pays.

Il est possible que la loi 19 viole le droit international

Les pouvoirs proposés pour vendre et redistribuer les avoirs russes pourraient violer le droit international, selon l'expert juridique David Kleimann, conseiller en droit international. Le chapitre II des articles des Nations unies sur la Responsabilité de l'État pour fait internationalement illicite, a été adopté par la Commission du droit international en 2001 et soumis à l'Assemblée générale. Il énonce les règles relatives aux contre-mesures que les États membres peuvent prendre pour tenir un autre membre responsable d'actes illégaux tels que l'invasion de l'Afghanistan par les États-Unis et l'OTAN, le bombardement et la destruction de la Yougoslavie et de la Libye, ainsi que la « coalition des volontaires » qui a envahi et détruit l'Irak.

L'article 49 du chapitre II stipule que les contre-mesures aux actes illégaux « doivent, autant que possible, être prises d'une manière qui permette la reprise de l'exécution des obligations en question ». La loi C-19 va cependant plus loin, en permettant aux autorités non seulement de geler les avoirs détenus au Canada, mais aussi de les voler et de les vendre. Il est évident que cela ne « permet pas la reprise de l'exécution des obligations en question », ce qui fait de la loi C-19 une violation du droit international.

Après avoir examiné la loi C-19, David Kleimann dit avoir des inquiétudes. Il a déclaré à la CBC : « Je pense que la question juridique est relativement claire ici, qu'une telle action ou de telles procédures violeraient le droit international ». Dans une entrevue accordée à la CBC, David Kleimann a déclaré que le vol d'avoirs, pour quelque raison que ce soit, bonne ou mauvaise, nous entraîne sur la voie « de la loi de la jungle, et cela rend les avoirs occidentaux très vulnérables à la saisie, à la confiscation et à l'utilisation de ces produits à d'autres fins. Et ce n'est pas nécessairement quelque chose que les pays occidentaux aimeraient voir, j'imagine ».

On craint que si le Canada sape la norme internationale énoncée à l'article 49 de l'ONU, cela pourrait créer un précédent risqué pour les investisseurs étrangers en général. D'autres gouvernements qui se trouvent en conflit avec le Canada pourraient suivre l'exemple et saisir les avoirs canadiens à l'étranger. On dit que l'on récolte ce que l'on sème.

Ce qu'aucun d'entre eux ne dit cependant, c'est que le système international fondé sur la propriété privée est en train d'être détruit. La propriété privée peut être détruite. Tout comme la guerre de Sécession aux États-Unis a détruit le système d'esclavage au profit du système d'esclavage salarié, aujourd'hui, à une époque où les impérialistes américains et ceux qui pratiquent l'apaisement avec eux, comme le Canada, ont imposé l'anarchie et la violence comme mode de vie et qu'ils appellent cela un ordre international fondé sur des règles, la propriété privée elle-même est en train d'être détruite.

Il n'y aura pas de retour en arrière. Les arguments intéressés ne changeront pas la réalité d'un iota.

Le porte-parole du parti conservateur cartellisé en matière d'affaires étrangères, Michael Chong, suggère que le droit et les droits internationaux ne s'appliquent qu'aux pays que le Canada juge acceptables selon le point de vue et les critères du Canada. Il a déclaré à la CBC : « Les États autoritaires comme la Russie ont démontré qu'ils sont prêts à défier les démocraties sur le plan existentiel et qu'ils n'ont aucune considération pour les règles les plus fondamentales du système international. »

« Des États comme la Russie ont perdu certains de leurs droits à participer à ce système, notamment sur le plan économique. Les sanctions et la politique économique occidentales doivent changer pour reconnaître cette nouvelle réalité. »

Davis Kleimann déclare à la CBC que le gouvernement Trudeau risque de paraître hypocrite en promulguant une loi nationale permettant à ses fonctionnaires de violer le droit international. Kleimann trouve « relativement étrange qu'il n'y ait pas eu plus de débat au Canada » sur le projet de loi C-19 et sur toute la question du vol d'avoirs légaux par l'État. Les discussions ont été du type de celles de Heather McPherson, membre du parti néodémocrate cartellisé pour Edmonton Strathcona, qui s'est plainte d'un manque d'information, ce qui ne traite évidemment pas du fond du problème qui est en fait la destruction de la propriété privée. Selon elle, « Affaires mondiales ne nous dira pas quels biens ont été gelés parce qu'il dit que ses données peuvent ne pas être complètes, donc le gouvernement ne sait pas ce qui a été sanctionné et les Canadiens ne savent pas ce qui a été sanctionné . » Sans cette information, les Canadiens n'ont aucun moyen de savoir si le plan du gouvernement pour faire pression sur la Russie fonctionne réellement, a-t-elle ajouté.

Rien de tout cela n'a dérangé le chef du NPD, Jagmeet Singh, qui soutient la loi C-19 et le vol des avoirs des individus et entités russes. Le parti conservateur a déclaré qu'il s'opposait à la C-19 mais pas aux mesures particulières visant à voler les avoirs russes.

Le vol de ce qui appartient à d'autres pour faire avancer des intérêts privés est le modus operandi fondamental sous le capitalisme. À cet égard, plusieurs soulignent que les partis cartellisés ont tous récemment accepté de présenter des excuses aux Canadiens d'origine japonaise pour avoir volé leurs maisons, leurs bateaux, leurs entreprises et d'autres biens pendant la Deuxième Guerre mondiale et envoyé des hommes, des femmes et des enfants dans des camps d'internement pour le « crime » d'être d'origine japonaise. De même, les partis cartellisés s'excusent pour le vol des terres des autochtones, le génocide et les autres crimes commis à leur encontre, qui se poursuivent encore aujourd'hui malgré tout.

(Avec des informations d'agences de nouvelles et de l'article de la CBC, « Canada can now seize, sell off Russian assets. What's next ? »)


Cet article est paru dans
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Volume 52 Numéro 10 - 17 juillet 2022

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