Croissance effrénée du commerce des armes

Des dépenses militaires et une militarisation accrues sous prétexte de « protéger les Canadiens des menaces au pays et à l'étranger »

– Pierre Soublière –

CANSEC, la « plus importante exposition commerciale de défense et de sécurité mondiale » du Canada, organise à nouveau sa rencontre annuelle de marchands d'armements et de la mort les 1er et 2 juin au centre EY à Ottawa. L'événement est organisé par l'Association des industries canadiennes de défense et de sécurité (AICDS), qui est « la voix nationale de plus de 900 compagnies canadiennes de défense et de sécurité », dont Boeing, General Dynamics et SAAB.

En outre, en avril 2021, l'AICDS a lancé son Marché canadien de la défense, « le plus important réseautage d'affaires pour la défense, la sécurité et l'Industrie 4,0 (les industries de la quatrième révolution industrielle) ». Comme c'est le cas de CANSEC, les participants sont à la fois des chefs de file de l'industrie et de hauts fonctionnaires du gouvernement et de hauts représentants des Forces armées canadiennes et leurs « équipes chargées de l'approvisionnement ». Il y a 200 participants du gouvernement qui représentent 25 « partenaires » tels que le ministère de la Défense nationale, Affaires mondiales Canada, le Commandement canadien des Forces d'opérations spéciales du Canada, la GRC, et le Conseil national de recherches. Les participants à l'événement, qui doit avoir lieu en novembre prochain, peuvent réserver des réunions virtuelles privées interentreprises et entre les entreprises et le gouvernement, qui comprennent un réseautage avec des entités gouvernementales comme le sous-ministre adjoint du ministère de la Défense nationale.

De tels événements illustrent bien à quel point le Canada est lié aux États-Unis en fait de production et d'opérations militaires.

Une des préoccupations les plus flagrantes à cet égard est la proximité des gouvernements et de leurs institutions, y compris les Forces armées canadiennes, avec l'industrie de guerre.

La gouvernance du système cartel de partis est liée par de nombreuses ententes militaires bilatérales et de production militaire de longue date au sein de l'OTAN et du NORAD. Il y en a aussi de nombreuses autres telles que la Commission permanente mixte de défense Canada-États-Unis créée en 1940 et le Comité de coopération militaire créé en 1946. Il y a aussi d'autres ententes de coopération militaire et de partage d'information dont les régions d'opérations comprennent les États-Unis continentaux, l'Alaska, le Canada, le Mexique, les Caraïbes, les Bahamas, le Puerto Rico, l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud.

Les ententes de production militaire comprennent l'Accord sur le partage de la production de défense et l'Accord sur le partage du développement de la défense, lesquels intègrent totalement ce qu'on appelle la « base industrielle de défense » du Canada à l'industrie d'armements des États-Unis. Aujourd'hui, cette intégration a pris des proportions extrêmes alors que des arrangements sont faits pour axer les ressources humaines et naturelles du Canada sur les besoins de la machine de guerre américaine.

Lorsqu'on voit la GRC parmi les institutions qui se procurent l'équipement militaire le plus récent, ce qui vient immédiatement à l'esprit sont les raids militarisés de la GRC à la défense d'intérêts privés sur le territoire Wet'suwet'en, alors que ses agents entrent de force dans les maisons et arrêtent les défenseurs de la terre à la pointe du fusil. Il y a une urgente nécessité de redéfinir la « défense » parce que ces agressions sont commises au pays et à l'étranger précisément au nom de « protéger les Canadiens des menaces au pays et à l'étranger ».

C'est également au nom de la « défense » que la « modernisation » du NORAD a été à l'ordre du jour ces dernières années et le conflit en Ukraine est devenu un prétexte pour mettre en oeuvre cette modernisation. La modernisation du NORAD a des implications offensives, comme l'exprime la Déclaration conjointe des États-Unis et du Canada de 2021 sur la modernisation du NORAD : « Nous comprenons que, pour atteindre nos objectifs de sécurité et de défense, les deux pays doivent être en sécurité au sein de notre continent nord-américain commun. Plus nous sommes forts et en sécurité chez nous, plus nous sommes capables de nous engager et d'agir ensemble dans le monde, à l'appui d'un ordre international solide et fondé sur des règles. »

Dans le cadre et les plans généraux de l'OTAN, qui a adopté le programme de défense antimissile balistique comme politique officielle, et en gardant à l'esprit la politique de « première frappe » des États-Unis, la modernisation du NORAD comprend le développement de sa capacité à dissuader et, si nécessaire, à « vaincre les menaces aérospatiales en évolution pour l'Amérique du Nord », et à développer sa capacité à « détruire les plateformes de ses adversaires avant même le lancement de missiles ».

Cela suggère que les États-Unis, qui considèrent le Canada comme un « partenaire irremplaçable » en raison de sa « position géographique », considèrent la modernisation du NORAD comme une partie intégrante du programme de défense contre les missiles balistiques, ce qui soulève la préoccupation qu'ils utiliseront le Canada comme rampe de lancement pour frapper des pays étrangers, en particulier la Russie.


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Volume 52 Numéro 6 - 24 mai 2022

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