Les prisonniers condamnent les travaux forcés dans les prisons


Lansing, Michigan, 9 septembre 2016

Les prisonniers partout aux États-Unis, leurs familles, les avocats et les activistes soucieux de justice continuent de s'opposer aux conditions d'incarcération dans ce pays, notamment la torture de l'isolement cellulaire, le manque de soins de santé, la nourriture avariée et la négation du droit des prisonniers de poursuivre leur éducation.

Leurs actions sont surtout en opposition à la surexploitation des prisonniers traités comme des esclaves modernes. De nombreux prisonniers sont forcés de travailler pour peu ou aucun revenu, dans des centres d'appel, à la fabrication d'uniformes et d'autres produits pour les monopoles et les gouvernements d'États, sans oublier leur travail dans des opérations de secours, des projets d'infrastructure et d'autres.

Il y a cinq ans, le 9 septembre 2016, et dans les jours qui ont suivi, à l'occasion du 45e anniversaire de la Rébellion d'Attica, près de 50 000 prisonniers ont participé dans des actes de résistance, refusant de travailler. La résistance de masse organisée prenait toute son importance en raison des conditions carcérales. Les dirigeants de la résistance ont été transférés en isolement cellulaire par les autorités à titre de représailles. Ils ont néanmoins affirmé qu'ils poursuivraient leurs activités de contestation.

Que les prisonniers aient réussi à organiser une grève d'une telle ampleur et à obtenir l'appui de l'extérieur dans des conditions si difficiles témoigne de leur détermination et de leur refus de se soumettre. Cette qualité doit être appuyée et défendue par tous.

Le 9 septembre et durant les jours précédents, de nombreuses actions ont été organisées partout au pays en appui à la grève. De la Floride à l'État de Washington, du Texas au Massachusetts, les gens ont organisé des manifestations, des rivionnements de films, des sessions éducatives, des groupes de discussion, l'envoi de lettres aux prisonniers et bien d'autres choses. Partout, des efforts ont été faits pour bâtir des relations avec les prisonniers et veiller à ce que leurs voix soient entendues à l'extérieur des murs de prison. Il y a eu déploiement de bannières, rassemblements, affichage, des appels téléphoniques aux autorités et aux médias — le tout servant à alerter le public au fait que les prisonniers résistent, s'organisent et refusent d'être réduits au silence.


Pittsburgh, 9 septembre 2016

Les incarcérations de masse aux États-Unis sont une forme de contrôle des masses et de génocide, surtout contre les minorités nationales et les peuples autochtones, mais avec des répercussions sur toute la société. La grande majorité des prisonniers sont incarcérés pour des délits non-violents liés à la drogue. On les garde en dedans où ils sont souvent placés en isolement cellulaire parce qu'ils résistent et défendent leurs droits.

Les États-Unis se placent au deuxième rang mondial pour le taux d'incarcérations (après les Seychelles) — 698 prisonniers adultes pour 100 000 personnes. Alors que les États-Unis représentent 4,4 % de la population mondiale, ils incarcèrent 22 % des prisonniers à l'échelle mondiale et ils ont aussi le nombre absolu le plus élevé de prisonniers à l'échelle mondiale, soit 2,2 millions. Les Afro-Américains et les minorités nationales constituent la majorité des prisonniers.

Les problèmes que soulèvent les prisonniers et le taux massif d'incarcérations aux États-Unis sont en soi une condamnation du chauvinisme des cercles dirigeants qui prétendent que les États-Unis sont de grands défenseurs de droits humains. C'est aussi une condamnation du système social, politique et électoral des cercles dirigeants qui engendre des taux élevés d'incarcérations, prive le peuple de pouvoir politique et nie l'existence de ces problèmes sociaux et de combien d'autres en rabaissant le niveau de la politique à l'électoralisme le plus crasse. Il est une autre indication de la nécessité d'un profond changement prosocial que le peuple américain doit préparer et réaliser.

Comme le disent les prisonniers eux-mêmes :

« Les prisonniers sont forcés de travailleur pour peu ou pas de revenus. C'est de l'esclavage. Le 13e amendement de la constitution des États-Unis maintient l'exception juridique permettant la perpétuation de l'esclavage dans les prisons américaines. Selon cet amendement, ‘Ni esclavage ni servitude involontaire, si ce n'est en punition d'un crime dont le coupable aura été dûment convaincu, n'existeront aux États-Unis ni dans aucun des lieux soumis à leur juridiction.'

« Des surveillants épient nos moindres mouvements, et si le rendement de notre travail assigné ne leur est pas satisfaisant, nous sommes punis. Oui, ils ont remplacé le fouet par le poivre de cayenne, mais plusieurs des autres supplices sont toujours là : l'isolement, des positions restrictives, se mettre à nu et les fouilles corporelles, comme si nous étions des animaux. »

Par leurs actions, ils ont appelé à « mettre fin à l'esclavage en Amérique. C'est un appel direct aux esclaves mêmes. Ce ne sont pas des revendications ni des demandes que nous faisons à nos ravisseurs, mais bien un appel à nous-mêmes à passer à l'action. Nous appelons tous les prisonniers de tous les États et toutes les institutions fédérales des États-Unis à refuser d'être des esclaves, à laisser les récoltes pourrir dans les plantations, à faire la grève et à arrêter de reproduire les institutions de votre confinement.

« Cet appel est pour un arrêt de travail des prisonniers à l'échelle du pays pour mettre fin à l'esclavage dans les prisons [...]. Ils ne peuvent pas faire fonctionner ces établissements sans nous.

« Les contestations pacifiques, les arrêts de travail, les grèves de la faim et les autres refus de participer aux routines et aux exigences carcérales ont augmenté au cours des dernières années.

« La grève de la faim de 2010 en Géorgie, les grèves de la faim rotatives massives en Californie, l'arrêt de travail du mouvement Free Alabama en 2014, sont les actions les plus connues, mais ils ne sont pas les seules expressions du pouvoir des prisonniers. D'importantes, parfois très efficaces, grèves de la faim ont eu lieu au Ohio State Penitentiary, à Menard Correctional dans l'Illinois, à Red Onion en Virginie ainsi que dans plusieurs autres prisons.

« Le mouvement de résistance naissant est diversifié et interconnecté, comprenant entre autres les centres de détention pour immigrants, les prisons de femmes et les centres jeunesse. L'automne dernier, les femmes prisonnières à la prison de Yuba County en Californie se sont jointes à la grève de la faim commencée par les femmes incarcérées dans des centres de détention en Californie, au Colorado et au Texas.

« Des prisonniers partout au pays participent régulièrement à une myriade de manifestations du pouvoir à l'intérieur des prisons. Ils ont souvent réussi à le faire avec la solidarité des prisonniers eux-mêmes, en bâtissant des coalitions peu importe la couleur de la peau ou l'appartenance à un gang, pour confronter l'oppresseur commun. [...]

« Nous espérons mettre fin à l'esclavage carcéral en le rendant impossible, en refusant une fois pour toutes d'être des esclaves.

« Pour y arriver, nous avons besoin de l'appui des gens de l'extérieur. Une prison est un lieu où il est facile de confiner les prisonniers et de les contrôler, car chaque pierre des murs et chaque maillon de chaîne suinte la répression, et il en va de même pour chaque geste et chaque routine. Lorsque nous défions les autorités, ils s'en prennent à nous et la seule protection que nous avons est la solidarité des gens à l'extérieur.

« L'incarcération de masse, que ce soit dans les établissements privés ou gérés par l'État, est un stratagème par lequel les chasseurs d'esclaves patrouillent nos quartiers et contrôlent nos vies. Il exige la criminalisation de masse. Nos épreuves en prison sont un outil pour contrôler nos familles et nos communautés à l'extérieur. Certains Américains vivent chaque jour le danger de se faire exécuter de façon extrajudiciaire — comme les manifestations pour dénoncer les meurtres de Mike Brown, Tamir Rice, Sandra Bland et plusieurs autres l'ont amplement montré — mais aussi le danger d'être capturés, jetés dans ces plantations, enchaînés et forcés de travailler.

« Notre contestation de l'esclavage carcérale en est une aussi contre le chemin qui mène directement de l'école à la prison, contre la terreur policière, contre les contrôles après libération. Lorsque nous aurons aboli l'esclavage, ils perdront leur plus grande motivation à vouloir incarcérer nos enfants. Ils arrêteront de construire des pièges pour ramener dans leurs griffes ceux qu'ils ont libérés. Lorsque nous aurons éliminé le motif économique derrière nos travaux forcés du système carcéral américain, toute la structure des tribunaux et de la police, de contrôle et de chasse aux esclaves devra se transformer afin de nous accommoder en tant qu'humains, et non en tant qu'esclaves.

« La prison a un impact sur tout le monde [...]. Nous devons être rassurés que nos amis, nos familles et nos alliés à l'extérieur veillent sur nous.

« Faites votre part, levez-vous et joignez-vous à nous contre l'esclavage carcéral, pour notre libération à tous. »

Appuyez la résistance des prisonniers !


Appui aux prisonniers en grève de la faim à Pelican Bay en Californie, 2011

(Photos : itsgoingdown.org)


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 20 - 9 septembre 2021

Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/Lml2021/Articles/LS51202.HTM


    

Site Web:  www.pccml.ca   Courriel:  redaction@cpcml.ca