Cette année est le 100e anniversaire du
massacre brutal perpétré à Tulsa, en Oklahoma,
en 1921. Alors que partout aux États-Unis les
gens commémoraient le massacre et dénonçaient
l'héritage raciste que les États-Unis continuent
d'imposer, le président Joe Biden a décidé de
visiter Tulsa pour y reprendre la désinformation
délibérée voulant que des « masses » de «
suprémacistes blancs » étaient responsables du
massacre. Selon cette désinformation, c'est la «
haine » de ces « masses » qui est la véritable
responsable du massacre, et non le gouvernement
fédéral, ni la police ni les forces
gouvernementales, dont le maire, qui
protégeaient tous activement les racistes et les
terroristes – comme le KKK – organisés
par le gouvernement.
En 1921, Tulsa, comme pour un grand nombre de
villes américaines, était ségréguée en vertu de
la loi. Le massacre a ciblé la communauté
afro-américaine de Greenwood qui, à cette
époque, était florissante. L'attaque n'était pas
un accident. C'était en partie un accaparement
des terrains par le maire et les responsables de
la ville et aussi un moyen de contrer le succès
et l'indépendance croissants de Greenwood et de
donner une leçon à tous ceux qui luttent pour
l'égalité et qui s'opposent au racisme du
gouvernement.
Le gouvernement était directement impliqué, non
seulement par l'imposition de lois
ségrégationnistes racistes, ou parce qu'il
appuyait le maire qui était un membre du KKK,
mais aussi parce qu'il a déployé des troupes
munies de mitrailleuses et d'avions appartenant
à l'armée pour bombarder cette zone et réduire
la ville en ruines. Un examen des photos
confirme que des édifices en briques ont été
réduits en ruines, ce qui confirme que ce niveau
de destruction ne pouvait pas être dû qu'aux
incendies. La garde nationale a été appelée par
le gouverneur. Dès le lendemain du massacre, le
vol des terrains est devenu évident quand Tulsa
a adopté des lois de zonage pour empêcher
Greenwood d'être reconstruit tandis que les
gouvernements à tous les niveaux ont tout fait
pour que les crimes soient dissimulés et que la
communauté afro-américaine elle-même soit
pointée du doigt. Les fosses communes qui
viennent d'être découvertes – 27 au dernier
compte – et le fait que l'attaque a fait des
milliers de blessés et de sans-abri témoignent
de la violence et de la brutalité subies par
l'ensemble de la communauté.
Tulsa n'était pas un incident isolé. Il fait
suite aux grandes rébellions qui se sont
produites dans les communautés afro-américaines
à travers le pays en 1919, également violemment
réprimées par le gouvernement. Les troupes
afro-américaines rentraient chez elles après la
Première Guerre mondiale et étaient en colère
contre le racisme et la discrimination organisés
auxquels elles étaient confrontées, notamment en
raison des lois imposant des écoles, des
logements ségrégués et plus encore. En effet,
des dizaines de soldats afro-américains à Tulsa
se sont ralliés et se sont armés pour appuyer et
défendre Greenwood, y compris contre un lynchage
planifié.
Tulsa a également lieu dans le contexte de la
révolution russe de 1917 qui a inspiré les
peuples du monde entier alors que le nouveau
gouvernement reconnaissait les droits humains de
tous et affirmait que chaque personne était
légitime et qu'il n'y aurait pas de citoyens de
seconde classe. L'organisation se produisait
parmi les travailleurs qui unissaient
noirs et blancs, ce qui effrayait les
dirigeants, provoquant une répression brutale,
l'usage de la terreur du KKK et plus encore.
C'est le contexte du massacre.
Lorsque le président Biden a visité le site à
l'occasion du 100e anniversaire, il a
ouvertement cherché à dissimuler le rôle du
gouvernement américain d'hier et d'aujourd'hui
dans la perpétration de ces crimes. Il a même
prétendu que des « avions privés » avaient été
utilisés en dépit du fait que plusieurs rescapés
ont affirmé que l'armée et divers corps
policiers étaient impliqués, tirant dans la
foule.
Joe Biden mentionne que certains gouverneurs et
représentants au Congrès étaient à l'époque
membres du KKK, mais ne tient pas le
gouvernement d'hier et d'aujourd'hui
responsable. Il relate certains événements, y
compris le « redlining » (une pratique
discriminatoire consistant à refuser ou à
limiter les prêts aux populations situées dans
des zones géographiques déterminées) et le «
eminent domain » (le pouvoir du gouvernement
fédéral d'exproprier à des fins privées) visant
à cibler et détruire Greenwood de nouveau, après
le massacre, après que les gens se sont relevés
pour ensemble rebâtir la communauté. Malgré
toutes les preuves indiquant le contraire, Joe
Biden s'en tient au mantra que les États-Unis
sont les plus grands défenseurs des droits
humains, comme si tous les crimes qu'ils
commettent ne sont que des aberrations dont il
ne faut pas vraiment tenir compte.
Le « redlining » était une forme codifiée de
racisme qui a façonné les villes aux États-Unis
et les façonne toujours aujourd'hui. Des cartes
d'il y a près d'un siècle, dessinées par la
Société de prêts aux propriétaires de maison
(SPPM), sont basées sur la perception que les
populations immigrantes sont « dangereuses ». La
présence de personnes noires représentait une «
influence négative » ou encore une «
infiltration ». Des lignes étaient tracées en
rouge foncé sur les cartes pour mettre en relief
les quartiers où vivaient les gens de couleur,
d'où l'expression « redlining ». Les lignes
vertes mettaient en relief les zones «
sécuritaires » où la presque totalité des
familles étaient blanches.
Dans les années 1930, ces cartes de « sécurité
résidentielle » servaient de guide aux
professionnels de l'immobilier et aux
responsables du crédit. Ces cartes classaient
les régions partout au pays selon qu'elles
méritaient qu'on y investisse ou qu'elles
étaient considérées trop « à risque » par les
prêteurs hypothécaires. Le calcul du « risque »
était basé uniquement sur la composition raciale
de la communauté.
Ces cartes étaient du racisme codifié. Bien
qu'il ait éventuellement été déclaré illégal, le
« redlining » se poursuit sous diverses formes.
Par exemple, une étude publiée en 2018 confirme
que 64 % des quartiers ayant été classés «
dangereux » par la SPPM demeuraient des
quartiers minoritaires ségrégués, plus souvent
qu'autrement afro-américains. Soixante-quatorze
pour cent des quartiers étiquetés « dangereux »
sont toujours des quartiers minoritaires
ségrégués à revenus de faibles à modérés. Une
étude en 2017 a montré que des régions classées
comme étant à risque élevé sur les cartes de la
SPPM sont devenues de plus en plus ségréguées au
cours des 30-35 années suivantes et qu'elles ont
vu une baisse à long terme de la propriété et de
la valeur domiciliaire. Le gouvernement fédéral
et les agences financières qu'il gère sont
depuis longtemps responsables de l'imposition et
du maintien de cette ségrégation.
Cette pratique ouvertement raciste a exclu les
Américains noirs et ciblé les communautés
pendant plusieurs générations, en imposant des
écoles inéquitables et en empêchant l'accès au
capital, au financement gouvernemental pour la
propriété domiciliaire et à tous les attenants
de base de ce qu'on appelle communément la
création de la richesse. Conçu au temps du New
Deal, le programme de la Société de prêts aux
propriétaires de maison devait en principe
atténuer les impacts de la Grande Dépression,
mais a plutôt créé des régions vouées au
désinvestissement et à la concentration de la
pauvreté.
Après le « redlining », d'autres efforts
dommageables ont été déployés, tels que le «
renouvellement urbain », qui a vidé des
quartiers pour faire place à la construction de
projets domiciliaires et d'autoroutes, déplaçant
pour ce faire les communautés de couleur et
transformant une fois de plus le paysage
géographique urbain. Encore aujourd'hui, les
minorités sont constamment exclues des régions
dites d'« immobilier de luxe », ou encore sont
contraintes de vivre dans des quartiers
ségrégués.
Le rôle que joue le président Biden est de
défendre les crimes commis par les États-Unis et
d'omettre de parler des crimes et de réparation.
Il en est ainsi parce que ces crimes se
poursuivent encore aujourd'hui et tout est fait
pour que la question d'exiger des comptes ne
soit pas soulevée. Joe Biden ne parle pas des
structures gouvernementales permanentes
d'inégalité qui non seulement perpétuent cette
inégalité, mais font en sorte que les problèmes
sociaux et politiques sont exacerbés au
centuple, comme en témoigne les meurtres
racistes aux mains de la police, le manque de
traitements pour la COVID-19 et le manque de
soins de santé de façon générale, ainsi que la
discrimination pour ce qui a trait à l'emploi et
au logement. Joe Biden ne parle pas du manque de
mécanismes permettant au peuple de tenir le
gouvernement responsable alors que c'est la
recherche de solutions à ce problème qui est au
coeur des nombreuses batailles pour la justice
qui se mènent actuellement.
(Voice of Revolution,
Organisation marxiste-léniniste des
États-Unis)
Cet article est paru dans
Volume 51 Numéro 18 - 4 juillet 2021
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