Plus de 100 organisations revendiquent la fin des expulsions des réfugiés aux États-Unis

Dans une lettre datée du 30 juin 2021, 105 organisations ont écrit au président Joe Biden pour revendiquer la fin des expulsions des réfugiés en vertu du titre 42 du Code des États-Unis. Les expulsions sous le titre 42 sont des renvois par le gouvernement des États-Unis des personnes qui ont été récemment dans un pays où une maladie transmissible est présente. Ce titre a été mis en place sous le prétexte de combattre la COVID-19. Cette lettre fait état du sort des réfugiés aujourd'hui et de l'état de la violation des droits humains par l'administration des États-Unis. Voici le texte de la lettre.

Cher président Biden,

Nous, les 105 organisations soussignées, écrivons pour exprimer notre inquiétude et notre déception que votre administration envisage de continuer à utiliser la politique d'expulsion illégale du titre 42 pour détenir et expulser les demandeurs d'asile adultes pendant au moins deux mois de plus et peut-être utiliser des mesures punitives telles que des bracelets électroniques et une procédure accélérée de renvoi des familles. Non seulement la politique du titre 42 viole-t-elle la loi et les traités des États-Unis sur les réfugiés, mais elle met également en danger les personnes cherchant la protection des États-Unis, avec plus de 3 250 enlèvements, viols et autres attaques contre des personnes expulsées ou retenues à la frontière américano-mexicaine depuis votre entrée en fonction. Ce nombre augmente à chaque jour où votre administration ne met pas fin à cette politique. Nous exhortons votre administration à annuler complètement cette politique pour toutes les populations, à se conformer à la loi américaine sur les réfugiés et à faire en sorte que les demandeurs d'asile noirs, LGBTQ et autres demandeurs d'asile adultes, dont beaucoup ont été refoulés ou expulsés aux points d'entrée, ainsi que les familles et enfants, aient un accès rapide au système pour les demandeurs d'asile des États-Unis.

Beaucoup de nos organisations ont demandé à plusieurs reprises à votre administration de mettre fin à la politique d'expulsion selon le titre 42 et de reprendre le traitement des demandeurs d'asile pour les personnes cherchant refuge. Des mesures rationnelles et scientifiques, recommandées par des experts en santé publique, existent pour atténuer les préoccupations liées à la COVID-19 et traiter en toute sécurité les demandeurs d'asile à la frontière. L'utilisation du titre 42 – décrit comme un « spécial Stephen Miller » par un ancien responsable de l'administration Trump – a été mise en oeuvre malgré les objections d'experts de haut niveau des centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) et a été largement discréditée par les épidémiologistes et les experts de la santé publique qui ont confirmé qu'il ne comprend « aucune base scientifique en tant que mesure de santé publique ». Ces experts ont fourni des recommandations détaillées pour le traitement sécuritaire des demandeurs d'asile à votre équipe de transition, au CDC et à d'autres fonctionnaires de votre administration. En mai 2021, des experts médicaux du département de la Sécurité intérieure (DHS) ont déposé une dénonciation condamnant la politique pour son absence de justification en matière de santé publique et pour avoir alimenté la séparation généralisée des familles et la détention d'enfants. Les professionnels de la santé qui dispensent des soins dans les campements et les refuges à Tijuana ont également dénoncé la politique d'expulsion comme une menace à la santé et à la sécurité des migrants.

Les organisations de défense des droits humains et les médias ont documenté les dangers croissants auxquels sont confrontés les demandeurs d'asile et les migrants soumis à la politique du titre 42, dont beaucoup ont été contraints de vivre dans des conditions sordides et dangereuses dans plusieurs des nouveaux camps près de la frontière. Le personnel juridique et humanitaire qui travaille avec les migrants soumis à la politique a également fait face à de graves risques à sa sécurité. La politique du titre 42 a également entraîné des séparations familiales, car elle présente aux familles le choix impossible de garder les enfants dans une situation dangereuse ou de les envoyer traverser seuls la frontière pour leur sécurité. En conséquence, de nombreux adultes qui sont maintenant seuls et bloqués au Mexique tentent désespérément de retrouver leurs enfants placés sous la garde du Bureau de réinstallation des réfugiés ou avec leur famille aux États-Unis.

La politique d'expulsion a touché de manière disproportionnée les demandeurs d'asile d'Afrique, des Caraïbes et d'ailleurs, qui n'ont pas été placés sous les protocoles de protection des migrants (MPP) et ne sont pas éligibles au traitement de leur cas aux États-Unis dans le cadre de la phase 1 ou de la phase 2 du retrait de la politique. Les demandeurs d'asile noirs et LGBTQ bloqués au Mexique en vertu de la politique d'expulsion et incapables de demander une protection à un point d'entrée continuent de faire face à la discrimination et subissent des violences ciblées. Des rapports récents indiquent que même si votre administration peut mettre fin en juillet à la politique pour les familles, elle peut continuer à soumettre les demandeurs d'asile adultes à la politique pendant au moins deux mois – un délai inacceptable qui prolongerait les disparités dans l'accès à la protection et aurait un impact disproportionné sur les demandeurs d'asile parmi les Noirs des pays d'Afrique et des Caraïbes, ainsi que sur les réfugiés LGBTQ et les autres personnes qui ne voyagent pas avec des enfants. Une telle approche serait totalement indéfendable. Les garanties de santé publique n'exigent ni ne justifient en aucun cas des traitements disparates entre les familles et les adultes arrivant seuls. De plus, une telle approche est contraire à la loi américaine sur les demandeurs d'asile et aux dispositions de non-discrimination de la Convention sur les réfugiés.

Nous sommes préoccupés par le fait que cette administration continue de considérer la dissuasion comme une stratégie pour traiter les demandeurs d'asile à la frontière. Les bracelets électroniques, les demandes de budget pour une détention prolongée et le renvoi accéléré font partie d'une stratégie de dissuasion inhumaine et inefficace. Une telle stratégie aussi cruelle est une forme déguisée de déclaration qui dit « Ne venez pas ». Les dispositifs de surveillance électronique sont une mesure particulière qui porte atteinte à la vie privée et qui cause des dommages physiques et émotionnels ayant un impact négatif sur les taux de comparution, en opposition à des services appropriés de gestion des cas à partir des communautés. En ce qui concerne les renvois accélérés, bon nombre de nos organisations, ainsi que la Commission bipartite des États-Unis sur la liberté de religion internationale, ont depuis longtemps constaté que les agents des douanes et de la protection des frontières (ICE) et les agents des services de patrouille frontalière ne respectaient pas les procédures de base requises pour identifier les personnes qui doivent être référées pour des entrevues parce qu'elles ont des craintes légitimes, et ont constaté l'intimidation et la coercition des demandeurs d'asile pour qu'ils retirent leurs demandes de protection.

Bien que nous appréciions grandement les efforts continus de votre administration pour traiter de manière sécuritaire certains demandeurs d'asile soumis au MPP, nous demeurons très préoccupés par le fait que l'administration Biden continue de bloquer et d'expulser les demandeurs d'asile vers les mêmes situations dangereuses en vertu de la politique du titre 42. Dans une rare déclaration publique appelant ce pays à respecter ses obligations légales, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a récemment exhorté les États-Unis à mettre fin rapidement à cette politique et à « rétablir l'accès à la demande d'asile pour les personnes dont la vie en dépend, conformément aux obligations légales et en matière de droits humains. »

À l'approche du 70e anniversaire de la Convention sur les réfugiés en juillet, nous exhortons votre administration à mettre fin immédiatement à son utilisation abusive de l'autorité de santé publique en vertu du titre 42, à rétablir le traitement des demandes d'asile conformément aux lois et traités des États-Unis sur les réfugiés pour tous les demandeurs d'asile – y compris aux points d'entrée américains – et à donner l'exemple au reste du monde en accueillant les réfugiés dans la dignité.

Respectueusement,

[Signé]

On peut lire la liste complète des signataires en cliquant ici.


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 18 - 4 juillet 2021

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