La lutte contre la pandémie
mondiale
Cuba à la tête de la lutte mondiale contre la pandémie de la COVID-19
- Isaac Saney -
Le contingent de la Brigade médicale
internationale Henry Reeve se prépare à partir
pour l'Afrique du Sud pour participer à la lutte
contre la COVID-19, le 25 avril 2020.
Isaac Saney est un spécialiste sur Cuba à
l'Université Dalhousie, au Canada, et
coprésident et porte-parole du Réseau canadien
pour Cuba.
Cuba continue de recevoir des éloges à l'échelle
internationale pour son rôle incomparable dans la
lutte mondiale contre la pandémie de la COVID-19.
Cela s'exprime par les nombreuses mises en
candidature du contingent médical
internationaliste cubain – la Brigade médicale
internationale Henry Reeve, une brigade de
médecins cubains spécialisés en situation de
désastres et de graves épidémies – pour le prix
Nobel de la Paix de 2021.
Plusieurs pays font
appel à l'expertise cubaine dans la lutte contre
la COVID-19. Près de 4 000 membres du personnel
médical dans au moins 39 pays et territoires ont
participé et participent aux premières lignes dans
la lutte contre le coronavirus en Amérique latine,
dans les Caraïbes, en Afrique, en Asie, en Europe
et au Moyen-Orient. Ce sont les Caraïbes et
l'Amérique latine qui en ont le plus bénéficié
alors que les brigades médicales cubaines sont
présentes en Jamaïque, dans la Barbade, en
Antigua-et-Barbuda, Saint-Vincent et les
Grenadines, Haïti, Sainte-Lucie, Suriname, la
Grenade, la Dominique, Saint-Kitts-et-Nevis, au
Mexique, au Bélize, au Venezuela et au Nicaragua.
Le personnel de santé Henry Reeve est organisé en
brigades, en fonction de la demande locale.
Jusqu'à présent, 55 brigades ont servi à
l'étranger pendant la pandémie et plusieurs pays
ont demandé l'aide d'une deuxième brigade lorsque
leur nombre de cas a monté en flèche.
Cuba offre aussi des traitements dont certains ne
sont pas disponibles aux États-Unis. Une des
composantes clés des protocoles à l'oeuvre dans
l'île et dans les missions médicales est
l'Interferon Alfa 2B Recombinant (IFNrec). Les
journaux scientifiques tels que Lancet et
le World Journal of Pediatrics ont reconnu
l'efficacité du IFNrec. Celui-ci a contribué à
combattre diverses infections virales pour
lesquelles il n'existe pas de thérapies
spécifiques disponibles, et il a prouvé sa
capacité à activer le système immunitaire du
patient et à inhiber la réplication virale. À
Cuba, le IFNrec a combattu avec succès des
éclosions de dengue hémorragique et de
conjonctivite, et a aussi servi de traitement pour
les hépatites B et C. Il a aussi été efficace dans
la lutte et contre les infections causées par
diverses versions du coronavirus, telles que le
SRARS-CoV (le coronavirus de l'éclosion de 2002)
et le SRAS et le MERS-CoV (le coronavirus de
l'éclosion de 2012).
Le IFNrec est un élément crucial des protocoles
de traitement cubains et sert aussi comme mesure
préventive pour protéger de la contagion les
travailleurs de la santé. Différents pays ont
incorporé le IFNrec dans leurs protocoles
nationaux et leurs directives cliniques dans le
traitement de la COVID-19, où il est une
composante cruciale du traitement antiviral pour
combattre le coronavirus. L'Interféron Alfa 2B
nébulisé est aussi recommandé comme traitement
pour les enfants et les femmes enceintes ayant la
COVID-19. Bien que le IFNrec ne soit pas une
panacée, il est très prometteur en tant que
réponse thérapeutique à la COVID-19, car il
renforce la réponse du système immunitaire. En
outre, on attribue à l'Itolizumab et au Biomodulin
T, conçus à Cuba, la capacité de réduire le taux
de mortalité due à la COVID-19 et d'accélérer le
rétablissement de patients, en particulier les
patients à haut risque.
Cuba met aussi à
l'essai quatre vaccins candidats de la COVID-19 :
Soberana 1 et Soberana 2, développés par
l'Institut de vaccins Finlay, et Mambisa et
Abdala, produits par le Centre de génie génétique
et de biotechnologie. Jusqu'à présent, les
résultats sont très encourageants. Au moment de la
rédaction de cet article, trois des candidats sont
soit en phase 1 ou en phase 2 des essais
cliniques. Soberana 2 est déjà en phase 3 des
essais, et les essais pour Abdala doivent débuter
en mars. Ces phases d'essais évaluent l'efficacité
et la sécurité. Tous les candidats doivent réussir
la phase 3 d'essais, au cours de laquelle
l'efficacité et la sécurité sont davantage
confirmées par des essais élargis comprenant des
milliers de personnes. S'ils réussissent cette
phase, Soberana 2 et Abdala seront bientôt
approuvés pour la vaccination à Cuba et dans le
monde. La Havane se prépare déjà pour la
production de masse.
L'île des Caraïbes a une expérience considérable
dans la conception, le développement et la
production de vaccins. En ce moment, l'industrie
biopharmaceutique de Cuba produit 8 vaccins qui
font partie du programme d'immunisation de l'île.
Dans les années 1980, elle a développé son premier
vaccin contre la méningite et elle produit aussi
un vaccin contre l'hépatite B.
Le gouvernement cubain a l'intention de vacciner
tous les Cubains contre la COVID-19 avant la fin
de 2021. Les vaccins seront aussi disponibles pour
les visiteurs. La Havane compte aussi produire 100
millions de doses de vaccins pour les pays de
l'hémisphère sud, et plusieurs pays ont déjà
réservé leurs doses. L'exportation de produits
pharmaceutiques cubains est gérée par la société
d'État BioCubaFarma, qui distribue actuellement
plus de 300 produits dans au moins 50 pays.
Rolando Perez Rodriguez, le directeur de Science
et Innovation chez BioCubaFarma, résume ainsi les
objectifs de La Havane : « Dans la deuxième partie
de l'année, nous pourrons immuniser toute la
population et fournir des doses aux pays qui en
ont besoin. C'est une question de partager avec le
monde ce que nous sommes, la réponse que Cuba peut
donner au problème de la pandémie. »
La production de vaccins à Cuba est axée non
seulement sur la détermination de protéger et de
préserver la santé du peuple cubain et du monde,
mais aussi d'exercer et de défendre la
souveraineté et le droit à l'autodétermination.
Par exemple, Soberana signifie souveraineté en
espagnol, tandis qu'Abdala est inspiré d'un
célèbre poème de José Marti, le héros national de
Cuba et le principal auteur intellectuel et
organisateur de la guerre de 1895-1898 pour
libérer Cuba de la domination coloniale espagnole.
Mambisa évoque les combattants cubains pour la
libération nationale pendant les guerres du XIXe
siècle pour l'indépendance.
En ces temps de pandémie, l'humanitarisme médical
international de Cuba reflète l'histoire de l'île
et son dévouement au cours des six dernières
décennies envers une solidarité internationale
concrète. Sous la direction de Fidel Castro, Cuba
a enregistré un héritage incomparable
d'internationalisme par son appui et sa
participation actifs aux luttes anticoloniales et
de libération nationale et aux aspirations de
développement social et d'émancipation des pays
dans l'hémisphère sud. Dès le début des années
1960, plus de 400 000 travailleurs de la santé
cubains ont servi dans 164 pays. En Afrique du
Sud, plus de 2 000 Cubains ont donné leur vie dans
la défaite du régime raciste d'apartheid de ce
pays. Nelson Mandela n'a jamais oublié. Dès qu'il
a été libéré de prison, l'un des premiers pays
qu'il a choisi de visiter à l'exception des pays
d'Afrique, et le premier pays d'Amérique latine
qu'il a visité, c'est Cuba.
Aujourd'hui, cet engagement envers l'humanité est
incarné dans les milliers de médecins et
d'éducateurs cubains qui continuent de servir
partout dans le monde. De nombreux membres du
personnel médical qui sont aux premières lignes
dans la lutte contre la COVID-19 font partie de la
Brigade internationale Henry Reeve qui s'est
distinguée dans la lutte contre l'épidémie de
l'Ebola en 2014-2016 en Afrique de l'Ouest.
La Havane, tout en fournissant une aide
internationale sans pareil, est aussi engagée dans
sa propre lutte contre la COVID-19 sur l'île. Elle
le fait face à une guerre économique implacable
menée par Washington contre le peuple cubain, une
guerre qui restreint l'accès de l'île à de
l'équipement et à d'autres produits nécessaires à
la santé des Cubains. Sous le régime de Donald
Trump, la guerre économique des États-Unis contre
Cuba a atteint des niveaux sans précédent avec
plus de 240 mesures distinctes visant la nation
insulaire.
Dans un geste qui est l'emblème de l'hypocrisie,
les États-Unis ont désigné Cuba comme pays
parrainant le terrorisme d'État. C'est Cuba
lui-même qui depuis 1959 est victime de toutes
sortes d'attaques terroristes menées avec la
complicité, la participation et le parrainage de
Washington. Plusieurs de ces actes de terreur ont
été directement lancés à partir des États-Unis où
ils ont été planifiés. Quelque 3 478 Cubains ont
été tués et 2 099 ont été blessés à la suite de
ces actes de terrorisme.
Cette plus récente mesure du régime de Donald
Trump reflète l'incapacité de Washington d'isoler
Cuba dans les relations internationales et dans
l'opinion publique. Cet échec est amplement mis en
lumière par le mouvement mondial grandissant –
comprenant des parlementaires, des personnalités
mondiales connues, d'éminents universitaires et de
multiples pétitions – pour attribuer à la Brigade
internationale cubaine Henry Reeve le Prix Nobel
de la Paix de 2021. Ces candidatures expriment
plutôt comment c'est Cuba qui est un modèle
mondial de relations internationales, un modèle
diamétralement opposé au terrorisme.
Une caravane de voitures en appui à Cuba à
Montréal, le 28 février 2021
Malgré l'agression américaine sans relâche, Cuba
continue de prioriser la santé et la vie de ses
citoyens. Par exemple, avec une population à peu
près semblable à celle de Los Angeles aux
États-Unis, Cuba a eu 70 fois moins de décès dus à
la COVID-19. Comparativement à la ville de New
York, le taux de mortalité à Cuba est plus de 100
fois moins élevé. Le gouvernement cubain affirme
et défend les soins de santé en tant que droit
humain et le bien-être du peuple est au coeur de
ses programmes et de ses décisions politiques.
Chaque Cubain est visité régulièrement par un
médecin et a libre accès à tous les protocoles de
traitement disponibles sur l'île.
Il y a une reconnaissance croissante que
l'exemple de Cuba doit être mondialisé. Par
définition, une pandémie est mondiale. Face à
cette menace mondiale, la coopération et la
solidarité internationales s'imposent. C'est le
temps d'unir nos efforts pour confronter la
COVID-19, de laisser de côté nos différends
politiques afin de sauver des vies. Comme l'a
déclaré le ministre cubain des Relations
extérieures Bruno Rodriguez Parrilla le 27 mars
2020 : « Le défi est le même pour l'ensemble de
l'humanité. Cette pandémie ne respecte ni
frontières ni idéologies. Elle menace la vie de
tous, et c'est la responsabilité de tous de tout
mettre en oeuvre pour la surmonter ».
Ceci est particulièrement important à l'heure où
les fissures et les fossés, les inégalités, les
injustices et les disparités historiquement
enracinés, particulièrement dans le système de la
santé, n'ont pas seulement été mis à nu, mais ont
été grandement amplifiés. Reconnaissant cette
urgence, 15 municipalités, États et conseils
syndicaux aux États-Unis ont adopté des
résolutions appelant à la collaboration et à la
coopération avec Cuba.
Les missions médicales internationalistes
cubaines sont l'expression vivante des capteurs de
rêves et de ce qu'ils symbolisent. Tout comme les
capteurs de rêves permettent aux rêves agréables
de passer et retiennent les cauchemars, les
missions médicales internationalistes cubaines
font tout en leur pouvoir pour empêcher que les
cauchemars de la maladie n'atteignent le peuple.
Face à la pandémie de la COVID-19 qui sévit sur le
monde, dans un monde aux prises avec les dangers
d'une conflagration planétaire, les brigades
médicales cubaines sont la preuve vivante que les
relations entre les nations et les peuples du
monde n'ont pas à être déterminées par l'intérêt
étroit et la poursuite du pouvoir et de l'argent.
Elles sont un exemple et une inspiration montrant
qu'il est possible de bâtir des relations sur la
base d'une authentique solidarité humaine.
Cuba est aussi engagé dans un important projet
intérieur de rectification et de renouveau
économiques. Au coeur de ce projet est
l'unification monétaire et l'importante expansion
récente du secteur non étatique, par exemple, le
travail autonome et l'activité économique privée.
Ces mesures elles-mêmes font partie d'un projet
plus large de mesures économiques mises en oeuvre
depuis une décennie pour surmonter les lacunes et
les distorsions du modèle économique cubain. Alors
que les nouvelles mesurent s'implantent peu à peu,
le gouvernement cubain a réitéré à plusieurs
reprises son engagement à ce que personne ne soit
laissé pour compte ou laissé à lui-même. Toutes
les garanties sociales restent en vigueur, y
compris les soins de santé et l'éducation gratuits
et universels et un ensemble d'autres programmes
sociaux.
Le but de la restructuration est de consolider
les programmes sociaux, non pas de les privatiser
ou de les démanteler. Comme l'a affirmé l'ancien
président cubain Raul Castro, l'objectif est de
réaliser un socialisme durable et prospère.
Cependant, c'est tout un défi pour quelque pays
que ce soit de surmonter la crise économique
mondiale de sorte que le peuple en sorte gagnant,
et non les monopoles mondiaux. De nombreuses
questions surgissent, et c'est normal : comment
les engagements historiques de la révolution
cubaine envers l'équité – en particulier l'équité
raciale et de genre – seront-ils influencés par
les nouvelles politiques économiques ? Ces mesures
engendreront-elles des changements fondamentaux
dans la praxis précédente de la révolution cubaine
?
Partout à Cuba, on peut voir ce slogan sur les
panneaux d'affichage : « Chaque jour, dans le
monde, 200 millions d'enfants dorment dans la rue.
Aucun d'entre eux n'est Cubain ». Par ces temps
incertains, face à d'immenses défis, c'est
peut-être ce qui résume le mieux ce que Cuba
représente et ce qu'il désire être.
(Stabroek News, 8 mars 2021)
Cet article est paru dans
Volume 51 Numéro 8 - 21 mars 2021
Lien de l'article:
https://cpcml.ca/francais/Lml2021/Articles/LS51087.HTM
Site Web: www.pccml.ca
Courriel: redaction@cpcml.ca
|