Les libéraux fédéraux préparent une attaque intéressée contre les libertés
- Diane Johnston -
Le gouvernement Trudeau fait tout ce qu'il peut
pour présenter le point de vue perfide selon
lequel des forces hostiles de toutes sortes
doivent être blâmées pour le profond
mécontentement des Canadiens envers le processus
politique et le système de partis cartellisés. Le
mantra récent consiste à blâmer des acteurs
étrangers et leur désinformation, leur espionnage
et leur infiltration. On dit que ces activités
sont perpétrées par des agents consentants ou des
dupes ou des gens qui adhèrent idéologiquement à
des pays qui visent à saper les institutions
démocratiques libérales du Canada. Quel que soit
le cas, ces forces doivent être mises en échec et
criminalisées.
Certains
sont passés maîtres dans l'art de défendre la
constitution américaine comme modèle de démocratie
et ils utilisent les événements récents au
Capitole à Washington, tandis que d'autres
profitent de la triste occasion du quatrième
anniversaire de la fusillade à la mosquée de
Québec pour criminaliser davantage l'opposition du
peuple. Ils ciblent l'opposition populaire à
l'impunité policière, aux mauvais traitements des
minorités, des femmes, des autochtones et des
enfants, à la guerre, au changement de régime et
aux politiques qui nuisent l'environnement
social et à l'enironnement naturel pour adopter à
nouveau une loi qui est soi-disant contre le
discours haineux. Le gouvernement libéral tente
honteusement d'utiliser la détermination du peuple
à mettre fin à toutes sortes de crimes haineux
pour porter atteinte à son droit à la conscience
et criminaliser ceux qui luttent pour les droits,
s'opposent à la guerre et s'efforcent de faire
naître le Nouveau. Cette question mérite une
attention et une discussion sérieuses.
Durant la réunion du 29 janvier du Comité
permanent du Patrimoine canadien, Lyne Bessette,
la députée libérale de la circonscription de
Brome-Missisquoi, au Québec, a dit en référence à
la tuerie à la mosquée de Québec en 2017 : «
L'islamophobie et la xénophobie ont motivé cet
acte ». En ce qui a trait aux victimes du
massacre, elle a ajouté que peu de temps après
l'attaque « nous avons appris que
l'agresseur s'était radicalisé par l'intermédiaire
des réseaux sociaux. Or, nous savons que les
Canadiens sont souvent exposés à du contenu à
caractère haineux, violent, extrémiste, voire à
des discours de radicalisation lorsqu'ils
naviguent sur les plateformes numériques ».
S'adressant à Steven Guilbeault, le ministre du
Patrimoine canadien, dont la lettre de mandat
inclut la création de nouvelle réglementation pour
les plateformes de médias sociaux et qui a
mentionné qu'un projet de loi serait bientôt
déposé à ce sujet à la Chambre des communes, elle
lui a demandé d'informer le Comité sur « le
travail essentiel que le gouvernement fait pour
protéger les Canadiens en ligne ».
Reconnaissant que « cet individu s'est radicalisé
sur les médias sociaux avant de poser ce geste le
29 janvier », Guilbeault a rapporté que depuis
quelques mois, son ministère et d'autres (Justice,
Sécurité publique et Innovation) travaillent à la
présentation d'un nouveau projet de loi « qui va
définir un cadre réglementaire entourant la
question du discours haineux, mais également
celles de la pornographie juvénile, de
l'incitation à la violence, de l'incitation au
terrorisme et de la diffusion non consensuelle
d'images ».
« Peu de pays dans le monde se sont attaqués à ce
problème, a-t-il dit. Nous avons eu, à la fois au
sein de la fonction publique, mais aussi sur le
plan politique, des rencontres et des discussions
avec les représentants de ces pays pour voir
comment nous pourrions adapter les modèles
existants à la réalité canadienne. »
Il a également rapporté qu'il avait récemment eu
des discussions avec le commissaire australien à
la sécurité électronique., « pour bien
comprendre comment ce pays a mis en place son
système » et quels sont les éléments auxquels «
il faut faire attention ».
« Quand nous voulons faire cela, comme
tout le monde, nous sommes préoccupés par la
question de la protection de la liberté
d'expression, a-t-il dit. Il a ajouté : « La
liberté d'expression, comme dans le monde
physique, nous l'avons balisée au fil des années
par nos lois et des jugements de nos tribunaux.
Nous essayons donc de voir comment nous pourrions
reproduire le cadre qui existe dans le monde
physique afin de l'appliquer au monde virtuel. »
« Bien que nous reconnaissions le droit
de tous à pouvoir s'exprimer librement ,
a commenté Bessette, il existe des limites quand
le discours se transforme en propos haineux,
blessants ou racistes. Les réseaux sociaux ont
beaucoup contribué à amplifier les messages de
haine envers les communautés les plus
marginalisées, brimant ainsi leurs droits sans
pour autant être jugés responsables. »
Elle a ensuite demandé à Guilbeault d'expliquer
comment il prévoyait tenir les réseaux sociaux
responsables de la publication et de la diffusion
de ce contenu.
« Nous [...] allons
le faire par la présentation d'un projet de loi,
a-t-il dit, soulignant que son but est de «
définir un nouveau cadre réglementaire au Canada,
et les plateformes devront s'y conformer ».
Guilbeault a en outre expliqué que des
régulateurs seraient embauchés pour mettre en
place la nouvelle réglementation et surveiller les
plateformes en ce qui concerne le discours de
haine et que diverses pistes étaient actuellement
explorées, telles que la possibilité d'imposer des
amendes en cas de non-conformité.
« Vous avez raison. C'est un enjeu qui préoccupe
de plus en plus de Canadiens et de Canadiennes.
Vous aurez probablement vu, plus tôt cette
semaine, la publication d'un sondage mené par la
firme Abacus pour le compte de la Fondation
canadienne des relations raciales. Ce sondage
montre que la très grande majorité des Canadiens
et des Canadiennes ont été témoins ou victimes de
violence sur les réseaux sociaux, les femmes et
les populations racialisées ayant été visées
beaucoup plus que les autres catégories de la
population, et qu'une très forte proportion des
Canadiens et des Canadiennes demande au
gouvernement d'intervenir. »
Le même jour qui a coïncidé avec le 4e
anniversaire du massacre à la mosquée de la ville
de Québec, le chef du NPD Jagmeet Singh a dit : «
La communauté musulmane est encore sous le choc de
l'horrible attentat qui a eu lieu à la grande
mosquée de Québec il y a quatre ans . Pour
que les communautés se sentent en sécurité, le
gouvernement libéral doit s'attaquer de front aux
groupes de haine et d'extrême- droite qui sont de
plus en plus nombreux au Canada. Si rien n'est
fait aujourd'hui, ce ne sera qu'une question de
temps avant le prochain attentat. Nous devons
passer à l'action dès maintenant. Les gens
méritent de se sentir en sécurité dans leurs
communautés. » Le communiqué de presse souligne
que « Justin Trudeau doit aller au-delà
des belles paroles et prendre des mesures
concrètes. Les personnes confrontées à
l'islamophobie, à la xénophobie et à toutes les
formes de discrimination ne doivent pas se sentir
seules dans ce combat. Elles méritent de savoir
que leur gouvernement est de leur bord. Je suis de
votre bord. »
Sur la même lancée, Jagmeet Singh a déposé une
motion à la Chambre des communes, adoptée à
l'unanimité par les députés, qui demande
l'interdiction des Proud Boys et d'autres mesures
pour démanteler les groupes suprémacistes blancs
au Canada. Le 3 février, le ministère de la
Sécurité publique a annoncé l'ajout de 13 groupes
jugés violents à la liste des organisations
terroristes, dont Proud Boys.
La façon dont toutes ces choses sont décidées et
sur la base de quels critères, tels que ce qui
constitue un discours dans l'intention de
provoquer de la violence ou un « contenu illégal »
sur les réseaux sociaux est une préoccupation
sérieuse, en particulier lorsque la police et les
agences de sécurité assimilent l'opposition à
l'OTAN et NORAD et à l'intégration du Canada à la
machine de guerre des États-Unis à la déloyauté et
la subversion.
La tuerie à la mosquée de la ville de Québec en
2017
Le 29 janvier 2017, un tireur seul, Alexandre
Bissonnette, a fait irruption au Centre Islamique
Culturel de Québec, tirant et tuant six hommes et
en blessant 19 autres alors qu'ils priaient.
La fusillade au Centre culturel islamique s'est
produite quelques jours seulement après la
publication du décret du président des États-Unis
qui interdisait aux citoyens de sept pays ayant
une population à majorité musulmane d'entrer aux
États-Unis et qui fermait les frontières
américaines aux réfugiés.
Un élan de compassion, de solidarité et d'amour
social a été la réponse des Québécois et des
Canadiens, qui se sont immédiatement mobilisés
pour pleurer publiquement leur perte avec les
personnes de confession musulmane.
Des vigiles, des rassemblements et des cérémonies
ont été immédiatement organisés à l'échelle du
Québec et du Canada et les gens se sont unis pour
condamner cet acte barbare et offrir leurs
sincères condoléances et leur soutien aux
familles, aux amis et à la communauté qui ont
perdu des êtres chers ainsi qu'aux communautés
musulmanes qui sont la cible de l'islamophobie
organisée et inspirée par l'État. Ils ont affirmé
que si la communauté musulmane et toutes les
autres communautés ne peuvent s'épanouir, libres
d'exprimer leur droit d'être et libres de toute
violence exercée contre elles, alors les peuples
québécois et canadien ne le peuvent pas non plus.
Vigile à Montréal, 30 janvier 2017
À Montréal, au lendemain de la tragédie d'il y a
quatre ans, des milliers de personnes se sont
rassemblées devant la station de métro du Parc.
Les organisateurs ont empêché les représentants
des partis cartellisés et des médias monopolisés
de parler, les tenant pour responsables de leur
rôle dans la tragédie par leurs insinuations,
leurs représentations et leurs allégations
concernant les musulmans et en cela ils ont été
fortement appuyés par la foule.
Vigile à Montréal, 29 janvier 2021
Cette prise de position a été réitérée cette
année encore à Montréal, lors de la tenue de la
commémoration, le seul événement physique, au même
endroit qu'il y a 4 ans, par une journée
extrêmement froide et malgré la pandémie. Les
orateurs ont souligné le fait que diverses
communautés au Québec et au Canada ont souffert et
continuent de souffrir d'attaques racistes
organisées et encouragées par l'État. La solution,
ont-ils dit, est d'assumer notre responsabilité
sociale de condamner ces attaques et de traduire
les auteurs en justice.
Cet article est paru dans
Volume 51 Numéro 6 - 28 février 2021
Lien de l'article:
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