Les lettres de créances et la mission contestables du nouvel ambassadeur américain pressenti en Argentine

Marc R. Stanley, un avocat du Texas qui a des connexions de longue date avec le Parti démocrate et a travaillé pour la campagne présidentielle de Joe Biden, a été choisi par Biden pour être le prochain ambassadeur des États-Unis en Argentine.

« Arrogant, provocateur, méprisant et cachant à peine ses intentions de s'ingérer dans les affaires intérieures » est comment le journaliste Raul Dellatorre de Pagina 12 a décrit Stanley, après l'avoir observé lors d'une audience de confirmation devant un comité du Sénat américain le 26 octobre. Dans son article, Dellatorre souligne qu'en dépit de ses nombreuses années à travailler pour le Parti démocrate, de par son arrogance et sont style méprisant, Stanley a plus d'affinités avec Trump, contrairement à ce qu'on pourrait s'attendre de quelqu'un nommé par Biden, et a davantage l'apparence d'un lobbyiste pour les intérêts des grandes entreprises que d'un diplomate. En fait, Stanley, qui se présente lui-même comme un activiste politique et un dirigeant de la communauté juive américaine, n'a jamais obtenu de poste de diplomate. Sa confirmation est toujours en instance.

Lors de son audience de confirmation, Stanley a décrit l'Argentine comme étant « un bel autobus touristique dont les roues ne tournent pas rond », pour ensuite s'empresser de dire aux membres du Comité sénatorial des relations étrangères ce que le gouvernement de l'Argentine a fait de bien et ce qu'il n'a pas réussi à faire, et comment il interviendrait pour régler le problème s'il était confirmé en tant qu'ambassadeur des États-Unis.

Par exemple, il a dit que l'Argentine ne s'était pas encore jointe « aux États-Unis et d'autres pays dans la promotion de réformes significatives dans des pays comme le Venezuela et Cuba » et s'est engagé à s'entretenir avec les dirigeants argentins à tous les niveaux « pour trouver des façons d'atteindre notre objectif commun d'un hémisphère qui est respectueux de nos plus nobles idéaux ». Ce qu'il faut entendre évidemment c'est que Stanley incitera l'Argentine à se rapprocher davantage de la politique américaine visant à isoler Cuba, le Venezuela et le Nicaragua.

Lorsque les membres du comité sénatorial lui ont demandé ce qu'il pensait des relations de l'Argentine avec le Fonds monétaire international (FMI), Stanley a dit qu'il s'était engagé envers les deux partis à « aider l'Argentine à restructurer sa dette envers le FMI. « La dette envers le FMI, de 45 milliards de dollars, est énorme », a-t-il dit. « Le problème, cependant, est que c'est la responsabilité des dirigeants argentins d'élaborer un plan d'ensemble pour la rembourser, ce qu'ils n'ont pas encore fait. Ils prétendent qu'il y en aura bientôt un. » Selon Dellatorre, ce dernier commentaire s'est fait sur un ton ironique, presque moqueur. La détermination de Stanley à aider l'Argentine à surmonter ses défis économiques, a-t-il dit, repose sur le fait que ce pays est un « grand partenaire bilatéral » des États-Unis en termes de commerce et d'économie, mais qu'il devait d'abord retrouver la santé économique. Quoique ce commentaire puisse sembler innocente, les incidences pour le peuple argentin, qui a une expérience amère de devoir porter le fardeau de dettes odieuses encourues par des dirigeants néolibéraux, sont tout sauf bienveillants.

Dellatorre prévient que l'engagement de Stanley à s'ingérer dans les négociations du gouvernement argentin avec le FMI visera à atteindre une entente qui garantit avant tout le remboursement de l'énorme dette encourue par le gouvernement précédent de Mauricio Macri et un plan de remboursement dont Alberto Fernandez a dit qu'il était impossible à respecter.

Stanley n'a pas non plus hésité à faire connaître son intention de s'ingérer dans les relations économiques de l'Argentine avec la Chine, l'empêchant plus particulièrement d'avoir accès aux progrès les plus récents obtenus par la Chine en technologies de la communication. Il a dit aux sénateurs : « Puisque les États-Unis vivent une compétition accrue avec la République populaire de Chine en Argentine et ailleurs, je ferai une priorité de continuer à leur faire pression, surtout que des produits technologiques 5G font leur chemin sur le marché régional, et qu'ils font en sorte que la Chine peut accéder à toutes les données et l'information de la population argentine ».

Dans un autre commentaire de Pagina 12 sur la candidature du nouvel ambassadeur américain, l'universitaire argentin Atilio Boron écrit que « les mots de Stanley étaient imprégnés d'un interventionnisme sans scrupules, typique des années de la ‘diplomatie de la canonnière'. Ils confirment la validité de la doctrine Monroe qui aura bientôt 200 ans et est toujours la référence fondamentale du gouvernement américain dans sa définition de ses relations avec l'Amérique latine. »

Comment les États-Unis définissent leurs relations en Amérique latine en fonction d'une doctrine coloniale vieille de 200 ans est une chose. Ce qu'en pensent les peuples des États-Unis et de l'Amérique latine et ce qu'ils sont prêts à accepter en est une autre.


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 16 - 14 décembre 2021

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