Tribunal international sur les violations des
droits humains commises contre les populations noires, brunes et
autochtones, New York, 22-25 octobre
Cérémonie d'ouverture
À New York du 22 au 25 octobre s'est tenu l'important Tribunal
international sur les violations des droits humains par les États-Unis,
réunissant les forces les plus aguerries de la lutte pour la justice aux
États-Unis. C'est un esprit positif et tourné vers l'avenir qui s'est
dégagé de cette
rencontre. Des témoignages instructifs et émouvants ont permis de tirer
des conclusions fondées, qui seront maintenant portées devant les
Nations unies où les États-Unis seront accusés de génocide encore une
fois.
La
cérémonie d'ouverture a commencé avec la présentation des membres du
comité de coordination du programme et les représentants du Malcolm X and Dr. Betty Shabazz Memorial and Educational Center,
le lieu principal des échanges. Les organisateurs ont parlé du rôle du
Tribunal comme outil
de travail pour unir les forces et développer de nouvelles institutions
du peuple, comme le « Sénat du peuple » qui sera créé comme suivi du
Tribunal. La tenue de l'événement à cet endroit a permis d'honorer la
vie et l'oeuvre de Malcolm X qui, comme Paul Robeson, William L.
Patterson et W.E.B. Du
Bois, a également porté l'accusation de génocide contre les États-Unis.
La bannière du Tribunal se lisait : « Nous maintenons l'accusation de
génocide ».
Il y a eu présentation de poèmes et de musique, tous sur le thème de
la résistance et de la libération des Noirs, des Bruns, des Autochtones
et de tous les opprimés. Un joueur de tambour autochtone a fait une
prestation et parlé de l'incarcération brutale de Leonard Peltier qui,
maintenant âgé de
77 ans, est toujours en prison après plus de 44 ans. Comme d'autres
prisonniers politiques, Leonard Peltier refuse de renoncer à la position
qu'il a prise à la défense des droits des peuples autochtones et de tous
ceux qui luttent pour la justice.
La bande-annonce du documentaire Radical Conversations a été
présentée par le réalisateur Edwin Stokes. Le film sera diffusé en
ligne lors du Festival international du film de la diaspora africaine du
26 novembre au 12 décembre. Il comprend des conversations avec
d'anciens prisonniers
politiques dont certains étaient présents dans la salle. Un message
vidéo de Pete et Charlotte O'Neal, d'anciens Black Panthers exilés en
Tanzanie depuis les années 1970, a été diffusé avec une chanson et un
hommage à tous les prisonniers politiques. Il y a ensuite eu la lecture
de textes puissants
de prisonniers politiques américains sous le thème « Par-delà les murs
».
Plusieurs intervenants, dont deux des animateurs, Dequi Kioni-Sadiki
et Matt Meyer, ont mis l'accent sur la lutte pour la libération de tous
les prisonniers politiques et pour mettre fin à la brutalité policière, à
l'oppression de l'État et au génocide contre les Noirs, les Bruns et
les
Autochtones. Ils ont également parlé des crimes internationaux commis
contre Cuba et le Venezuela en particulier.
Oscar Lopez Rivera a parlé de l'histoire de la colonisation et de la
répression américaines à Porto Rico et de son expérience dans les
prisons de haute sécurité aux États-Unis en compagnie de prisonniers
portoricains et noirs. Il a expliqué qu'en dépit de l'isolement
cellulaire et des efforts
faits pour le démoraliser, comme ce fut le cas pour d'autres prisonniers
politiques, il a su persister parce qu'il était convaincu que l'État ne
pourrait jamais lui voler son esprit et son âme. Il a parlé de son
travail à Porto Rico et aux États-Unis aux côtés des combattants
américains pour la
justice pour un Porto Rico libre, indépendant et souverain.
Pam Africa, avocate de Mumia Abu-Jamal et d'autres prisonniers
politiques, a parlé de l'impact qu'ont les gens à l'extérieur des
prisons pour changer les conditions et faire connaître au public les
conditions et les brutalités dont sont victimes les prisonniers. Elle a
donné l'exemple d'un
prisonnier qui a obtenu d'être traité pour l'hépatite C grâce à des
appels provenant des États-Unis et du monde entier. Elle a souligné que
souvent les prisonniers politiques se consacrent à l'éducation des
autres prisonniers et sont punis par l'isolement cellulaire. Elle et
Dequi Kioni-Sadiki ont
vivement dénoncé l'État américain, les gouvernements des États comme
celui de New York et le système pénitentiaire à tous les niveaux qui
protègent les policiers tueurs et les tortionnaires mais criminalisent
et emprisonnent les combattants de la liberté.
Dans un message audio, Mumia Abu-Jamal, toujours en prison, a dit
applaudir la tenue du Tribunal. Il a parlé de la poigne de fer de
la slavocratie, qui veille à ce que les batailles juridiques contre les
lynchages et l'impunité policière meurent au Congrès. La suprématie
blanche du gouvernement
américain porte aujourd'hui le visage du néolibéralisme, dit-il : il
fait la guerre aux pauvres et aux communautés noires. Le néolibéralisme a
donné un nouveau souffle à l'industrie de l'oppression et c'est durant
la présidence de Bill Clinton que la construction de prisons pour les
jeunes a connu
sa plus grande expansion. Mumia a lancé l'appel à intensifier la
résistance à l'intérieur et à l'extérieur des prisons.
Tous ont parlé du Tribunal comme d'une occasion de dénoncer la
répression de l'État et d'appeler à la liberté des Noirs, des Bruns et
des Autochtones, à la fin de l'incarcération de masse et à l'abolition
du système carcéral.
L'orateur principal était Jihad Abdulmumit du National Jericho
Movement (pour la libération de tous les prisonniers politiques) et de
la coalition Spirit of Mandela, en hommage à Nelson Mandela qui
a été prisonnier politique pendant 23 ans. Il a déclaré que le Tribunal
allait faire ce
que Paul Robeson et William L. Patterson ont fait en portant une
pétition contre le génocide par les États-Unis à l'ONU. Son thème
principal était « Nous sommes nos propres libérateurs ». Le colonialisme
est réel et l'oppression est normalisée jusqu'à ce que, de temps en
temps, comme dans le cas du
meurtre de George Floyd, « cela pique notre conscience morte » et nous
descendons dans la rue, a-t-il dit.
Dans le cas d'autres génocides, comme l'Holocauste, il y a eu un
début et une fin, a souligné Jihad, mais le génocide américain se
poursuit depuis 400 ans, aujourd'hui sous la forme de répression
politique, d'incarcérations massives, de manque de soins de santé et de
services sociaux. Il a dit
que les impérialistes « nous ont appris à nous haïr » et que, malgré les
changements apportés à diverses lois, le système est toujours le même.
Nous tenons des réunions et des rassemblements, ce que nous devons
continuer, mais nous devons aussi faire les choses différemment, en
partant du principe
que nous sommes nos propres libérateurs. Nous ne nous battons pas pour
que les maîtres d'esclaves nous traitent mieux mais pour faire ce que
Malcolm a dit, pour nettoyer notre propre maison.
Jihad a dit que ce Tribunal qui a pris deux ans à préparer est
l'occasion d'engager ce combat parce qu'il offre l'organisation et un
processus discipliné. Dans l'esprit de « Oser lutter, oser vaincre », il
a lancé : « Je vous mets au défi » de participer à la création du Sénat
du peuple et de
vous joindre au travail pour bâtir de nouvelles institutions en
construisant ce mouvement avec les familles, les voisins et les
communautés. Il a appelé à rejeter les institutions des maîtres
d'esclaves et leur constitution, car ce dont nous avons besoin, c'est de
notre propre constitution.
Les maîtres de cérémonie, artistes et intervenants du Tribunal ont
donné un ton militant au programme de la fin de semaine et ont affirmé
de diverses manières qu'il n'existe aucun doute sur le génocide commis
par les États-Unis, confirmé encore une fois par les témoignages
entendus. Les
participants au Tribunal ont insisté sur la nécessité de continuer à
lutter ensemble.
Cet article est paru dans
Volume 51 Numéro 14 - 13 novembre 2021
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