Attiser les passions par des propos non vérifiables – le modus operandi du premier ministre

Des remarques faites par le premier ministre Justin Trudeau lors du « Forum international de Malmö sur la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme » soulèvent la controverse. L'événement a eu lieu le 13 octobre en Suède. Dans un discours prononcé par vidéoconférence, le premier ministre a blâmé les « groupes extrémistes d'extrême-droite et d'extrême-gauche » pour « la montée de la haine, de la peur et de la méfiance ». Justin Trudeau a dit à l'auditoire : « Nous vivons actuellement une période où, partout dans le monde, nous constatons une augmentation de la polarisation, de l'extrémisme ou de la radicalisation, y compris dans certaines des démocraties libérales les plus ouvertes du monde. Dans nos élections, dans notre discours public et dans les communications courantes sans parler des médias sociaux nous assistons à une montée de l'intolérance. Nous voyons les organisations extrémistes d'extrême-droite et d'extrême-gauche qui poussent à la suprématie blanche, à l'intolérance, à la radicalisation, à la promotion de la haine, de la peur et de la méfiance au-delà des frontières, mais aussi à l'intérieur des frontières. »

Justin Trudeau parle comme s'il était la victime ou une partie neutre dans la promotion de la haine, du racisme et de la violence contre les femmes organisés par l'État. Nous verrons ce qu'il cherche à accomplir avec ces remarques sur les « groupes extrémistes d'extrême-gauche et d'extrême-droite », et cette façon d'associer cela à des thèmes sensibles comme la suprématie blanche, la radicalisation, la promotion de la haine, etc. Tout cela sert un objectif intéressé, comme le montrent ses tentatives antérieures de blâmer ceux qu'il appelle « extrémistes » pour des choses qu'il a lui-même rejetées ou reniées comme un empereur (comme la représentation proportionnelle) ou qu'il a condamnées (comme l'« ingérence étrangère » et le « discours haineux »). C'est un exemple typique de la démagogie qui consiste à calomnier et diffamer ce qui est appelé « l'extrémisme d'extrême-gauche » sans préciser de qui il s'agit.

C'est devenu le nouveau modus operandi des impérialistes et des réactionnaires qui cherchent à répandre la peur de la Chine et de la Russie et à préparer la guerre. Le gouvernement du Canada, son premier ministre et les partis cartellisés donnent un exemple parfait de cette tactique qui consiste à dire des choses qui ne peuvent être vérifiées. Ils créent un ennemi de toute pièce et l'accusent de différentes choses, surtout de choses qu'ils font eux-mêmes.

Cette politique crasse a pour effet d'abaisser le niveau du discours politique à un point tel que celui-ci devient inexistant. Puis ils accusent les extrémistes d'attiser les passions, de provoquer des divisions alors que ce sont eux qui créent l'hystérie pour éviter d'avoir à rendre des comptes de leurs actions de façon rationnelle.

Le Canadian Anti-Hate Network (Réseau canadien contre la haine) a condamné les remarques de Justin Trudeau, déclarant que son assimilation des « antiracistes et antifascistes aux suprémacistes blancs et à l'extrême-droite est de la désinformation. C'est irresponsable. Et cela nécessite des excuses[1]. »

« Le Cabinet du premier ministre ne s'excuse pas. Dans une déclaration à PressProgress, il a indiqué que Justin Trudeau maintient ses propos. » PressProgress ajoute que l'attaché de presse du Cabinet du premier ministre, Alex Wellstead, a réitéré la position de Justin Trudeau, mais a refusé d'identifier les groupes auxquels il fait référence[2].

Le premier ministre Justin Trudeau, en particulier, s'est fait le porte-parole de l'obsession de la classe dirigeante concernant les groupes extrémistes, qui sert à détourner l'attention de la guerre civile qui fait rage dans les rangs de la classe dirigeante aux États-Unis, laquelle déborde au Canada et se manifeste dans la rivalité pour le pouvoir au Canada.

Chaque fois que l'argumentation rationnelle lui fait défaut, et c'est toujours le cas, Justin Trudeau recourt à la répétition des dogmes reçus, qui comprennent les vociférations contre les extrémistes. En 2017, lorsqu'il est revenu sur sa promesse électorale de mettre fin au système électoral majoritaire uninominal à un tour et qu'il a décidé unilatéralement de ne pas donner suite à la recommandation d'un comité multipartite de la Chambre des communes d'introduire un système de représentation proportionnelle, il a dit que la représentation proportionnelle constituerait une menace pour le Canada, car elle permettrait aux partis « extrémistes » de remporter des sièges à la Chambre des communes. Il a laissé entendre que seules les forces qui se regroupent dans des partis de type « grande tente » qui, selon lui, représentent les opinions et les intérêts de tous, sont légitimes. C'est sans compter que les membres de son propre parti, de son caucus parlementaire et de son cabinet qui ne suivent pas la ligne sont aussi déclarés persona non grata.

Maintenant, pour détourner l'attention du caractère élitiste et non représentatif du système électoral et de la gouvernance fondés sur les partis, Justin Trudeau parle constamment de la menace à la démocratie libérale qui viendrait selon lui de l'« ingérence étrangère » et de l'« extrémisme ». En fait, ce sont plutôt les expressions antidémocratiques des institutions libérales déchaînées qui menacent la démocratie libérale. Par exemple, Justin Trudeau est allé jusqu'à charger le ministère responsable des institutions démocratiques de déployer des forces de sécurité nationale et la police secrète le Centre de la sécurité et des télécommunications et le Service canadien du renseignement de sécurité pour surveiller le discours politique pendant les élections et entre les élections.

À l'heure où le Parlement s'apprête à reprendre ses travaux et que les libéraux menacent d'aller de l'avant avec leur projet de loi « contre la haine » qui renforcera la surveillance et le contrôle d'État des médias sociaux et de l'Internet en général, l'opposition à cette orientation antidémocratique de l'élite dirigeante va certainement grandir.

Les Canadiens n'ont jamais accepté le modus operandi de l'élite dirigeante qui consiste typiquement à blâmer le peuple pour le racisme organisé par l'État, la promotion et l'acceptation institutionnelles de la violence contre les femmes et la violence entre factions pour camoufler l'offensive contre la liberté de conscience, la liberté d'expression et les libertés politiques en général et la gouvernance par décret. Un des principaux objectifs visés est d'empêcher le peuple d'aborder le besoin de renouveau politique. Toutefois, le besoin de renouveau politique qui placera le processus et les institutions démocratiques sous le contrôle du peuple, au lieu d'un système de représentation bidon, est un besoin objectif. Il existe en raison du conflit entre l'Autorité et les Conditions l'Autorité qui ne s'accorde plus avec les exigences de l'époque. Le danger pour les institutions démocratiques ne vient pas d'une construction mentale appelée « extrémisme de gauche » et « extrémisme de droite », mais de la corruption inhérente aux institutions qui ne peuvent plus justifier objectivement leur existence.

La déclaration d'intolérance de Justin Trudeau, faite dans des forums internationaux, sur ce qui constitue une menace pour la démocratie représente en fait une escalade de l'offensive des puissants intérêts économiques regroupés sur les plans national et supranational qui ont pris le contrôle des institutions de gouvernance partout où ils le peuvent.

Notes

1. Le Canadian Anti-Hate Network (CAHN) est une organisation canadienne à but non lucratif qui surveille les groupes et les crimes haineux au Canada.

2. En 2013, l'Institut Broadbent a lancé PressProgress, qui se décrit comme « la source la plus partagée au Canada pour les nouvelles et les informations progressistes ».

(Le Renouveau, 22 novembre 2021)


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 13 - 7 novembre 2021

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