Le gouverneur du Texas ajoute d'autres policiers de l'État à la frontière

Le gouverneur du Texas, Greg Abbott, en plus de placer la Garde nationale du Texas sur la frontière avec le Mexique et d'avoir recours à la Garde nationale d'autres États, augmente maintenant la présence des forces policières de l'État. Il le fait au nom d'une « déclaration de catastrophe » dans la région frontalière, ce qui lui donne l'autorité de commander et d'inviter les agences de police d'État.

Abbott a expédié environ 1 000 agents du Département de la Sécurité publique du Texas (DPS) – près du quart de la force policière de l'État – dans des comtés sur la frontière ou à proximité de celle-ci. Il leur a ordonné d'arrêter les migrants entrant au pays, dont plusieurs sont des demandeurs d'asile, les accusant d'intrusion, un délit qui ne mène pas habituellement à l'emprisonnement et qui relève normalement des forces locales. Alors que ce ne sont que les « hommes non accompagnés » qui doivent être ciblés, les hommes membres d'une famille ont aussi été ciblés et envoyés à des kilomètres de la prison. D'une façon ou d'une autre, ces actions vont à l'encontre de la loi fédérale, qui requiert que ce soient les forces fédérales qui interviennent dans les questions d'immigration.

À la fin de juillet, Abbott a ordonné à la Garde nationale du Texas d'aider les policiers de l'État à faire ces arrestations. Habituellement, la Garde ne s'occupe pas du maintien de l'ordre public local. Les gardes à la frontière sont munis de fusils d'assaut. La Garde nationale fédéralisée, sous le commandement du Pentagone, est aussi armée et présente.

Le comté de Val Verde, où est située la ville de Del Rio, est l'endroit où les premières arrestations ont eu lieu. Les représentants gouvernementaux évaluent qu'il pourrait y avoir 50 arrestations par jour dans le comté de Val Verde à lui seul, et possiblement 200 par jour en août.

Le gouverneur a aussi puisé dans les fonds de l'État pour financer une clôture de frontière qui doit être érigée sur un terrain privé à la frontière près de Del Rio pour donner suite aux accusations d'intrusion. Au Texas, une intrusion criminelle requiert que la personne sache qu'elle commet une intrusion, ce qui souvent n'est pas le cas des migrants. On dit que la clôture sera suffisante pour que des accusations soient portées.

On s'attend à ce que les personnes arrêtées reçoivent des peines d'emprisonnement et qu'elles soient remises à l'Agence de l'immigration et des douanes (ICE) pour être expulsées. L'ICE a déjà demandé d'être notifiée avant que les personnes arrêtées ne soient libérées.

Les actions du gouverneur vont à l'encontre de la loi fédérale en matière des réfugiés demandant asile. Les migrants qui traversent la frontière, que ce soit aux points d'entrée ou non, et qui se rendent à la patrouille frontalière fédérale, peuvent présenter leur cas en faveur de l'asile et rester aux États-Unis. Les représentants du comté de Val Verde ont dit qu'une vaste majorité de gens traversant la frontière à Del Rio se sont immédiatement rendus pour demander asile. S'il est vrai que le gouvernement fédéral a aussi rendu l'asile plus difficile d'accès, il s'agit ici d'une ingérence de la part de forces policières d'État en immigration, qui relève du fédéral.

Déjà, les shérifs locaux s'objectent et il en est de même des forces fédérales. Le shérif du comté de Val Verde, par exemple, est intervenu en faveur d'un couple de migrants, alors que l'homme a été arrêté par des policiers de l'État et séparé de sa conjointe. Il a aussi invité les médias à assister à l'arrestation, disant que celle-ci n'était pas habituelle et qu'il ne s'agissait pas du seul exemple de familles subissant une séparation. Le shérif a appelé les représentants du DPS et a obtenu la libération de cet homme, mais des douzaines de cas vont tout de même de l'avant. L'agent de la patrouille frontalière présent a aussi soulevé des objections mais a choisi de ne pas intervenir dans ce cas particulier.

Les comtés frontaliers les plus peuplés, comme El Paso et ceux de la Vallée du Rio Grande, ont refusé la requête d'Abbott d'envoyer plus de policiers dans les régions. Les représentants locaux maintiennent qu'il n'y a pas eu augmentation d'activités criminelles dans leurs comtés qui justifierait une déclaration de catastrophe et une augmentation de présence policière. On ne peut dire si Abbott va envoyer des forces en dépit de leurs objections.


Des soldats tendent des fils barbelés à la frontière entre McAllen, au Texas, et Hidalgo, au Mexique, le 12 novembre 2018.

Avec tant de forces différentes dans la mêlée – la patrouille frontalière fédérale et l'Agence de l'immigration et des douanes (ICE), la Garde nationale fédérale et d'État, dont certaines sont contrôlées par le Pentagone et d'autres par l'État ou le gouverneur, et un nombre encore plus élevé de policiers d'État, de shérifs et de représentants locaux – le potentiel de conflit entre elles est énorme. Cela crée une situation où aucune autorité n'existe. C'est un nouvel exemple de comment la gouvernance est devenue dysfonctionnelle et de l'incapacité des forces gouvernantes aux niveaux fédéral, d'État et local de régler leurs conflits. Cela crée les conditions d'une guerre civile violente qui met en danger la vie de tous.

Les résidents du Texas et le long des frontières ont rejeté la militarisation de leurs villes et de la région frontalière et s'opposent en même temps à la criminalisation des migrants. De nombreuses organisations, dont certaines travaillent des deux côtés de la frontière, s'organisent pour renforcer l'unité de tous ceux et celles qui luttent et intensifient la lutte pour la justice et la défense des droits de tous, qui est le fondement de la sécurité du peuple.


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 9 - 1er août 2021

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