Pour nous, la responsabilité commence chez soi

Où réside la responsabilité de l'héritage brutal du système des pensionnats du Canada

Une des nombreuses actions de la fête du Canada où les Canadiens de tous horizons se sont joints aux peuples autochtones pour demander des comptes au gouvernement fédéral

La vérité sur le système des pensionnats indiens et son héritage brutal est en train de se révéler dans ses détails les plus sordides. D'abord, le 27 mai, kukpi7 Rosanne Casimir, cheffe de la nation Tk'emlups te Secwépemc, a annoncé la découverte des restes de 215 enfants autochtones dans des tombes non marquées au pensionnat de Kamloops. Moins d'un mois plus tard, le 24 juin, le chef Cadmus Delorme de la Première Nation de Cowessess a annoncé que 751 tombes non marquées avaient été découvertes dans un cimetière de Cowessess, près de l'ancien pensionnat indien de Marieval. Cette annonce a été suivie, le 30 juin, par celle de la nation Ktunaxa, située près de Cranbrook, en Colombie-Britannique, de la découverte de 182 tombes non marquées, adjacentes à l'ancien pensionnat de la Mission Saint-Eugène.

Et ce n'est que le début. Selon l'ancien président de la Commission de vérité et de réconciliation (CVR), Murray Sinclair, il pourrait y avoir plus de 25 000 enfants qui sont morts alors qu'ils fréquentaient les 138 pensionnats que l'État colonial canadien a exploités entre 1870 et 1997; et il pourrait y avoir encore plus d'enfants autochtones qui sont morts après avoir été arrachés de force de leur foyer et de leur communauté et envoyés loin de chez eux pour fréquenter des écoles ordinaires. L'énormité du crime de la politique et de la pratique des pensionnats du Canada pour les peuples autochtones exige des réparations déterminées par les peuples autochtones eux-mêmes. Il faut commencer par fournir aux peuples autochtones les ressources dont ils ont besoin pour guérir du traumatisme causé par le système des pensionnats, comme ils l'ont déjà demandé.

On peut s'attendre à ce que le gouvernement libéral, qui s'est donné pour mission de perpétuer l'ordre constitutionnel actuel au nom de grands idéaux, refuse d'accepter la responsabilité des crimes commis au nom du Canada dans le passé. Les excuses, les expressions de sympathie sont soigneusement formulées pour s'assurer que rien n'est justiciable – que le gouvernement ne peut être tenu légalement responsable de quelque façon que ce soit. La défense de l'ordre constitutionnel que défendent les gouvernements du Canada signifie que les crimes commis sur une base raciste et anti-peuple pour défendre la propriété privée dans le passé, il y a plus de 150 ans, se poursuivent dans le présent. Il appartient au peuple de mettre fin à l'approche actuelle coloniale et raciste de la prise de décision.

Même face à ce qui est véritablement devenu une journée de deuil national le 1er juillet, au cours de laquelle des Canadiens de tous les horizons se sont joints aux peuples autochtones pour leur exprimer leurs sympathies et partager leur chagrin, le premier ministre a appelé les Canadiens à « réfléchir aux manquements historiques de notre pays » et à faire preuve d'une « ferme volonté de confronter ces vérités » pour « tracer une voie nouvelle et meilleure vers l'avenir ». Il a ajouté : « Si chacun de nous promet d'accomplir le travail nécessaire – et si nous sommes guidés par ces valeurs fondamentales que sont l'ardeur au travail, la bienveillance, la résilience et le respect – nous pouvons parvenir à la réconciliation et bâtir un Canada meilleur pour tous. »

Le premier ministre continue de tenir des propos ambigus. Il parle au nom des Canadiens d'une manière personnaliste, pour s'insinuer dans leurs sentiments intérieurs, comme si l'État canadien n'avait pas à assumer de responsabilité pour les conséquences des crimes commis dans le passé et qui continuent d'être commis dans le présent.

Il demande au pape de s'excuser pour les crimes commis dans les pensionnats et de venir le faire en sol canadien, comme si c'était cela qui allait réparer les dommages du passé et du présent ou qu'une visite du pape était ce dont les Canadiens ont besoin. C'est une tentative pitoyable de détourner l'attention du fait que les peuples autochtones demandent que les églises publient les noms et les informations dont elles disposent et cessent de détruire les archives. Le gouvernement du Canada va-t-il adopter des mesures pour les obliger à le faire ? Cela n'est même pas envisagé. Les responsables gouvernementaux, les partis cartellisés qui forment le gouvernement et l'opposition et les médias concentrent toute leur attention sur l'incendie d'églises et le renversement de statues, qu'ils n'hésitent pas à qualifier d'acte criminel.

Pendant ce temps, les médias donnent une interprétation de l'histoire qui n'inclut jamais le rôle décisif joué par les peuples pour humaniser l'environnement naturel et ouvrir la voie au progrès. Ils prétendent « qu'il y a de bonnes et de mauvaises choses qui se sont produites », ou dans ce qu'un individu comme Sir John A. Macdonald a fait, et que « nous devons prendre le mauvais avec le bon et reconnaître que dans l'ensemble c'est bon ». Cette façon d'écarter la réalité concrète du présent pour éviter d'assumer toute responsabilité est insidieuse, conçue pour perpétuer le statu quo dans lequel les peuples sont privés du pouvoir de décision.

Le premier ministre a conclu son message de la fête du Canada en reprenant le slogan de campagne du président américain Biden et de l'oligarchie financière internationale : « Reconstruire en mieux ». « En cette fête du Canada, a dit le premier ministre, réaffirmons notre engagement à être à l'écoute des autres et à apprendre les uns des autres. Ainsi, nous pourrons éliminer les obstacles qui nous divisent, rectifier les injustices de notre passé et bâtir une société plus juste et plus équitable pour tous. Ensemble, nous relèverons nos manches et nous accomplirons le dur travail nécessaire pour bâtir un Canada meilleur. » Cet emprunt au slogan de l'oligarchie financière internationale ne fait qu'exposer le cynisme de la classe dirigeante. Ce slogan est basé sur leur fausse croyance idéologique selon laquelle ils sont au-dessus de l'obligation de rendre des comptes. Il n'est pas surprenant que le premier ministre ait terminé son message en disant : « De ma famille à la vôtre, bonne fête du Canada. » Peu importe ce que ces gens disent, ce n'était pas une « bonne fête du Canada ». C'était un jour de deuil national, un jour où les gens de toutes origines se sont joints aux peuples autochtones pour s'engager ensemble à voir à ce que justice soit faite.

Duncan Campbell Scott, le surintendant adjoint des Affaires indiennes en 1920, est encore aujourd'hui célébré comme le « poète de la Confédération ». Sa poésie présentait les peuples autochtones comme « une race en voie de disparition » et il expliquait la politique de l'État anglo-canadien comme suit : « Je veux me débarrasser du problème indien. [...] Notre but est de continuer jusqu'à ce qu'il n'y ait plus un seul Indien au Canada qui ne soit assimilé à notre société, qu'il n'y ait plus de question indienne, ni de ministère des Indiens. »

La vérité est que cet objectif n'a pas changé. L'objectif de l'État est le même aujourd'hui qu'à l'époque : dominer la multitude, imposer à la société l'objectif des détenteurs de la propriété privée et soumettre les revendications du peuple à ces objectifs. Pour lui, rien d'autre ne peut être toléré et la persistance à se battre pour une cause juste doit être considérée comme un délit.

Ça ne passera pas !

(Avec des informations de CBC, CTV, Gouvernement du Canada, Encyclopédie canadienne)


Cet article est paru dans

Volume 51 Numéro 8 - 4 juillet 2021

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