Des voix juives et des universitaires juifs s'opposent à l'adoption de la définition sioniste
À la fin du mois de mars, les Professeurs juifs
du Canada contre l'adoption de la définition
opérationnelle de l'antisémitisme de l'Alliance
internationale pour la mémoire de l'Holocauste
(IHRA), un groupe d'environ 150 membres du corps
professoral juif à l'échelle du Canada, a publié
une déclaration s'opposant à la définition
opérationnelle de l'antisémitisme de l'Alliance
internationale pour la mémoire de l'Holocauste de
l'IIHRA.
Voix juives indépendantes Canada (VJIC) souligne
: « La définition de l'IHRA a suscité une
controverse majeure au Canada et à travers le
monde pour avoir confondu la critique et
l'opposition légitimes aux politiques du
gouvernement israélien avec l'antisémitisme. »
VJIC indique que ce groupe de professeurs juifs «
ajoutent leurs noms à plus de 600 universitaires
canadiens, à près de 20 associations de
professeurs et syndicats universitaires canadiens
et à de nombreuses organisations de la société
civile comme l'Association des libertés civiles de
la Colombie-Britannique et le Congrès du travail
du Canada qui ont adopté des positions similaires[1]
».
Le LML mensuel reproduit ci-dessous leur
déclaration :
« Nous vous écrivons en tant que professeurs
juives/juifs d'universités et de collèges de
partout au Canada pour vous faire part de notre
profonde inquiétude quant à certaines
interventions récentes sur nos campus concernant
les relations israélo-palestiniennes. Nous croyons
qu'il est impératif, à ce moment-ci de l'Histoire,
de combattre toutes les formes de racisme et de
discrimination, y compris bien sûr
l'antisémitisme. L'histoire familiale de plusieurs
signataires a d'ailleurs été profondément et
intimement marquée par l'Holocauste. C'est donc
sur la base d'un engagement ferme en faveur de la
justice que nous écrivons ceci; un engagement qui,
pour certains d'entre nous, doit être au coeur
d'une vie juive menée éthiquement.
« Nous nous joignons au mouvement international
grandissant d'universitaires juives/juifs qui
insistent pour que les politiques universitaires
conçues pour combattre l'antisémitisme ne soient
pas employées pour étouffer les critiques
légitimes de l'État israélien ou réprimer le droit
de se montrer solidaires du peuple palestinien.
Nous considérons que le mouvement de Boycott,
Désinvestissement et Sanctions (BDS) est une forme
de protestation non violente légitime. Bien que
nous n'approuvions pas unanimement le mouvement
BDS, nous nous opposons à ce que celui-ci soit
assimilé à une forme de soutien pour
l'antisémitisme. Nous sommes par ailleurs
profondément choqué.es par la recrudescence, au
cours des dernières années, de gestes à caractère
antisémite qui prennent des formes tristement
familières.
« Nous nous inquiétons particulièrement des
récents efforts de lobbying menés sur nos campus
pour faire adopter la définition de
l'antisémitisme utilisée par l'Alliance
internationale pour la mémoire de l'Holocauste
(IHRA). La manière vague dont l'IHRA redéfinit
l'antisémitisme a certainement de quoi inquiéter
: 'une certaine perception des Juifs qui peut
se manifester par une haine à leur égard' et peut
viser 'des individus juifs ou non juifs et/ou
leurs biens'. Mais le principal problème, à notre
avis, est que la définition vient avec une série
d'exemples dont plusieurs ne sont en fait que des
critiques de l'État israélien. C'est pour cette
raison précisément que la définition de l'IHRA est
l'objet de vives critiques. En plus
d'essentialiser l'identité, la culture et la
théologie juives, elle assimile la judéité et le
judaïsme à l'État d'Israël, effaçant ainsi un
débat qui perdure depuis plusieurs générations au
sein des communautés juives. La question est
d'autant plus pressante que la définition de
l'IHRA a d'ores et déjà été invoquée par des
groupes et des individus qui désirent interférer
avec la gouvernance collégiale et la vie étudiante
dans les universités canadiennes. De plus, la
définition de l'IHRA détourne l'attention des
véritables incidents de racisme anti-juif et
menace de réduire au silence toute critique
légitime des graves violations du droit
international commises par Israël, en particulier
son déni des droits humains et politiques des
Palestiniens.
« Sur les campus où cette définition a été
adoptée, elle a été employée pour intimider et
réprimer les syndicats, les associations
étudiantes, les départements et les associations
facultaires qui sont résolument engagés en faveur
de la liberté, de l'égalité et de la justice pour
le peuple palestinien. Un grand nombre
d'institutions juives internationales ont déjà
reconnu ce problème. Par exemple, le New Israel
Fund of Canada a récemment retiré son appui à la
définition de l'IHRA. Le conseil académique de la
University College de Londres (UCL) a recommandé
que l'université cherche une autre définition de
l'antisémitisme et infirme la décision d'adopter
le modèle de l'IHRA. Le conseil académique de
l'UCL se joint ainsi à un mouvement croissant, qui
compte plus de 500 universitaires canadiens, des
universitaires juifs et israéliens, des
universitaires britanniques de citoyenneté
israélienne et des spécialistes de l'histoire du
peuple juif et de l'Holocauste, pour s'opposer à
l'adoption de la définition de l'antisémitisme
mise de l'avant par l'IHRA.
« Nous sommes bien conscients que les désaccords
qui existent sur nos campus au sujet de
l'antisémitisme et des critiques de l'État
d'Israël sont importants et parfois acrimonieux.
Ces disputes, toutefois, ne seront pas résolues
par décret. Si le but de l'adoption de la
définition de l'IHRA est d'apaiser les conflits
entourant la portée des critiques à l'endroit
d'Israël, elle est assurément vouée à l'échec.
Cela s'est d'ailleurs déjà avéré dans de
nombreuses institutions. »
La déclaration est aussi disponible en français,
hébreu et en arabe. Voir la liste
des signataires ou la déclaration dans une des
autres langues
Notes
1. Le 9
mars, VJI était parmi les 27 organisations
antiracistes basées à Montréal qui ont envoyé
une lettre ouverte à la mairesse Valérie
Plante et au conseil municipal de Montréal,
exigeant qu'ils prennent position contre la
définition de l'antisémitisme dangereusement
trompeuse de l'Alliance internationale pour la
mémoire de l'Holocauste (IHRA). Bien qu'aucune
motion pour adopter l'IHRA n'ait été présentée
à la réunion de mars, les gens restent
vigilants quant à la possibilité qu'une telle
motion puisse encore être présentée. Pour lire
la lettre ouverte, cliquer
ici.
(Professeurs juives et juifs
du Canada contre l'adoption de la définition
opérationnelle de l'IHRA de l'antisémitisme)
Cet article est paru dans
Volume 51 Numéro 5 - 4 avril 2021
Lien de l'article:
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